Black Templar Tome II

Chapitre 12 : Mémoire De Nos Pairs

5768 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 25/04/2021 20:01

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Le Revenant tournait paisiblement autour de la planète morte, dans une orbite géostationnaire. Ses capteurs et ses antennes tournées vers l’ancienne planète impériale. A peine eussent-ils franchi le point de Mandeville du secteur, que le Revenant chercha activement à se connecter par ondes noosphériques à la balise impériale. Le petit engin, perdu dans l’espace contenait toutes les informations d’entrées et de sorties Warp, mais aussi les informations les plus basiques. Ainsi chaque navire qui entrait savait où il mettait les pieds, que ce soit dans un secteur contrôlé par les forces impériales, ou une planète tombée aux mains de l’Ennemi.


Quand le navire Astartes sorti du Warp, plus mal en point que quand il y était entré, ce connecta. Un unique message passait en boucle sur toutes les fréquences possibles. Les officiers en charge des communications le lisèrent sur leurs écrans blafards, avant de le transmettre à leurs supérieurs. Plus d’un de ces matelots de professions blêmi face à l’annonce.

« Nous sommes tombé. Waagh Ork. Planète perdue. Population anéantie. N’approchez pas. Exterminatus demandé. L’Empereur nous garde. »


Le message était clair. La planète était perdue. Et sur toutes les bandes de communications, la balise impériale ordonnait de ne pas approcher. Un message astropathique avait été surement envoyé pour demander assistance à une flotte impériale, mais elle n’arriva jamais. Maintenant seulement un Exterminatus par le feu aurait pu faire revenir cette planète dans le giron de l’Imperium. Et le sergent Brüner savait pourquoi.

Il n’y avait plus aucune trace de la flotte Ork qui avait débarquée ici. Elle avait surement repris son chemin semé de massacres et de carnages après avoir pillé cette planète pauvre de ce côté de la galaxie. Mais partout où passait une Waagh Ork c’est son sillage qui était le plus dangereux. La race Ork est une plaie pour la galaxie. Sa faible intelligence est le principal frein au fait qu’ils pourraient raser l’Imperium de l’Humanité, si l’ombre d’une alliance entre les différents clans apparaissait. Mais leur nature même était un danger. Sur chaque monde, chaque navire, chaque station où ils passaient, ils laissaient derrière eux des spores.

La nature de la race Ork reste encore un mystère, mais un ork, au niveau génétique du therme se rapproche plus de la flore d’un monde hostile, que de sa faune. Chaque cadavre Ork devient à son trépas un nid à spores qui se répandent partout dans l’air et le vent, saturant son atmosphère et sa biodiversité. Quand les conditions sont favorables alors ses spores se reproduisent pour former des nids de gestations pour une nouvelle génération de guerrier Ork mâles. Pas de femelles pour cette espèce qui ne connait que la guerre, dans qui ne laisse derrière elle que des mondes en ruines, anéantis, mais surtout des mondes qui seront recouvert de leurs congénères même bien après que la Waagh principale ai continué sa route. Partout où pose sa botte la race Ork, elle s’y implante, durablement. L’Ork est une épine, planté dans le cœur de l’Humanité, mais pour l’y extraire, les dommages causés seraient énormes, comptés en mondes vitrifiés.


-Donnez-moi les sorties et les entrées Warp de ce secteur, sur les dix dernières années, et plus loin si c’est possible. Nous recherchons un cargo impérial standard qui aurait déposé nos frères d’une croisade précédente.


Un des serviteurs de la passerelle de commandement replongea ses yeux cybernétiques dans les prises et les branchements d’une paire de jumelles hérissés de port neuronaux, directement fixé à une table de calcul dans un coin de l’immense pièce. Il commença à éplucher les données brutes qui saturaient son cerveau lobotomisé.


-Monseigneur ! Appela un officier qui déchira un parchemin qui sortait de la console du serviteur, toujours ses globes oculaires plantés dans ses jumelles de traitements de données. Nous avons quelques informations.  


L’officier passa le parchemin au capitaine Makloff qui attendait avec les Astartes, quand il le prit dans ses mains, il invita les Anges de l’Empereur à le suivre dans le stratégium à l’arrière de la passerelle de commandement, derrière de lourdes portes blindées. A l’abris des regards et des oreilles de l’équipage. Ce qui allait être dit devait rester secret, du moins pour l’instant.

               

-Alors capitaine ? Demanda Markus, stoïque comme à son habitude.


Quant à lui, Dord faisait les cents pas. Toujours silencieux, le tintement de sa nouvelle cotte de maille, résonnait dans la pièce plus basse de plafond et plongée dans la pénombre. La fumée du cigare du capitaine montait paresseusement avant de disparaitre dans les conduits de ventilation.

L’humeur des Astartes était maussade.  Ils venaient tous d’inhumer leur frère, Luther, dans les cryptes où reposaient déjà leur autre frère Tantion, depuis des années. Son armure, léguée depuis des années, sûrement aussi vieille que le chapitre lui-même, venait de rejoindre le Hall des Héros du navire. Du goût du sergent Brüner et de ses hommes, il commençait à y avoir trop de Héros à honorer. Les pertes s’accumulaient et chaque mort venait balafrer leurs rangs, d’une profonde blessure qui ne guérirait jamais. Mais ils avaient fait tous une promesse. Un serment. Et il le respecterait, même si mourir devait leur permettre de l’accomplir. Les artefacts qu’ils avaient trouvés tout au long de leur périple reviendrait à leurs propriétaires ou au chapitre. Une nouvelle génération d’Astartes revêtirons ces atours, ces armures et ces armes. Ainsi la mémoire du chapitre et de ceux tombés perdureront. Cela n’enleva pas la douleur de la perte d’un proche.  


-Dix régiments des forces de défenses planétaires massacrés dès le début de l’assaut planétaire. Plus trois régiments blindés. Rien que dans la première phase de l’attaque. Trois fois plus ensuite. La planète est tombée en une semaine. Les signaux que nous avons en notre possession, nous montre bien que la Waagh est repartie. Mais les spores à la surface doivent recouvrir tout. Une population Ork latente doit être encore présente. Impossible de savoir où elle se cache. L’atmosphère et le climat bloque tous nos scans longues portés.

Brüner eu un sourire grave et mélancolique. Pourquoi toutes les planètes de l’Imperium devaient-elles être dans des conditions désastreuses ? Le climat était déréglé, la faune et la flore, morte, ou mourante. Partout où l’Imperium se développait, il détruisait la nature, la modelait à son image, ou la rasait purement et simplement. Il n’y avait qu’une réponse à cette question.


La fin justifie toujours les moyens. Le pragmatisme froid et logique d’un Imperium en guerre constante. Il n’y avait pas de temps à préserver l’écologie d’un monde qui possédait des ressources permettant d’alimenter un effort de guerre toujours plus grandissant. Quesque serait un climat ou une espèce rare d’animal contre le destin d’un milliard ou plus d’êtres humains ? Dans la balance dure mais juste de l’Homme, la Nature n’avait pas sa place. Quand la Paix, unique et universelle serait prononcée, alors peut être que la nature et la préservation des mondes humains seraient une priorité, mais aujourd’hui, l’Imperium était en flamme. Et seulement l’industrie, la pétrochimie et la production à des échelles titanesques permettaient de repousser les vagues impies à ses portes.


-Et nos frères ? Demanda Brüner, l’air grave.

-Une navette est arrivée après de longues années sans mouvement spatiaux après le départ de la Waagh. Six signaux Astartes furent déployés à la surface. Répondit calmement le capitaine Ström. Il déglutit difficilement. Aucun signal ne revint jamais à la navette. Elle attendit une année complète en orbite, mais repartit dans le Warp, six âmes en moins.

-Il y a combien de temps de cela capitaine ? Demanda Maximilian.

-Trente années standards monseigneur.

-Nos frères sont encore à la surface. Surement mort, mais nous allons les chercher. Préparez-vous pour un largage par Thunderhawk. Nous y allons.

Les Astartes rompirent les rangs, les ordres avaient été donnés. Ils avaient maintenant une mission. Ils touchaient au but. Leurs frères n’étaient pas loin et la piste se réchauffait. Leur mission n’attendait pas.

 

               

La descente c’était faite sans embûche. L’ordre avait été donné de déployer l’escouade au grand complet d’Astartes, mais dans un souci de discrétion. Les Anges de l’Empereur n’étaient pas réputés pour leur discrétion. Leurs armures encombrantes et bruyantes les empêchaient de se déplacer en silence. Et même leurs armes n’avaient rien de la discrétion nécessaire pour entrer et ressortir sans être vu ou entendu d’une planète aux mains des Orks. Mais quand il y était obligé, un Astates pouvait se rendre aussi silencieux et discret qu’une ombre. Le générateur de son armure tournant au minimum, assez pour lui permettre de se déplacer, mais suffisamment discret pour passer sous la vigilance des ennemis du chapitre. Les armes à feu étaient abandonnées pour l’utilisation des couteaux de combats, et des lames. La chair était tranchée, le sang vidé, et quand les monticules de cadavres étaient découverts, les Anges étaient déjà loin.

C’est dans cette optique que le Defiance, entra dans l’atmosphère de la planète. Aussi silencieux qu’un nuage, aussi furtif qu’une ombre. Utilisant plutôt les courants aériens et les rafales de vent pour se déplacer, comptant sur la portance de ses ailes déployées pour arriver à bon port. Le climat était un enfer. Des ouragans perpétuels venaient retourner les cieux de ce monde presque mort. Brüner observait par un des hublots le spectacle de la nature qui se rebellait contre l’Homme.


La pluie perpétuelle, les bourrasques de vent venaient fouetter la carlingue déjà malmenée par l’entrée atmosphérique. La température semblait basse, si bien qu’un humain lambda, trempé en quelques secondes jusqu’aux os, mourrait d’hypothermie dans la demi-heure qui suivait. Rien n’était accueillant sur ce morceau de rocher qui dérivait dans l’espace. Brüner, comme chacun de ses hommes avait lu le rapport de ce monde. C’était autrefois un monde luxuriant, riche en matières premières, mais quand elles furent toutes consommées ou envoyées vers d’autres mondes, rien ne subsistait. Il ne l’était pas spécifié dans les rapports, mais Brüner en était sûr. Le Mechanicum s’en était mêlé. Du jour au lendemain les océans et les mers se déchainèrent, le ciel s’obscurcit, et les tempêtes perpétuelles fondirent sur les villes qui peinaient déjà à survivre. Le Mechanicum entreprit des chantiers pharamineux, et c’est quand des villes aussi grandes que des continents émergèrent sur toutes les falaises longeant les océans de la planète que le plan des adeptes de Mars vit le jour.

Ils utilisèrent l’énergie des flots déchainés par eux-mêmes pour alimenter leurs usines et les villes, où se terraient dans leurs seins la population aux proies du même climat créé pour les exploiter. L’ironie de la situation ne fit pas rire le sergent Brüner. La fin justifie toujours les moyens pensa-t-il.

 

La descente était dans sa phase terminale, Brüner remarqua enfin la silhouette de leur objectif, alors qu’ils étaient encore à une centaine de kilomètres de l’atteindre. Elle était gigantesque. A contrario d’une cité ruche dîtes classique, celle-là c’était étendu sur une distance bien plus vaste que ses sœurs qui, elles s’étiraient en hauteur, faisant vivre leurs citoyens les uns sur les autres. Cette cité ruche là, s’étendait sur presque toute la côte, sur un millier de kilomètre de long et presque une centaine de kilomètres vers les terres. Les rares structures qui sortaient du sol ne faisaient pas plus de deux cent mètres de hauteur, et venaient s’ériger au milieu des autres bâtiments dans la tempête et la pluie perpétuelle de ce monde balayé par les vents marins.

Le Defiance passait presque paresseusement, entre les rochers qui sortaient de l’eau entre les creux de deux vagues qui auraient pu engloutir des villages entiers tellement elles étaient immenses et puissantes. Mais lancé à pleine vitesse, les rugissements de ses moteurs couverts par les bourrasques et les éclairs qui venaient frapper la surface d’écume, il continuait sa route. Ils approchaient de la cité ruche tentaculaire.

Brüner balaya le hublot de son gantelet pour y chasser la condensation qui venait le recouvrir pour mieux y voir au dehors. La mélancolie l’envahi tandis qu’il passait au-dessus d’une bizarrerie architecturale. Les Astartes ne connaissaient pas la peur, ni la douleur, au sens propre du terme. Ils avaient été entrainés à ignorer ces informations, comme une pensée qu’on chasse de son esprit avant de passer à autre chose. Ils étaient des machines, et leur travail était la guerre. Même l’âge et la vieillesse n’avait pas de prise sur eux, mais c’était faux que croire qu’ils n’avaient plus aucun sentiment ou sensation. La mélancolie était une de celles qu’ils pouvaient encore ressentir. Leur vie étendue les faisait voir tomber un frère de plus à chaque campagne, et au fil des années c’était des centaines voire des milliers de leurs frères qu’ils voyaient mourir. Ils leur rendaient hommage, à chacun, mais les souvenir des anciens s’accumulaient, les noyant dans un torrent de souvenir et de douleurs de frères oubliés. La mélancolie était un poison qui pouvait contaminer un frère de bataille. Et le seul remède était la confrérie en elle-même. Un Astartes n’était jamais seul, toujours entouré de ses frères encore en vie, et même quand il recherchait la solitude, c’était pour mieux se retrouver avec ceux avec qui il combattait.


Brüner remarqua une structure qui n’avait rien à faire là, sur ce rocher, entouré par les flots déchainés. Une église impériale, aussi seule et solitaire qu’il se sentait lui-même. Il n’y avait aucun signe de vie à l’intérieur ou dans les environs et son emplacement semblait suspect. Elle avait été érigée au milieu d’une île de pierre noire, assez haute pour ne pas être submergée par les flots constant de la mer déchainée qui l’entourait. Mais les vagues qui venaient se briser sur le pourtour de l’île aspergeait de leur eau salée ses hauts murs et son toit d’ardoise. Tandis qu’il admirait de loin ses vitraux et ses meurtrières sombres, il téléchargea dans son heaume le peu de données qu’il y avait sur cet endroit énigmatique. Il y a de ça une centaine d’années, une confrérie de frère du très saint Ministorum avait installé une église ici, malgré les tempêtes et les conditions extrêmes. Cette confrérie était partie du principe qu’elle se devait d’aller prier continuellement dans les endroits les plus reculés et inaccessibles pour étendre la fois de l’Empereur. Alors vivait ici, il y a bien longtemps quelques prêtres assez fervents pour s’y installer. Dû aux conditions climatiques ils étaient isolés du reste du monde, mais par leurs prières, ils y étaient connectés. C’était là toute la subtilité de la vie d’un Astartes. Brüner se reconnu dans ses prêtres assez fous pour entreprendre ce voyage sans retour.

Il s’imagina même un instant vivre ici. Sur cette île désolée, sans pouvoir jamais en sortir, en autarcie complète. Seul avec lui-même, priant l’Empereur. L’image de l’église fièrement dressée vers le ciel en colère resta longtemps imprimée sur sa pupille, même après que le Thunderhawk ne la dépassa. Il revint à lui quand les hauts parleurs de son casque résonnèrent avec la voix du pilote qui leur annonçait qu’ils amorçaient leur descente vers le monde tombé aux mains des Orks. Brüner regarda une dernière fois par le hublot, mais ne vit rien, elle avait disparue. Il se surprit à sourire franchement dans son heaume et penser :

« Dans une autre vie, peut-être. »


Les claquements des chargeurs engagés et des leviers d’armements tirés le ramenèrent à l’instant présent, son sourire disparu rapidement pour ne laisser qu’un visage empli de détermination à défendre et retrouver ses frères disparus, avec qui il était née et avec qui il vivrait, jusqu’à la fin.

 

Les patins d’adamantium du Thunderhawk touchèrent la piste détrempée par la pluie et les embruns de la mer déchainée. Il n’y avait plus qu’un phare sur cette piste, les autres étaient soit éteins depuis longtemps, soit brisé par les mêmes ravages qui avaient meurtris la piste du spatioport. Le seul phare de positionnement jaune maladif envoyait sa lumière sur une dizaine de mètres autour de lui, dans l’obscurité permanente d’un ciel hostile. Il devait être encore branché sur un générateur dissimulé, encore connecté au système presque perpétuel qui se rechargeait avec les mouvements marins et les vagues qui percutaient sans discontinuer la côte.


Les Astartes se déployèrent comme un seul homme. Avec la précision d’une horloge, et la vitesse issue d’un entrainement long de plusieurs dizaines d’années. Les bolters pointés devant eux, ils sortirent par la rampe frontale du Thunderhawk, qui ne détecta aucune menace et reprit aussitôt de la hauteur, propulsé sur les traits de feu de ses propulseurs directionnel. Il disparut dans une accélération soudaine, loin dans les nuages, zébré par les éclairs.

-Aucune menace sur nos capteurs, je passe en mode de discrétion optimale. Vous n’avez aucun soutien aérien. Bonne chasse sergent. Defiance terminé.

Ils étaient enfin seuls. La pluie battait sur leurs armures noires de jais. Les éclairs et le tonnerre qui les suivaient venaient éclairer le ciel par intermittence. On pouvait encore lire au sol le marquage blanc à la peinture des chiffres et des signes pour aiguiller les véhicules de transport et de fret qui normalement pullulait sur un spatioport. Mais il demeurait vide. La formation de l’escouade de croisés n’avait pas bougé encore, toujours en arc de cercle, attendant la moindre menace sur le tarmac, mais rien ne venait. Ils purent enfin voir à quoi ressemblait cette cité ruche.


Les dommages subis étaient grandioses. Partout où portait leur regard, ils pouvaient voir les affres de la guerre qui avait été menée ici il y a bien longtemps. Ici, gisait sur le flanc un char Leman Russ, rouillé, retourné, éventré, surement dû à une explosion de ses munitions. Au sol gisait encore des fusils lasers, des armures, des os de toutes tailles, balayés par les vents. Aucun doute que des gardes et des Orks étaient mort ici. Les zones à découvert étaient presque propres. Aucune trace de sang, nettoyé depuis longtemps, et le vent avait chassé tous les ossements vers des endroits à l’abris de la tempête perpétuelle. D’un zoom de ses optiques vers un des hangars qui cernaient la piste, Brüner pu voir un tas d’ossements et d’objets qui s’agglutinaient dedans, comme un mausolée. Comme si la planète avait elle-même choisi de cacher comme elle pouvait ses tourments. Mais il ne pouvait pas cacher les dégâts dans sa chair. Partout où portait le regard, les impacts, les cratères venaient parsemer le paysage. Des blocs d’habitations lointains semblaient sur le point de s’effondrer, leurs structures complètement démolis par un tir de barrage. Le bout d’une aile d’un appareil impérial méconnaissable dépassait du toit d’une des rares tours qui sortaient du sol, à plus d’une centaine de mètres. La ville n’était plus l’ombre que d’elle-même. Un simulacre de cité impériale. Plus rien ne vivait ici, mais le vainqueur de cet affrontement meurtrier semblait introuvable. Soit il n’avait pas entendu approcher les Astartes, soit il leur tendait une embuscade. Quoi qu’il en soit, il n’était pas là, et le sergent fit un rapide geste pour donner l’ordre d’avancer, quittant cette piste d’atterrissage.

Au moins où ils commencèrent leur progression, une déflagration retentit. Aussi violente que soudaine. D’une puissance dévastatrice. D’un seul réflexe surhumain, les Astartes se retournèrent, comprenant que le son venait de derrière eux, vers la jetée et la mer. Dans le vox, la voix de Maximilian prit vie :


-Contact arrière !


Les bolters furent pointés vers la pénombre s’attendant à une attaque surprise. Mais rien ne vint. Une minute passa, puis deux, puis trois. Les Astartes à genoux, ou debout comme Johann, fermement campé sur ses jambes, tenant son bolter lourd, ne vit rien. Puis une autre déflagration retentit, comme un coup de bolter d’un modèle inconnu. Les Astartes aux aguets, continuèrent leur observation, toujours sur cette maudite piste d’atterrissage.


-Ce bruit, commença Johann. Me semble familier.

-Explique toi. Demanda Markus, tendu par la présence d’une menace qu’il ne pouvait pas voir.

Johann ne sembla pas vouloir répondre, et attendit. Soudain une troisième détonation retentit. Les Astartes, préparés à se défendre attendaient les explications de leur frère qui tardaient à venir.

-Ce bruit, c’est le ressac contre la côte.

-Comment c’est possible ? Nous sommes presque à un demi kilomètre de la côte.

-Ces vagues sont puissantes, c’est le seul souvenir que j’ai de ma vie avant mon incorporation. Le rythme des vagues est constant, comme un métronome. Une nouvelle devrait nous percuter dans moins d’une minute.


Comme pour répondre à sa phrase, une nouvelle détonation rugit, dont l’échos se répercuta dans toute la cité. Il ne faisait aucun doute que Johann avait son ascension au sein du Chapitre, avait fait partie d’un peuple de pécheurs ou de gens de la mer. Mais quand son corps changea pour devenir celui d’un Astartes, ainsi que son esprit, tous ses souvenirs, ou presque de sa vie d’avant, disparurent. Seuls restaient des sensations, ou de vagues instincts ancrés dans leurs corps.


-Reprenons la progression, ordonna le sergent, se remettant debout, son tabar déjà trempé par la pluie perpétuelle, ses optiques rougeoyantes dans la demie nuit.

 

               

Ils progressaient vite et bien. Dans une relative discrétion. Le fracas des vagues au loin, le tonnerre et la pluie masquait leur progression. Ils c’étaient séparés en deux colonnes d’assaut, de chaque côté de la rue assez large pour laisser passer au moins quatre transports de la garde, ces engins à huit roues, capable de faire voyager une centaine de soldat à eux seuls. Brüner avait envoyé Konrad en éclaireur dès leur sortie du spatioport, et Maximilian comme à son habitude restait en retrait et fermait la marche. Le groupe central de huit Astartes était donc scindé en deux. Le Thunderhawk les avait déposés au plus près de l’objectif, même si cela voulait dire qu’il leur resterait à parcourir une quinzaine de kilomètres à pieds pour se rendre dans un bloc d’habitation, un des plus grands de ce secteur. C’était la dernière position connue de la dernière croisade d’expiation qui était passé par ici. Après cela, il avait perdu tout contact. Brüner et ses hommes devraient trouver par leurs propres moyens une solution pour retrouver leurs compagnons disparus.

La colonne de tête, menée par Dord s’arrêta à un embranchement. Dord fit passer devant lui Lyderic, qui avec son bolter pouvait mieux appuyer leur traversée du carrefour devant eux. Il se positionna à l’angle du bâtiment juste avant l’embranchement, et scruta les environs. Le groupe de Brüner s’immobilisa lui aussi, sur la droite du groupe de Dord, de l’autre côté de l’autoroute de plastbéton qui serpentait dans la cité ruche, attendant le signal pour eux aussi traverser, exposé de la gauche, mais appuyé par l’autre groupe. Lyderic donna le signal. Dord et ses hommes s’élancèrent à découvert, appuyé par Lyderic, mais aussi Konrad, qui les attendait de l’autre côté, fusil stalker levé, depuis une bonne minute. Au signal Brüner s’élança lui aussi, son groupe sur les talons. Lyderic attendrait Maximilian pour traverser ensemble, quand il recollerait le groupe de tête. La progression se faisait de manière claire et professionnelle. Les Astartes n’avaient pas besoin de vérifier leurs arrières pour savoir si son frère le suivait, chaque mouvement avait déjà été répété un millier de fois. Tout était parfait.


En traversant Brüner risqua un œil sur sa gauche, quand le tonnerre gronda. Les ombres de ses hommes qui traversaient eux aussi, illuminé par les éclairs, se découpèrent sur les voies d’accès rapide des véhicules abandonnés qui sillonnaient la cité. La voie était dégagée, malgré les cadavres et les carcasses des chars qui les encombraient de leur masse qui rouillaient. C’était une cité industrielle et les échafaudages encore debout, et les grues de levages venaient parsemer les toits des habitations. Ici, gisait une grue immense, presque coupée en deux, mais qui sans sa chute c’était arrêtée entre deux bâtiments. Sa structure de métal avait râpé le ferrobéton, avant de s’immobiliser au-dessus du sol, comme une parodie de pont antique entre deux falaises inaccessibles. Partout où le regard du sergent Brüner portait, la mort, et la destruction était encore présente. Des sacs de sable renversés, des positions de mitrailleurs dévastées. Les trépieds des bolters lourds étaient encore en place, les armes avaient disparus. La bataille pour cette planète sans nom avait été rude. Et malheureusement les défenseurs étaient morts en attendant des renforts qui n’arriveraient jamais.

Ils franchirent enfin le croisement, au milieu des carcasses des transports chimères et des blockhaus détruits pour arriver de l’autre côté, sans encombre. Peu après, Lyderic et Maximilian les rejoignirent. Konrad reparti dans la tempête, disparaissant presque instantanément dans la pluie et les bourrasques qui balayaient la chaussée détrempée. Au signal, ils reprirent leur progression, Maximilian restant seul, sur leurs arrières, pour vérifier que personne ne les suivait. Les deux colonnes d’assaut reprirent leur marche vers leur objectif. Ils laissèrent dans leurs dos, le croisement et sa passerelle de fortune, témoins d’une bataille qui avait ravagée la face d’une planète et son histoire en une seule semaine.

 

               

Le chemin était tortueux. Konrad les avaient fait passer par des embranchements et des ruelles qui normalement ne faisaient pas parti de la cartographie qui s’affichait dans leurs heaumes de batailles. C’était courant dans les cités ruche. La physionomie de la cité changeait si vite et sans demande préalable que les plans qui, à la base devaient être respecté, se retrouvaient vite dépassé, si bien que plus personne n’avait de connaissance claire des rues, et des passages en dehors des axes principaux. Seuls les enfants qui étaient nés ici-bas pouvaient connaitre par cœur les veines et les artères en constantes évolution de l’organisme vivant qu’était une Ruche. Konrad les guidait, toujours en avance sur le groupe. Les faisant passer loin d’un groupe d’habitations ou d’usines qui lui semblaient suspectes. Brüner avait confiance dans le jugement de ses hommes, malgré le fait que cet itinéraire les éloignait pour mieux les rapprocher du point qui continuait de clignoter sur leur affichage.


Ils étaient postés devant ce bloc d’habitation depuis un bon moment. Ils étaient immobiles, comme des pierres, dans un paysage de destruction de carnage. La route était jonchée de véhicule Ork détruits, mais aussi de blindés impériaux. Chaque rue qu’avait traversé le groupe avait été la proie de furieux combats. Aucun bâtiment n’avait été épargné. Aucune habitation, aucune usine. La guerre avait été totale et avait balayée la vie sur cette planète. Brüner bougea imperceptiblement la tête vers le ciel, pour voir tomber les goutes d’eau sur lui comme au ralenti. Ils étaient dans un quartier industriel, et les grues et les poutrelles montées au-dessus des blocs d’habitations, venaient zébrer le ciel, quand les éclairs venaient les éclairer par intermittence. Depuis son arrivée, le sergent avait remarqué quelque chose d’étrange. Chaque surface métallique était recouverte d’une épaisse couche de peinture antirouille. Presque trop, pensa-t-il. Mais en dessous, attendait encore plusieurs autres couches, plus vieille, et en moins bonne condition. On aurait dit une succession de couche de peinture, dans un agglomérat qui semblait superflu. Soudain Brüner réalisa pourquoi. L’air marin dévorait tout. Le sel de l’eau de mer, combiné à cette tempête perpétuelle, rongeait tout ce qui n’était pas protégé. Et les habitants de cette cité, comme seul moyen de se prémunir contre cela, avait alors recouvert leurs métaux de cette immonde peinture protectrice. Il ne faudrait qu’une autre centaine d’années avant que cette cité ne s’effondre sur elle-même, affaibli par la guerre, achevée par son climat.


Brüner enleva délicatement sa main d’une des rambardes sur laquelle il avait posé son gantelet, et tourna sa paume vers le ciel pour que l’eau qui y tombait nettoie les restes de peinture.


-Aucun mouvement, frère sergent. Rapporta Kantor, plus en avant du groupe.


Brüner connaissait sa position actuelle, mais quand il regardait dans sa direction, il ne le voyait pas. Kantor c’était vraiment fondu dans son rôle d’éclaireur du groupe.


-C’est bien ce qui m’inquiète, ajouta Gauron, l’Apothicaire. Normalement, les Orks laissés à eux-mêmes après le passage d’une Waagh se regroupent toujours auprès des structures de leurs races, voir même sur les anciens champs de batailles, comme par nostalgie. C’est presque inscrit dans leur patrimoine génétique.

-Es tu sûr que le signal vient de ce groupe de bâtiment ? Demanda le Chapelain sur le vox d’escouade.

-Affirmatif frère sergent. La balise d’au moins d’un de nos frères vient d’ici, après nous perdons leur signal.

-Nous n’avons pas le choix alors. La voix de Dord retentit dans le vox, il n’avait pas parlé depuis leur atterrissage sur le spatioport depuis cinq heures.


Sa voix sonna comme un coup de tonnerre. Au son de sa phrase les Astartes présent surent que le moment était venu. Brüner donna l’ordre, et la progression reprit, les Astartes fonçant vers le groupe de bâtiments qui les dominait de toute leurs tailles. Aussi haut que large, imposant, froid et austère. Ils fonçaient sous la pluie à découvert pour atteindre les portes principales qui ne tenaient plus debout depuis bien longtemps, quand il éclair vint frapper le sommet du bâtiment, éclairant la scène comme en plein jour, pendant un demi second.

On aurait pu penser à un astéroïde, ou simplement un rocher qui serait venu tomber depuis les cieux, mais il n’en était rien. La structure d’un Space Hulk Ork de modeste taille venait s’enfoncer de toute sa masse dans le toit du bloc d’habitation. En passant les portes, Brüner ne put s’empêcher d’imaginer ce qu’avait été cette invasion. Des vaisseaux innombrables pleuvant du ciel, quand des masses informes chargés d’Orks agressifs et assoiffés de guerre venaient percuter la croute terrestre à pleine vitesse, au milieu de la cité. Il n’y avait pas eu de champ de bataille, ni de guerre. Les ennemis émergeaient directement des décombres de leurs navires écrasés pour débuter le massacre. Les gardes surpris et désemparés se battirent à chaque coin de rue, prit en tenaille, à revers. Sans soutient, ni renfort. La vague Ork submergeait tout. Le fracas des vagues au loin répondit à la pensée du sergent qui s’engouffrait dans les ténèbres.

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