Black Templar Tome II

Chapitre 22 : Nosce Te Ipsum

6539 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 16/07/2021 09:34

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Il les senti avec même de les voir. Le vent chargé de poussière charriait les odeurs acres et rances de la mort. Le sang séché et coagulé sur les lames des Drukhari, se mêlaient à la putréfaction des cadavres accrochés aux arbres morts et secs. D’un simple ordre le néophyte fit s’ébrouer la ligne de défense sur les murailles. Les hommes et les femmes ordinaires, armés de fusils lasers, accompagnaient à la guerre les néophytes du chapitre nouvellement recrutés.

Dans les premiers temps du début des raids sur la planète de recrutement, les populations fuirent les steppes arides du continent, ne pouvant les défendre contre un ennemi supérieur en nombre et en technologie. Elles entreprirent un exode total vers des contrées mieux défendable. Sur la route les massacres fleurirent. Les Eldars réduisirent en esclavage ceux qu’ils n’avaient pas massacrés tout simplement. Ce fut un génocide total d’une population entière. Quelques caravanes en fuite réussirent à trouver par hasard la forteresse des Black Templars, qui, respectant leurs serments éternels les accueillirent. Ils leur offrirent un toit, un abri mais en contre parti ceux en âges de se battre viendraient grossir les rangs de leurs recrues.

Quelqu’un appela le néophyte par son nom de batême, celui qu’il avait reçu lors de son entraiment intensif pour rejoindre les rangs des Anges, il y de ça quelques années à peine. Les vestiges de son ancien nom commençaient à disparaitre. Le néophyte sorti de sa torpeur quand son meilleur tireur, posté au sommet du donjon l’appela de nouveau :


-Frère Thomaas ? Je vois quelque chose à l’orée de la forêt. Ils approchent.

-Donnes leur une cuisante idée de la souffrance mon frère. Ordonna-t-il sur le vox général.

 

               

Le bolt parti, comme la foudre qui tombait sur les plaines. La détonation creva le silence tel un poignard, résonnant et se répercutant vers l’horizon. Le tir était facile malgré la distance qui le séparait de sa cible. Il avait ajusté son tir en conséquence. Le fusil de précision qu’il avait trouvé dans les arsenaux sous la forteresse, était devenu depuis les derniers mois son compagnon de fortune. Il avait reçu un enseignement sur chaque arme disponible de l’arsenal des Astartes, mais les bolters lourds et autres armes spéciales n’avaient pas la même grâce à ses yeux. Comme lui avait ordonné l’autre néophyte qui commandait le reste des survivants, il avait visé une partie bien précise de l’anatomie du chef Eldar noir qui les narguait depuis l’orée de la forêt morte.

La cible tomba au sol, presque six cent mètres plus loin. La partie inférieure de son anatomie avait disparue. Il se tenait les parties intimes de ses mains gantées et armurées, en hurlant à la lune de douleur. C’était un faible prix à payer pour faire souffrir celui qui depuis trois mois les harcelait et avait empalé autant de citoyens impériaux aux branches des hauts arbres. Sa bande de guerre hurla avec lu, se nourrissant de la douleur de leur chef autant qu’ils partageaient sa détresse. La forme floue se tordait de douleur au sol, à cette distance on n’aurait su dire s’il appréciait ce traitement ou se contorsionnait sous la cuisante douleur de son anatomie déchirée.


Le sniper néophyte rechargea son arme et jugea qu’il allait laisser sa victime encore souffrir, ne voulant pas abréger ses souffrances trop tôt. Il en était sûr, son tir aurait des répercussions cuisantes pour lui et ses frères. La bande de guerre Drukhari ne laisserait pas cet affront impuni, et attaquerait prochainement avec une hargne dédoublée. Mais c’était le prix à payer. Il y a de ça deux semaines, le sniper néophyte avait vu, par cette même lunette de visée ce seigneur de guerre si hautain et cruel, trainer par les cheveux un homme, dans la force de l’âge hors de la forêt. Et il l’égorgea, laissant ses guerriers exultés autour du cadavre encore chaud. Ce spectacle aurait dû saper le moral des défenseurs, mais il le renforça. Pourtant le sniper reconnu l’homme agonisant, du sang jaillissant à gros bouillon de sa gorge tranchée nette, presque décapité. Il le reconnaissait, parce que l’endoctrinement qu’il subissait depuis des années à la forteresse n’avait pas encore effacé sa mémoire de jeune homme quand il était arrivé. Il s’agissait de son père. Génétique. Celui qui l’avait élevé, celui qui l’avait protégé pendant toutes ces années. Mais aujourd’hui il était vengé. Le cœur du néophyte était apaisé pendant qu’il continuait de scruter la plaine dans la lunette de son viseur. Il savait que son action n’aurait jamais été approuvée par le chapelain Hebert. Il se demanda même ce qu’il en aurait pensé, mais il était mort aujourd’hui et ils étaient seuls, sans guide, sans aucun initié pour guider leurs actions. Livrés à eux-mêmes ils faisaient ce qu’ils jugeaient nécessaire. Le sniper se renfrogna quand les corps de guerre résonnèrent et le ronronnement caractéristique des transports antigrav Eldar résonnèrent. En effet, leurs premières années au sein du chapitre étaient bien loin derrière eux. Voilà trois ans qu’ils vivaient tous ici, dans cette forteresse, et ils n’auraient jamais pensé mourir là où ils renaquirent tous.

 

 

Thomaas fut le premier à voir, il y avait presque trois ans, de ses yeux, le chapelain Hebert qui les attendaient, lui et ses hommes, aussi postés fièrement que des statues légendaires au centre de la place de la forteresse balayée par les vents de poussières. Ils attendaient patiemment que les aspirants pénètrent dans la forteresse, ses portes grandes ouvertes. Les jeunes hommes, d’abord hésitant emboitèrent le pas à celui qui allait les mener à la bataille des années après. Les aspirants furent mis en rang, et présentés aux Astartes. Thomaas que l’un était le chef, celui au casque à tête de mort, un autre à l’épaulière blanche ornée d’une croix alambiquée était surement le guérisseur du groupe ou ce qui s’en rapprochait le plus. Un autre avec une paire de bras supplémentaires, mais étranges et mécaniques qui dépassaient de son dos semblaient s’occuper des machines tout aussi étranges que Thomaas ne connaissait pas. Enfin deux guerriers semblant tout aussi brutaux venaient former le groupe.


Le jeune aspirant ne comprenait pas tout ce qui se passait autour lui. Ils avaient été tous déshabillés, et scrutés par les géants en armure. Ils devaient dépasser de plus d’un mètre même le plus grands des aspirants et engoncés dans leurs armures, ils semblaient immortels et agressifs. Une croix noire de jais sur un fond blanc impeccable venait décorer chacune de leurs épaulières droites. Les ornements et les parchemins voletaient aux vents, accrochés par des sceaux de cires rouges à leurs armures gigantesques.

Beaucoup furent rejetés durant les premières heures du processus. Thomaas ne sût jamais pourquoi, mais lui et l’autre aspirant qui lui avait sauvé la vie devant les remparts avaient passés les premiers tests. Les autres étaient renvoyés vers les terres désolées, la mine basse, marquée du sceau de la faiblesse et de l’échec. C’est ainsi que les véritables épreuves commencèrent.

Ils étaient logés dans les entrailles humides et inhospitalières de la forteresse. Les lits de camps étaient miteux, mal entretenu, si bien que les aspirants préféraient dormir à même le sol dans l’unique couverture tout aussi en état de décomposition que le reste du mobilier qui les entouraient. La pierre était dure et froide, mais rassurante, car quand ils ne dormaient pas quelques heures, toujours surveillés par un des géants, ils couraient, se battaient, ou enchainaient les entrainements physiques intensif. Beaucoup encore partirent.

Certains renonçaient, d’autres s’évanouissaient, d’épuisement ou de faim. Les rations étaient chiches et infecte. Le manque de sommeil était un problème lui aussi. Ils savaient tous qu’ils étaient observés et jugés à chaque moment, et aucun ne voulait être le prochain à être éliminé. Thomaas, accompagné de son fidèle binôme avait échangé une promesse discrètement avec lui, pendant le changement de quart d’un des géants :


-Je n’abandonne pas, temps que tu n’abandonnes pas toi non plus. Lui lança-t-il, moqueur.

L’autre essayait de panser ses plaies ouvertes à ses mains, après avoir tracté une charge lourde sur plusieurs centaines de mètres à l’aide d’une corde rêche.

-J’allais te dire la même chose petit frère.


A peine eut-il prononcé ces mots qu’un des géants hurla aux aspirants de se taire et de continuer leurs activités. Son cri puissant et guttural rappela le silence en un instant à la troupe toujours moins nombreuse de jours en jours. Ils ne parlèrent plus depuis ce jour à moins d’y être invité.

Puis vint le jour où les géants ouvrirent de nouveau les portes de la forteresse. Thomaas ne sût pas depuis combien de temps ils y étaient tous enfermé, mais quand les géants en armure les poussèrent à l’extérieur par la force, les cadavres sur la plaine qu’ils trouvèrent n’étaient plus que des amas d’os blanchis. Les aspirants furent jetés presque nu, dans leurs bures de tissu dehors, sans arme, ni vivre et les Anges ne leur donnèrent aucune explication. Ils n’étaient plus que vingt sur les cinquante du départ. Et beaucoup étaient épuisés, voir en état de mal nutrition. Les portes se refermèrent, et les aspirants désemparés furent abandonnés aux éléments.

Ils étaient seuls, et donc purent commencer à parler entre eux. Certains qui n’avaient pas parlé depuis plusieurs mois eurent du mal à utiliser leurs langues et leurs cordes vocales. Leurs bouches étaient sèches, et ils n’avaient aucune eau ni nourriture. Ils étaient aux pieds des remparts, de nouveau, sans consigne, ni maitre. Des clans se formèrent vite. Certains disaient qu’ils avaient tous échoués et qu’ils devaient retourner dans leurs tribus pour espérer survivre, d’autre parlaient de se cacher dans la forêt le temps que les portes rouvrent. Thomaas écouta chacun des chefs de ses clans qui parlaient aux autres et essayaient de rameuter un maximum de confrère dans leurs groupes.


-Et toi tu en penses quoi petit frère ?

-Je dis qu’on reste devant les portes. Je n’abandonne pas. J’ai trop donné pour être ici que je ne retournerais jamais vers ma tribu. Plutôt mourir. Répondit Thomaas à son ami.

-Je reste avec toi alors.


Les groupes se séparèrent avec une dispute qui dura des heures pour savoir quoi faire. Certains ayant peur de la faim ou de la soif, s’enfuirent vers la forêt espérant trouver de quoi survivre. Leurs cris de douleurs et le rugissement des prédateurs durant la nuit d’après glaça le sang de ceux qui étaient restés.

Au bout du troisième jour, Thomaas, ayant des vertiges et hauts le cœur à cause de la soif et de la faim, prit les devants pour mener le petit groupe de seize aspirants. Il essaya de les haranguer comme il pouvait, parlant de place acquise, de souffrance collective et de devoir envers leurs ancêtres. Il envoya quelques aspirants dépouiller les cadavres restés sur la plaine. Ils arrivèrent temps bien que mal à confectionner une corde avec les vêtements des morts, avec au bout un tibia d’un jeune garçon comme prise à lancer et bloquer sur le haut des murailles. Si les portes restaient fermées, alors ils rentreraient par la force.

Après de nombreuses tentatives, un des plus forts des garçons réussis à envoyer l’échelle de corde et la fixer au sommet, presque quinze mètres au-dessus du sol. Mais personne n’osa y monter ne premier.


-Moi j’irais, lança l’ami de Thomaas, poussant l’attroupement de devant lui. Si je ne vous fais pas signe dans cinq minutes, c’est que je suis mort et vous devriez peut-être partir loin d’ici.

-Je monte avec toi mon frère.


C’était la première fois que Thomaas appelait l’autre garçon son frère, et pourtant ils n’avaient aucun lien de parenté. Pourtant ils avaient tellement en commun. Ils avaient survécu à l’enfer ensemble, il le suivrait quoi qu’il arrive. Il ordonna aux autres de rester sur place, et d’attendre leur signal.

La montée fut dure et éprouvante, pourtant ils y arrivèrent. L’ascension était compliquée dut aux rafales de vent chargées de poussière qui venaient leur fouetter le visage, leur envoyer du sable dans les yeux et leur irriter les bronches. Ils arrivèrent à se hisser au sommet des remparts, pour y trouver le vide total. Il semblait que la forteresse n’avait jamais été habitée. Si cela avait été une épreuve, ils c’étaient attendu à être accueillit comme la première fois qu’ils avaient passé les portes désormais fermées. Mais rien.

Ils firent signe aux autres de monter à leur tour, pendant qu’ils dévalaient à deux les marches des remparts pour retourner dans la cour de terre battue. Toujours rien, rien que le silence qui fut soudainement interrompu par une paire de cris de garçon apeurés. La corde avait cédé pour les deux derniers qui firent une chute mortelle plus bas. Seuls quatorze enfants réussirent à pénétrer de nouveau dans la forteresse.

Thomaas était en tête du groupe de treize jeunes hommes, et progressait le plus discrètement possible. Quand soudain une forme immense, surement tapis pendant tout ce temps dans les ombres du donjon, émergea d’une bourrasque de poussière. Elle chargea droit sur le groupe. Thomaas s’interposa entre elle et le groupe, quand il reconnut l’un des géants, celui à tête de mort. Avant que l’impact du dos de sa main armurée ne lui fasse perdre conscience il n’entendit que :


-Félicitations, votre entrainement commence maintenant.


Puis la douleur et les ténèbres l’engloutirent tout entier.

 


Thomaas apprit peu après que c’est à ce moment précis qu’ils furent baptisés du nom qui les suivrait jusqu’à la fin de leurs vies au sein du chapitre des Black Templars. Son ami lui raconta qu’ils durent le transporter jusqu’à leurs baraquements, et que le géant en armure qui les avait accueillis leur avait expliquer ce en quoi consistait ce nouveau test. Les aspirants jetés hors des murs n’avaient en réalité que deux choix. Soit attendre aux pieds des murs en mourant de faim, soit escalader les remparts pour entrer dans la forteresse. Les Anges ne cherchaient en réalité que des guerriers obstinés, qui même devant l’échec ne renonçaient pas. Mais ceux qui avaient choisi la deuxième solution de s’introduire dans la forteresse par d’autres moyens étaient puni. Thomaas se souviendrait de cette correction encore longtemps. Son ami avait été lui aussi baptisé à la suite de leur tentative d’effraction, il ne répondait qu’au nom de Valdemar. Et il en était content. C’était le premier signe comme quoi ils étaient acceptés au sein des Anges même s’ils leur restaient encore beaucoup à faire pour y parvenir.

Du jour au lendemain leur quotidien s’améliora. Les rations de nourriture, quoi que toujours infecte augmentaient en quantité, et il leur était enfin autorisé à communiquer entre eux pendant les rares moments de repos qui leurs étaient donnés. Il leur fut aussi autorisé à améliorer les dortoirs qu’ils occupaient. Les jeunes aspirants réparaient donc les couchettes qui leur avaient été données avec les moyens du bord. Thomaas et son ami, regardaient avant de s’endormir dans des nuits courtes et mouvementées, les lits vides qui les entouraient. De la cinquantaine d’aspirants qui avait franchis les murs, moins de quinze restaient encore.

               


Les entrainements physiques se succédaient, mais aussi psychologique. A intervalles réguliers, les aspirants étaient enfermés dans des cages faites d’une matière que Thomaas et Valdemar n’avait jamais vu. Une fois enfermés, ils n’entendaient plus rien, et ne voyaient plus rien de ce qui les entouraient. Ils étaient plongés dans le noir et dans le silence le plus complet qu’ils ont connu au cours de leurs vies. Ils étaient privés de leurs sens, une véritable torture psychologique. Mais là où les aspirants pensèrent que c’était pour les punir, les parois des prisons dans lesquelles ils étaient enfermées s’illuminèrent dans des débauches d’images et de son à une vitesse presque épileptique.

Ils ressortaient épuisés, chancelant, haletant. Leurs yeux leurs brulaient, et leurs crânes les lançaient dans des piques de douleurs atroces dans le cerveau. Après ces séances, entrecoupées d’entrainements physiques aussi horrible qu’interminable, leurs sommeils étaient peuplés de cauchemars. Ils voyaient dans leurs songes les images de flashs lumineux qu’ils avaient été obligés de visionner pendant des heures. Certains aspirants se réveillaient en sueur, hurlant de peur, quand les cauchemars étaient trop intenses.

 

               

Thomaas comprit enfin pour quoi ils vivaient tous, tout cela. Quand l’Ange à tête de mort, le chapelain Manfred les attendit un jour, dans une salle d’entrainement, avec sur une pierre taillée dans un épais morceau de roche, dessus, posé, une arme qu’ils n’avaient jamais vue. Pourtant, tous la reconnurent. Un bolter.

L’entrainement et le conditionnement psycho active dans les cuves d’endoctrinement forcé avaient portés leurs fruits. Thomaas reconnut immédiatement l’arme, et même s’il ne l’avait jamais utilisé ou touché, il savait quoi faire pour l’armer et s’en servir. Était rentré dans son esprit de force presque tous les savoirs tactiques et techniques d’un Astartes pour combattre. Pourtant beaucoup de psycho endoctrinement restait aux aspirants à assimiler avant de réellement pouvoir utiliser ces savoirs.


C’est ainsi que quand le chapelain Manfred les jugea prêt pour les changements physiques qui les transformeraient en de véritable machine à tuer.

Thomaas revint à l’instant présent quand Valdemar lui donna une claque sur l’épaulière de son armure carapace aux couleurs des Black Templars. Il cligna des yeux, chassant ses souvenirs pas si lointains de son incorporation au sein du chapitre des plus illustres Anges de l’Empereur-Dieu. Il était de retour, parmi ses frères sur les remparts de la forteresse qu’il avait escaladés, lui et les aspirants, il y a trois ans. Pour Thomaas c’était il y avait une éternité. Il avait changé. Il était plus grand, bien plus grand qu’aucun homme qu’il n’avait jamais vu, et bien plus fort encore. Ils se sentaient tous fort, et prêt à combattre. Et il en était sûr, cela avait à voir avec ce qu’on lui avait fait dans les cryptes de la forteresse.

Ses souvenirs de cette période étaient confus. Seule la douleur encore palpable dans son corps, se ressentait. Thomaas en avait parlé avec son frère Valdemar. Ils en étaient arrivés à la même conclusion. On leur avait greffés d’autres organes, et leurs corps changeaient à vue d’œil. Leurs nuits de sommeil étaient ponctuées de cauchemars dû aux entrainements physiques qui continuaient tambour battant malgré les séquelles de la chirurgie, mais aussi les images du psycho endoctrinement dans les cuves sensorielles. Les cris de douleurs venaient percer les nuits dans leurs baraquements, et le lendemain, ils retournaient tous en enfer, ou ce qu’il s’en rapprochait le plus. 

 


Les Drukhari sortirent de la forêt comme une vague de goudron se répandant sur les rivages d’une île solitaire. Les cris de douleurs de leur archonte en train de se vider de son sang, la moitié de son anatomie pulvérisée, accompagnait les champs de guerre, les hurlements extatiques, anticipant le massacre à venir. Quand il vit tout ça, frère Thomaas, néophyte nouvellement entré dans les rangs des Black Templars, savait que c’était sa dernière bataille. Ils étaient trop nombreux, et eux trop peu. Une bande de guerre Drukhari entière se dressait devant eux. Et eux, n’étaient qu’une poignée. Quitte à mourir, il en amènerait autant qu’il pouvait avec lui dans la tombe. Il marchait le long des remparts, sur le chemin de ronde, occupés par les tireurs humains et néophytes de la forteresse. Il savait que s’ils faiblissaient, alors le reste de la maigre population qu’ils avaient jusque-là réussi à sauver, serait, elle aussi massacrée et réduite en esclavage.

Thomaas épaula son bolter. Il l’avait récupéré sans autorisation sur le cadavre d’un des initiés Black Templars après la charge dans la forêt. Là où était mort le chapelain Manfred et un de ses frères. Il savait qu’il aurait été châtié sévèrement pour l’emploi de cette arme bénie sans autorisation, mais plus personne n’était là pour le voir. Il se reprit, chassant cette idée séditieuse de son esprit en une seconde. Lui savait, et donc il appliquerait le règlement à la lettre. Il en allait de son devoir mais aussi de son honneur. S’il survivait, il observerait alors les châtiments de contritions d’usage pour son acte. S’il survivait, évidemment.

 

               

La plaine de poussière fût martelée par les bottes à pointes des Drukhari tandis qu’ils avalaient la distance qui les séparaient d’un massacre glorieux. Le tireur qu’avait posté Thomaas dans le donjon, ouvrit le feu une seule fois. Le tir vint percuter le menton d’une hideuse forme à l’allure féminie, même si aucun de ses traits ne reflétaient la tendresse ni la compassion. Sa tête fut séparée de son corps par l’impact avant que le bolt n’explose pour la réduire en esquilles d’os sanglantes. Le signal fût donné, et la ligne impériale ouvrit le feu. Les remparts furent baignés de lumières et de feux vengeurs. Les hommes ordinaires, de leurs armes laser, manquaient de précision, mais ils la compensaient avec un volume de tir ahurissant. La petite quinzaine de néophyte, placés à intervalle régulier sur la ligne de rempart, ouvraient le feu eux aussi de leurs armes nouvellement acquises. Leurs projectiles n’avaient rien de comparables aux lasers tirés. Les bolts explosèrent sur la lande désolée. Le massacre débuta.


-Cela va être grandiose, petit frère. Murmura Valdemar.

Sans y prêter attention, Thomaas en vidant son chargeur de trente bolts hurla à plein poumons, son cri se répercutant sur la pierre de la forteresse assaillit.

-Hommes de l’Empereur ! Tenez la ligne !


Les rugissements des armes lui répondirent, quand les Drukharis arrivèrent aux pieds des murs.

Thomaas tirait sans vraiment viser, par-dessus le parapet derrière il était protégé, vers le bas des murailles. Il tirait bolt après bolt vers le sol, fracassant aussi bien la pierre que les corps des assaillants qui s’agglutinaient en-dessous de lui. A la droite de Thomaas un lance flamme rugit, expédiant une langue de flamme vers le sol. Des cris inhumains de gorges fondues résonnèrent sur la plaine.

Le carnage était total. Pour l’instant les portes tenaient bon, mais leur manque d’armes lourdes était critique. Depuis que le système automatisé de défense de la forteresse avait été désactivé par une incursion Drukhari, en pleine nuit, leur volume de tir avait diminué grandement. Les Drukharis avaient attaqués juste avant l’aube, quand les sentinelles en faction étaient dans un demi sommeil, épuisées par des mois de combats et de fuite. Le périmètre était trop étendu, et leurs forces trop peu nombreuses. A l’aube ils ne retrouvèrent que des cadavres sans têtes, emportées comme des trophées, et leurs systèmes automatisés hors service. Ni Thomaas ni aucun de ses frères n’avaient les connaissances pour espérer le réparer ou le remettre en ligne. Seul le frère techmarine aurait eu les capacités pour le faire, mais il était mort, lui aussi, il y à deux mois, emportés dans les ombres par une cabale de sorcières hurlantes.

Ça y était, ils étaient passés. Thomaas l’entendait et le voyait. Des formes floues dues à leur vitesse, venaient de franchir le mur d’enceinte. Leur agilité et leur dextérité étaient leurs forces. Ils venaient de sauter par-dessus le parapet et atterrissaient dans la cour intérieure sans un bruit, presque avec élégance. Les tireurs qui continuaient de déverser un torrent de bolt et de laser vers l’extérieur furent attaqué par derrière. Thomaas avait prévu cette possibilité. D’un geste de la main il fit signe aux quelques escouades de conscrits et de volontaires qu’il avait placé en retrait dans la cour intérieur en cas de percée dans leurs murs.

Les soldats, par escouades d’une dizaine d’individus sortirent de leurs couverts, et chargèrent sans attendre, ceux qui venaient de pénétrer dans leur dernier refuge. Le massacre fut unilatéral. Les hommes et les femmes vêtus d’un simple gilet par balle et armé d’un fusil laser ne rivalisèrent pas une seule seconde. Quelques Drukharis tombèrent, mais le sang qui coula au sol était celui des Hommes de l’Imperium. Quelques néophytes menaient la charge et c’étaient peut-être les seuls capables de tenir tête à l’envahisseur.


Thomaas tout en rechargeant, risqua un œil vers l’intérieur de la cour. Ce qu’il vit ne le rassura pas sur la suite. Les femelles Drukharis ainsi que les mâles égorgeaient à mains nues les hommes blessés au sol. Certaines brandissaient fièrement les têtes arrachées des corps vers le soleil pâle comme des trophées immondes. Elles enfonçaient leurs visages dans les cous ensanglantés pour y boire le sang encore chaud qui s’échappait à gros bouillon. Thomaas vit un des néophytes résister longtemps contre au moins cinq ou six Drukharis, uniquement armé de son couteau, il tranchait, poignardait tout ce qui arrivait à sa portée.

Thomaas venait de recharger. Il trébuchait et écrasait au sol la multitude de douilles et de chargeurs vide sur tout le pourtour du chemin de ronde du mur de la forteresse. Il épaula son bolter et pressa la détente. Les Drukharis tombèrent comme des mouches, trop occupés à savourer leur victoire presque certaine, ils explosèrent dans des nuages de sang et d’os. Ce qui laissa le temps à son frère en contrebas pour contre attaquer, épaulé par une escouade presque complète d’hommes et de femmes. Ils formèrent un rocher de résistance, au milieu d’une mer de carnage.

Thomaas rapporta son attention sur l’extérieur des murs. Leur défense s’effritait de minutes en minutes. Mais temps que le mur tiendrait bon, ils auraient peut-être une chance de repousser cette attaque. A peine l’idée émergea dans son esprit, que depuis la forêt, trois silhouettes fantomatiques, effilées et armées jusqu’aux dents sortirent de leurs couverts pour foncer vers eux.

 

Thomaas les reconnut d’un rapide coup d’œil, comme chacun de ses frères encore en vie, après avoir passé autant de temps dans les cuves de psycho endoctrinement et d’entrainement. Des véhicules antigrav Drukhari. Valdemar, toujours à ses côtés, eut le même réflexe que lui. Ils levèrent ensemble leurs armes vers le véhicule de tête, qui fonçait sans un bruit au-dessus la plaine, droit sur eux. Son bolter et le pistolet bolter crachèrent ensemble leurs munitions qui tambourinèrent sur la silhouette sombre du véhicule. Thomaas voyait distinctement les impacts sur son blindage, et les étincelles de ses bolts fleurirent sur sa peau métallique et résistante. Leurs tirs combinés n’eurent aucun effet, à part peut-être celui de faire se désengager le pilote du véhicule de tête, mais les deux autres eurent tout le temps nécessaire pour manœuvrer. L’avant des véhicules s’illuminèrent quand leurs armes emmagasinèrent l’énergie nécessaire pour un tir à pleine puissance. Au lieu d’avoir comme s’attendait Thomaas, une lumière crue comme un soleil libéré, ce fut un éclair de nuit. L’exact opposé d’un rayon pur d’énergie. Les deux tirs touchèrent la forteresse avec précision et puissance, la pierre vola en éclat, les corps furent oblitérés.

 

Sa tête lui faisait mal, ses tympans sifflaient. Sa vision revint, et il ne découvrit que le chaos. Là, où sur gauche, quelques secondes à peine avant les tirs, se tenait fièrement le rempart de la forteresse, il ne restait plus rien. Le tir de lance venait d’emporter sans distinction, les corps, les barricades et la pierre renforcée vieille de plus de mille ans. Une brèche, aux contours rougeoyants de chaleur et de pierre fondue était ouverte. La forteresse était ouverte vers la plaine de poussière. Les rares escouades et frères sur et derrière cette partie du mur, furent soufflés comme des fétus de paille. Thomaas avait du mal à comptabiliser les pertes, mais elles étaient grandes. Sans attendre, les Drukharis aux pieds du murs s’y engouffrèrent, pénétrant sans résistance dans l’enceinte, rejoignant ceux qui massacraient déjà les défenseurs. Thomaas toujours au sol, se dégagea des débris fumants sur lui, pour se remettre debout. Valdemar de ses bras puissants l’aida, le portant presque.


-La porte principale est touchée elle aussi. Ils sont partout, petit frère.


Thomaas encaissa la nouvelle, tout en saisissant son bolter non loin pour se défendre. Les véhicules qui venaient de faire feu passèrent en rase motte au-dessus des sections du mur encore intacte pour y déverser leurs passagers assoiffés de sang et de combat. Les formes squelettiques et rapides tombèrent depuis les cieux pour venir achever les survivants qui peinaient à se réorganiser.


-Vas à la porte, prêt des frères avec toi, elle ne doit pas tomber !

-On se revoit à la fin, petit frère, lança Valdemar en partant en courant avec deux autres néophytes pour défendre la porte principale qui venait d’être éventrée.

Thomaas activa le micro vox dans son casque pour donner ses ordres.

-Mettez le bolter lourd en batterie ! Ne les laissez pas passer par la brèche sous aucun prétexte !


Il avait laissé la seule arme lourde de la forteresse encore opérationnelle en réserve. Quand il avait pris cette décision des voix c’étaient élevé contre cette décision. Certains néophytes avaient affirmé qu’ils en auraient besoin sur les murs, et pas en retrait. Mais Thomaas avait gardé ses positions, en affirmant que les murs tomberaient quoi qu’il arrive et que quand cela arriverait, ils en auraient tous besoin, pour un dernier carré. Il les harangua à l’idée de réserver un carnage grandiose à ses frères avant de tous mourir. Les dissentions moururent à cette idée qui plut à tout le monde.

 

Le bolter lourd était opéré par trois hommes. L’un tirait avec l’arme, l’autre amenait les boites de munitions cachées plus loin et l’autre rechargeait l’énorme affût quand il arrivait à court de bande de bolts de gros calibres. Un néophyte commandait l’’emplacement, guidant les tirs et donnant ses ordres. Quand la brèche dans le mur, fut ouverte, quelques précieuses secondes furent nécessaires pour réorienter l’arme lourde vers la brèche. Le bolter lourd, posé sur trépied, à couvert derrière un mur de sac de sable était en retrait, mais aucun des défenseurs n’aurait pu deviner quelle section de la forteresse tomberait en première.

Les Drukharis foncèrent dans la brèche, hurlant et glapissant de plaisir, anticipant le massacre à venir. Les premiers passèrent le mur de poussières des décombres sans résistance, plongeant dans la mêlée générale. Soudain, le bolter lourd prit vie. La boîte d’une centaine de bolts explosifs de gros calibres fût vidée en trois énormes rafales. La brèche à défaut d’être comblée par des barricades, fut ensevelie par les cartouches explosives qui détonnèrent dans les corps et la maçonnerie sans distinction.


Les silhouettes explosaient dans des gerbes de sang. Les corps étaient démembrés, mais au lieu de se replier, les sombres Eldars continuèrent de passer par là, attiré par le massacre en bonne et due forme. Le bolter lourd les massacrait et endiguait la marée d’assaillant. Mais il arriva à court de munition. Le tireur hurla qu’on lui amène une nouvelle boite de cartouches, ce que ses homologues firent avec la vitesse et l’énergie du désespoir. Le néophyte, dans un réflexe issu de l’entraiment dégaina son propre pistolet bolter pour reprendre le tir vers la brèche pendant que son équipe rechargeait en toute hâte. 

 


Une créature monstrueuse se hissa de ses pâtes affreuses sur le chemin de ronde assaillit. A travers la fumée des incendies et les explosions, frère Thomaas l’entraperçus. Dans son oreillette Valdemar hurlait à la mort des chants de batailles et des cris inarticulés. Il haranguait sur le réseau vox les rares survivants qui se battaient encore. Valdemar venait d’informer son frère qu’il tenait la porte avec deux autres néophytes, que les combats étaient intenses, mais que personne ne passerait temps qu’ils respireraient. Dans un trait d’humour noir, il l’informa aussi que c’était une question de minute.

Thomaas ignora les informations qu’on lui donnait pour se focaliser sur la chose qui venait d’apparaitre devant lui. Il la vit dans son entièreté. Une chose génétiquement difforme. Toute son anatomie était hypertrophiée. Rien n’était naturel chez elle. Des sangles de cuir venaient serrer ses muscles hideux, et des clous de fer noir s’enfonçaient dans son crâne et son visage, surement pour lui procurer une douleur demandée, sans être mortelle. Des tuyaux et autres gaines de plastec couraient sur et sous sa peau, un liquide noirâtre circulait dedans pour s’engouffrer dans ses veines gonflées. Thomaas se rappela en un instant ce qu’il avait appris durant ses années d’entrainements. Les Drukharis étaient réputés pour utiliser des drogues de combats abjectes lors de violents affrontements. Certaines les rendaient plus fort, ou insensible à la douleur, d’autres leur permettaient de ressentir plus fortement les plaisirs des combats. Les ennemis qu’ils affrontaient étaient drogués jusqu’aux yeux, et dans une rage presque divine.

Thomaas vit un de ses frères néophyte charger la bête, qui ignora le coup de poignard qu’elle encaissa sans un sursaut de douleur. En une seconde se fut fini. Elle se jeta sur lui, pour l’entraver et l’immobiliser. Le néophyte fut incapable de se débattre contre cette chose qui était beaucoup plus forte que lui. Elle le souleva au-dessus de sa tête. Une de ses mains agrippait ses jambes, l’autre, sa tête. Dans un rugissement de plaisir, la bête écartela comme s’il ne c’était s’agit que d’un jouet le néophyte. Il fut coupé, arraché, au niveau de la taille. Il hurla de douleur, et la chose lança par-dessus le parapet les deux partis sanguinolents du néophyte qui alla s’écraser en bas de la muraille.


Le bolter lourd rugit de nouveau. Envoyant des nuées de bolts de gros calibre vers la brèche du mur, plus loin. Thomaas sentit la haine monter en lui. Il empoigna son bolter et son couteau et chargea droit vers la chose qui massacrait tout sur les remparts. Il vida d’une traite dans sa course son bolter, qui émit un claquement distinctif quand le dernier bolt fut tiré. Ses projectiles explosèrent sur et autour de la bête, sans lui causer le moindre dégât. Quand un des bolts explosa dans ses chairs, un liquide noir en sorti, mais la chose ne semblait pas le remarquer. Quand Thomaas arriva à moins de deux mètres de la créature qui venait de massacrer un de ses frères, il saisit son poignard à deux mains, bien décidé à lui enfoncer le plus profondément dans le crâne. Mais un choc tonitruant vint percuter la forteresse, envoyant un nuage de poussière et une onde de choc monstrueuse dans toutes les directions. Thomaas fut fauché par la puissance de l’impact, envoyé valdinguer contre les créneaux comme un fétu de paille. Tout fut terminé.

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