Âme de Pureté

Chapitre 47 : Orichalcos: chapitre 47

2362 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 19/10/2019 15:08

- « Jolie veste. »

La nuit tombée sur la Floride, je n’ai d’autres choix que de retourner dans la chambre de Mai et tâcher d’oublier mon insatiable envie de la voir disparaître. Piquée par sa remarque sur mon emprunt, je lâche un petit sourire et m’installe nonchalamment à sa table.

- « Merci, elle appartenait à une fille cool que j’ai connue. » Je crache en la foudroyant du regard.

Après avoir quitté la chambre en compagnie de Rafael, celui-ci avait accepté de me faire visiter les lieux. Ce fut l’occasion pour moi de découvrir leur fameuse réserve de cartes rares sur lesquelles, selon lui, Insector Haga et Rex Raptor se seraient jetés dès leur arrivée. Il ne m’en a pas fallu davantage pour que je me serve à mon tour. Si jamais le destin voulait que j’affronte le pharaon dans le futur, mon deck ne pesait pas lourd contre son Timée. Puis qui refuserait des cartes rares, franchement ?

- « Tu as raison, la Mai que tu as connu a disparu. » Surenchérit-elle en me proposant un verre d’eau d’un signe de la main. « Elle est devenue plus forte, plus indépendante. Elle n’a plus besoin de ces imbéciles pour avancer. »

A cet instant, j’hésite à lui demander si je suis comprise dans la catégorie « imbécile ».

- « Et donc tu as décidé de voler l’âme de Pegasus pour te prouver que tu étais devenue puissante ? Ou est-ce que c’était un moyen d’essayer de te racheter auprès de moi ? »

Mai hausse un sourcil, visiblement perplexe.

- « Pegasus ? Non, c’était une demande de Dartz. Je ne pensais pas que tu voulais voir ce type disparaître. »

Ainsi donc Dartz n’a pas tout révélé à ses comparses. J’ignore vaguement l’expression intriguée sur le visage de Mai et me verse un verre d’eau comme si de rien était. Les minutes qui suivent, nous nous jaugeons dans un silence lourd. Parfois, l’une décide de vider une partie de son verre ou de dévier son attention vers la lumière blanche diffusée par la série d’ampoules au plafond. A l’intérieur, je me remémore ma dernière altercation avec Joey à son retour du duel opposant Yugi et Rafael. Rien que de penser qu’il s’épuise à la ramener à la raison me provoque des tremblements de colère. Cette fille ne veut rien entendre, c’est une cause perdue.

- « Alors tu comptes vraiment te joindre à cette deuxième bande de bras cassés ? »

Je fronce les sourcils.

- « N’est-ce pas ce que tu as fait ?

- Bien sûr que non. Je croyais te l’avoir dit : je n’ai besoin de personne, pas même de ces gens. Je n’utilise le sceau d’orichalque que pour servir mes intérêts et tu devrais en faire de même. »

Je ne peux m’empêcher un gloussement mauvais.

- « Avec tout mon respect, Mai, tu es très mal placée pour me donner des conseils.

- Parfait, je ne cherche pas à te faire changer d’avis de toute façon. Tout ce qui m’importe, c’est de retrouver Joey pour l’affronter en duel. »

Mon sang pulse brusquement dans mes veines, je me sens bouillir au plus profond de mon être. La douleur que j’ai subie lorsque l’épée du Sceau d’Orichalque s’est abattue sur moi, je refuse que Joey la ressente à son tour.

- « Dans ce cas, il faudra m’affronter en premier. » Je déclare d’une voix menaçante. Mes doigts se resserrent sur mon verre à tel point que mes phalanges blanchissent. « Je te propose un marché, Mai. Si tu me bats en duel, je t’amènerai à Joey. »

Bien que je n’aie jamais confronté mon niveau à celui de Mai, il est hors de question de la laisser prendre le risque d’absorber l’âme de Joey. S’il est assez idiot pour sacrifier sa vie pour ramener cette fille ingrate, ce n’est pas mon cas. Les pupilles de Mai s’agrandissent subitement.

- « Non… Toi et cet idiot, franchement ? Je n’y crois pas, tu es tombée bien bas, ma chérie. »

Je serre la mâchoire pour ne pas l’insulter. Peu importe son avis sur la chose, elle ne peut pas comprendre. Elle n’a personne et elle le clame haut et fort.

- « Ton petit marché ne vaut rien. » Ajoute-t-elle entre deux ricanements. « Je n’ai pas besoin de toi pour trouver Joey, il viendra à moi de lui-même. »

Sa remarque me glace le sang. Elle a raison et ne s’en cache même pas. Evidemment que Joey cherchera à la rejoindre coûte que coûte pour la libérer de l’emprise du Sceau d’Orichalque. Mon visage doit trahir la déception qui m’envahit car Mai pose sa main sur mon poignet.

- « C’est ça qui te dérange, pas vrai ? Tu as été relayée au second plan et tu ne l’as pas supporté. »

Désormais penchée au-dessus de la table, ses lèvres se rapprochent de mon oreille, comme pour me livrer une confession. Tétanisée par ses propos, je baisse la tête, réfrénant une puissante envie de détaler sur le champ.

- « C’est pour ça que tu es venue. Non pas pour ton amie, comme tu le clames tant, mais bien pour que Joey vienne te sauver comme il essaie de le faire pour moi. » Le volume de sa voix diminue petit à petit. « Mais écoute-moi bien, Joey ne signifie rien à mes yeux. Je vais me débarrasser de lui et tu comprendras que toi aussi tu n’as besoin de personne pour avancer et surtout pas d’un type comme lui. »

Ma tête est sur le point d’exploser, mon cœur tambourine furieusement contre ma cage thoracique au point où le battement résonne dans mes tympans, ma gorge et mes membres. Soudain, je me lève brutalement et, d’un revers de la main, envoie valser mon verre d’eau qui se brise contre une armoire. Mai m’adresse un rictus satisfait, ma violente réaction ne la surprend pas, ce qui accroit encore plus ma colère.

- « Tu me débectes, Mai. » Je grogne du plus profond de mes entrailles. « Tu ne saisis pas la putain de chance que tu as d’avoir quelqu’un prêt à se sacrifier pour toi. »

Je m’échine en vain, elle semble s’amuser de mon état. Peu importe les mots que j’utilise, ils l’effleurent sans l’atteindre véritablement. Assez, je l’ai suffisamment écoutée pour les dix prochaines années de mon existence si je survis jusque-là. L’eau s’enfonce dans la moquette, je jette un œil aux morceaux de verre éparpillé autour du meuble. Peu importe, j’envoie valser ma chaise et rejoins le canapé dans l’espoir d’y trouver le sommeil. Mai ne rétorque rien de plus, si ce n’est des sifflements ravis.

Malgré la lumière, le poids de ces deux derniers jours me retombe sur les muscles. Il ne me faut pas plus d’une dizaine de minuter pour trouver le sommeil et disperser, l’espace de quelques heures, mes remords dans les méandres de la nuit.

 

Bien que le canapé ne soit pas l’endroit le plus confortable pour piquer du nez, j’admets que celui-ci est particulièrement moelleux. Toute la pression de mes muscles s’est volatilisée, me gratifiant d’une sensation de légèreté incomparable. Alors que mes membres lourds par le sommeil se réveillent doucement, je relève la tête et cherche dans l’obscurité un point de repère. La pièce n’est pas complètement plongée dans le noir. La lumière du couloir s’insinue insidieusement par d’infimes canaux entre la porte et le chambranle.

- « Mai ? » Je tente, la bouche pâteuse.

Mes yeux, désormais habitués aux ténèbres, se dirigent immédiatement vers le lit parallèle au canapé. Les draps sont défaits, le coussin menace de s’échouer sur le sol. Surprise, je me hisse sur le dossier du fauteuil à l’aide de mes bras et constate que ses cartes se sont également volatilisées. Ni une, ni deux, je m’extirpe de mon lit de fortune et titube jusqu’au couloir, butant sur divers meubles et objets parsemés ici et là.

- « Mai ? » Je répète un peu plus fort.

Les néons au plafond m’éblouissent. Il me faut un moment pour me tirer complètement du sommeil.

- « Elle n’est pas là. »

Je sursaute et pivote en direction de la voix. Tiens, revoilà le chevalier Saint Seiya. Le bras toujours enroulé dans son bandage, il s’adosse au mur mitoyen de la chambre et m’évalue de ses yeux bleus.

- « Où est-elle dans ce cas ? 

- Nulle part où tu puisses la trouver. »

Non mais je rêve. Il pense réellement que j’ai le temps pour ses petites énigmes ? J’ai connu bien meilleur matin. Passablement énervée devant son excès de zèle, je croise les bras et le foudroie du regard.

- « Très drôle. Si tu n’as pas envie que je t’arrange l’autre bras, tu ferais mieux de me dire où elle est partie et tout de suite. »

Ma tentative d’intimidation lui décoche un pouffement suivi d’un ricanement non dissimulé.

- « Des menaces, hein ? Je comprends pourquoi tu sors avec ce crétin de Wheeler. Tu sais ce qu’on dit « qui se ressemble, s’assemble. » »

Je lève les yeux au plafond. Mai n’a pas pu s’empêcher de le crier au premier venu. Une seconde, si elle lui en a parlé, cela signifie que…

- « Ne me dis pas qu’elle est partie à sa recherche pour l’affronter en duel. 

- Tu écoutes quand on te parle ? Je viens de te dire que je ne te dirai rien.

- Merci, c’est suffisant. » Je crache avant de retourner dans la chambre pour récupérer mon sac.

Valon me talonne au moment où j’essaie de sortir de la pièce. Ignorant ses plaintes, je le bouscule sans sommation et m’oriente approximativement. La visite des lieux par Rafael m’aura au moins servie à connaitre l’issue de ce bâtiment.

- « Hé reviens ! »

Les appels de Valon ne m’atteignent pas, je me dépêche de rejoindre les escaliers et les dévales quatre à quatre. Hors de question de laisser Mai retrouver Joey avant moi, peu importe l’heure à laquelle elle est partie. Si je le trouve, je dois absolument lui donner mon fragment d’orichalque pour lui éviter de se sacrifier pour rien. L’avantage que j’ai, c’est de connaitre leur emplacement et leur moyen de transport, à moins qu’ils n’aient choisi de quitter le camping-car. Je manque de louper une marche et me rattrape à la rambarde. Mon esprit se noie sous le flot continu de pensées. Je m’efforce de rester concentrée sur mes mouvements jusqu’à la sortie où le vent de l’aube me frappe violemment la peau.

- « Merde. » Je grogne quand je me souviens que mon téléphone n’est plus dans mon sac.

Tant pis, qu’il considère ceci comme un cadeau d’adieux ! Tandis que je rejoins la route sans connaître le chemin, un appel plus fort que les autres me force à me retourner.

- « Maître Dartz souhaite que tu restes ici. »

Rafael… On dirait bien que l’autre larbin l’a alarmé de mon départ précipité. Mais je ne compte pas obéir sans la moindre résistance.

- « Et moi je veux retrouver Mai avant qu’elle n’affronte Joey. » Je rétorque en croisant les bras sous ma poitrine.

- « Tu n’as donc rien compris de ce que j’ai expliqué hier. Notre but est de changer ce monde en un monde meilleur et tes amis s’opposent à notre mission ! »

Tes intentions sont louables, Rafael, mais je ne peux pas me permettre de perdre une autre personne que j’aime à cause du Sceau d’Orichalque.

- « Désolée. » Je souffle avant de me diriger vers la chaussée déserte.

Dommage, je suis sûre qu’on aurait pu devenir amis dans une autre vie, lui et moi. Mais dans celle-ci, j’ai choisi de m’accrocher à ce blondinet obstiné qui ne sait pas encore à quel point il a besoin de moi.

- « J’active le Sceau d’Orichalque ! »

Je m’immobilise au cri de Rafael. La légère brise qui me soufflait dans le coup se transforme en une puissante rafale. Mes mèches me fouettent les joues et me barrent la vue. A mes pieds, le cercle étincelant bloque ma progression. Des symboles sataniques turquoise illuminent le sol et une aura me repousse en arrière. Je me tourne brusquement. Rafael se tient à l’autre bout du cercle, son disque de duel fermement accroché sur son bras gauche. La marque du sceau se grave sur son front.

- « Je ne peux pas te laisser partir comme ça. »


 

Laisser un commentaire ?