When in Rome

Chapitre 76 : Je rêvais d'un autre monde

4037 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 18/07/2023 18:51

Chapitre 76 Je rêvais d'un autre monde

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San Francisco, septembre 2003

Le chuchotement mit longtemps à se frayer un chemin vers sa conscience au repos, fendant les brumes d'un rêve agréable où elle se pressait contre celui qu'elle aimait. Entendre murmurer son prénom n'aurait eu, en la circonstance, rien d'étrange. A la faveur d'un micro-réveil où elle se tourna de l'autre côté, des pensées inconsistantes et navrées affleurèrent par bribes, comme « hôtel » ou « Alex » ou encore « Je suis si malheureuse d'être ici ».

Puis elle eut la sensation d'être brutalement arrachée aux bras qui lui manquaient tant, happée loin de leur force et de leur soutien.

— Dawn ?

Ses paupières étaient trop lourdes alors elle décida que, quoi qu'il voulût, son ami pouvait sans doute attendre le lendemain.

— Dawn ? Je suis désolé de te réveiller mais je dois te parler de ton entrevue avec Riley Finn. C'est important.

Elle poussa un gémissement où l'on pouvait distinguer sans trop de peine un « pas maintenant » et se rencogna mieux dans l'oreiller en se tournant de l'autre côté, remontant le drap sur son épaule.

— 'lex, f'tiguée. Demain.

Trop fourbue en raison du sport inhabituel qu'elle avait fait en essayant de s'adapter au lourd équipement prosthétique bricolé, elle était certaine de n'avoir pas dormi plus d'une dizaine de minutes.

Alex lui avait galamment laissé le lit pour se tasser dans le canapé trop petit pour sa stature. Elle le revoyait faire bouffer un coussin et se pelotonner en chien de fusil. Quand il lui avait dit bonsoir, elle avait perçu dans ses yeux maints sentiments contradictoires où l'inquiétude dominait. Sa loyauté envers elle ne l'empêchait peut-être pas de crever d'envie d'appeler Buffy pour la mettre au courant de ce qui arrivait à sa sœur.

— Je ne suis pas Alex, annonça une voix cette fois clairement audible.

En une seconde, le cœur de Dawn monta en régime et elle se redressa brusquement sur son séant avant de se ratatiner. Près des murs vert tilleul de la chambre, une silhouette fine se manifesta. Elle devinait, plus qu'elle ne voyait, un homme vêtu de blanc, debout et tourné vers elle.

— Qui est-là ? Alex ! Il y a quelqu'un ici !

Si elle avait voulu parler fort, c'était raté. Sa main tremblante chercha à tâtons l'interrupteur qu'elle parvint à actionner en devant s'y reprendre à plusieurs fois. Effrayée, elle ne le quitta pas des yeux. C'était un inconnu. Jeune, brun aux cheveux très courts, des sourcils droits perpendiculaires à un long nez, une petite bouche… ses traits ne lui disaient absolument rien.

— N'aie pas peur, c'est encore Doyle, dit-il en effectuant un petit salut de la main.

— ALEX ! essaya-t-elle à nouveau.

Ledit Doyle se tourna à demi pour jeter un coup d'œil au gaillard immobile dont seuls les cheveux dépassaient de la couverture rabattue sur lui. Mais pourquoi ne se réveillait-il pas ?

— Qu'est-ce que vous lui avez fait ? Vous l'avez assommé ? ALEX !

— Il ne peut pas nous entendre, répondit l'intrus. J'ai suspendu le temps autour de nous.

— Quoi, suspendu ? Vous êtes… un sorcier ?

— Euh, non. Pas du tout.

De toute évidence, il se fichait d'elle. Seul un sorcier pouvait faire cela. Tendue, Dawn le scruta mieux. Elle était sûre de ne l'avoir jamais vu et pourtant quelque chose lui soufflait qu'elle avait tort. C'était comme une sorte de picotement à l'arrière du crâne. Son comportement retenu et hésitant la laissait un peu perplexe tout en la rassurant à moitié. Il ne semblait pas menaçant mais il n'avait toujours pas dit comment il était entré, ni ce qu'il voulait. On ne s'invitait certainement pas nuitamment chez les gens avec de bonnes intentions.

Elle remonta le trop mince rempart de la fine couverture sur elle. La machine d'Alex était hors d'atteinte, ce qui était dommage car les pièces de métal lui auraient fourni de quoi se défendre. Elle était coincée et n'avait aucun moyen de s'enfuir. C'était la première fois qu'une telle chose lui arrivait depuis des années.

— Qu'est-ce que vous voulez ?

— Je suis désolé… Je n'ai pas l'habitude de faire ça.

— Pénétrer par effraction chez les gens ? Eh bah voilà, je suis rassurée ! grinça-t-elle.

— Non… Je veux dire me projeter si densément ici. Je crois que je ne suis pas très doué, admit-il avec un petit sourire embarrassé. J'ai essayé hier matin mais je n'ai pas réussi, alors j'ai préféré attendre que tu sois endormie.

— Mais qu'est-ce que vous voulez à la fin ? Je n'ai pas d'argent si c'est ce que vous cherchez ! Et vous seriez aimable de ne pas me tutoyer, je ne vous connais pas.

Il balaya la pièce du regard, manifestement à la recherche de quelque chose. Les prothèses bizarres ne l'étonnèrent même pas, il alla simplement s'asseoir sur une chaise rembourrée, disposée dans un angle. Les mains posées sur les genoux, il cligna deux ou trois fois des yeux.

— Excuse-moi un instant, dit-il lentement. J'ai la tête qui tourne un peu, je ne sais pas si je vais pouvoir rester bien longtemps, je vais devoir faire vite…

Une certaine dose d'incrédulité la gagna tandis qu'elle le regardait fixement faire son petit manège. Cet idiot était en train de lui raconter ses petits problèmes de santé ?

— On s'est vus hier mais apparemment, tu ne t'en souviens pas… Notre différentiel énergétique était trop important, alors tu t'es évanouie.

« Différentiel énergétique » ? Dawn fronça les sourcils, désarçonnée par son charabia.

— Non, j'étais seule avant ça. Je n'ai parlé à personne.

— Si. Tu m'as même demandé si je pouvais faire passer un message à ta famille…

— Pourquoi j'aurais oublié ? Vous êtes un démon qui trafique les esprits ?

— Non, ça, c'est plutôt toi, laissa-t-il échapper avec un tout petit sourire en coin.

Elle lui lança un regard glacial montrant assez qu'elle n'appréciait pas la blague. Il se rétracta à la hâte en voyant qu'il l'avait vexée. En tant qu'ex-démon lui-même, et plutôt sympa, il ne voyait pas où était le problème, mais certains trouvaient le sujet déplaisant.

— Je n'ai malheureusement rien pu t'expliquer, reprit-il. Je voulais te prévenir de ne pas chercher à... disons... neutraliser Warren et Amy dans le centre de rétention de l'armée. Tu ne dois pas y aller. Les probabilités d'un échec sont très élevées. Et celles que tu sois capturée et enfermée avec eux, encore plus grandes.

— Non mais vous êtes qui pour me dire ce que je dois faire ou pas ?

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Qui que ce fût, ce gars était trop bien renseigné. Avec Alex, elle n'avait pris cette décision qu'en fin de matinée, pendant le déjeuner et après une longue délibération – plutôt d'ordre moral que pratique.

En effet, physiquement, rien ne l'empêchait d'ouvrir une brèche dans le complexe, sauf peut-être la méconnaissance des lieux. Un simple schéma de Riley, même mal dessiné, pouvait arranger cela. Ce détail mis à part, il leur suffirait de s'y rendre discrètement de nuit… Les jours précédents serviraient d'entraînement avec l'exosquelette, à noter les tours de garde, et à prévoir des cachettes de repli… Alex était devenu très bon à ce jeu. Par contre, son égo détestait l'idée de devoir rester à couvert, posté à un kilomètre pour assurer un plan B. Elle comptait y aller à pied. Son équipement lui permettrait d'alterner entre la course et les sauts rapides à travers des portails. Toute personne surveillant les environs avec des caméras thermiques ou infrarouges pourrait croire avoir rêvé, ou supposer une défectuosité du matériel…

Doyle se releva et fit un pas dans sa direction. Elle crispa instinctivement ses mains sur ses couvertures, en un geste défensif qu'elle ne parvenait pas à contrôler. Quelque chose d'étrange irradiait de lui.

— N'aie pas peur de moi, je ne te veux pas de mal. J'ai travaillé avec Angel quand il est revenu s'installer à Los Angeles. On a monté une agence pour aider les désespérés, ceux pour qui la police ne pouvait pas faire grand-chose vu le genre de criminels impliqués, si tu vois ce que je veux dire... Moi, j'étais le pauvre gars qui se tapait des visions et les migraines qui allaient avec. Mais ça permettait de savoir où on avait besoin de nous. Tu pourras lui demander quand tu le verras. J'ai tourné la page mais j'ai toujours plus ou moins ce talent et, là, tu dois me croire quand je te dis de ne surtout pas y aller…

— Je dois comprendre que vous ne travaillez plus ensemble et c'est pour ça qu'il n'est pas là ?

— Oui, on n'est plus vraiment en contact.

— Vous n'aimez pas qu'il gère ce cabinet d'avocat véreux, vous non plus ?

— Non, je n'aime pas ça. En plus, il me croit mort. Ce serait compliqué de venir me présenter à lui après tout ce temps, pour lui dire que la sœur d'une ex – qui l'a envoyé sur les roses – a besoin d'aide…

Elle acquiesça d'une petite moue montrant qu'elle validait l'argument.

— Il y a autre chose… Écoute, je vais jouer franc-jeu, je ne sais pas comment le dire et ça te semblera peut-être incroyable de l'entendre. Je ne vis pas non plus à cette époque. Pas plus que toi.

— Vous êtes... du futur vous aussi ? demanda-t-elle prudemment.

Il acquiesça avec un dodelinement de la tête qui semblait vouloir dire que c'était plus ou moins le cas. Peut-être pas si franc-jeu que ça.

— Et alors de là où vous étiez, vous avez vu que j'étais en danger – je ne sais combien d'années en arrière – et vous avez remonté le temps, rien que pour me sauver moi ?

— Pas exactement dans cet ordre. Après ton « départ » il a commencé à se passer des trucs bizarres au CDO : des jeunes personnes disparues dont on oubliait le nom, des événements connus absents des archives tandis que d'autres apparaissaient, des écoles qui se détérioraient dans différents pays… Certains ont fait le lien avec le moment où tu as rajeuni. Moi, je suis venu au plus vite. Mais c'est seulement une fois que je t'ai trouvée que j'ai vu que quelque chose de grave allait bientôt t'arriver. C'est plus clair, là ?

— Comment ça « j'ai rajeuni » ?

— En réalité, tu as été échangée avec la Dawn qui vit ici mais comme c'est très difficile à accomplir, ils privilégient la thèse de la régression physique.

Dawn leva les yeux au ciel.

— Pour avoir l'air d'une gamine ? C'est ridicule. Je fais juste attention de ne pas avoir l'air trop mémère pour plaire encore à mon mari… Il a dû faire une de ces têtes, le pauvre... Bon, et alors, qui a fait cet échange au plus mauvais moment ? J'étais bien, je me sentais mieux, j'avais l'impression que ma vie allait pouvoir reprendre…

— Tu as très certainement été envoyée ici parce que ton pouvoir a fait peur à quelqu'un. Je parle de ta capacité d'ouvrir des portails à volonté. Sous peu, Amy va apprendre que tu as pu dissoudre autrefois les barrières entre les dimensions, et ce talent va beaucoup l'intéresser.

— Je ne comprends pas. Elle aidait Warren à se venger et ils ont bien détruit notre famille. Ils ont eu ce qu'ils voulaient, non ?

— Warren n'avait aucune envie de s'arrêter là. Pour lui, Willow devait payer, et il voulait en finir aussi avec Buffy.

Dawn se contenta de grincer des dents. Pour Willow, elle comprenait. Mais vouloir la tuer, elle, parce qu'il ne pouvait pas se venger sur Buffy, et alors qu'elle n'avait rien à voir avec tout ça ? Combien de morts lui faudrait-il sur la conscience avant qu'il arrête ?

— Bref. Il ne faut absolument pas qu'Amy puisse utiliser ton pouvoir. Alors pour éviter ça, tu as été renvoyée des années plus tôt, pour te mettre en sécurité.

— Eh là ! De quoi je me mêle ? Je peux m'occuper de moi ! Je ne suis plus la gamine manipulée par cette folle de Gloria… Et renvoyée par qui ?

— Tu n'es plus cette jeune fille, c'est vrai, mais Amy a énormément changé. Il faut que tu réalises qu'elle n'a pas besoin de t'obliger à te servir de ta capacité. Elle peut simplement te la voler, sans que tu le saches…

— Oh… dit-elle en plissant les yeux. Je crois qu'Andrew a dit quelque chose comme ça… qu'elle drainait tout ce qui était près d'elle…

— Exactement.

Dawn resta silencieuse un moment, étourdie par ce qu'il lui apprenait là ; frustrée aussi d'être si loin des siens et d'avoir été si négligemment déplacée comme un pion, sans qu'on lui demande son avis. Elle aurait très bien pu aller faire un tour sur le vaisseau de Spike ou s'ouvrir un passage vers l'un des mondes vierges qu'elle avait découvert grâce aux pilotes...

— Ok, mais tout ça ne dit pas qui m'a fait atterrir là ? C'est… Willow ? Parce que moi je ne vois pas comment Amy ne pourrait pas voler ma capacité à moi-jeune...

— Non, ce n'est pas Willow. C'est de toute évidence une personne puissante qui s'en est chargé car elle a utilisé la loi de conservation de la matière. Tu n'as pas disparu, tu n'as pas été tuée, aucun vide n'a été généré, tu existes toujours. Tu as juste été permutée entre deux époques… La bonne chose là-dedans, c'est que si pour une raison x ou y, Amy avait vent de la Clé et voulait reproduire le plan de Gloria, faire couler le sang de ta jeune version ne lui servirait à rien.

— Ah bon ? Et par quel miracle ?

— Le truc, c'est que Gloria avait besoin d'éléments très précis pour son rituel : la bonne date, un point tellurique spécifique et la jeune Dawn, telle qu'elle était à l'époque. Mais la date est passée, l'endroit est détruit et avec trois ans de plus, tu n'es plus la même. Ta capacité est devenue dormante. Comme tu le sais, c'est bien plus tard que tu as…

— Attendez… Comment ça, "je n'étais plus la même", bien sûr que si ! Je n'ai pas tellement changé en si peu de temps.

— Il y a quand même un petit quelque chose qui a changé. Euh… physiologiquement, ajouta-t-il avec un peu de gêne.

Interdite, elle le regarda d'abord sans comprendre. Physiologiquement ?

— Il fallait que je sois vierge ?

— Au sens ancien. Pas encore de... règles.

Soudain très mécontente, Dawn souffla d'impatience en serrant les poings, ce qui le fit sursauter.

— Quoi ? C'était encore un de ces putains de rituels de merde sur la magie du sang ? Je suis maudite avec ça ! dit-elle en songeant à la Proclamation qui avait failli les tuer Spike et elle. Alors si je n'avais pas été en retard par rapport aux autres filles, Gloria n'aurait rien pu faire ?

— Euh, c'est… presque sûr. Mais donc, la bonne nouvelle, c'est que la Dawn étudiante est maintenant à l'abri de ce type de sorcellerie. C'est une jeune femme tout à fait normale...

Elle ne l'écoutait plus.

Et elle n'apprenait ça que maintenant qu'elle était ménopausée ? Ses premières règles étaient arrivées dans la foulée du sacrifice de Buffy. Elle était bien sûr au courant que ça arriverait à un moment mais pas préparée à la quantité de sang perdu ni à ce que ça dure près d'une semaine. Non seulement elle avait cru qu'elle allait mourir à force d'en perdre autant, mais en plus elle avait craint pendant des mois de rouvrir sans le faire exprès un portail gigantesque.

Tara l'avait aidée et lui avait fait comprendre qu'elle était aussi très perturbée par le choc et le chagrin, et que son corps réagissait peut-être à tout cela de cette façon particulière. Mais le mois d'après, c'était pareil...

Elle se souvenait aussi parfaitement bien de la façon dont Spike l'avait regardée quand il était réapparu après plusieurs semaines. Il avait stoppé net à quelques mètres d'elle, puis avait regardé par terre. Ensuite, il avait seulement marmonné qu'il repasserait. Elle en avait souffert, pensant qu'il ne supportait plus de la voir supposément parce qu'elle lui faisait trop penser à Buffy.

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— Tout ça c'est bien joli, coupa-t-elle. L'échange pour me mettre hors d'état de nuire, je comprends, mais vous ne dites toujours pas ce qui se passe exactement.

— Il se passe que je sais que tu veux coûte que coûte modifier le cours des événements futurs pour empêcher la mort d'Andrew, mais tes proches se trouvent sur une crête extrêmement fragile et délicate. La situation en 2046 est sur le point d'exploser très bientôt. Te déplacer dans le temps était suffisant. En désirant éliminer Warren et Amy ici et maintenant, et même simplement en voulant le faire, tu es en train de créer des remous dans ce qui devrait se passer, sans t'en rendre compte.

— Qu'est-ce que vous voulez dire par « exploser » ? Qu'est-ce qu'il y a ?

— Amy et Warren ont refait surface. Amy t'a retrouvée parce que la venue de tous tes amis a généré un champ magnétique spirituel puissant qui t'a réancrée dans la réalité. A partir de là, ç'a été comme s'il y avait eu un gros panneau rouge et clignotant sur ta maison, visible pour elle même depuis la Bouche de l'Enfer de Cleveland où elle se trouve. Elle a envoyé Warren vérifier. Il a foncé jusqu'en Italie pour espionner en éclaireur car il était curieux et convaincu que tu étais morte dans l'accident. Ton apparence l'a surpris mais ça ne l'a pas empêché de te suivre jusqu'à l'école des Tueuses.

— Mais alors, il sait où nous vivons ? Il va faire du mal à mes petits ?

— En fait, non. Les protections mises en place par Willow sur certains sites sensibles sont très efficaces. C'est très ingénieux. Plus il s'approche pour chercher, moins il est capable de trouver. S'il était devant, il aurait seulement l'impression d'un terrain vague ou que les deux immeubles voisins ont un grand jardin…

— Bon, mais alors qu'est-ce qu'ils veulent faire ?

— Mettre en place leur plan contre Willow déjà. Ils ont ça en commun. Pour Buffy, Amy ne se sent pas concernée. En vérité, elle ne supporte pas Warren. Elle l'a ressuscité uniquement pour se dire qu'elle était du niveau de Willow en magie, mais s'est empressée de le vendre à Eyghon le Somnambule pour s'en débarrasser. C'est une monumentale erreur. Ils n'ont pas conscience que le démon va se servir d'eux pour des projets que personne ne va aimer chez les humains…

Serrant les mâchoires, Dawn se croisa les bras en signe d'opposition, essayant d'intégrer la pile de mauvaises nouvelles qui grossissait à chaque mot qu'il prononçait.

— Je ne me souviens plus très bien où j'ai entendu parler de cet Eyghon... A voir votre tête, ça n'a pas l'air bon. Et si vous êtes là, c'est peut-être même parce que c'est catastrophique. De quels projets vous parlez ? Si vous ne m'en dites pas plus, comment voulez-vous que je décide au mieux ce que je dois faire ?

Doyle soupira et elle crut ressentir comme de l'anxiété qui émanait de lui.

— Ce n'est pas si simple. Si tu modifies trop de choses dès maintenant, tu risques de regretter les conséquences que ça va avoir.

— Oui, oui, effet papillon, je sais. Et je sais aussi que le temps est résilient. Dites-le carrément : votre « crête », c'est qu'il y a une nouvelle apocalypse en 2046 ?

Encore une fois, il n'eut pas besoin de parler pour qu'elle en ait confirmation. Elle inspira lentement, l'estomac noué.

— Dites-moi ce qui se passe, ou se passera…

— Promets que tu ne mettras pas le pieds dans ce complexe militaire…

— Qu'est-ce que je peux promettre dans la mesure où je ne peux pas comprendre les enjeux ?

La mine sombre, il clôt ses paupières, comme s'il avait besoin de délibérer. Elle attendait, consciente qu'elle jouait peut-être en effet avec le feu. Puis il s'éclaircit la gorge et reprit d'un ton hésitant, entrecoupé de silences :

— Si tu veux vraiment l'entendre, c'est potentiellement pire que tout ce qui s'est présenté jusqu'alors. Parce que vos ennemis ont eu tout le temps de tirer les leçons de vos victoires et de vos échecs. Parfois, ça s'est joué à presque rien. Ils ont eu des années pour élaborer un plan. Il est intelligent, il entend tirer parti de toutes vos faiblesses et utiliser vos propres forces contre vous, en tous cas si les choses se poursuivent sur la même lancée. Willow a de l'expérience, elle sent que quelque chose n'est pas normal et ça l'a convaincue de prendre une décision risquée mais avec le consentement de Giles. Elle est en train de se préparer à renvoyer Dawn Summers. Elle craint pour sa vie dans les attaques que l'école des Tueuses subit en même temps que les Bouches de l'Enfer…

— Une minute, une minute, l'école est attaquée ?

— Oui, plusieurs fois par semaine... Willow se dit que si la jeune Dawn mourait dans un effondrement, tout ce qu'elle a fait ensuite n'existerait plus. Elle n'a pas un mauvais raisonnement. Elle analyse leur situation et n'a pas envie de rester les bras ballants pendant que les ennuis s'accumulent. Tu ne réalises sans doute pas qu'à à toi toute seule, tu as réussi à créer un univers viable jusqu'à présent… Parmi tout ce que tu as fait, il y a : influencer toute la destinée d'Andrew, aider à la création d'un autre centre européen du CDO et former systématiquement les nouvelles Tueuses pour les envoyer partout auprès des survivantes venues combattre à Sunnydale… En rapprochant Willow de Kennedy, tu as permis la naissance d'Alexandra, et tu as donné toi-même naissance à Maya… Ce sont actuellement les deux Tueuses européennes les plus fortes. Mais si la jeune Dawn meurt, toute cette ligne de défense disparaît instantanément. Et sans toi pour l'intégrer dès le début, Faith aurait fait cavalier seul et ne serait pas vraiment encline à mener les troupes éparses après avoir été laissée livrée à elle-même. Willow n'agit pas de façon insensée, mais il y a des choses qu'elle ne sait pas.

— Alors je vais retourner chez moi s'il y a un autre échange qui remet tout en ordre ? dit-elle, pleine d'espoir pour la première fois.

— Ce n'est pas… certain.

Douchée, elle lui jeta un regard désespéré.

— Le futur dont tu viens tient bon grâce aux liens étroits que tu as créés entre tes amis. Il tend à se maintenir solidement, donc la jeune Dawn pourra rentrer tant que les événements sur place le permettent encore... Mais toi, j'ai peur que tu restes ici.

— Mais pourquoi ?!

— Parce que tu as déjà parlé à Riley.

Elle fronça les sourcils et secoua la tête, affreusement frustrée et en colère de se voir encore tirer le tapis sous les pieds.

— Et alors ?! Riley est déjà au courant puisqu'il a contacté Andrew en 2044… Je ne comprends pas. Je lui ai tout raconté parce qu'il a contacté Andrew…

— …et il a contacté Andrew parce que tu viens de lui en parler. Tu as créé une boucle.

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