Âme de Pureté

Chapitre 60 : Eveil: Chapitre 60

3634 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 19/11/2019 22:01

- « Et de trois. »

Les cartes que je serrais dans mes doigts glissent et s'étalent sur la table. Ecœurée d'enchainer trois défaites d'affilée contre le même adversaire, je me couche contre le bois dans un gémissement plaintif.

- « Comment ça se fait ? » Je geins, la joue collée contre mon Ninja Blanc, défait bien trop tôt dans la partie.

A l'autre bout de la table, Joey masque sa mouche de ses mains, mais ses yeux trahissent sa joie immense de me vaincre à son propre jeu.

- « Tu crois que je ne te vois pas ? Tu étais supposé m’aider ! »

Cela ne fait qu'élargir son sourire qu'il ne cherche même plus à dissimuler.

- « Hé, ne t'en veux pas trop. Tu viens d'affronter un des meilleurs duellistes du Japon, c'est tout à fait normal que tu perdes ! »

Tout en me redressant correctement sur ma chaise, j'essaie de lui asséner un coup de pied mais ne rencontre que le vide. Ma tentative d'agression provoque un petit rire à l'entrée du salon.

- « Peut-être que ce n'est qu'une mauvaise passe. » Souffle discrètement Sérénity, munie d'un plateau fumant de chocolats chauds.

Suite à ma défaite contre Aigawa, j'ai dû subir les railleries incessantes de ce crétin avant de m'enfuir pour retrouver Joey. Au début, je croyais qu'il ne m'avait vaincue que sur un coup de chance. Néanmoins, les victoires à répétition de Joey m'ont rapidement fait changer d'avis. Quelque chose cloche. Mon jeu se serait affaibli en l'espace de trois jours ? Non, les cartes récupérées chez Dartz l'ont considérablement renforcé. Il suffit d'analyser mon duel contre Mai Valentine pour s’apercevoir que le problème provient d’ailleurs.

Lasse, j'accepte la tasse tendue par la jolie brune et en avale une longue gorgée avant de m'avachir à nouveau.

- « Au moins, plus besoin d'affronter Atem. Si je ne parviens même pas à battre Joey, alors c'est peine perdue. »

Le principal intéressé tique à ma remarque.

- « Hé ! Qu'est-ce que tu insinues ? »

Sérénity laisse échapper un gloussement face à la réaction de son frère.

- « C'est vrai que Yugi est plutôt fort. Même toi tu n'as jamais réussi à le battre, grand-frère.

- Pas besoin de me le rappeler ! Puis je vous signale que j'ai tout de même fini quatrième au tournoi de Bataille-Ville. Je ne connais pas beaucoup de duellistes plus forts que moi ! »

Une longue liste de noms me vient en tête, mais pour ma propre protection, je décide d'éviter le sujet.

- « Quoi qu'il en soit. » Poursuit le grand blond en me désignant de son index. « Tu as besoin d'être coaché par un véritable champion du jeu ! »

Je place mon pouce sous mon menton, feignant de réfléchir.

- « Mais Yugi ne peut pas m'apprendre à jouer et je doute que Kaiba soit emballé par cette idée.

- Tu pourrais demander à Tristan ! » Ajoute Sérénity avec entrain. « Il m'a dit que c'était lui qui avait tout enseigné à Joey sur les Duels de Monstres. »

- Bon sang, vous le faites exprès ? Je parlais de moi ! »

Nos regards se tournent sur lui, agitant ses bras pour récolter toute l'attention. Je hausse un sourcil et croise les bras.

- « Il me faut un maître sage et attentif.

- Je suis l'homme de la situation. » Déclare-t-il, une main sur le torse d'un air solennel.

Sage et attentif ne collent pas au personnage de Joey. Il pourrait y mettre toute la conviction du monde, je n'arriverais pas à le prendre au sérieux. Sérénity semble du même avis au vu de son incapacité à le regarder droit dans les yeux. Nous échangeons un regard complice avant de vider chacune à notre tour le contenu de nos tasses.

- « Je ne compte pas affronter Yugi. » Je finis par avouer.

Il ne paraît pas surpris. Après tout, c'est lui qui m'a un peu forcée à accepter son défi.

- « Il le faut. Kaiba ne te laissera pas tranquille si tu ne te bats pas contre Yug'. »

Ses traits se sont tirés pour une expression plus grave. Je fronce les sourcils, cherchant dans mes souvenirs le moment où je lui aurais parlé de Seto Kaiba.

- « Zoé m'en a touché un mot. Cela ne m'étonne pas de ce détraqué. Il ferait n'importe quoi pour que tu perdes. »

Joey ne sait pas à quel point ses mots sont justes. Ils me renvoient en Floride, dans cette ruelle où les créatures obscures créées par Dartz s'apprêtaient à aspirer mon âme.

- « Il y a quelque chose que je ne saisis pas. » Je soupire en relevant les yeux vers les siens. « Il aurait pu m'affronter directement après mon abandon contre Mai. Pourtant, j'ai l'impression que c'est lui qui a offert mon âme à l'orichalque. »

Jamais je ne m'étais exprimée sur ce point depuis notre retour au Japon, et encore moins à lui. Sérénity, qui n'a pas suivi nos aventures en Amérique, se dandine sur sa chaise, passant en silence de son frère à moi.

- « Ce mec ne perd rien pour attendre, je vais lui donner une bonne leçon. » Grogne Joey, le poing serré contre la hanse de sa tasse. « Il se croit vraiment tout permis. »

Il en a les moyens, après tout. Je n'imagine même pas son état en apprenant ma défaite contre un inconnu tel qu'Aigawa. Je risque d'en entendre parler durant des années.

Soudain, le bruit d'un claquement de porte nous provoque un sursaut. Joey se retourne brusquement vers l'entrée alors que Sérénity me lance un regard inquiet.

- « Déjà ? » Bredouille-t-elle en se triturant les doigts au-dessus de la table.

J'aimerais lui poser des questions quand un grommellement plaintif flotte dans tout l'appartement. Dès mon entrée, j'ai été surprise d'apprendre que seuls Joey et son père vivaient dans cet endroit. Etrangement, c'était relativement bien rangé, si ce n'est quelques bouteilles de bières et sacs poubelles par-ci par-là. Joey s'est d'ailleurs empressé de les repousser loin des regards indiscrets.

- « Putain, je t'ai déjà dit de pas ouvrir les fenêtres. Ça caille ici, crétin ! »

La voix se rapproche, elle est grave et... menaçante ? Je retiens mon souffle jusqu'à ce que la silhouette grande et large d'un homme se présente au pied du salon.

- « C'est bon, c'est juste pour aérer un peu. » Marmonne Joey en se levant de sa chaise.

Le père de Joey est plutôt large d'épaules, des cheveux bruns tirés en arrière, mettant en évidence les marques des rides sur son front. De toute évidence, cet homme ne sourit jamais. Mon regard descend sur ses bras, dont l'un maintient un sac où les bouteilles en verre s'entrechoquent et l'autre ballotte une bière à moitié vide. L'odeur pestilentielle nous indique qu'il n'en est pas à sa première boisson alcoolisée de la journée. Je peux sentir Sérénity se crisper à un mètre de moi.

- « On ferait mieux d'y aller. » Je lui chuchote en posant une main sur son bras.

Elle tressaute et réprime un frisson. Mon cerveau me hurle de récupérer mes affaires et de la pousser vers la sortie. Pourtant, pour une raison que j'ignore, je ne peux m'arrêter de lorgner du coin de l'œil cet homme à l'allure repoussante. Il titube et jette nonchalamment le sac en plastique contre un meuble.

- « Alors Sérénity, comment va ta mère ? » Peste-t-il suivi d'un rire étouffé dans une quinte de toux.

- « Ferme-la. » Rétorque aussitôt Joey. « On était sur le point de partir. »

J'approuve ses dires et me lève de ma chaise en rassemblant mes cartes éparpillées au centre de la table. Soudain, alors que la petite brune m'imite et dispose un paquet en face de moi, un projectile heurte le mur à côté de nous et explose dans un fracas. Il me faut plusieurs secondes pour assimiler les débris de verre et la forte odeur à une bouteille d'alcool.

- « Gamin de merde ! Comment oses-tu me parler de la sorte ?! »

Sérénity tremble de la tête aux pieds. Dans sa torpeur, elle s'est rapprochée de moi pour s'éloigner de son père. Elle bredouille des mots incompréhensibles lorsque son épaule rencontre la mienne par mégarde.

Ce type en tient une bonne.

Je déglutis et observe Joey, poings serrés le long du corps, le foudroyant du regard. La tension est telle que je me sens à l'étroit dans ce salon. Le liquide a commencé à se répandre le long du parquet non loin de nous.

- « Dégage de mon plancher tout de suite ! » Vocifère l'alcoolique en tapant du poing sur le meuble.

Nous ne nous faisons pas prier pour décamper sur le champ. Une main pressée contre la hanche de Sérénity, je la guide jusqu'à l'entrée où Joey nous rejoint quelques minutes plus tard.

Enfin quelque chose d'intéressant. On pourrait se débarrasser de ce type. Cela fait beaucoup trop longtemps qu'on a envoyé personne au Royaume des Ombres.

Cette idée bien que séduisante n'est pas envisageable. Nous avons fait suffisamment de mal comme ça. Inutile d'amputer la famille de Joey d'un membre pour des histoires qui ne nous concernent pas. Etrangement silencieux, nous descendons les marches du bâtiment, uniquement remplis de logements sociaux. A notre arrivée, je dois avouer que je n'étais pas surprise de constater l'endroit où vivait Joey. Quelques discussions passées avec Tristan m'avaient mis sur cette piste.

- « Désolé, je ne pensais pas qu'il reviendrait si tôt. » Grogne le blondinet pour briser le silence. « J'espère que vous n'avez pas eu trop peur. »

Je me suis chiée dessus.

- « Pas du tout. » Je réponds fièrement.

- « Tu es tellement impressionnante, Lore-chan ! » M'acclame Sérénity, des étoiles plein les yeux.

- « Je vais reconduire Sérénity à la gare. » Reprend-t-il, un petit sourire aux coins des lèvres. « Ça ira pour rentrer ? »

Nous nous arrêtons au milieu d'un carrefour. Je lève les yeux au ciel, le soleil décline doucement à l'horizon, mais je devrais être capable de rejoindre ma maison avant la tombée de la nuit.

- « Sans problème ! »

Au fond, j'aurais tout de même apprécié que Joey me raccompagne chez moi. Cela aurait été l'occasion pour moi de lui poser des questions sur ce qu'il vient de se produire. Je les observe s'éloigner en direction de la gare de Domino City. A moins que ce soit pour cette raison que je dois rentrer seule. N'ayant aucun moyen de répondre à mes interrogations, je hausse les épaules et m'oriente vers la ville. Autrefois, j'aurai emprunté les rues excentrées et les recoins tranquilles plutôt que les grands axes fréquentés. La présence de tout ce monde autour de moi me rassure quelque peu, alors qu'elle m'effrayait auparavant.

Depuis quand ce changement date-t-il ? A croire que les doutes de ma mère sont fondés, je deviens une autre personne à cause d'Eléonore.

Tu veux plutôt dire « grâce ».

Bien évidemment.

Mes pas me guident au centre de Flems. Les lumières urbaines règnent en maître sur la ville. Je ne sais plus où donner de la tête entre les vitrines décorées de loupiottes, des lampadaires aveuglants et des enseignes clignotantes à chaque coin de rue. Au loin, le Tam-Tam m'hypnotise. Ma curiosité me murmure de m'approcher au plus près de l'entrée pour vérifier la véracité des propos de Zoé.

Qu'est-ce qui nous en empêche ?

A peu près tout.

- « Lorène ? »

Mon cœur rate un battement, je manque de trébucher sur le bitume quand une forte poigne attrape mon bras pour me sauver d'une terrible et humiliante chute. De l'autre côté de ce bras se trouve Tristan, habillé d'un pantalon et d'une chemise classique, surmontée d'une veste en faux cuir. Je bute un instant sur son style. Après tout, mon esprit s'habituait lentement à les assimiler aux mêmes vêtements. Je suis obligée d'avouer que de sauver le monde nous force à adopter une hygiène précaire, parfois.

- « Lorène ? » Répète-t-il sans se douter le monologue intérieur qui m'assaille.

- « Oh, Tristan. Qu'est-ce que tu fiches ici ? »

Mon ami semble mal à l'aise devant ma question. J'observe ensuite les enseignes autour de nous et trouve sans peine la réponse. Le café dans lequel Zoé s'est dégotée une place de serveuse se situe à l'opposé de la place. Je ne suis certainement pas la seule à connaître ce détail.

- « Tu lui as sorti le grand jeu ? »

Son visage rougit instantanément, il se met à agiter nerveusement les mains à ma hauteur dans l'espoir de dissiper un malentendu.

- « Je ne vois pas de quoi tu parles ! A moins qu'elle t'ait dit quelque chose ? Elle te parle de moi parfois ?

- Wow, wow, wow. Doucement, mec. Une question à la fois ! »

Les paroles de Zoé me reviennent progressivement en mémoire. Tristan ne s'est pas manifesté auprès d'elle depuis le retour de son âme parmi nous. Et la connaissant, elle a probablement prévu de l'ignorer pour se venger. Mon amie est le genre de fille à se comporter comme un fantôme le temps que vous regrettiez vos actes. J’en sais quelque chose.

- « Viens, on ne va pas rester plantés ici. » Je pouffe en lui indiquant une rue en dehors de l'effervescence nocturne.

 

- « Tu penses qu'elle m'en veut ? »

Je me mords la langue. Zoé n'apprécierait pas que je m'occupe de ses relations, bien que ce soit devenu son petit passe-temps avec moi. Mal à l'aise, je sautille légèrement sur place, à la recherche d'une excuse.

- « Oui... Non ! J'en sais rien ! Le mieux serait de lui demander. »

Il réprime un grognement insatisfait. Sûrement s'attendait-il à ce que je le rassure sur les sentiments de Zoé à son égard. Mais pour tout lui dire, je n'ai aucune idée de ce qu'elle peut ressentir.

- « Les filles sont tellement compliquées. » Gémit-il au point d'en avoir les larmes.

- « Elles le sont moins quand tu sais en choisir une à la fois. »

Eléonore glousse à sa propre remarque avant de s'étouffer sous mes raclements de gorge. J'adresse un signe de prière envers Tristan en guise d'excuse.

- « A propos de ce qu'a dit Téa l'autre fois... »

Je secoue mes mains pour l'interrompre.

- « Tu n'as pas besoin de te justifier. Tu sais, je la comprends.

- Vraiment ? »

Il me toise comme s'il assistait au débarquement des aliens sur Terre.

- « Eléonore est allée beaucoup trop loin avec Yugi. Je peux comprendre qu'en tant qu'amie, Téa ne me voit pas d'un bon œil. »

Ma réaction semble l'apaiser. Embarrassée, je glisse une main dans mes cheveux et enroule une mèche autour de mon index.

- « Disons que je suis plutôt surprise que vous ne le fassiez pas. »

Mon attention se reporte sur la circulation étrangement calme en ce début de soirée. Mes mains grelottent en pinçant distraitement les plis de ma jupe.

- « C'est ce qu'elle pense aussi. »

Même si cela me paraissait évident, l'entendre de la bouche de Tristan me fait l'effet d'un coup de massue.

- « Alors pourquoi...

- Parce que Joey a toujours pris ta défense. »

Je le fixe avec des yeux ronds.

- « Pas que je ne suis pas d’accord ! » S'empresse-t-il de corriger. « C'est juste qu'il est... déterminé à vous protéger Yugi et toi. »

Je vais chialer

Moi aussi.

Ma gorge se comprime, j'inspire profondément pour ne pas transparaitre mon trouble.

- « Du coup... Si tu pouvais le ménager un peu.

- Bien sûr, je ne laisserai pas Eléonore s'en prendre à lui. »

Dois-je y voir un défi ? Souviens-toi de ce délicieux moment à bord du dirigeable de Kaiba.

Sans s'accoutumer de la présence de Tristan, l'esprit me renvoie les images du corps endormi de Joey sur son lit de soin. Elle reproduit les sensations de ma peau se pressant avidement sur l'entrejambe de celui qui n'était pour moi qu'un ami à cette époque.

- « Tout va bien ? »

La voix de Tristan éclate la bulle brûlante qui m'engloutissait. Malgré la température basse et la brise fraiche actuelle, je me sens bouillir au plus profond de mon être.

- « Oui, oui ! » Je siffle.

Mon timbre frôle des notes aigües jamais atteintes auparavant.

- « Au fait, tu comptes me suivre jusqu'à chez moi ? » Je remarque au détour d'une rue proche de mon quartier.

- « N'a-t-on pas convenu de te suivre partout ? » Rétorque Tristan suivi d'un clin d'œil.

Amusée par cette complicité qui m'avait tant manquée, je le pousse sur le côté d'un coup d'épaule.

- « Si tu comptes me suivre jusqu'à ma chambre pour assurer ma sécurité, il faudra me prévenir.

- Cela ne risque pas, je ne cherche qu'une fille à la fois. »

Il a répondu si vite que je n'ai pas pu m'empêcher de sourire.

- « Bonne réponse. »

Nous nous sommes arrêtés au beau milieu du trottoir. J'imagine qu'il ne m'accompagnera pas jusqu'à ma porte, pas après ma petite pique. Avant de le laisser repartir vaquer à ses affaires, je réfléchis à mille à l'heure puis décide enfin de me lancer :

- « Il y a quelque chose que j'aimerais savoir. »

Je reviens alors sur les événements de la journée et plus particulièrement sur la fureur du père de Joey. J'évite soigneusement de mentionner la présence de Sérénity à l'appartement et me cantonne aux faits. Le visage de Tristan s'assombrit au fur et à mesure que je lui raconte la scène à laquelle j'ai assisté.

- « Est-ce que... ça arrive souvent ? » Je demande du bout des lèvres.

Le grand brun détourne le regard vers l'autre trottoir, désert. Il a l'air d'hésiter pendant de longues secondes, si bien que je crois un instant qu'il va me remballer.

- « Ça dure depuis aussi longtemps que je le connais. » Avoue-t-il dans un soupir. « Tu ne t'es jamais demandée pourquoi Joey travaillait autant ? »

Sa question sonne un peu comme un reproche. Je baisse la tête. Au fond, je me doutais qu'il avait besoin d'argent, mais de là à subvenir aux besoins de son père alcoolique ? C'est le monde à l'envers.

- « Je suis surpris qu'il t'ait laissée venir chez lui, ce n'est pas son genre. Généralement, il évite de nous inviter pour ne pas qu'on voit son père. »

J'acquiesce, bien que je l’ignorasse.

- « La plupart du temps, son père est calme et végète dans son salon. Joey vit de son côté et rapporte de l'argent pour payer le loyer et... les dettes. »

Tristan parle si bas que je décoche le dernier mot avec difficulté. Des dettes ? Je déglutis, complètement embrouillée.

Tu as choisi un mec à problèmes, heureuse ?

Les pensées d'Eléonore m'effleurent, je les balaie d'un mouvement de tête.

- « Et il n'y a aucun moyen que nous... »

Tristan croise les bras et esquisse un pas dans mon espace vital.

- « Je t'arrête tout de suite, il est hors de question que tu fourres ton nez dans cette histoire ! »

Déçue, je joins les mains en signe de prière et le fixe de ma plus belle moue suppliante.

- « S'il te plait. »

Je suis sur le point de lui servir mon plus beau jeu d’actrice quand ses grandes mains s'abattent subitement sur mes épaules.

- « Ecoute, je comprends que le cas de Joey t’inquiète, mais il y a suffisamment de bordel autour de nous en ce moment. Puis, tant que cet... esprit sera en toi, je ne crois pas que tu puisses faire quoi que ce soit sans tout bousculer. »

Son constat est cinglant, mais pourtant vrai. Je peine à tenir le regard intense qu'il m'adresse et finis par observer une série de haies à ma droite. Ses mains quittent mes épaules dans un autre soupir, cette fois de soulagement.

- « On va s'en sortir. » Conclut-il avec conviction.

A l'écouter, on dirait qu'une énorme catastrophe va arriver dans les prochaines secondes. Néanmoins, je hoche le menton à plusieurs reprises.

- « Tu as raison. »

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