La voix de l'ombre - Livre III : Au-delà des brumes

Chapitre 23 : Un essai concluant

2388 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour il y a 9 mois

Chapitre 23 : Un essai concluant.



Les têtes pensantes de la rébellion peinaient à se mettre d'accord. Thrall était d'avis qu'il fallait rechercher des alliés dans les orcs de l'entourage direct de Garrosh, car, tous n'adhéraient sûrement pas à ses plans, comme Eitrigg, ou encoreVarok Saurcroc.

Chen Brune d'Orage était pour la libération des prisonniers Sombrelance en priorité, et sans forcément entrer en conflit direct.

Quant à Keera, elle proposait d'attendre un accord officiel avec l'Alliance, car leur nombre était trop réduit.


  • Je pourrais peut-être partir en amont et détruire la garnison plus au nord, proposa la princesse.
  • Keera, t'es censée être morte, en tout cas aux yeux de Hurlenfer. Tu participeras pas à l'assaut, fit Vol'jin. Faut pas que Garrosh il sache que t'es en vie. Ses préparatifs seront pas les mêmes s'il s'attend à t'affronter.
  • Et donc je vais rester là à vous regarder vous faire tuer ? Ou pire, vous amuser sans moi !
  • T'as de quoi t'occuper avec les armes à affûter et...
  • On nous attaque ! Chef ! Là, devant la Vallée des Épreuves !
  • Par les Loas, c'est bien not' veine, jura Vol'jin. Bien, on se prépare, et on leur fonce dans le croupion. L'attaque, c'est la meilleure des défenses !


Keera scruta l'horizon, et pivota pour aller récupérer son arme. Vol'jin la retint par le bras.

  • Keera, fais en sorte qu'on te reconnaisse pas, ni à ton accoutrement, ni à ta façon de te battre.
  • La hache que je brandis à présent était celle de Bazol. Elle a été touchée par le Sha de la peur. Aucun kor'kron ne la reconnaîtra, lui assura-t-elle.
  • Bien, on a besoin de toi et de ta force, mais fais bien attention.
  • Compte sur moi, fit-elle en s'éloignant à grands pas.


Elle tendit la capuche de son nouvel affublement, puis récupéra la hache de Bazol. Elle demanda à l'un des trolls de lui prêter un foulard qui masquerait le bas de son visage, afin de ne pas être reconnue, et se hâta de rejoindre les autres à l'entrée du village.


Tous se tenaient droits et fiers, arborant leurs armes et leur courage. Keera se tenait aux côtés de Thrall, tandis qu'une orque se positionna à sa hauteur.

  • Si nous y restons, je veux que vous sachiez que c'est un honneur de se battre à vous côtés, princesse Keera, déclara Yarall.


Surprise par cet aveu, Keera lui lança un regard éberlué, et se reprit.

  • Nous n'y resterons pas, et c'est moi qui suis honorée de me battre aux côtés de si courageux rebelles, sourit-elle.
  • Mais vos hauts-faits vous honorent, poursuivit Yarall. Et beaucoup vous admirent !
  • Et comment se nomment ces personnes ? demanda Keera en levant le sourcil, désignant l'orque qui rougit de plus belle.
  • Yarall, et je compte bien tuer le plus de kor'krons possible !
  • Tu ne sembles pas les porter dans ton cœur, sourit la princesse.
  • C'est surtout leur chef que je me réserve, fit l'orque en serrant les dents.


Vol'jin fit signe qu'ils allaient devoir charger. Il se plaça aux côtés de Thrall qui semblait troublé.

  • Ce sont nos camarades, nos frères, s'indigna Thrall en observant les rangs ennemis.
  • Y sont prêts à nous égorger Thrall. Qu'est-ce que tu dis de ça ? demanda Vol'jin.
  • Nous ne devons pas hésiter à frapper, ajouta Chen.
  • Bien, les gars, en avant ! scanda Vol'jin, la lance au-dessus de sa tête.


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Karog était un orc fier et orgueilleux. Alors qu'il naquit au sein de l'un des camps d'internement orc peu après la fin de la Seconde Guerre, et qu'il avait une bonne dizaine d'années lorsqu'il en sortit, il gardait une rancune tenace envers les humains pour ces années d'humiliation.

Durant la gouvernance de Thrall, Karog s'était évertué à devenir un grand guerrier, rêvant de laver l'honneur de sa lignée souillé par ses parents qui avaient léché les bottes des humains pour quelques avantages durant leur détention. Fort heureusement, ils avaient péri lors de la libération des camps.


Et depuis l'arrivée au pouvoir de Hurlenfer, il avait enfin trouvé l'inspiration qui lui avait manqué : un chef sans pitié et œuvrant pour la suprématie des orcs, et nourrissant une haine implacable pour les humains. Karog avait alors aiguisé ses compétences martiales à mesure des combats, et ce n'était certainement pas pour tomber face à ces peaux bleues répugnantes qui croyaient pouvoir défier son chef.


Cependant, il ne s'était pas attendu à voir les trolls les ruer, et encore moins à apercevoir leur chef, Vol'jin, supposément mort, les mener.

  • Kor'krons, ne laissez aucun survivant, hormis les femelles orques. Chargez !
  • Lok'tar ogar ! hurlait la troupe qui fondit sur les rebelles.


La hargne des kor'krons semblait à la hauteur de leur aversion pour les trolls. Ils chargèrent avec rage, et les deux camps s'entrechoquèrent férocement. Les trolls invoquaient leur magie vaudou et la puissance de leurs Loas pour maudire leurs cibles. Quelques guerriers orcs qui avaient rallié les rebelles combattirent jusqu'à la mort leurs homologues qui ne faisaient preuve d'aucune pitié.

Vol'jin, armé de Nekana, son glaive de guerre, avait bénéficié de l'effet de surprise sur les kor'krons qui le croyaient mort. Mais les orcs reprirent rapidement leurs esprits, car le troll n'était pas un revenant, et les tuait aussi sûrement que le jour suivait la nuit. Ils réagirent donc, et commencèrent à l'encercler en nombre.


Bien plus nombreux, les kor'krons acculèrent les rebelles contre les dunes rocheuses et chaudes de la plaine de Durotar. Thrall, qui paraissait fort troublé de combattre ses pairs, ne donnait pas le meilleur de lui-même. De son côté, voyant Vol'jin en mauvaise posture, Keera affronta deux kor'krons et les décapita de sa hache, tandis que le chef Sombrelance en éviscéra un autre, qui tomba à genou, essayant de retenir ses boyaux qui dégoulinaient de son abdomen.

Bien mieux armés que les kor'krons ne s'y étaient attendus, les Sombrelances défendaient farouchement leur chef, lui-même animé par la force de la vengeance et de la justice.


Ce n'est qu'après une longue escarmouche que les rebelles purent repousser leurs assaillants au point que Vol'jin les mène jusque Tranchecolline, le bourg plus au nord qui les séparait d'Orgrimmar.


Aucun kor'kron ne survécut, et ce qui ressemblait à une première victoire plus qu'honorable gonfla l'orgueil de la troupe de rebelles, bien décidés à l'emporter sur Garrosh Hurlenfer.


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  • Quoi ? Qu'est-ce que tu es en train de me dire ?


Le Chef de guerre s'était approché si près du visage du messager que celui-ci eut un geste de recul, croyant qu'il allait se faire écharper.


  • Je... Je ne fais que vous rapporter...
  • Vol'jin est vivant !? beugla Garrosh. Par les Ancêtres, comment cette information a pu nous échapper ? fit-il en se tournant vers Toni le Truand, l'un de ses espions gobelin.
  • Chef, j'en savais rien ! se défendit-il. Véridique !
  • Il me semble que je te paie assez pour que tu assures ta part du marché, gobelin, rappela dangereusement le Chef de guerre. Ou peut-être n'ai-je pas été assez généreux, auquel cas j'aurais dû ajouter une paire de mandales en guise d’acompte.


Devant cette menace, le gobelin recula ridiculement, sachant pertinemment que l'orc pouvait couvrir la distance d'un seul pas. Cependant, ce n'était pas tant la menace que l'aura noire et inquiétante qui émanait du Chef de guerre qui le faisait reculer.

Tarokk percevait cette aura que dégageait Garrosh depuis peu. Il devenait difficile de l'approcher sans être rabroué, voir agressé. Et il connaissait certaines de ces raisons pour les lui avoir annoncées : les fouilles du caveau mogu qui renfermait une force encore méconnue et particulièrement dangereuse, l'attaque des kor'krons aux Tarides, ou encore l'infiltration d'Orgrimmar par des espions de l'Alliance, dont quelques agents avaient déjà été débusqués.


Le kor'kron se reprit lorsque Garrosh se tourna vers lui.

  • Tarokk, que crois-tu que l'on réserve aux traîtres ? demanda-t-il en toisant le gobelin.
  • Chef de guerre, grand seigneur... implora Toni qui tremblait de tout son être.


Tarokk eut presque pitié de l'espion. Il n'affectionnait pas particulièrement l'idée de torturer ces êtres sournois et bien plus faibles. Néanmoins, il mettait un point d'honneur à servir son Chef de guerre, et répondre à ses accès de cruauté faisait partie de ses attributions.


  • Je crois bien que le démembrement servirait d'avertissement aux autres, proposa Tarokk.
  • Qu'il en soit ainsi, sourit sinistrement Garrosh qui regarda la scène avec mépris, convaincu de faire justice, et sans aucune conscience de la souillure infligée au site sacré du Val de l’Éternel Printemps depuis lequel il dirigeait.


Soudain, devant la scène de torture et les cris de douleur du pauvre gobelin, Garrosh se sentit las. Les choses commençaient à traîner, et les événements n'avançaient pas assez vite à son goût. Il était pourtant certain de détenir quelque chose qui donnerait le change avec l'Alliance. Une arme d'une telle puissance que cela le rendait d'autant plus impatient d'en découdre et d'asseoir une fois pour toute son autorité sur tout Azeroth.

Sans même considérer le supplicié auquel on avait arraché les deux bras et une jambe, le Chef de guerre s'éloigna, attiré par le retour d'un des chercheurs qui étudiait l'entité enfermée dans le caveau mogu. Voyant arriver le Chef de guerre, l'orc se redressa.


  • Du nouveau concernant le pouvoir emprisonné dans la coque métallique ? l'interrogea Garrosh.
  • Oui, Chef de guerre. Nous pensons enfin savoir ce que renferme la coque, confirma-t-il. Et cela devrait vous satisfaire, fit l'orc dont la gueule s'élargit.


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Le soleil se couchait sur Tranchecolline. La ville était difficile à défendre pour le peu d'effectif des rebelles. La sortie nord donnait directement sur le Canyon de Tranchevent, et n'offrait aucune protection physique, hormis les remparts naturels que formait le goulet. Seules quelques fortifications de bois à l'entrée sud protégeaient d'éventuelles invasions.


Installée sur les hauteurs des reliefs rocheux, Keera repensait à Orgrimmar. L'imposant portail de roche et de bois était à présent ponctué de pics sur chaque toit des tours de guet, donnant davantage l'impression de pénétrer dans un fort militaire que dans une cité où cohabitent des centaines de civils.

Un profond sentiment de mélancolie l'envahit alors. Elle repensait à sa première venue, et la découverte de cette fière cité qui aurait rendu Orgrim si heureux. Elle était l'aboutissement de ses rêves, et Thrall l'avait enrichie en y invitant d'autres peuples et d'autres cultures, réunis sous la même bannière, et rappelant toute la force que pouvaient apporter de telles associations.


Keera vit alors Thrall traverser le canyon, convaincu de pouvoir rallier d'autres membres de la Horde qui devaient contester les choix de Garrosh en silence. Il avait très mal vécu l'attaque des kor'krons de la veille, et supportait difficilement que des alliés se fassent ainsi la guerre. « La Horde ne peut et ne doit pas s'en prendre aux siens » avait-il dit à Vol'jin qui avait alors tenté de le dissuader de partir seul pour Orgrimmar. Parfois, à l'entendre parler ainsi et souffrir de cette guerre intestine, Keera se demandait si le fardeau qu'Orgrim lui avait légué n'était pas trop lourd pour lui.


D'autant qu'elle s'inquiétait pour sa sécurité. Mais elle savait que Thrall avait été un Chef de guerre respecté, même si son pacte de non-agressions avec les humains de Theramore, ainsi que certaines de ses décisions, avaient divisé la Horde. Elle doutait qu'on lui fasse du mal. Au pire, il serait chassé à l'entrée de la ville, et reviendrait.


Depuis les hauteurs, Keera aperçut une autre silhouette qui semblait vouloir quitter le village.

Très discrètement, Yarall se dirigea vers le maître des démonistes Dhugru, à qui elle fit signe, puis s'éloigna vers la plaine pour contourner le canyon. Elle prit la route vers le nord-est, mais une main sur son épaule la fit sursauter.


  • Où crois-tu pouvoir aller toute seule ?
  • Oh, Keera, fit Yarall qui rengaina sa hache. Je... je voulais...
  • Te rendre à Orgrimmar seule, la coupa la princesse. Pour quelle raison ?


La jeune orque baissa les yeux. Elle s'en voulait d'avoir cru pouvoir quitter le camp des rebelles sans être vue.

  • J'ai... une affaire à régler, reprit-elle.
  • Yarall, si tu crois pouvoir nous trahir...
  • Oh non ! Jamais je ne ferai ça ! s'insurgea la guerrière. Et les informations que je vous ai apportées sont vraies, et vous servirons à faire échouer les plans de Garrosh.
  • Donc, tu pars pour une vendetta personnelle ? Penses-tu que cela aidera notre cause ?
  • Si je réussis, oui, je vous le garantis, assura Yarall.
  • Et penses-tu pouvoir réussir seule ? insista Keera.
  • Écoutez, il n'y a que moi qui puisse l'approcher. Et les coups que j'ai reçus durant l'attaque de la veille aideront à lui faire croire à mon récit.


La jeune orque semblait sûre d'elle. Keera ignorait combien elle était motivée par leur rencontre, et poussée par une envie grandissante de lui prouver sa valeur. La princesse l'avait inspirée, et plus encore depuis qu'elle l'avait rencontrée et vue à l’œuvre.

Yarall pensait également que les légendes naissaient durant les guerres, et avait toujours rêvé qu'on la cite dans les Lok'tra. Son plan fonctionnerait, il le fallait. Et pour cela, elle devait se rendre à Orgrimmar.


  • Faites-moi confiance Keera, je sais ce que je fais.
  • Yarall, tu sais à qui tu as affaire, fais-bien attention à toi ! Je ne peux t'empêcher de partir, et je ne pense pas que tu nous trahirais, mais si Malkorok te confond...
  • Ça n'arrivera pas, je sais m'y prendre avec lui.


À la fois inquiète et fière, Keera la regarda s'éloigner avec conviction et force. Elle lui souhaitait de réussir, mais surtout de revenir vivante.

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