The drugs don't work

Chapitre 2 : J'ai plus de souvenirs que si j'avais mille ans

3726 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour il y a environ 1 mois

Chapitre 2 : J’ai plus de souvenirs que si j’avais mille ans [1]



Il tenait son frère par la main, et son frère le suivait, l’air perplexe et désorienté, comme s’il ne parvenait pas à comprendre où il se trouvait. Sherlock lui désigna obligeamment du menton l’immense scène où ils venaient d’apparaître. Tout autour, depuis les gradins illuminés, des centaines de spectateurs les fixaient. Mycroft hocha la tête.

– Sherlock…

Le ton protecteur, un peu inquiet, l’agaça. Pourquoi lui parlait-il comme à un grand malade, sur ce ton prudent et feutré réservé aux chambres d’hôpital qu’il détestait tant, alors que Sherlock lui faisait l’insigne honneur de l’introduire chez lui ?

– Quoi ? s’écria-t-il sur un ton qu’il ne put s’empêcher de rendre agressif. Ca ne te plaît pas, c’est ça ?

– Je ne sais pas de quoi tu parles, répondit son aîné sur un ton plus neutre. Je ne sais pas où tu es précisément en ce moment.

Le jeune homme soupira. Parfois, il oubliait à quel point Mycroft pouvait se montrer lent, à quel point il pouvait être adulte et manquer d’imagination.

– Tu ne reconnais pas l’Albert Hall ? [2]

– Oh. Si, si, bien sûr, maintenant que tu le dis…

Le ton était peu convaincant, mais Sherlock choisit de ne pas relever. Comme toujours lorsqu’il pénétrait dans son palais, son esprit était aiguisé par tout ce qu’il voyait, entendait, respirait. Si son frère ne ressentait pas la même chose, s’il était imperméable à la grandeur, à la beauté, à la majesté des lieux… tant pis pour lui.

– J’ai allumé toutes les lumières. J’ai ouvert les portes en grand. Pour toi. Si ce sont les autres qui te gênent, ils peuvent partir.

– Non, non, s’empressa de répondre Mycroft. Ils ne me gênent pas du tout. De qui s’agit-il ?

Sherlock haussa les épaules.

– Ce sont toutes les personnes que j’ai rencontrées au cours de mon existence. Bien sûr, tu en connais certains, mais la plupart d’entre eux ne te diraient rien. Ils ont une place bien précise dans les loges, les balcons, le parterre, selon des critères que j’ai sélectionnés – année de rencontre, nombre de fois où je leur ai parlé, intérêt relatif de leur conversation, connaissances qu’ils sont susceptibles de m’apporter, liens entre eux… Tu ne le vois peut-être pas d’ici, mais ils tiennent tous une fiche dans les mains. Il suffit que je les fasse venir sur scène, près de moi, pour pouvoir la lire et tout connaître d’eux, nom, prénoms, âge, adresse, téléphone, profession, famille, amis, loisirs… Tout est consigné, leurs traits de caractère, leurs points faibles, les moyens de pression que je peux exercer sur eux. Les fiches sont bien évidemment extensibles à volonté.

A cette dernière mention, Mycroft eut le bon goût de paraître impressionné.

– L’Albert Hall suffit à contenir toutes les personnes que tu as rencontrées ? demanda-t-il en levant les yeux vers le deuxième balcon.

– Si je peux rallonger les fiches, répondit Sherlock en essayant de ne pas arborer le petit sourire suffisant que son frère lui avait déjà maintes fois reproché, je peux aussi agrandir la salle. Il suffit de rehausser le dôme.

– Bien sûr, je suis stupide de ne pas y avoir pensé.

Il y avait dans la voix de Mycroft un étrange mélange de tristesse et de fierté, deux sentiments que le jeune homme n’était pas certain de savoir interpréter. Il était plus prudent de les éviter.

– Qu’en dis-tu ?

– Que c’est assez bien imaginé.

De toute sa vie, jamais Sherlock n’avait obtenu de la part de son frère pareille approbation. Il ne put s’empêcher de sourire, plus franchement cette fois. S’il suffisait de traîner Mycroft dans son palais mental pour qu’il se montre moins froid et méprisant, il pourrait bien lui demander de lui rendre visite plus souvent. Pendant des années, il avait redouté de lui en parler, d’essuyer une rebuffade, un sarcasme, un roulement d’yeux méprisant. Il ne savait pas ce qui l’avait poussé à lui ouvrir les portes précisément aujourd’hui. Peut-être parce qu’il y avait été bien trop seul, ces derniers temps.

– Et tu peux y avoir accès à tout moment ? demanda Mycroft.

– Bien sûr, c’est tout l’intérêt du système. J’y suis quasiment tout le temps. Lorsque je parle aux autres…

– Tu veux dire, l’interrompit Mycroft, l’air stupidement préoccupé, que lorsque tu es en train d’avoir une conversation dans le monde réel, tu es à la fois… à la fois ici, et là-bas ? Dans ton palais et dans la réalité ?

– Oui, c’est ça. Les gens sont à la fois en face de moi et sur la scène, ce qui fait que j’ai accès à toutes leurs données. J’ai également une autre salle plus petite à l’étage – un amphithéâtre de County Hall [3] – où je peux convoquer qui je veux, en plus petit comité. Tu t’y invites souvent, d’ailleurs, fit remarquer Sherlock d’un toi qu’il espérait suffisamment désapprobateur.

Mycroft n’eut pas l’air d’avoir entendu. Il semblait focalisé sur tout autre chose.

– Tu ajoutes au fur et à mesure sur leur fiche les renseignements que tu glanes sur eux ?

– Bien sûr, répondit Sherlock, agacé par la trivialité de la question. Ce n’est pas comme ça que tu procèdes ?

– Je fonctionne… différemment. Dans le principe, je te l’accorde, ça revient à peu près au même : je stocke des données, je les mémorise, je les classe. A ceci près que je ne suis pas dissocié. Je reste toujours au même endroit, entier.

Au ton réticent de son frère, au timbre de sa voix un peu plus aigu qu’à l’ordinaire, le jeune homme comprit que quelque chose dans ses explications l’avait dérangé.

– Qu’est-ce que ça change ?

– Ca change que tu n’es pas vraiment là, dans le réel, avec les autres, soupira Mycroft, mais passons. Toi aussi, tu es sur scène ?

– Lorsque je parle avec des gens, oui. C’est préférable car je contrôle davantage de choses depuis la scène, mais je peux partir à tout moment, aller dans d’autres pièces. Cela ne m’empêche pas de parler, d’observer, de déduire et d’enregistrer les faits et les conversations.

Mycroft hocha la tête, comme s’il s’attendait à une telle réponse, mais qu’il était malgré tout déçu. Ce qui ne changeait guère de d’habitude : dès que Sherlock était concerné, son aîné était de toute façon déçu.

– Et moi ? demanda ce dernier après une brève hésitation. Je suis quelque part dans cette salle ?

– Ne sois pas stupide, répondit Sherlock avec un nouveau haussement d’épaules qui servait davantage à masquer sa gêne qu’à exprimer un quelconque agacement.

Le rôle que tenait son frère dans son palais mental, Mycroft l’apprendrait bien assez tôt. Nul n’était besoin de lui révéler dès à présent que, non content de s’inviter dans diverses parties normalement non autorisées de son palais, il y possédait sa propre pièce…

– Je t’emmène dans les coulisses ? proposa le jeune homme, désireux de changer de sujet.

– Avec plaisir.

– Ne fais pas attention à la porte de gauche.

A peine Sherlock avait-il prononcé cette phrase qu’il se mordit les lèvres de dépit. Il n’avait pas voulu attirer l’attention de son frère sur elle, mais il n’avait pas pu s’empêcher de la mentionner. Peut-être parce qu’il voulait malgré tout que Mycroft l’interroge.

– Où mène-t-elle ?

La question était tout sauf innocente. Le ton paraissait désinvolte, mais le jeune homme n’était pas dupe. Les inflexions de Mycroft, il les connaissait toutes par cœur. Il ne se laisserait pas prendre à celle-ci.

Il opta pour une semi-vérité…

– En bas.

… et il ouvrit résolument la porte de droite, bien décidé à ne pas lâcher un seul autre fragment d’information qu’il n’avait pas décidé de révéler à l’avance.

– Mais nous allons plutôt monter, si tu n’y vois pas d’inconvénient.

Mycroft ne fit heureusement aucune difficulté à le suivre, aisément détourné de la porte fatidique par la curiosité. Les marches de bois craquaient agréablement sous leurs pas, et de minuscules grains de poussière dansaient dans la lumière qui provenait d’une large fenêtre entrouverte. Sherlock avait toujours aimé cette odeur de vieux livres, de cire et d’herbes coupées.

– Tu ne reconnais pas ? demanda-t-il lorsqu’ils furent arrivés au seuil du premier étage, dans le grand couloir inondé de lumière qu’il affectionnait tant malgré la solitude qu’il y avait éprouvée.

De nouveau, son aîné jetait autour de lui des regards aveugles, comme s’il ne pouvait pas vraiment voir ce qu’il avait sous les yeux.

– Non, avoua-t-il avec hésitation. Je devrais ?

Sherlock haussa les épaules, et s’en voulut. Il avait tendance à faire un peu trop ce geste lorsque son frère se trouvait à proximité : signe d’agacement, malaise, hésitation – tout un tas d’émotions qu’il n’appréciait pas. Il appréciait encore moins que son corps, agissant de lui-même, le trahisse de cette manière.

– Je ne sais pas. Tu y as passé bien moins de temps que moi.

Le jeune homme put presque voir les rouages du cerveau de Mycroft s’activer devant lui.

– Cambridge ? proposa-t-il avec prudence.

Sherlock acquiesça. Il y était resté, il ne savait pas très bien par quel miracle, pendant cinq ans. Ou plutôt, il se doutait que le miracle avait nom Mycroft Holmes, qui avait réussi à accumuler suffisamment d’influence et d’argent pour suggérer aux responsable de la prestigieuse université que son petit frère soit autorisé à suivre les cours dans les matières qu’il souhaitait sans pour autant avoir l’obligation de passer le moindre examen. Une exception parmi tous ces étudiants dont le seul but était d’obtenir leur diplôme : cinq ans dans une des facs les plus prestigieuses d’Angleterre, et pas un seul bout de papier pour attester de son passage dans ses locaux. La simple idée de s’asseoir devant une table pour répondre à des questions stupides le révulsait (ses parents avaient parlé de « phobie scolaire », ce qui était ridicule mais avait l’avantage de lui permettre de n’en faire qu’à sa guise). Cela dit, Sherlock en savait probablement davantage dans les matières scientifiques qu’il avait choisi d’étudier que ceux qui avaient quitté l’université en croulant sous les mentions et les louanges. Mycroft, pour sa part, avait passé une semaine à Cambridge, avant de décider qu’il était fait pour vivre à Londres. Il avait déménagé, s’était inscrit à la London School of Economics, et avait commencé à monter son petit réseau de relations utiles. [4]

– Principalement les couloirs, plus un amphithéâtre et quelques salles de sciences.

– D’accord. Que contiennent-elles ?

– Tout ce que je sais – je veux dire, toutes mes connaissances universitaires, factuelles. Triées, classées, prêtes à servir. Biologie, chimie, neurosciences, physique, et même un peu de maths, annales criminelles, plus tout un tas de choses qui pourraient éventuellement se révéler utiles, tout est là. Par exemple…

Il fit quelques pas et ouvrit la deuxième porte sur la droite.

– … là, tu as le labo de dissection, avec quelques corps. Entre, je t’en prie, et ne fais pas attention à Molly même si elle te parle. D’ailleurs, il est peu probable qu’elle t’adresse la parole. Elle est plutôt timide.

Mycroft ouvrit des yeux ronds comme des soucoupes. La tête effarée qu’il faisait était tellement comique que Sherlock ne put s’empêcher d’éclater de rire.

– … Molly ? répéta Mycroft comme s’il avait mal entendu. Qui est Molly ?

Sherlock s’arrêta de rire. Il n’avait pas vraiment pensé à tout ça lorsqu’il s’était mis dans la tête de faire visiter son palais à son frère. Jamais il n’avait mentionné le nom de Molly devant Mycroft – jamais il n’avait mentionné le nom d’aucune de ses connaissances devant aucun membre de sa famille. Un rapide coup d’œil dans la salle de dissection lui confirma qu’elle était bien présente, concentrée sur son travail. Elle lui adressa un rapide sourire un peu crispé avant de se repencher, rougissante, sur un organe quelconque que Sherlock ne pouvait pas identifier à cette distance.

– Molly… est une connaissance, répondit-il distraitement en essayant de se rappeler quelle expérience était en cours dans ce coin de son esprit.

– Une connaissance qui a une pièce réservée dans ton palais mental ? s’exclama Mycroft. Qu’est-ce qu’elle a de plus que les autres ?

Le jeune homme ne parvint pas à déterminer ce qui, de l’inquiétude, de la curiosité ou de la jalousie, l’emportait dans cette nouvelle intonation – puis il comprit le sous-entendu, et devint à son tour cramoisi, oubliant la dissection en cours.

– Ce n’est pas… ce n’est pas ce que tu crois, s’entendit-il balbutier pitoyablement. Je… je veux dire… Elle travaille à St Barts, c’est tout. Je veux dire, à la morgue. Un jour, j’y suis allé et elle m’a permis d’entrer dans une salle de dissection, de l’observer travailler, de regarder les cadavres. J’y suis retourné quelques fois, pour approfondir mes connaissances en médecine légale.

Pourquoi, pourquoi, mais pourquoi donnait-il toutes ces informations à son frère ? Pourquoi parlait-il si rapidement, comme ces coupables qui ont quelque chose à cacher ? Pourquoi s’empressait-il de détromper Mycroft, de le détourner de ses suppositions aberrantes ? Pourquoi s’en souciait-il ? Tout cela n’avait aucun sens, mais peut-être était-il toujours sous l’emprise de la cocaïne, qui déliait sa langue et le poussait à dire toutes ces choses ridicules ?

– Comme c’est romantique, ironisa Mycroft. Un dîner aux chandelles autour d’un macchabée. Qu’est-ce que tu allais faire à St Barts pour commencer ?

Sherlock sentit la colère monter en lui alors que d’autres questions affluaient à son esprit. De quel droit son frère lui faisait-il subir un tel interrogatoire ? Come d’habitude, il voulait s’immiscer dans sa vie, violer son intimité. Jamais il n’aurait dû ouvrir cette porte. C’avait été une erreur que de vouloir le laisser voir ce qu’il avait mis tant de temps à construire, pierre par pierre, connaissance par connaissance.

– En quoi ça te regarde ? demanda-t-il froidement.

– Nous savons tous les deux à quel point tu aimes les hôpitaux, reprit Mycroft d’un ton volontairement neutre. Je ne vois pas ce qui pourrait te décider à aller à St Barts, à part un cas de force majeur. Que s’est-il passé ? Un accident ? Une première overdose ? Une maladie ?

Sherlock comprit soudainement le raisonnement de son aîné et il éclata de rire, soulagé.

– Tu as tout faux. Je n’y suis pas allé pour consulter un médecin, mais spécifiquement pour voir des cadavres, pour les disséquer. Je suis allé directement à la morgue, certainement pas dans les salles de consultation. Sérieusement, comment as-tu pu croire que j’irais voir un médecin de mon plein gré ?

– Stupide de ma part, en effet, lui accorda son frère avec un petit sourire soulagé. Mais à St Barts, on t’a laissé entrer… pour voir des cadavres et les disséquer ? Permets-moi d’être quelque peu surpris.

– Il m’a fallu presque un an pour pouvoir y avoir accès. Je tentais le coup tous les quinze jours ou à peu près, mais je me faisais toujours expulser par les légistes. Ils ont même fini par appeler la police. Je me suis fait plus discret et j’ai attendu qu’ils embauchent quelqu’un d’autre. Une chance qu’ils aient engagé Molly Hooper. Elle a été bien plus sympa et compréhensive que les autres. [5]

– Tu veux dire qu’elle t’a permis de disséquer des cadavres avec elle ? Comme ça, alors qu’elle ne te connaissait pas et que tu n’avais visiblement rien à faire là ?

Haussement d’épaules.

– Oui, et alors ? Il y a un problème ?

– Absolument pas, s’empressa de répondre Mycroft, mais son regard perplexe démentait ses paroles. Est-ce qu’il y a… d’autres personnes avec un statut privilégié dans ton palais mental ?

– Quelques-unes.

La réponse avait été volontairement évasive, mais Mycroft insista.

– Mais encore ?

– Il y a… Mrs Hudson, expliqua Sherlock avec réticence.

Malgré lui, il éprouvait le besoin de parler, d’évoquer ces gens qui, au fil des mois et des années, avaient fini par prendre, à son insu, une place dans sa vie. Il aurait vraiment dû faire plus attention à la dose de cocaïne qu’il s’était injectée. Cela le rendait trop bavard, et Mycroft était en train de récupérer bien trop d’informations personnelles à son sujet. Il devrait se taire – il devait se taire, mais il continuait à parler. Saleté de drogue.

– Mrs… ?

– Hudson. Tu sais, la dame que je suis allée voir en Floride.

Le visage de Mycroft se ferma.

– Ah oui, la fois où tu as quitté le pays sans prévenir les parents ? La fois où la police a passé près de quinze jours à te chercher partout ? La fois où on t’a tous cru mort… c’est juste que tu allais « voir Mrs Hudson en Floride » ?

Sherlock décida d’ignorer le sarcasme dans la voix de son frère. Il aurait peut-être dû prévenir quelqu’un lorsqu’il avait décidé, sur un coup de tête, de prendre l’avion pour San Francisco. Cela aurait évité tout le mélodrame qui s’était ensuivi lorsqu’il était revenu à Londres et avait trouvé toute la famille sur le pied de guerre.

– Je devais l’aider.

– L’aider ?

Mycroft avait l’air proprement stupéfait.

– Parce que tu aides les autres, toi, maintenant ? Première nouvelle.

Si, jusqu’ici, son aîné avait parlé doucement, presque gentiment, Sherlock percevait à nouveau dans sa voix ce ton supérieur, pontifiant, moralisateur – ce ton qui lui disait « je sais tout mieux que toi, petit frère, tu es lent et stupide, et tu n’as rien compris à la vie », comme si Mycroft connaissait tout, savait tout, y compris ce que pensait, sentait, éprouvait son jeune frère.

Sauf que Mycroft n’avait jamais compris.

– Je l’ai sauvée de la pendaison ! hurla Sherlock. Ce n’est pas aider, peut-être, sauver la vie de quelqu’un ?

Un voile rouge lui était descendu devant les yeux et il sentait le sang battre à ses oreilles. Mycroft retrouva immédiatement son intonation lénifiante.

– D’accord, d’accord, calme-toi.

– Tu crois toujours tout savoir, mais tu n’as rien compris ! C’était la seule chance de ma vie de pouvoir résoudre une affaire ! Son mari lui avait tout collé sur le dos mais elle m’a fait confiance, elle. Elle m’a demandé de l’aide et je l’ai sauvée parce qu’elle avait besoin de moi !

Et elle était bien la seule, pensa amèrement Sherlock avant de repousser cette idée loin, très loin dans les profondeurs de son esprit – de l’enfermer dans une des petites pièces du sous-sol, si profondément qu’il lui faudrait beaucoup, beaucoup, beaucoup de temps pour la retrouver.

Et même, peut-être, ne la retrouverait-il pas.



[1] Extrait d’un des quatre poèmes nommés « Spleen » (de « splen », la rate, indiquant une humeur mélancolique, un regard désabusé sur la vie, un dégoût de cette dernière) de Baudelaire, dans lequel le poète compare son esprit à un « meuble à tiroirs », puis à une « pyramide », et enfin à « un immense caveau » et même à un « cimetière abhorré de la lune ». Je ne dis pas que Baudelaire avait un palais mental (si c’était le cas, comme dirait Oldie, c’était vraiment pas la vie de château là-dedans), mais je pensais que cette métaphore méritait d’être relevée…

[2] Le Royal Albert Hall est une salle de spectacles à Londres, imaginée par le prince Albert, époux de la reine Victoria, et finalement inaugurée par cette dernière en hommage à son défunt mari. Je l’ai choisi comme pièce centrale du palais de Sherlock en raison de son amour de la musique (mais ce n’est pas canon).

[3] Des recherches sur Internet m’ont appris que la salle de tribunal que l’on voit dans la saison 3 de Sherlock (quand il « convoque » les femmes contactées sur Internet par la même personne mystérieuse dans l’épisode 2) est un amphithéâtre de County Hall, qui servait de lieu de débat aux députés.

[4] Tout ça est parfaitement non-canon…

[5] Tout ça aussi.

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