Black Templar Tome I
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Depuis leur empoignade avec la force Eldar, le Revenant et son équipage se trouvèrent dans l'obligation de trouver où ils avaient échoué. Une sortie Warp d'urgence, en étant poursuivi par un ennemi était une chose dangereuse. Dans ces flots indescriptibles, le temps et l'espace n'avaient pas lieu. Une rentrée et une sortie Warp rapide pour relier un système stellaire proche à un autre, si elle était interrompue au pire moment, pouvait faire sortir le navire à plusieurs milliers années lumières de sa destination. Il fallut trois jours pour que l'astropathe et les cartographes de bords réussissent à localiser un amas d'étoiles qui permettraient de se repérer dans cette mer de lumières. Ils n'étaient plus perdus, seulement, ils c'étaient éloignés de leur destination principale. Aux vues de leur niveau de carburant et de leurs ressources tactiques, ils devaient trouver un port d'attache et de commerce le plus vite possible. En consultant leurs fichiers cryptés concernant les planètes impériales à proximité ils découvrirent qu'un seul choix s'imposait, à environ huit semaines de voyage. Endless Hope.
L'accrochement avait été consigné dans les annales de combat du croiseur d'attaque. Le lieu, la date et l'ennemi sur lequel ils avaient remporté une victoire décisive avait été rajoutée en lettre d'or sur la bannière de l'escouade de croisés. C'était leur première victoire, et cela avait été bien faillit être la dernière. Ce fut un combat acharné dans les méandres du vaisseau de moelle Eldar, et ses hommes ainsi que lui-même avaient été blessés. Il fit jouer ses doigts de sa main gauche, emmitouflés dans un pansement de gaze stérile. L'apothicaire Gauron venait changer régulièrement ses pansements et vérifier la cicatrisation de ses blessures. A leur retour sur le Revenant, ses hommes déposèrent leurs armures et leurs armes à frère Osmund, le Techmarine, dans son sanctus, enfoncé profondément dans le croiseur Astartes. Il avait passé de nombreuses heures à réparer les armures endommagées, avec les pièces qu'il avait en stock. Il avait accepté avec enthousiasme cette tâche qui cassa sa monotonie, de réparer à l'aide de ses quelques serviteurs lobotomisés, le Contempt Of Death, le char Rhino de l'escouade. Il s'escrimait depuis leur départ de la croisade principale à le remettre en état de marche, mais le manque de moyens humain et de pièce, la handicapait fortement.
C'est frère Gauron, l'apothicaire, c'était chargé de réparer les corps meurtris par la bataille. La main du sergent Brüner avait demandé des heures de microchirurgie, de greffes de peaux synthétiques, et de rééducation. A son arrivée, certains de ses doigts ne tenaient à sa main que par des bribes de peaux ou de tendons. L'apothicaire, dans son sanctuaire, produisait par le biais de culture de la peau synthétiques, facile à greffer, avec un taux de rejets bien inférieur aux moyennes impériales, qui permettaient aussi bien des reconstructions physiques, aussi bien que des soins de premières urgences sur le champ de bataille. Mais lui aussi était en manque de matériel, et de personnel.
Leur départ c'était fait à la hâte, leur seigneur ne leur fournissant que le strict minimum pour voyager. Un croiseur d'attaque antédiluvien, un nombre de membre d'équipage restreint, peu de matériel, un parc de véhicule non opérationnel. Seul le Thunderhawk, Defiance, avait été remis en état de marche avant leur départ. Il avait nécessité presque toutes les ressources et le temps disponible du Techmarine. Depuis le frère Osmund mettait tout en œuvre pour rendre cette croisade opérationnelle à son plein potentielle.
Durant ces nombreuses interventions chirurgicales, le sergent Brüner avait eu l'occasion de se remémorer les faits. A peine avaient ils quittés les leurs, que les pirates Eldars les avaient interceptés. Ce n'était pas une attaque inhabituelle, ils les cherchaient, eux. Pour une raison précise. Le prophète le cherchait lui. Afin de contrer un avenir qu'il avait vu. Un avenir plein de morts et de destruction pour son peuple. Ce pourrait-il qu'il sache l'objectif de leur quête ? Aurait-il vu un avenir incertain où leur quête les mènerait dans un massacre d'Eldar ?
Le sergent s'accorda une journée de repos et de prières après son opération et à ses hommes aussi. Le lendemain, ils reprirent leur entrainement quotidien, malgré les blessures et les corps meurtris. Au court d'un entrainement à l'arme blanche avec le chapelain Markus, ils avaient pu s'entretenir sur ce qui c'était passé sur la passerelle ennemie. Le chapelain ne remit pas en cause le fait que le sergent accorda ses dernières volontés au prophète Eldar, c'était un duel d'honneur, et les Black Templar n'avait qu'une parole, et mettait l'honneur par-dessus tout. Si le chapelain avait jugé tout comportement comme déviant il aurait appliqué une sentence rapide et juste. Le sergent le savait. Il se demandait surtout ce qu'avait voulu dire l'Eldar avant de mourir.
-Croyez-vous qu'il a vu une possibilité que nous réussissions notre quête ? Demanda le sergent, en sueur.
Cela faisait maintenant plus de cinq heures qu'ils s’entraînaient tous dans le gymnasium aménagé dans les cales du croiseur d'attaque. Ses hommes, hors du cercle de combat, s’entraînaient au tir sur cibles, démontaient leurs armes sur des tables de marbres blanches recouvertes de tissus, où s’entraînaient au combat à main nue. Certains avaient amenés leurs serfs, qui observaient pour reproduire les mêmes gestes d'entretient quand leurs maîtres leur demanderont.
Le sergent saignait de sa blessure à la main, la cicatrisation avançait bien. Son organisme sur-développé refermait déjà la blessure, mais les quelques agrafes c'était rouvertes. Le chapelain de son glaive d'entrainement effectua une attaque tranchante horizontalement. Le sergent au lieu de reculer pour esquiver l'attaque plongea sous la garde de son adversaire, pour se retrouver torse contre torse.
-Cette manche est à moi.
Il avait la garde de son épée entrainement sur la gorge du chapelain. Il avait terrassé le prophète de la même manière. Ils reculèrent et prirent leurs distances pour une nouvelle passe d'arme.
-Les Eldars peuvent lire les différents fils du destin qu'ils pensent percevoir. Nous sommes des Astartes, le destin pour nous, n'existe pas. Seul compte la vérité impériale. Nous ne croyons pas à la superstition telle que cela. Dis le chapelain en reprenant son souffle. Son torse ruisselait de transpiration.
-Certes, mais ils nous ont attaqués, délibérément. Ils nous cherchaient. Dans un but précis. Cela a peut-être un rapport avec notre mission.
Les deux Astartes se tournaient autour, leurs pieds nus sur l'acier froid du pont. Ils étaient ramassés sur eux-mêmes. Comme deux fauves s'apprêtant à bondir.
-Ce xenos, n'a pas pu prévoir sa propre mort. Les Eldars ont péchés par acquis de conscience. Ils sont trop imbus de leur personne. Cela les aveugles. Méfiez-vous des mensonges des ennemis de l'humanité.
-Vous avez raison, chapelain. Comme toujours.
Les lames s'entrechoquèrent.
Les ronronnements habituels des moteurs Warp, auxquels ils c'étaient habitués durant leur transit de plusieurs semaines, changèrent de sonorité. Ses blessures à la main avaient bien guéri mais ses doigts abîmés étaient encore raide. L'apothicaire avait fait du beau travail. Il resterait quelques cicatrices, là où la peau synthétique avait fusionnée avec sa véritable peau.
-Sorti voyage Warp estimée : vingt minutes. Dit la voix féminine préenregistrée dans les hauts parleurs du vaisseau.
Quelques instants plus tard, le serf du sergent arriva dans ses quartiers.
-Préparons-nous. Ordonna le sergent.
Depuis l'attaque surprise des Eldars, toute sorti de transit Warp était source de tension au sein de l'équipage. Le sergent Brüner avait fait passer des consignes. Quand le croiseur d'attaque sortirait ou entrerait dans l'Immaterium, le moment où ils étaient le plus exposés, tout l'équipage, ainsi que le personnel Astartes serait sur le pied de guerre. Ils avaient été surpris une fois, cela ne se reproduirait pas.
L'espace devant le croiseur se déchira et laissa entrevoir l'espace réel et les reflets des étoiles. Il décéléra brutalement, reprenant pieds dans la réalité. Les volets blindés qui protégeaient la bais d'observation de la passerelle de commandement s'ouvrirent.
Les boucliers Void du vaisseau étaient levés, son armement paré, et ses soldats prêt à toute éventualité.
-Scan d'auspex dans toutes les directions ! Maintenant ! Ordonna froidement le capitaine Ström.
Ses lieutenants de quarts exécutèrent ses ordres sans broncher. Des ondes partirent des antennes relais sur toute la surface du navire pour chercher la présence d'ennemi quel qu'il soit.
-Rien capitaine. Répondit l'officier responsable. Il regardait l'écran verdâtre de sa console avec application. Ses instruments ne distinguaient rien. A part la station.
Elle était massive. Au début, à cause de la distance qui les séparait, le sergent ne la distingua. Il était en armure complète, ses hommes derrière lui. Il avait les bras croisés sur la poitrine. Et regardait fixement la bais d'observation. Soudain, un des rayons du soleil accrocha la surface métallique de sa structure. Elle faisait presque deux cents kilomètres de diamètre. Elle était tellement vieille qu'on avait oublié qui l'avait construite. Une structure de métal, circulaire, avec en son centre du vide. Assez de vide, pour que les premiers explorateurs impériaux, aménage son centre en un port d'attache spatiale. Dans les grandes heures de son histoire, plusieurs cuirassés et navires de plus petit tonnage pouvaient stationnés en orbite haute au centre de la structure monumentale. Cette station, qui avait depuis longtemps, perdu son nom véritable, gravitait au-dessus d'une planète d'une lueur jaune maladive. Cette planète était un monde ruche. Où les habitants vivaient les uns sur les autres, se marchant dessus pour aller travailler dans les immenses manufactorums de munitions et de matériel à sa surface. L'exploitation à l'extrême des ressources premières de cette planète avait obligé les guildes marchandes et artisanes à faire importer les matières premières d'autres systèmes voisins pour répondre aux quotas de production.
La particularité de cette station, plus vieille que certaine civilisation, était que sa vitesse de rotation était calquée sur la vitesse de rotation de la planète dont elle était le satellite. Et la ville principale de ce monde était juste en dessous d'elle. Les rares travailleurs qui avaient pu regarder le ciel pollué de leur monde purent voir l'auréole de la station plané au-dessus d'eux.
Cette particularité bien singulière, causa deux choses. La première, fut la construction d'un ascenseur spatial de fret et de personnel du sol vers la station. Les reliant en à peine quelques minutes, la station devint un port en espace peu profond pour communiquer et commercer avec le sol.
Le second, fut, au fil des années, la croyance des élites de la bourgeoisie en place, qui pouvait observer le ciel plus que de simples travailleurs, que la station avait quelque chose de divin, comme une extension de la volonté de l'Empereur lui-même. Cette station qui faisait comme une auréole au-dessus de cette cité ruche, au fil des millénaires, fit émerger la croyance que le peuple de ce monde oublié était béni. Plusieurs guerres civiles de purifications de leurs gênes plus tard, la caste dirigeante, mit en place un procédé radical.
Aucun « outre-monde » ne devra poser le pied sur le sol sacré de cette planète. Dans un souci de préservation de gênes pures. Dans un second temps, tous les « impurs » seraient bannis de ce monde. Dans le seul endroit qui pourrait accueillir autant de monde. C'est pourquoi tous les criminels, les hérétiques, les handicapés, et ceux jugés impurs par des tribunaux populaires furent envoyés en orbites, sur la station spatiale. Elle devint autant une prison, qu'un port d'échange commercial, vu qu'aucun marchand hors sol ne pouvait plus poser pieds à terre.
Au fil des années la fréquentation du secteur diminua drastiquement, les points d'ancrages de la station furent abandonnés les uns après les autres, leurs entretiens coûtant trop cher. Seuls un petit nombre, le strict minimum fut gardé en service pour assurer les échanges nécessaires à la survie de la communauté du dessous.
La station se transforma petit à petit en bagne. Où les ostracisés, les oubliés de la société du bas les exploitaient. Ils entretenaient la station, les contremaîtres les obligeant à coup de fouets et de bâtons électriques pour le reste de leur vie. Ils étaient parqués dans une zone réduite de la station, le reste des centaines de kilomètres de couloirs étant abandonnés.
Le Revenant se dirigea vers la prison spatiale qui dérivait dans l'espace.
-Faites nous saluer, et transmettez nos codes d'identification. Ne ralentissez notre allure qu'au dernier moment. Manœuvre d'intimidation. Nous transportons les anges de l'Empereur. Annonça calmement le capitaine à son timonier en chef.
Celui-ci hocha simplement la tête et s'exécuta.
Le sergent reporta son regard devant lui et inspira profondément. Il ne pouvait pas le voir à cette distance mais des remorqueurs partaient déjà des hangars mal entretenus de la station pour les amener au cœur de celle-ci. Il avait besoin de munitions, de matériel et de ravitailler le croiseur en plasma. Les réserves étaient basses. Leur départ précipité n'avait pas aidé aux préparatifs de leur croisade.
-Monseigneur, les remorqueurs demandent humblement que nous abaissions nos boucliers pour pouvoir s'arrimer et nous escorter. Rapporta l'officier en charge des communications.
-Accordé. Mais que nos tourelles de défenses rapprochées surveillent chaque remorqueur de prêt.
-Ce sera fait capitaine.
-Une petite chose, ajouta le sergent. Faites passer le mot. Quand nous serons arrimés et que le transfert de munitions et de carburant débutera, je veux que toutes les escouades de la sécurité naval du croiseur prennent position aux points névralgiques d'entré et de sorti du personnel sur ce bâtiment. Je ne veux qu'aucun détenu de cette prison ne s'enfuît sur ce navire. Ordre de tirer à vue sans sommation, est-ce bien clair ?
-Absolument, un pragmatisme bienvenu, sergent. Répondit le capitaine.
Le chapelain Markus sous son casque sourit et hocha imperceptiblement la tête.
Les moteurs du Revenant étaient presque à l'arrêt. Une dizaine d'escorteurs aux moteurs démesurés par rapport à leurs cabines, poussaient ou tractaient l'immense géant d'adamantium Astartes. Ils furent amenés au-dessus de la station orbitale, au centre de l'ouverture en son milieu, où il y a des centaines d'années, le contrôle spatial aiguillait les navettes et vaisseaux marchands de passage. Ils étaient seuls. Pas un autre vaisseau en vue ou arrimé. Le sergent pu voir par la bais d'observation le nom donné à cette station poussiéreuse. Sur le métal érodé par le temps, les tempêtes solaires et les impacts de micro astéroïdes, figurait son nom, en lettre aussi grande que des blocs d'habitations. Endless Hope. Un nom trompeur. Un espoir infini. Une prison où l'on venait purger une peine illimitée. L'ironie de ce nom collait maintenant à la peau de la cage où ils étaient tous enfermé.
Le Revenant s'immobilisa sans une secousse devant un imposant hangar, son champ atmosphérique bleuté gardait le précieux oxygène à l'intérieur de la prison. Il éclairait l'espace entre les deux structures de sa lumières blafardes. Des immenses bras télescopiques sortirent de la carlingue de la prison pour s'arrimer au blindage du navire impérial. Ce n'était pas pour le retenir à proprement parler. Si le navire Astartes aurait voulu se dégager, la force de ses rétrofusées ou la puissance de ses moteurs auraient suffi pour arracher les arrimages, c'était surtout pour empêcher tout contact entre la station et le croiseur si un événement astronomique imprévu le projetait sur eux.
Raccordés aux pinces d'arrimages plusieurs longs et tortueux tuyaux de ravitaillements, au diamètre grand comme des chars super-lourds commençaient leur lente approche des emplacements de réception de carburant. Ils étaient guidés par magnétismes, par les mêmes remorqueurs qui avaient amenés le navire ici. La manœuvre était longue et délicate. Surtout pour un transfert de carburant aussi important. Cela demanderait plusieurs dizaines d'heures.
-Transmettez notre demande de matériel, de munitions, et de carburant. Ainsi que notre accréditation de l'Adeptus Astartes, ainsi que du Mechanicum. Qu'ils soient payés. Demanda le sergent calmement, toujours en regardant la bais d'observation, qui était remplis maintenant des énormes pinces magnétiques, aux longs tentacules qui cherchaient à abreuver son navire.
Un navire Astartes possédait une aura quasi mystique. Peu d'humain pouvait se targuer d'en avoir vu un dans sa vie. Encore moins un guerrier Astartes. Mains quand un ange de l'Empereur, demandait assistance, de n'importe qu'elle sorte, l'instinct de survie humain, ou le respect pour ses guerriers de légendes, obligeaient à lui donner l'objet de sa requête dans les délais les plus bref. Un simple marchand, qui rechargeait ses réservoirs de plasma à bord d'une station, se devait d'honorer sa ligne de crédit contractée, soit en monnaie sonnante et trébuchante, soit en service rendu auprès des autorités, soit en fret, à transporter en plus de sa cargaison. Ce qui amenuisait grandement les bénéfices par voyage interstellaire. Mais c'était le dur métier de libre marchand.
Concernant les guerriers de l'Empereur, leur statut à part, et leur affiliation avec le Mechanicum leur accordait une ligne de crédit presque illimité sur toutes les ressources disponibles dans un secteur. Les Astartes n'étaient pas connus pour le gaspillage de ressources cher à l'Imperium. Et si on leur refusait l'accès à ce qu'ils demandaient, ils le prendraient par la force. Sans autre forme de procès. L'élite de l'humanité ne pouvait pas se permettre de perdre du temps ou des ressources pour des obligations purement humaines. Après leur départ, une ligne de crédit serait ouverte au nom du chapitre Black Templar ou du Mechanicum. Elle sera clôturée dans les délais les plus brefs. Remerciant les acteurs de cette transaction et sollicitant leur discrétion sur ce qu'ils avaient vu.
- Prévenez-moi quand nous serons prêts à partir. Demanda le sergent.
Il tourna le dos à la baie d'observation, suivi de ses hommes pour sortir de la passerelle de commandement. Ils s'enfoncèrent dans les entrailles du navire. Le capitaine Ström superviserait les manœuvres de ravitaillement et la bonne marche des opérations.
A sa première rotation, le prisonnier qui pilotait la navette de transport, entra dans le hangar du croiseur Astartes par le bouclier atmosphérique. Il venait de quitter le hangar numéro deux de la station, sa navette transportait deux énormes obus pour les pièces d'artilleries des vaisseaux impériaux. La station employait les prisonniers comme main d'œuvre gratuite, et ils n'avaient aucune chance de s'échapper. Un transpondeur émettait leur position en temps réel, et s'ils s'éloignaient par mégardes des plans de vols transmis, un explosif dissimulé dans le cockpit explosait. Certains avaient essayé, pensant que c'était une rumeur, qu'ils ne pouvaient pas surveiller autant de prisonnier en même temps. Il ne restait d'eux que quelques débris flottant aux encablures de la station. On les voyait encore flotter par certains hublots, comme un avertissement macabre.
Il pénétra dans le hangar sombre, éclairé par des rangées de projecteurs fixés haut au plafond, celons un espacement bien précis. Le hangar du croiseur était imposant. Presque trois cents mètres de larges, mais à sa grande surprise, il était quasi désert. Il n'y avait qu'un monstre de métal arrimé au sol, un Thunderhawk, noir comme la nuit, autour duquel une équipe réduite de serviteurs s'occupaient de sa maintenance. Sa carlingue et ses alentours étaient éclairés par intermittence, par les flashs des postes à souder. Le pilote avait pour ordre de ne pas s'approcher, ou faire mine de s'approcher du monstre endormi, sous peine de mort. Il fessait parti des premières navettes à pénétrer dans le hangar, et une file longue d'un kilomètre attendait derrière lui pour décharger leur matériel. Au sol était marqué, d'une peinture jaune, les emplacements correspondants aux matériels. L'emplacement pour sa cargaison était au centre du hangar, une dizaine de rectangles jaunes pointillés, encerclaient un énorme sas de deux portes, verrouillées dans le sol. Une navette d'un de ses codétenus, déposa son chargement. C'est alors que le sol s'ouvrit. Des gyrophares orange s'allumèrent, des alarmes crièrent de reculer. Les portes du sas engoncées dans le sol s'ouvrirent avec lenteur. Il voyait la scène du haut, en vol stationnaire, la première navette n'était pas encore partie. Les portes d'aciers et d'adamantium s'ouvrirent sur des profondeurs abyssales de métal. Deux énormes pinces robotiques sortirent. Elles travaillaient de concert, chacune prit un obus séparément et le placèrent dans les tréfonds du vaisseau. Le pilote put voir un tapis automatisé gigantesque qui roulait sous le plancher du hangar, les obus y étaient déposés sur des supports métalliques prévus à cet effet, et ils disparaissaient sous le sol, les emmenant aux soutes à munitions.
Le vacarme fut assourdissant. Rajoutant au bruit des navettes qui déchargeaient le matériel léger, le bruit du carburant sous haute pression qui passait dans les conduites du vaisseau, et maintenant le rechargement du magasin du croiseur. Les équipes de sécurité du navire, lourdement armées, qui surveillaient chaque allée et venue, portaient en plus de leur casque lourd, un casque anti-bruit, et c'était compréhensible. Le pilote pouvait entendre le brouhaha de l'effervescence du hangar même dans son cockpit hermétique. Il déchargea ses deux obus en vitesse et reparti. Il lui restait beaucoup de rotations à faire.
-Comment avance le transfert ? Demanda le capitaine Ström.
Cela faisait maintenant quatre heures que les balais de navettes déposaient leurs cargaisons dans son vaisseau.
-Le seigneur Techmarine met à jour en temps réel nos stocks. Nous avons presque fini le réapprovisionnement en munitions d'armes légères, en médicaments, en denrée alimentaires, en matériel lourd, et en matière première.
-Et le carburant ? Insista-t-il.
-Il nous faudra encore quatre autres heures pour finir le transfert de carburant et pour les obus de nos pièces de batailles. L'informa l'officier en charge. Il était au-dessus d'une console de contrôle, son écran verdâtre baignait son visage dans un halo étrange.
-Capitaine ! Héla le responsable des communications.
-Parlez nom de nom. L'admonesta-t-il.
-Communications entrante du commandant général de la prison. Il demande une audience avec le Sergent Brüner.
-Refusé. Le sergent ne veut pas être dérangé. Répondit-il.
-Il insiste mon capitaine.
-Cela ne va pas lui plaire.
Il posa le pied sur le sol grillagé du hangar de la prison. Le sergent Brüner était encadré d'une escorte protocolaire. Le ravitaillement de son vaisseau avançait vite, mais pas assez à son gout. Il voulait repartir au plus vite suivre les potentielles pistes et la trace de ses nombreux frères disparus. Frère Dord et Luther le suivait de près. Une escouade de gardien en habits bleu sombre, ils étaient armés d'armes à courte portée, de fusils à pompes, surement chargé de munitions anti-émeutes, et de gourdins paralysants à la ceinture. Leur équipement et leur apparence semblaient en piteux état, comme si il était vieux et usés. Ils avaient besoin d'être remplacé au plus vite. Quand la rampe du Thunderhawk s'abaissa, les Astartes en sortirent d'un pas décidé. Ils avancèrent à vive allure vers l'escouade d'escorte qui les attendait. Les gardiens eurent un mouvement de peur incontrôlée. C'était la première fois qu'ils voyaient un ange de l'Empereur. Certains firent deux pas en arrière devant le spectacle. Trois colosses en armures complètes, leurs tabars à l'héraldique des Black Templar flottant dans les courants d'air du hangar, les sceaux de puretés accrochés à leurs épaulières. Ils étaient menaçant par nature et tout en armes. L'officier de l'unité de gardiens essaya de garder sa contenance et fit un bref salut martial au sergent Astartes.
La montagne caparaçonnée grogna son mécontentement dans son casque. Les hauts parleurs vox ne retransmirent qu'un grincement métallique, comme si un rapport d'une boite de vitesse d'un char ne passait pas.
-Agenouillez-vous devant moi quand vous me saluez, garde. Seuls les officiers de notre chapitre peuvent effectuer une révérence, ils ont gagné le droit de le faire, pas vous. Gronda-t-il.
Il ne cachait ni sa colère ni son exaspération vis-à-vis de la requête du commandant général de la prison de le voir. C'était l'officier qu'il avait envoyé qui en faisait les frais. L'officier devant lui et ses soldats crachaient un nuage de vapeur en expirant. D'une simple pensée il activa la température extérieure de son armure par le biais de son affichage tête haute. La température était basse, bien en dessous de zéro. Il ne la ressentait pas le moins du monde, les couches isolantes et le chauffage intégré le protégeait. Par contre les gardes semblaient la subir. Le système de chauffage de la station ne devait pas subir ou était défectueux, cela attestait de sa vétusté.
- Conduisez-moi à lui. Maintenant. Exigea le sergent.
L'officier se tourna vers le sas blindé situé derrière lui, dans le mur du hangar qui donnait sur le reste de la station. Les Astartes les doublèrent sans ralentir, les gardiens partirent à leur suite. Ils avaient du mal à suivre le rythme de marche des trois géants, si bien qu'ils trottinaient pour ne pas se faire distancer. L'officier avait pris la tête, et courait devant le groupe.
Ils s'étaient arrêtés. Devant un énième sas rouillé. L'intérieur de la station était en très mauvais état. Des traces d'humidité et de champignons venaient parsemer les murs et les plafonds qu'ils avaient vu. Quelques affiches de propagande jaunies par le temps pourrissaient sur les murs, exhortant les prisonniers à donner le meilleur d'eux même dans la rédemption. Ils avaient parcouru plusieurs couloirs qui se ressemblaient tous. Le bruit de l'agitation autour d'eux se faisait entendre. Cela faisait bien des années qu'un vaisseau étranger n'était pas venu et tout le personnel de la prison était sur le pied de guerre pour répondre à leurs besoins. On entendait des chariots élévateurs et des contremaîtres charger des caisses et donner des ordres malgré l'épaisseur des murs. Ils avaient passé un nombre incalculable de poste de garde, de poste de sécurité, où dedans, des gardiens essayaient tant bien que mal de se réchauffer. L'officier posa sa main dans un renfoncement de la porte. Il eut un léger sursaut de douleur imperceptible que les Astartes remarquèrent. Ils ne dirent rien. Une aiguille vint prélever du sang de l'officier pour analyse. Quand la concordance Adn fut validée la porte s'ouvrit.
Encore un corridor grillagé au sol. Le sergent Brüner risqua un coup d'œil en dessous de lui, à travers le grillage. Il y avait des dizaines de niveau en dessous de lui, avec les mêmes couloirs grillagés, et au-dessus de lui aussi. De part et d'autre du couloir il y avait des cellules. Sombres, pas du tout éclairées, seulement par les lumiglobes du couloir principal. Certaines étaient ouverte et vide. Les prisonniers de ces cellules devaient être sortis pour effectuer leur garde d'entretien ou participaient au réapprovisionnement du Revenant. Dans celles où il y avait des détenus, certains dormaient, d'autres discutaient, ou fumaient. Quand ils virent les Astartes ce fut un choc. C'était comme une réaction animale. Quand un fauve enfermé, sans moyen de se défendre, acculé, voyait un autre fauve en pleine possession de ses moyens se déplacer devant lui. Il se débattait, faisait du bruit, mordait tout ce qui passait. Ce fut identique.
Les prisonniers eurent peur. Que les Astartes soient venu pour eux, pour les purger de leurs crimes, c'était comme voir la punition qui venait à vous. La mort incarnée. Ils hurlèrent, renversant les lits sur lesquels ils dormaient. Ils sortaient leurs bras de leurs cellules, à travers les barreaux pour les toucher ou les saisir. Les gardiens firent preuves de plus de courage face aux détenus qu'envers les Anges. Ils brisèrent les os avec leurs matraques, tirèrent à bout portant pour calmer les foules dans les cages. Les croisés continuèrent leur chemin suivant l'officier à travers les couloirs de la prison.
-Nous ne pouvions pas passer par un chemin plus discret ? Demanda le sergent.
On pouvait encore sentir la colère à peine retenue dans sa voix, exacerbée par le spectacle qu'ils venaient de voir.
-C'était le seul chemin, monseigneur.
Les cris d'animaux sortant de gorges humaines résonnaient toujours derrière eux, on entendait des insultes, des pleurs, et des gardiens matraquant un à un les détenus déchaînés. Ils essayaient de faire revenir le calme mais c'était peine perdue. Enfin le sas de sorti se referma et on n'entendit plus que les bruits sourd des cris et matraques électriques qui tombaient. Il devait y avoir une dizaine d'aile de détention comme celle-ci.
Ils attendaient devant une imposante cage d'un monte-charge. Il pouvait surement transporter un char Leman Russ à lui tout seul. Il n'y avait aucun combiné ou boutons à actionner pour appeler ce monte-charge. Et l'officier ne semblait pas faire le moindre mouvement ou action pour le faire venir. Il attendait en silence.
Soudain un cervo-crâne apparu de nulle part. Il passa au-dessus de leurs têtes en vrombissant. Son champ antigravitique lui permettait de survoler le groupe sans un bruit. Il s'immobilisa devant eux et les scanna. Un épais rayon bleuté les parcourut de la tête aux pieds. La poussière présente dans l'air rendu visible quand le rayon la traversa.
Quand il eut fini son scan, un mécanisme prit vie dans le monte-charge. Un grondement profond de vérin qui s'actionnait. D'épaisses chaines et des contre poids bougèrent dans la cage juste devant eux. Le monte-charge arrivait.
-C'est le commandant général qui décide qui monte le rejoindre. En cas d'émeutes il serait protégé. Expliqua l'officier visiblement gêné d'avoir fait attendre les Astartes.
Brüner ne répondit même pas. Il ne savait que faire de cette information. Il grogna juste. Cette réponse devra lui suffire.
Il faisait chaud. Une chaleur douce et diffuse. Le résultat d'un système de chauffage qui marchait. Un groupe de gardiens, bien mieux armés et équipés les attendaient à la sortie du monte-charge. Les gardiens qui les avaient accompagnés jusque-là furent congédiés par l'officier en charge de la protection rapproché du commandant général de la prison. Brüner put voir la colère des gardiens avec qui il avait traversé la prison, ils devaient repartir dans le froid et le chaos qui régnaient en bas sans même avoir eu le temps de se réchauffer. L'officier en charge de cet étage vint saluer le sergent, et ses hommes comme le protocole le voulait. Un imposant casque lourd à visière et cimier lui recouvrait intégralement la tête.
-Je suis le lieutenant Kremer. Le commandant général vous attend. Je vous accompagne.
Il avait une voix puissante mais dans la retenu, couvert par son heaume. Il avait la carrure et la prestance d'un militaire de carrière, mais de cela il y a bien des années. Le sergent le remarqua et hocha de la tête. Il lui emboîta le pas.
La différence fut flagrante entre ce qu'ils avaient vu en venant ici et les appartements du commandant général. Ils furent tout de suite assaillis par l'agressivité outrageuse du luxe dans lequel il se vautrait. Ils arrivèrent dans un vestibule immense et tapageur. Il était recouvert du sol au plafond d'un velours rouge sang, ornementé de brochures tissé d'or. Au centre trônait une fontaine de marbre, ou coulait un petit filet d'eau clair et surement propre à la consommation. La pièce était très bien éclairée et des petits chérubins grassouillets voletaient au plafond, portant des encensoirs fumants ou chantonnaient des chants impériaux connus. Les Black Templar, était des croisés, des guerriers, austères, froid et implacable. Ils n'avaient cure des richesses matérielles, ou ornementales. Ils affectionnaient l'austérité, la simplicité, et le pragmatisme froid. Au contraire de nombreux d'autres de leurs frères Astartes d'autres chapitres, il n'y aurait aucune trace d'or, ou de frivolités décoratives sur leurs armures. Cette pièce attira le dégoût dans les cœurs des croisés qui venaient à la demande du commandant de la station prison. Ils traversèrent la pièce, des battants d'or et de marbre furent ouverts par un mécanisme silencieux et dissimulé, ils donnaient sur une autre pièce, une antichambre semblable à la pièce précédente, une pièce destinée à faire patienter les personnes qui venaient consulter le commandant. Les bottes blindées des Astartes piétinèrent le sol rouge soyeux. Dord par sa démarche rapide et sèche, froissa et déchira un pan de tissus sur lequel il venait de marcher. Un des gardes d'honneur le remarqua et eu un léger sursaut. Comme si une offense personnelle venait d'être faite. Les Astartes ne s'arrêtèrent même pas.
L'officier Kremer se planta devant la dernière porte, celle qui devait donner sur le bureau du commandant.
-Veuillez patienter ici mes seigneurs, le commandant...
Le sergent n'attendit pas qu'il finisse sa phrase, il écarta l'officier et ses hommes qui étaient sur ses flancs des deux mains, qui furent à leur tour écartés par Dord et Luther qui l'encadraient. Le sergent poussa les battants de la porte qui s'ouvrirent à la volée. Ils pénétrèrent dans le bureau, les gardes sur les talons, armes brandies.
Le commandant général était assis dos à la porte, dans un fauteuil luxueux fait d'un cuir surement rare et hors de prix. Il était juste devant une cheminée grésillant. Un verre d'un alcool à la main. Le sergent souri intérieurement, il n'était pas occupé et ils voulaient les faire attendre avant de les recevoir pour asseoir une quelconque supériorité sur eux. C'était peine perdue. On n'exigeait pas audience avec un Astartes, et on le faisait encore moins attendre avant un entretient comme on le faisait avec un homme politique adverse.
Il se retourna en sursaut, renversant le contenu de son verre sur un tapis qui devait coûter la production annuelle d'une guilde à la surface de la planète. Il se leva, plissa son uniforme impeccable de ses mains trempées d'alcool. Il transpirait à grosses gouttes, il était surement trop près de cette cheminée qui aurait pu chauffer un petit château. Son crâne chauve et gras dégoulinait de sueur. Il s'épongea la tête avec le revers de son uniforme. Comment un homme de petite taille, gras, et aussi peureux a-t-il pu accéder à un poste aussi élevé ? Le sergent parcouru la pièce du regard, partout où il posait le regard il y avait une étagère croulant sous des livres retraçant des récits de guerre d'illustre généraux, ou des armes croisées sur des bannières régimentaires. L'uniforme du commandant général était orné de médailles militaires. Un ancien officier peut-être ? Surement pas. Il avait dû accéder à un poste à haute responsabilité sans avoir à franchir les étapes antérieures. Il n'avait même surement jamais connu un champ de bataille et pourtant il avait en charge des centaines d'hommes sous son commandement, il était complètement détaché de la réalité du terrain. Le bruit de fusils laser radiant mis sous tensions se fit entendre dans leur dos. Les gardiens venaient de pénétrer à la suite des Astartes et les braquaient de leurs armes. Protégeant leur officier d'un comportement agressif. Même s'ils n'appréciaient guère celui qui les commandait, ils s'acquitteraient de leur mission. Le sergent respecta cela.
-Baissez vos armes ! Tout de suite ! Ce sont mes invités ! Aboya de sa voix nasillarde le commandant général.
Ses hommes eurent un moment d'hésitation devant l'ampleur de la menace éventuelle.
-J'ai dit baissez vos armes ! Je suis le commandant général, obéissez !
Encore une preuve de son incompétence, un meneur d'hommes, quel qu'il soit n'avait pas à dire qu'il était le chef. C'est pour cela qu'il n'en était pas un.
-Laissez-nous, tout ira bien Kremer, disposez ! Dit-il d'un geste dédaigneux de la main vers la porte pour les faire partir.
Kremer baissa son arme et ses hommes avec lui. Il sembla au sergent que les gardes d'honneurs suivaient plus les directives de l'officier Kremer que celles du commandant général. Ils sortirent du bureau, à reculons, ne tournant pas le dos aux Astartes, et refermèrent la porte derrière eux. Ils pouvaient être sûrs qu'ils étaient derrière, à ronger leurs freins, et qu'ils débarqueraient au moindre bruit suspect.
-Je ne vous attendais pas de sitôt messeigneurs. Je peux vous offrir un rafraîchissement ?
-Non. Répondit Dord.
Ils étaient en armure complète, leurs heaumes cachant leurs visages, une atmosphère glacée venait de tomber dans le bureau. Le commandant venait de réaliser que même s'ils avaient accepté, ils n'auraient pas bu, leur casque les aurait en empêcher. Il se rassit dans son fauteuil, regardant au sol, gêné.
-Vous avez demandé audience auprès de notre officier, annonça Luther. Il était sur la droite du sergent, en retrait. Sur sa gauche, se trouvait Dord. Parlez.
Il s'éclaircit la voix, ses joues étaient empourprées, il transpirait. Il posa sa main sur son bureau, comme pour soulager de son poids ses jambes qui tremblaient. Il avait voulu piéger les Astartes dans un jeu politique, pour exiger surement d'eux une quelconque contrepartie ou honneur. Les croisés n'étaient pas tombés dedans, ils l'avaient juste enjambé. Le sergent leva la tête, au-dessus de la cheminée trônait un imposant tableau, dans des dimensions incroyables. C'était une immondice. Il représentait le commandant général, vingt ans plus tôt, dans la fleur de l'âge, il était debout, il se tenait fièrement, une botte posée sur le cadavre d'un chef ork, il célébrait sa victoire en brandissant bien haut un sabre de combat. Cette scène n'eut jamais lieu. Il pouvait le parier. Cette peinture qui avait dû coûter une fortune le dégoutta de l'homme devant lequel il se trouvait.
-Je, hum...
-Parlez. Ou nous partons. Lança Dord.
Il était passablement énervé, et semblait difficilement se contenir, il était sur le point d'exploser de rage.
-Oui, pardonnez-moi. Dit-il en s'inclinant. Le réapprovisionnement va bon train, vos réservoirs sont bientôt remplis, et les munitions et le matériel que vous nous avez demandés arrivent bientôt dans vos cales.
Les choix de tournure de phrase et les mots choisis par cet homme étaient obséquieux. Le sergent Brüner s'entait lui aussi l'agacement monter en lui.
-Mais la liste transmise par votre, eu, frère Techmarine, comporte des pièces détachées très rares ou très anciennes. Nous devons envoyés des équipes de prisonniers dans nos propres réserves, loin dans la station inhabitée pour espérer trouver les dépôts où elles sont rangées.
-Vous envoyez vos prisonniers dans les couloirs et dépôts de la station ? Sans surveillance ? Demanda Luther, écartant les autres déclarations du commandant général.
-Nous n'avons pas assez de gardiens pour surveiller les prisonniers autorisés à travailler sur la station, se défendit le commandant. Et puis, ils ne peuvent pas s'enfuir, ils sont obligés de revenir en cellule, sans quoi ils mourraient de froid et de faim en errant dans ses coursives.
-Je ne veux pas savoir si c'est possible d'avoir ce matériel, je veux savoir dans combien de temps.
Le sergent glaça d'effroi son interlocuteur, il l'avait dit sur un ton cassant, sec, sa patience avait des limites, et elles commençaient à s'éroder.
-Aux vues de ce que vous avez demandé, des difficultés de retrouver les dépôts où s'est stocké, et que certaines pièces sont introuvables, nous devons les faire usiner, à la surface de la planète, dans nos arsenaux, je dirais, quatre jours supplémentaires.
-Vous en avez deux.
Le sergent et ses hommes tournèrent les talons pour partir.
-Messeigneurs, Je me dois de formuler une demande officielle auprès de vous.
Le sergent se tourna légèrement, regardant le petit bonhomme gras et suintant de peur sur son tapis hors de prix. Ses optiques rouge sang le fusillèrent du regard. Il trouva la dernière once de courage qui dormait en lui pour formuler sa demande.
-Nous sommes au bord d'une émeute, je n'ai plus assez de gardes, ni de gardiens pour contenir les prisonniers. Je suis obligé de faire travailler nos pires détenus à l'entretient de cette station qui tombe en ruine, nous n'arrivons pas à la réparer assez vite pour contrer les ravages du temps, s'ils arrivent à s'évader ils iront à la surface et massacreront tous les habitants qu'ils verront. Je fais la demande auprès de vous, messeigneurs, de prendre en charge deux cents détenus. Cela permettrait à la station de survivre quelques mois de plus. Nous vous fournirons les implants nécessaires si vous voulez les lobotomiser. Votre frère Techmarine pourrait le faire avec notre bénédiction.
-Accordé.
Et les trois Astartes sortirent du bureau du commandant, qui s'avachit dans son fauteuil, tout tremblant de peur, suant à grosses goûtes. Il finit d'un trais son verre qui était resté posé sur son bureau, et s'effondra, en sanglotant, devant son immense cheminé.
Les deux jours étaient passés. Aucune communication entre le Revenant et la station Endless Hope, n'eut court dans ce laps de temps. Le balai des navettes se retrouva amoindri au fur et à mesure que toutes les denrées nécessaires fussent apportées et stockées. Les rares navettes qui faisaient encore le chemin apportaient le matériel rare et important dont les Astartes avaient discutés avec le commandant général. Il venait des manufactorums de la surface par l'ascenseur spatial reliant la station à la planète ou bien des coffres forts de stockage, à l'autre bout de la prison. Le sergent ainsi que ses hommes attendaient, en formation, en armure complète, armes au poing, ils étaient alignés en trois colonnes de quatre croisés, derrière lui. Ils attendaient une des dernières navettes. Derrière l'escouade de croisés, il y avait trois escouades en armes et armures, de la sécurité du vaisseau. Enfin elle arriva, une énorme navette de transport, mais pas de marchandise, une navette de transport de passagers. Elle traversa elle aussi le bouclier atmosphérique, fit un demi-tour pour présenter sa rampe de débarquement vers la garde qui attendait de pied ferme les nouveaux arrivants. Elle se posa lourdement, elle devait être surchargée, les amortisseurs des patins s'affaissèrent sous le poids. La rampe s'ouvrit. En émergea un groupe de gardiens, fusils à pompe braqués derrière eux, vers la cargaison, deux cents prisonniers. Ils débarquèrent difficilement dans le hangar, ils portaient tous un uniforme orange, sale, crasseux, troué parfois. Certains détenus n'avaient pas de chaussures et marchaient pieds nus sur le métal froid du hangar. Ils étaient tous enchaînes. Aux pieds, aux mains et aux coups. Ils étaient aussi enchaînes aux détenus situés devant et derrière eux. Une longue procession émergea, encadré par des gardiens. On aurait dit un long dragon des mers ou un serpent des jungles hostiles, mais fait d'hommes emprisonnés. Quand la longue procession finit par sortir complètement de la navette, l'officier commandant des gardiens de la prison, salua protocolairement les Astartes, et remis la garde des prisonniers, à l'officier des escouades de sécurité du navire. Les gardes rembarquèrent aussi vite que possible et la navette repartie comme elle était venue. Ils semblaient soulagés en repartant, l'embarquement et le trajet avec autant de détenus et si peu de gardes avait dû être éprouvant.
L'officier des escouades de sécurité regarda le sergent Brüner et hocha de la tête. Tout était en ordre, aucun ne manquait à l'appel, et sa tablette de donnée lui donnait le dossier de n'importe quels détenus devant lui. Il suffisait de scanner le code barre qu'ils avaient de tatoué sur le poignet. Makloff, officier des escouades de sécurité, effectua deux cercles concentriques de son index dans les airs, de sa main droite. Aussitôt les trois escouades de gardes, encerclèrent les détenus enchaînés. Le sergent s'avança.
-Séparez les détenus qui ont commis des crimes de sang, ou des actes hérésie des autres. Ils seront envoyés à l'Apothecarium. Le frère Gauron s'occupera d'eux. Les autres, écoutez-moi bien. Sa voix portait sans problème, les hauts parleurs de son casque de guerre, la faisait résonner aux oreilles des prisonniers.
-Vous avez maintenant une dette envers le chapitre des Black Templars, et vous la paierez, d'une manière ou d'une autre. Vous serez incorporés en tant que servitors ou soldats des forces de sécurité. Le moindre manquement sera puni de mort. Vous vous rachèterez aux yeux de L'Empereur, ou vous mourrez en essayant.
Au deuxième rang, un prisonnier qui fixait le sergent depuis le début du discours cracha au sol, dans un geste de défis. Sans attendre, le sergent fonça sur lui, écarta d'une main le premier rang qui le gênait, et agrippa le détenu par la gorge. Il le souleva, pour le mettre au niveau de son visage, à trois mètres du sol, sa poigne de fer l'étranglait et il commençait à changer de couleur. Les prisonniers qui étaient enchaînés à lui tombèrent au sol, et se retrouvèrent suspendu au-dessus du sol par leurs chevilles. Le sergent les soulevait tous les trois. Le prisonnier dans ses mains était couvert de tatouages grossiers, une dague noire courait tout le long de son crâne chauve, il avait les dents pourries, et ses yeux révulsés étaient d'un jaune maladif.
-Votre service commence maintenant.
Il le lança contre le sol. Sa tempe heurta le sol la première, le prisonnier perdit connaissance sous la violence de l'impact, entraînant par leurs chaines les prisonniers attachés. Une mare de sang se répandait sous lui. Une ligne de détenus entraînés par leurs chaines tomba avec lui.
-Capitaine Makloff, je vous laisse le soin.