Black Templar Tome II

Chapitre 29 : Puissance De Feu Ecrasante

6187 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 31/08/2021 20:57

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Le sergent Brüner reprenait son équilibre avec facilité. La passerelle tremblait sous les coups de canons qu’expédiait le Revenant vers ses ennemis, mais le croiseur d’attaque lourd tremblait lui aussi sous les obus en approche qui venait percuter sa superstructure. Les matelots, les officiers et les serfs couraient ne tous sens. Les boucliers Void c’étaient effondrés en cascade. Aucune des torpilles qui avaient été repérées aussi prêt du navire n’avaient réussi à perforer sa peau énergétique déployée par les pilonnes de projection du bouclier. Mais à un terrible coût. Le surplus de puissance avait été puisé dans le moindre recoins du navire, et des dégâts étaient surement à déplorer quelque part. Mais, les boucliers n’avaient pas tenu devant la puissance des têtes perforantes explosives des ogives lancées à pleine vitesse.


Le contrecoup fut brutal et rapide. Les tuiles énergétiques, qui s’emboitaient les unes avec les autres, disparurent une à une quand les immenses résistances dans lesquelles passaient des milliers de térawatt avaient sautées les unes après les autres. La coque du Revenant était maintenant exposée aux éléments extérieurs. Sans aucune autre forme de protection que son blindage, pourtant conséquent. Les Orks n’hésitèrent pas une seule seconde. Leur plan pourtant simple mais efficace, avait surprit le navire Astartes. Pourtant le vieux navire Astartes n’avait pas dit son dernier mot. A l’ordre de son capitaine, une volée d’obus de macro canons fut expédiée vers les navires Orks en embuscade, maintenant dévoilés. Les coups furent presque portés à bout portant. Sur les quatre qui furent tirés en une seule bordée, trois furent absorbés par les boucliers des navires Orks et un seul réussi à perforer cette couche protectrice. L’obus causa des dommages horribles au navire Ork. Les explosions secondaires illuminèrent sa coque dans le vide de l’espace, emportant ses plaques de blindage de plusieurs tonnes comme des fétus de paille. Le navire prenait déjà de la gîte, il venait d’être mit hors de combat. Plus de cinq milles âmes Ork constituaient son équipage, elles seraient toutes mortes dans les minutes qui suivraient, mais c’était un piètre prix à payer en comparaison. La mission des deux frégates avait été remplie, les boucliers du Revenant étaient désactivés et pour une certaine période de temps. Trop longtemps du goût de l’équipage humain du croiseur d’attaque lourd, alors que les tirs ennemis pleuvaient tout autour de lui.


C’était le chaos. Le capitaine Ström avait réussi à limiter les dégâts. Son navire continuait son avance à pleine vitesse, tout en ayant un angle de déflection des tirs en approche. Quand la première salve tirée depuis le croiseur Ork atteignit le blindage du Revenant, le choc fut terrible. Le blindage de plaques d’adamantium pure et de synthèse, entremêlées de plaques de titane, d’acier et de polymères supersolide encaissèrent la volée d’obus ennemi. Le blindage se tordit. Quelques plaques furent arrachées. La plupart des obus rebondirent sur la surface de métaux conçu pour cela, sans réel dommage. Les obus déviés, de mauvaise facture, explosèrent dans l’espace proche du croiseur d’attaque. Son équipage et sa structure furent secoués en tout sens sous les explosions titanesques et les chocs répétés. Les équipes de rechargement du canon de bombardement et de la lance laser de proue, situés à l’avant du navire, prirent plus de temps qu’escompté pour recharger leurs pièces, dû aux conditions maintenant chaotiques. La proue du Revenant encaissait toute la fureur des Orks.

Même distante, les explosions venaient arracher des pans du blindage et de la peau du Revenant, malmené. Des arches, des tours et des fresques de plus de deux milles ans furent broyées par les tirs, emportées par la puissance du feu ennemi. Mais le mastodonte impérial ne s’avoua pas vaincu. Il continuait de tirer de toutes ses armes vers chaque cible qui approchait. Par une habile manœuvre, le capitaine Ström venait de se mettre au centre du feu ennemi. Il était prit, lui et son navire en étau. Entre les tirs d’artillerie de frégates et celui du croiseur Ork qui approchait. Ils n’avaient d’yeux que pour le Revenant, et le convoi maritime à quelques encablures passait sans encombre.


-Ordre au navire marchand. Machine avant toute. Qu’ils poussent leurs moteurs jusque dans leurs retranchements. Nous allons continuer de faire écran avec le Dauntless et son escorte. Qu’ils débutent le débarquement planétaire dès qu’ils le peuvent. Envoyez !

-Message transmit, capitaine. Réponse du navire cargo de tête. ‘’Merci capitaine, bon vent. ‘’

Le capitaine Ström croisa le regard du sergent Brüner, alors que celui-ci portait encore son heaume de guerre. Le capitaine hocha silencieusement de la tête. Le message du navire cargo était plus qu’explicite. Ils les remerciaient pour leur sacrifice. Le capitaine se reconcentra en un battement de cœur, donnant ses ordres alors que la tension et les rapports de dommages pleuvaient.

-Le rechargement des boucliers est à cinquante pour cent capitaine, rapporta un officier.

C’est trop long, ça prend trop de temps. Pensa le capitaine pour lui-même.

La passerelle trembla comme si un séisme venait de se réveiller dans les entrailles du navire sous les tirs ennemis. Des hommes tombèrent au sol sous le choc. Des pupitres de contrôles crachèrent des étincelles en cascades quand ils implosèrent sous les surtensions électriques des systèmes d’alimentation.

-Nous sommes touché ! Impact direct. Pas de perforation. Coursive tertiaire pulvérisée sur deux cent mètres. Nombreux morts et blessés. Rapporta la voix laconique d’un servitor enchâssé dans une console à l’autre bout de la passerelle de commandement.


Sa voix robotique et sans âme tranchant avec les rapports désastreux qu’il énumérait à haute voix. Au moins une bonne centaine de victime était à déplorer avec l’impact d’un obus à cet endroit précis. Le blindage profond n’avait pas été touché, mais pourtant il s’en était fallut de peu. Des corps de matelots et de serfs flottaient dans le vide spatial. Brûlés, mutilés puis gelés dans le froid intergalactique. Ils iraient se fracasser, dans leurs poumons gelés contre les débris qui flottaient déjà autour du croiseur d’attaque qui les avaient protégés durant toutes ces années. Un incendie brûlait paresseusement contre la coque du navire Astartes, incinérant dans le silence du vide spatial l’oxygène et le prométhium qui s’échappait de conduites brisées.

Brüner regardait l’incendie prendre de l’ampleur sur la peau de son navire. D’une simple pensée son armure lui envoya les flux vidéo pix de la zone touchée et les rapports des équipes anti-avaries déjà sur place.

Quel chose étrange que la guerre spatiale. Pensa-t-il. Remettre son destin entre les mains de quelques personnes à plusieurs centaines de mètres de là, voir des kilomètres, alors que l’on se faisait tirer dessus par des navires ennemis à des milliers de kilomètres les uns des autres, alors que la puissance de feu d’un seul aurait pu détruire un continent en une fraction de seconde.

Brüner n’aimait pas remettre son destin dans les mains de quelqu’un d’autre que lui-même. Pourtant il s’imagina aisément que ce qu’il ressentait était le quotidien de beaucoup de gardes impériaux. Des officiers de carrière venaient à décider du sort de milliers d’hommes sans avoir à mettre le pied sur un terrain d’opération. En ce jour, regardant l’incendie qui commençait à être contenu par son équipage, le sergent Brüner des Black Templars se jura une chose. Jamais il ne serait un tel officier. S’il devait prendre des décisions aussi difficiles, s’il avait le destin d’hommes dans ses mains, alors il connaîtrait avec eux les conséquences de ses choix. Il ne pourrait pas sauver tout le monde, mais il mourrait en essayant.


Les canons tonnèrent de nouveau. Les flancs du Revenant s’illuminèrent quand ses bordées d’artillerie crachèrent leurs chargements mortels. Les contremaîtres des équipes de rechargement leur imposaient des cadences infernales, mais seuls les obus maintenaient pour l’instant la distance avec les Orks qui approchaient. Une des deux frégates encore actives reçu une pleine volée d'artillerie. Ses boucliers semblèrent encaisser une seconde la puissance des tirs, mais finalement, touché en trois endroits différents elle explosa sous le déluge de tirs impériaux.

Les cris de joie emplirent la passerelle, quand le rapport tomba. L’équipage du Revenant venait d’ajouter deux autres frégates ennemies à son tableau de chasse. Son flanc bâbord était libéré de toute menace ennemie. Pourtant son flanc tribord, toujours exposé aux tirs du croiseur Ork rendu fou par la perte de son escorte, tenait bon.


-Cap au six-zéro. Exposons notre flanc bâbord pendant que nos équipes effectue les réparations à tribord. Feu à volonté sur le croiseur Ork. C’est notre priorité, messieurs.

-Capitaine, le Dauntless en arrière garde est gravement touché. Son escorte détruite.

-Message entrant !


Un visage pâle, verdâtre, projeté par le projecteur homolytique, apparut au centre la passerelle. C’était le visage du capitaine du Dauntless. Malgré les teintes de vert de l’image, on pouvait voir qu’il semblait blessé. Du sang coulait depuis son cuir chevelu jusque sur son visage. Le bruit des explosions et des tirs d’armes laser résonnaient sur la liaison vox.


-Nos boucliers n’ont pas tenu. Abordage Ork en cours. Nous sommes débordés. Nous allons les retenir assez de temps pour vous permettre de vous préparer. Par l’Empereur-Dieu, je vais en emporter avec moi dans ma tombe. Ne nous oubliez pas. Que les vents vous soient favorable Revenant. Ce fut un honneur.


La liaison se coupa. L’image résiduelle, imprimée sur la rétine de chacun des officiers ou matelots de la passerelle resta longtemps dans leur cerveau. L’image d’un homme fort et courageux, blessé dans ses chairs. Son navire perdu. Mais résolue à mener à bien sa mission jusqu’à la fin.


-Le Dauntless entame un éperonnage à pleine vitesse contre un croiseur Ork, capitaine.

-Ainsi soit-il. Marmonna Ström. Consignez son sacrifice honorable, qu’il ne soit pas vain !

 




À presque un millier de kilomètre de là, le croiseur léger de classe Dauntless, entièrement envahi de peau verte, percuta de plein fouet un croiseur Ork qui continuait de tirer sur sa cible. Le choc fut terrible pour le navire impérial. La différence de tonnage fut sa perdition. Bien qu’il arrachât tout un pan de batterie d’artillerie, de tourelle et de coursives secondaire, le navire Ork ne broncha pas. Il dévia de quelques degrés tout au plus. Pourtant le croiseur léger se fracassa contre son ennemi. La superstructure se brisa en plusieurs endroits. Son réacteur à cœur plasmatique fut exposé aux éléments extérieurs et imposa sous les tirs ennemis. Le champignon vint lécher le blindage Ork. Incinérant tout et toutes formes de vie sur le flanc du navire peau verte. Paradoxalement, c’est par son sacrifice courageux que le Dauntless, infligea plus de dommages qu’en ayant échangé de long duel d’artillerie. L’implosion du réacteur du croiseur léger impérial embrasa son ennemi dans une débauche de lumière et de feu. Les coursives s’embrasèrent les unes après les autres quand son oxygène lui aussi prit feu sous la chaleur accablante.

Dans une explosion cataclysmique, quinze milles âmes impériales succombèrent ensemble. Disparaissant avec leur navire dans la lumière et la chaleur d’un soleil unique. Autant d’Orks moururent aussi, mais ce n’était qu’une goutte d’eau dans un océan de peaux vertes. Le croiseur Ork en feu, brisé, blessé mais toujours en état de combattre continua sa route comme si de rien n’était, croisant son homologue avec qui ils avaient réussi à couler le Dauntless. Le navire Ork blessé, n’avait pas la vitesse de son frère jumeaux, ses propulseurs eux aussi endommagés par l’attaque suicide des impériaux et l’explosion du navire. Pourtant ils se dirigeaient tous les deux vers leur cible. Le Revenant, entrain de défendre chèrement sa vie dans un duel de canonnade à courte portée qu’il était entrain de perdre.

 

Les secousses à bord du Revenant n’arrêtaient pas. Tantôt c’étaient les batteries d’artillerie qui tonnaient jusque sur la passerelle, tantôt c’était les tirs ennemis qui faisaient trembler l’ensemble du navire. Les volets blindés avaient été fermés, alors que les explosions, les ricochets et les tirs perdus emplissent la baie panoramique. Le capitaine Ström ne pouvait prendre le risque qu’un éclat ou un tir perdu ne vienne perforer la baie d’observation de la passerelle et aspire dans une dépressurisation mortelle tout son équipage. La situation était critique. Le navire impérial tentait de se débarrasser par ses tirs précis du croiseur Ork qui ne semblait pas vouloir en démordre alors que deux de ses semblables arrivaient pour l'appuyer. Là où le Revenant envoyait salve après salve avec une précision de métronome ses tirs puissants dans le blindage du croiseur, les Orks, dans leur style propre, tiraient avec toutes leurs armes, sans réelle cohérence, dans la direction de son ennemi, espérant le toucher par son volume de tir.

Loin de là, le convoi marchand filait droit vers leur objectif de largage planétaire. Il recevait quelques tirs sporadiques, mais il avait bientôt atteint la sécurité relative de la ligne de défense impériale au dessus du pôle de la planète qui tenait encore. Pour le Revenant c’était moins sûr. Il se retrouverait bientôt débordé. Un tout jeune officier de la passerelle, que Ström pensait n’avoir jamais encore vu, sûrement un remplaçant d’un ancien matelot mort pendant les échanges de tirs, se retourna vivement vers son capitaine :

-Boucliers en ligne !

Ström souri pour lui-même dans son éternel nuage de fumée de cigalho. Enfin, les affaires reprennent.

-Moteurs pleine puissance, préparez vous à une passe de canonnade dans la propulsion du croiseur, et virage serré vers la planète ! Demande d’assistance à tout navire de guerre.

 

Enfin, la bulle protectrice d’un bleu clair et énergétique recommençait à luire alors que les tirs ennemis s’écrasaient dessus dans des champignons de destructions d’une intense fureur. Le Revenant rendait coup pour coup. On aurait dit un pugilat en bonne et due forme. Une bagarre de rue où chaque opposant frappait l’autre sans discontinuer jusqu’à ce que l’un ou l’autre ne tombe, mort. Le navire Astartes prit par surprise, sur ordre de son commandant, un virage serré sur son tribord. Il rompit le contact quand ses rétrofusées bâbord entrèrent en action pour l’aider à manœuvrer. La tactique était ingénieuse, et audacieuse. Ström paria la réussite de son plan sur deux facteurs clefs. La manœuvrabilité de son navire et le manque d’agilité de ses ennemis.

Le Revenant vira de bord aussi vite qu’un éclair. Les coques des navires se frôlèrent alors qu’il passait sur la poupe du croiseur Ork lancé sur sa trajectoire, n’ayant pas réagit à la manœuvre de son ennemi. Sa bordée d’artillerie manqua complètement le croiseur d’attaque lourd, se perdant dans l’espace alors que l’équipage du Revenant avait attendu pour libérer la fureur de leurs armes.

Même le canon de bombardement avait pivoté à cent quatre vingt degré, vers bâbord pour anticiper le changement de bord du navire. Toutes les armes étaient chargées, et braquées vers l’arrière du croiseur Ork qui commençait à s’éloigner, toujours prit dans son inertie à cause de sa masse et de sa vitesse.

 

Des étincelles tombaient du plafond et la coque grinçait dangereusement, mais Ström savait qu’il pouvait demander encore un peu plus à son antique navire. Quand les runes de collimateurs de tir passèrent au vert, il donna son ordre, qu’il hurla, pour libérer toute la tension accumulée et sa frustration depuis le début de cette campagne :


-Tous les affûts, Feu à volonté !


Les quatre macros canons bâbord, le canon de bombardement, ainsi que chaque tourelle, chaque lance missile de défense rapprochés du navire ouvrirent le feu simultanément. On aurait dit que le jour se levait sur le flanc gauche du Revenant alors que la nuit noire de l’espace profond menaçait de l’engloutir.

 



Les tirs n’avaient pas besoin d’être précis. Tous firent mouche dans une débauche d’explosions, de shrapnels et de feu purificateur. Les tourelles laser légère dardait les propulseurs arrière du croiseur Ork avec facilité, envoyant volée après volée de rayons rubis contre la coque ennemie qui fondait et se craquelait. Les boucliers ne tinrent pas longtemps alors que le Revenant expédia une seconde salve de pièces d’artillerie à bout portant.

Ce furent les boucliers du croiseur Astartes qui brillèrent quand les éclats provenant des tirs à si courte portée venaient s’écraser contre les boucliers Void. Quelque chose céda dans le navire ennemi, et une de ses tuyères principales de propulsion sembla se détacher. Un feu gras et étrange semblait consumer les quartiers arrière, alors que les explosions secondaires gagnaient du terrain sur son blindage arrière.

Balafré, mutilé, le navire Ork entama un demi-tour pour poursuivre celui qui venait de se jouer de lui, alors qu’il s’éloignait déjà, moteurs hurlants, vers ses lignes alliées.

 

L’alimentation automatique par bande de munition de la tourelle tertiaire trente-sept A quarante-deux étaient hors service. Un tir ennemi chanceux avait sectionné deux ponts plus loin un câble d’alimentation qui aurait dû lui fournir l’énergie nécessaire pour le tir. Les Magos et l’équipage avaient réussi à raccorder l’alimentions sur une autre partie du navire et pour l’instant cela semblait tenir. Ce n’était que des réparations de fortune, et une halte en dehors des combats serait la bienvenue, mais pour l’instant rien ne semblait prédire cela. Les coursives tremblaient alors que les armes principales des ponts d’artillerie se vidaient à un rythme effréné. Le vacarme des obus ramenés par chaîne automatique depuis les cales devenait dur à supporter pour les tympans des nouveaux matelots.

L’alimentation de la tourelle tertiaire quant à elle était devenue critique. L’arme montée, et son servitor enchâssé dedans depuis presque cinquante ans, allait finir par consommer le peu de munitions qui restaient dans le chargeur automatique dysfonctionnel. Le serf du sergent Brüner avait été réquisitionné depuis maintenant une heure, alors qu’il passait par là pour tenter d’aider les équipes incendies, pour faire partie des chariots de ravitaillement de la tourelle. Si le rechargement ne se faisait pas automatiquement alors les hommes à la force de leurs bras le ferait.

Il en était à son quinzième aller-retour depuis le monte-charge situé à cinquante mètres de là. Les caisses de bande de bolts arrivaient par chariots roulants et chaque homme devait le pousser jusqu’à l’affût de l’arme. Là, une autre équipe était mandaté pour ouvrir les boîtes de munitions et glisser les bandes dans l’arme qui continuait de tirer à un rythme infernal.

Le chariot que transportait le serf était lourd et malhabile. Plusieurs fois il avait faillit le renverser lui et son contenu. Il avait même percuté un mur, laissant une affreuse marque de peinture dessus. Il se maudit pour sa faute, se jurant de réparer ses torts causés avant la fin de tout ceci. La roue centrale de son chariot de transport glissait sur les douilles de laiton que crachait la tourelle automatique de défense sur le sol de pierre sombre qu’éclairaient des lumiglobes tremblotant, alors qu’il s’en approchait pour la seizième fois consécutive. L’évacuation en douilles vide semblait elle aussi endommagée et une équipe d’esclaves au service du chapitre, enlevait à la pelle des sceaux et des sceaux de cartouches tirées, encore fumantes pour les évacuer et les recycler, plus loin dans les cales du Revenant.

Le serf arriva à l’arme et un contremaître l’oreille rivée sur un casque vox audio relié à un poste portatif de communication hurla à l’assemblée :


-Halte au tir !


Le vacarme se calma. La tourelle de défense se tue quand son opérateur lobotomisé reçu l’ordre de cesser le feu. Le serf reposa les poignets de son chariot de munitions, espérant souffler un coup. Son habit trempé de sueur lui collait à la peau.

-Quesque tu attends toi ? Une invitation de l’Empereur en personne ? Continuez le rechargement, préparez vous au prochain ordre de tir !

Sans attendre le serf se saisir des poignets de son chariot de munitions déjà vide et commença le chemin inverse vers le monte-charge plus loin derrière. Une file de serf avec eux aussi leurs chariots commençaient à se former derrière lui. Il inspira longuement, en espérant que chaque seconde passée ne les rapprocherait pas tous de l’enfer de la damnation éternelle. Le son des canons des ponts d’artillerie répondit à ses inquiétudes.

 

-Tir en approche ! Hurla un officier chargé des auspex.


Le navire trembla une nouvelle fois. Cette fois l’impact était bien plus prêt de la passerelle que tous les autres durant les brefs échanges de canonnades à courte portée. Cette fois les Orks poursuivaient le Revenant. Ils le talonnaient, alors qu’ils étaient plus massifs, plus lourd et mieux protégés. Mais le navire Astartes réussissaient à maintenir l’écart alors que les tirs continuaient de pleuvoir sur et autour de lui. L’armement de proue du croiseur Ork le plus proche enchainait les tirs de canons de bombardement ou ce qui s’en rapprochait le plus. Les explosions venaient percuter les boucliers arrière du croiseur Astartes lancé à pleine vitesse.


-Transférez toute l’énergie aux boucliers arrière, moteurs en avant toute !

-Capitaine, nos moteurs sont déjà en surchauffe, nous…

-Envoyez-y tout notre liquide de refroidissement, c’est un ordre. Ordonna Ström tout en martelant l’accoudoir de son trône de commandement.

L’armement du Revenant n’avait plus en solution de tir les navires qui le poursuivaient. L’angle mort de son armement comprenait toute poupe sur un angle de presque cent quatre vingt degrés. Pour l’instant les boucliers tenaient bon et les moteurs aussi. Si l’un des deux lâchait alors les ennuis ne feraient que commencer.

-Message entrant du convoi capitaine. ‘’Commençons notre largage planétaire sous le feu ennemi, merci capitaine. L’Empereur vous garde. ‘’

 








Il faisait noir. L’atmosphère était étouffante. Seuls quelques lumières de secours rouges projetaient des ombres fantomatiques sur les parois d’acier du compartiment passager de la navette. L’odeur de la sueur et de la peur des hommes dedans commençait à devenir insupportable. Le caporal ferma les yeux et récit à voix basse dans la cacophonie ambiante une ville prière que sa mère lui avait apprise.

Je place ma foi en toi, je puise ma force en toi.


-Cinq secondes messieurs ! Rappelez-vous votre entraînement ! Le lieutenant devait hurler pour couvrir le vacarme du bruit des moteurs qui montaient en régime et des explosions distantes qui faisaient trembler la navette. Le caporal ouvrit les yeux, mais il le regretta aussitôt. Les attaches magnétiques qui maintenaient la navette de débarquement à bord du navire de transport sur lequel ils avaient attendu durant presque deux semaines dans l’espace autour de Gorst, relâchèrent leurs emprises. La gravité de la planète en dessous fit le reste.


Le caporal n’avait jamais ressenti ça. C’était comme si son estomac voulait ressortir par sa bouche. Une boule dans sa gorge se forma alors que la chute libre de plus de deux cents kilomètres commençait. Malgré les avertissements durant son instruction et juste avant le largage, la sensation fut horrible et brutale. La compagnie C au grand complet était dans cette navette qui fonçait vers la surface où des Orks les y attendaient. S’ils survivaient à la descente.

Quelques hommes hurlèrent alors que la sensation de chute libre non contrôlée persistait. On n’arrivait pas à dire si c’était des cris de peur ou d’excitation dans le brouhaha général d’une rentrée atmosphérique. S'en était trop. Plus loin sur la rangée, un soldat vomi, rendant l’intégralité de son repas consommé il y avait quelques heures sur ses bottes et celles de ses voisins. Les G encaissés par les corps ne permettaient pas au caporal de ne bouger plus que sa tête de droite à gauche pour regarder ce qu’il se passait. Les hommes avaient peur. Ils venaient de quitter un enfer pour un autre plus réel. Ils fonçaient vers le danger. Personne sain d’esprit n’aurait fait ça de son plein gré. Pourtant ils étaient des soldats.

Ne perds pas ton arme, mon gars. Se dit pour lui-même le caporal alors qu’il serrait plus fort son fusil laser accrocher à son gilet de combat par sa sangle. Comme si son arme aurait pu le protéger pendant une descente atmosphérique en plein territoire ennemi. Les harnais qui le maintenaient en place sur son fauteuil de transport lui comprimaient la respiration. Le caporal respirait fort par petites inspirations. Son cœur menaçait de sortir de sa poitrine. Ses tempes lui faisaient mal.


-J’aurais dû m’engager dans la marine ! Lança un soldat du troisième peloton, plus loin sur la droite du caporal.


Le trait d’humour fit rire tout ceux qui n’étaient pas tétanisé de peur par le débarquement mouvementé. Mais les rires furent de courte durée quand la voix du pilote résonna dans la cabine de transport :


-Tirs ennemi en approche. Nous nous poserons sous le feu. Accrochez-vous.

-Tu veux qu’on s’accroche à quoi, imbécile ? Hurla en retour le même soldat qui avait lancé plus tôt sa blague. Cette fois le trait d’esprit n’eut pas le résultat sur l’assemblée.

Les tirs perforèrent la cabine dans des débauches d’étincelles et de shrapnels. Le soldat du troisième peloton avec la langue bien pendue reçu la première rafale d’armes anti aérienne. Harnaché sur son siège il fut pulvérisé. Touché à trois endroits différents, son corps se contorsionna sous le déluge de projectiles qui venait de le tuer, lui et deux de ses camarades. Des explosions firent trembler la cabine. Si fort qu’un homme se retrouva en dehors de son siège et n’arrivait plus à se remettre debout. Le caporal tendit la main, qu’il réussit à saisir. Mais une seconde explosion les secoua si fort que sa poigne ne put le retenir. L’homme disparu en un instant, envoyé contre un mur comme un fétus de paille. Le bruit de sa colonne vertébrale brisée arriva jusqu’aux oreilles du caporal. Les cris de peur et l’odeur d’urine commencèrent à monter alors que les tirs performants venant du sol continuaient de tambouriner la carlingue, et hacher menu les hommes dedans. C’était un abattoir en plein ciel.

 





-Nous devons ralentir l’allure capitaine. Nos tuyères menacent d’exploser !

Ström étouffa un juron qui aurait fait pâlir une none. Et approuva la décision. Les boucliers faiblissaient alors que sur ses arrières se pressaient trois croiseurs Ork bien déterminés à pulvériser ce croiseur Astartes qui leur avait fait autant de tort. Les tirs continuaient de pleuvoir. La densité prévalait sur leur précision. Mais le Revenant commençait déjà à ralentir. L’écart se réduisait de minute en minute.

-Des signaux contradictoires, droit devant nous capitaine. Je ne comprends les données des auspex.

-Ouvrez les volets blindés. Ce fut les premiers mots que prononça le sergent Brüner depuis maintenant plusieurs heures.


Les matelots réagirent aussitôt, et le vide spatial les accueillit avec en toile de fond Gorst et sa bataille spatiale toujours en cours. La planète semblait si loin, et pourtant si proche. D’ici on pouvait voir les explosions titanesques mais qui pourtant n’étaient que des petites lueurs éphémères autour de la planète. Les navires les plus imposants ressortaient du paysage alors qu’ils déversaient leurs tirs, ils semblaient s’illuminer. Le sergent Brüner toujours les bras croisés sur le torse le remarqua en premier, puis tout le monde le vit.

Lancé à pleine vitesse, toutes lumières éteintes. Sa proue blindée, décorée d’un immense aigle bicéphale en or et argent pur venait accrocher la lumière du soleil distant alors que le navire de classe Gothic arrivait en sens inverse de celui du Revenant.


-Le Pride of the Foe! Hurla quelqu’un enthousiaste.


C’était bien lui. Il croisa à quelques centaines de mètres tout au plus le Revenant qui allait dans l’autre sens, vers la planète attaquée. A peine eut-il dépassé le croiseur qu’il entama un virage si serré qu’il frôla les flammes de poussée des réacteurs du Revenant. Il ouvrit le feu de toutes ses armes de son tribord alors qu’il mettait son imposante masse, presque deux fois plus gros que le croiseur Astartes, entre les tirs en approche et son allié. Ses batteries laser lourdes jumelées ouvrirent le feu à l’unisson, expédiant des traits d’énergie brute d’un bleu profond qui aurait rendu n’importe qui aveugle s’ils les avaient regardés sans les filtres visuels de la baie d’observation panoramique. D’une seule salve puissante il venait de mettre a bas le navire Ork qui poursuivait son allié. Les explosions suites aux tirs de lances ardentes fleurirent à la surface et à l’intérieur du navire ennemi.


-J’ai bien cru vous apercevoir capitaine Ström.

Ils connaissaient cette voix. Elle leur était familière.

-Et sur ma vie, nous avons besoin de vous dans ces moments sombres. Je ne vous abandonnerais pas temps que je vivrais.

-Et nous ne vous abandonnerons pas, lieutenant Mara. Répondit Brüner alors que les deux navires faisaient cap dans la même direction, vers l’orbite de Gorst et vers les lignes alliées, où le débarquement orbital se poursuivait sous les tirs de l’immense flotte Ork qui tentait de forcer le passage.

 







Le caporal ne pensait à une chose et qu’une seule. Le plancher juste devant lui venait d’exploser. Un obus anti aérien tiré par une batterie qui devait cracher vers le ciel un torrent d’obus à détection de proximité venait d’arracher le sol juste devant lui. L’explosion avait presque réduit en bouillie cinq soldats attachés dans leurs harnais de sécurité pour la descente. Le caporal pouvait voir le ciel et sentir l’air chaud de la descente lui frôler le visage.  Si l’air pouvait entrer dans la cabine de passagers, et qu’il n’y avait aucune dépressurisation alors ils étaient dans l’atmosphère et assez bas pour pouvoir respirer sans masque. Ses connaissances en physique s’arrêtaient là. Le caporal respirait avec peine. Il sentait du sang lui couler sur le visage et ce n’était pas le sien. L’homme à sa droite, dont il ignorait le nom, avait la tête contre son torse, brinquebalante. On aurait dit qu’il dormait, mais un trait de lumière venant de l’extérieur par un trou dans son dos, en dit tout autant. Une balle perforante l’avait fauché en pleine descente. Et le massacre continuait.

Quelque chose attira son regard à travers le trou dans le plancher. Une navette. Le même modèle que celle dans lequel il se trouvait. Une autre compagnie, peu être d’un autre régiment que le sien. Elle ne semblait pas endommagée ni avoir subit autant de dommage que la sienne. Il voyait clairement la cabine de pilotage avec ses vitres fumées pour compenser les éclats lumineux du soleil au-dessus de la couche nuageuse et ceux des tirs qui continuaient de pleuvoir sur eux depuis le sol. Tout à coup, la navette fut pulvérisée. Un tir chanceux la toucha juste sous une aile, dans un réservoir de prométhium à moitié plein. Le carburant s’enflamma. La cabine contenant les passagers suivit de peu. Dedans ce devait être un véritable four. Les hommes encore vivants cuisaient sur pied alors que la navette plongeait vers le sol, une aile en moins. Si la fournaise ne les tuait pas, l’impact au sol s’en chargerait.


-Deux minutes. Récita une voix mécanique.

Laissez-moi arriver au sol, par pitié. Que je meurs dignement. Implora le caporal une dernière fois, alors que le vacarme des réacteurs commençait à diminuer. Ce fut le lieutenant, toujours vivant au milieu de ses hommes terrifiés et de ceux morts dans leurs harnais qui prit la parole :


-Nous sommes la première vague. Cela veut dire plus de peaux vertes à tuer, et plus de travail pour nous. Nous allons nous poser en territoire ennemi. Quoi qu’il arrive, avancez. Si vous ne bougez pas vous êtes mort. Bonne chance messieurs, que l’Empereur vous garde.

-Une minute. Ponctua la voix mécanique.


Le caporal vérifia une dernière fois son équipement. Tout était paré. Il ferma les yeux, et inspira une dernière goulée d’air. Le choc fut monumental. Il aurait pensé que sa navette de transport venait de s’écraser au sol. Il ouvrit les yeux et comprit qu’il était encore vivant. Quelques hommes gémirent dans la pénombre, mais ils étaient au sol. Les harnais se soulevèrent, libérant les corps vivants, mais aussi ceux des morts qui tombèrent au sol. Les soldats vivants durent enjamber les corps de leurs camarades alors qu’ils marchaient et essayaient de ne pas tomber dans les viscères et les immondices des corps broyés.


-On y est messieurs. On se retrouve de l’autre côté.


La fusillade résonnait déjà de l’autre côté de la rampe d’accès toujours verrouillée. Soudain les boulons soudés sautèrent les uns après les autres dans des détonations contenues. Sans prévenir la rampe tomba au sol vers l’extérieur. Les soldats s’élancèrent en hurlant, armes à la main vers les tirs de mitrailleuses qui les accueillirent alors qu’ils posaient leurs bottes au sol. La compagnie C ou ce qu’il en restait s’élança à découvert vers les positions Ork fortifiées qui déversaient un feu écrasant vers eux alors que des navettes continuaient de se poser dans les environs et d’autres s’écrasaient au sol à l’horizon alors qu’un groupe de valkyries passèrent, tous moteurs hurlant au-dessus de leurs têtes. Le caporal chargea droit devant, son fusil laser pointer devant lui, alors que ses camarades tombaient les uns après les autres tours de lui. Il chargea, vers sa fin ou vers la gloire. Peut-être même les deux.

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