Une dernière promesse

Chapitre 33 : Destination finale

2658 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour il y a environ 2 mois

Installé devant les écrans d'Alphys, Frisk surveillait l'avancée des humains. Ils se trouvaient toujours près du laboratoire et patientaient pendant que leur chef cherchait toujours un moyen de percer les défenses de la scientifique. Si tout se passait bien, ce soir, ils seraient tous libres et en dehors de la montagne.


Un silence inhabituel régnait dans la grande cave où les monstres s'étaient réfugiés. Depuis le discours d'Asgore, une heure plus tôt, tout le monde s'était muré dans l'angoisse de ce qui allait se produire. Leur futur reposait désormais sur Papyrus, Asriel et lui. Ses deux compagnons d'infortune n'étaient pas en meilleur état. Asriel se rongeait les ongles et Papyrus ne tenait plus en place. Il avait d'abord nettoyé la pièce de fond en comble, et il était maintenant en train de faire la vaisselle dans son armure de cuir.


Il n'était pas le seul nerveux. Sans suivait le moindre de ses gestes du regard et avait perdu le sourire, tout comme Undyne, occupée à réviser leur stratégie avec Toriel et Asgore sur la table du salon. Tous commençaient à réaliser à quel point la situation allait être complexe et délicate. Si quelque chose se passait mal, les conséquences qui en découdraient seraient catastrophiques.


« Tu crois vraiment qu'ils vont nous écouter ? demanda Asriel une nouvelle fois.


— Il le faut, répondit Frisk. Parce que je ne sais pas ce qu'il se passera s'ils n'écoutent pas. »


Asriel ne parut que peu convaincu. Sans tenta un sourire pour le rassurer, mais même lui n'avait plus l'air d'avoir envie de plaisanter. Undyne termina son explication, puis se redressa.


« Je pense que nous sommes prêts à y aller. Vous allez rester dans le laboratoire pendant qu'on fait le tour des Hotlands pour se positionner au nord et au sud de votre position. Alphys vous enverra un message quand vous pourrez sortir, puis elle désactivera les barrières.


— D'accord, répondit Frisk en se levant. »


Ils avaient passé la soirée de la veille avec la capitaine de la garde royale pour apprendre quelques techniques de défense basiques, puis avec Sans pour travailler sur ce qu'ils allaient dire au groupe d'humain. Frisk se sentait prêt à affronter ce nouveau péril, et il espérait qu'il en soit de même pour ses compagnons.


Undyne enfila son casque et sonna le départ. Après une longue accolade avec Alphys, elle quitta la pièce, suivie d'Asgore et de Toriel. Les enfants suivirent Papyrus, et Sans ferma la marche. Alors qu'ils allaient sortir, Sans retint le bras de Frisk.


« S'il te plaît, ne prends pas de risques inutiles. Si la situation est désespérée, attrape le gamin et Papyrus, et retournez vous planquer ici. Je ne veux pas... Je n'ai pas envie que mon frère soit encore une victime collatérale.


— Je ferai de mon mieux. J'ai confiance. »


Le squelette grogna, et le relâcha. Devant la base, Undyne et Asgore motivaient les soldats royaux qui s'étaient portés volontaires pour les accompagner dans cette dangereuse mission. Ils avaient tous le visage fermé, conscients des risques. Une partie des troupes, menée par Undyne et Asgore, se dirigea vers l'ascenseur. L'autre les suivit quelques minutes plus tard, avec Toriel. Sans enlaça longuement son frère, puis monta avec eux. Papyrus, Frisk et Asriel furent les derniers à embarquer.


Les portes se refermèrent, les enfermant tous les trois.


« Il est temps de prouver que tout le monde peut devenir une bonne personne, soupira Frisk.


— J'espère que tu as raison, marmonna Asriel. La dernière fois que j'ai essayé de parler à des humains, ça ne s'est pas exactement bien passé.


— C'était il y a longtemps, Asriel. Ils ont changé. Comme toi.


— Restons optimistes, jeunes princes ! s'exclama Papyrus, en posant une main sur leurs épaules respectives. Je ne suis plus certain de vouloir entrer dans la garde royale après tout ce que m'a fait faire Undyne hier, donc j'ai bien l'intention que ce plan réussisse. Je ne sens même plus mon pelvis ! »


La remarque réussit à dérider les enfants qui rirent doucement. Une voix féminine annonça le laboratoire, puis les portes s'ouvrirent. Les derniers soldats, ceux de Toriel et Sans, étaient en train de quitter l'endroit par l'arrière. L'opération ne commencerait que dans une demi-heure, aussi les trois compagnons en profitèrent pour avaler quelque chose et revoir une dernière fois leur discours.


À l'extérieur, les voix des hommes devinrent brusquement perceptibles, signe que les barrières de défense venaient d'être abaissées. Frisk saisit la grande banderole blanche qu'ils avaient emmenés avec eux, Asriel s'installa à côté de lui, et Papyrus derrière, une main discrètement posée sur un os taillé qui lui servirait d'épée si les choses tournaient mal. Alphys avait confectionné un fourreau sombre qui la masquait presque entièrement, afin que les humains ne prennent pas leurs intentions de la mauvaise manière.


« Ils s-sont prêts, annonça la voix de la scientifique vers l'écran. J'ai d-déverrouillé les portes. C'est q-quand vous voulez. »


Frisk lança un regard à Papyrus et Asriel. Ils hochèrent la tête. L'enfant prit une grande inspiration, déplia son drapeau blanc et ouvrit les portes. Presque immédiatement, les hommes réagir. Les armes se levèrent et se braquèrent toutes sur eux. Asriel eut un mouvement de recul, nerveux, mais Frisk lui tint le bras, et s'avança lentement, le drapeau bien en évidence. Papyrus resta en arrière comme Undyne le lui avait demandé, prêt à intervenir au moindre problème.


En apercevant l'humain, les assaillants se concertèrent du regard et des murmures s'élevèrent. Comme prévu, son apparition était une surprise. Cela conforta Frisk dans l'idée qu'il y avait encore quelque chose à faire. Du coin de l'œil, il remarqua Undyne, perchée un peu plus en hauteur, tapie dans l'obscurité, sa lance à la main. Dans son armure noire, elle était presque invisible. Cette vision familière le rassura.


« Je m'appelle Frisk. Nous venons en paix. Nous venons discuter pour trouver un compromis.


— Vous êtes armés ? cria Barry Flicker, l'homme qui les avaient conduits dans cette situation.


— Non, répondit Frisk.


— Tant mieux. »


Il leva son arme. Frisk sentit son cœur se soulever. Il sentit à peine les deux bras de Papyrus se refermer sur lui avant d'être tiré en arrière alors qu'un déluge de balles s'abattait sur eux. Réfugié derrière un mur, Papyrus maintenait une barrière magique autour d'eux.


En quelques secondes, Undyne bondit de son perchoir, devant eux. Son unique œil, horrifié, balaya les deux enfants et le squelette des pieds à la tête.


« Vous êtes blessés ?


— N... Non, répondit Frisk, nerveux.


— Je vais bien aussi, répondit Asriel. »


Ils attendirent la réponse de Papyrus, qui tenait toujours Frisk contre lui. L'adolescent releva les yeux sur lui. La main crispée sur son épaule, Frisk réalisa qu'il tremblait.


« Papyrus ? »


Les genoux du squelette lâchèrent d'un coup et il s'effondra dans ses bras.


« Papyrus ! »


Undyne, qui surveillait les humains, tourna vivement la tête. Elle leva sa lance, prête à attaquer.


« Non ! Attends ! cria Frisk. »


Il pointa le groupe d'humains. Les autres soldats avaient désarmé Flicker et semblaient être en train de se disputer. Sa décision n'avait pas fait l'unanimité, loin de là. La capitaine retint son geste. Elle lança un regard nerveux vers les humains, puis se rapprocha de Papyrus.


Avec Asriel, Frisk détacha son armure pour regarder en dessous. Un impact de balle était clairement visible sur la partie vide de sa colonne vertébrale, entre sa cage thoracique et son pelvis. Frisk fouilla dans ses poches à la recherche d'un bonbon, et le glissa rapidement entre les dents du squelette pour faire remonter ses points de vie. Une lumière verte illumina la blessure, mais la marque ne disparut pas pour autant.


Undyne appuya légèrement sur la blessure. Papyrus rua en arrière et grogna de douleur.


« Il a besoin de vrais soins. Je... Je vais aller chercher Toriel. Restez avec lui.


— Mais les humains ? s'alarma Asriel.


— Restez à l'abri. Je viens d'avoir Asgore dans l'oreillette, il est en embuscade. S'ils bougent, il ouvrira le feu. »


Le prince hocha la tête. Undyne prit de l'élan et bondit sur la paroi rocheuse au nord, avant de disparaître dans l'obscurité. Il ne fallut pas plus de dix secondes pour Sans se matérialise à côté d'eux, complètement paniqué.


« Papyrus ! Qu'est-ce qui s'est passé ?


— H-Hey Sans, tenta son frère. Je v-vais bien.


— Flicker a tiré sans avertissement, répondit Frisk. Je ne comprends pas pourquoi. Il est plutôt modéré d'habitude. Plus subtile. Ce n'est pas normal. »


Toriel traversa la zone des humains sans même leur accorder un regard. Certains eurent un mouvement de recul, mais ils ne réagirent pas plus que ça. La reine s'accroupit au chevet du squelette et observa sa blessure.


« Papyrus, est-ce que tu peux bouger tes jambes ? »


Le squelette sembla se concentrer pendant quelques secondes, mais il n'y eut aucun mouvement. Ses yeux se remplirent de larme.


« Pourquoi je ne peux pas les bouger ?


— Tu as mal ?


— N... Non ? »


Le visage de la reine se referma. Frisk et Sans échangèrent un regard inquiet. Elle hésita, puis se tourna vers le laboratoire.


« Je vais l'évacuer. Vous deux, dit-elle aux enfants, vous venez avec moi. Tout ce plan était une terrible idée.


— Non ! réagit Frisk. On peut encore les raisonner ! Il a agi seul.


— Frisk, il vient de tirer à bout portant sur vous ! Je ne vais pas risquer encore une fois la vie de mes enfants. »


Frisk se releva.


« Frisk, non, menaça Toriel d'une voix plus grave. »


L'enfant ne l'écouta pas. Il ramassa le drapeau blanc et s'avança vers les humains d'un pas déterminé.


« Frisk ! Frisk, reviens ici ! »


L'adolescent ne se retourna pas. Il entendit Sans dire qu'il allait avec lui, et de s'occuper de Papyrus. Toriel protesta un instant, mais finit par abdiquer lorsque le squelette se mit à gémir de douleur.


L'enfant s'approcha du groupe et planta fermement son drapeau dans le sol.


« Je suis Frisk Dreemur, ambassadeur des monstres. Nous sommes venus ici pour discuter et éviter une nouvelle guerre entre votre peuple et celui des monstres. Il y a d'autres solutions, il y a d'autres moyens.


— Ne l'écoutez pas, cria Flicker. Il est corrompu. Ils lui ont retourné le cerveau. Ils nous ont tiré dessus dans cette ville enneigée plus tôt.


— Tout comme vous. Ils n'ont fait que se défendre ! Vous venez de tirer sur un de mes amis alors qu'il n'était pas armé, je crois que vous être mal placés pour discuter de ça.


— C'est un sorcier ! s'égosilla l'homme. Il est corrompu par leur engeance ! Ne l'écoutez pas ! »


Un des humains se détacha et s'approcha. Il lâcha son arme à terre.


« Nous nous excusons de son comportement, dit-il en pointant Flicker. Nous n'avons jamais voulu ça. Cette expédition ne devait même pas avoir lieu, elle s'est décidée au dernier moment. Il nous a dit que si on venait, on trouverait un trésor bien plus important que tout ce qu'on a vu dans notre vie, une technologie capable de nous offrir un accès à l'électricité gratuit et indestructible. »


Frisk se retourna, les sourcils froncés. Sans parut perplexe lui aussi. Il s'approcha et posa une main sur l'épaule de l'adolescent. Son interlocuteur recula légèrement, impressionné par le squelette.


« Vous parlez du CORE ? demanda Sans. Comment vous pouvez être au courant de son existence ? Qui vous en a parlé ?


— Flicker. Il dit qu'il l'a vu. Il dit qu'il a déjà vu ce dont il était capable, et qu'il fallait à tout prix le prendre avant votre peuple. »


Frisk sentit son cœur faire un bond.


« Sans, fais sortir son âme. »


Le squelette ne se fit pas prier. Il pointa la main vers Flicker, retenu les bras en arrière. Un cœur rouge sortit de sa poitrine. Figés, les humains observèrent l'âme avec les yeux écarquillés. Frisk et Sans également, mais pas pour la même raison. Sans relâcha l'attaque et l'âme s'évapora.


« Sorcier ! hurla Flicker en se débattant. Créatures de Satan ! Vous ne voyez pas ce qu'ils peuvent faire ? Ils utilisent leur magie pour corrompre nos âmes, et ensuite ils s'en servent pour réanimer les morts ! Je le sais ! J'avais anéanti leur espèce ! En entier ! Et maintenant ils sont revenus ! Ouvrez les yeux ! »


Tout devenait plus clair. L'homme se souvenait. Il se rappelait des resets, mais il n'avait pas eu les connaissances pour comprendre ce qu'ils étaient. Aveuglé par sa haine des monstres, il avait réagi comme ses ancêtres du passé, par la violence.


Frisk eut alors une horrible révélation : avait-il provoqué ce qui était arrivé ? Depuis qu'ils vivaient à la Surface, il avait agi comme si tout était normal et que rien n'était arrivé. Depuis quand Flicker se rappelait-il ? Avait-il vécu les premiers resets ? Si oui, cela expliquait pourquoi il avait perdu l'esprit. Incapable de comprendre pourquoi il revivait le même jour encore et encore, il s'était réfugié dans un mécanisme d'auto-défense violent et destructeur à l'encontre de ceux qu'il considérait comme responsable.


L'adolescent tomba à genoux, sous le choc. Sans posa une main sur son épaule.


« Ce qui est fait est fait, dit-il d'une voix calme, visiblement arrivé à la même conclusion. On... On devrait se rendre au palais, pour discuter plus calmement de tout ça avec le roi.


— Nous sommes d'accord, répondit l'homme d'une voix calme. Mais... Pour lui ?


— Il patientera en cellule, intervint Asgore, sortant de l'obscurité. Il devra répondre de son acte devant sa justice et devant la nôtre pour ce qu'il a fait. Mais ne partons pas sur de mauvaises bases. Enchanté, je suis le roi Asgore Dreemur, roi du peuple des monstres. »


La carrure impressionnante du monarque ne laissa pas les hommes de marbre. Beaucoup d'entre eux restèrent un long moment la bouche grande ouverte, sous le choc. Les gardes royaux sortirent eux aussi de leur cachette, et sous les ordres du roi et d'Undyne, retournèrent vers le laboratoire pour ordonner la fin de la quarantaine et la libération de tout le monde.


Alors que le roi discutait avec les hommes, Sans attrapa le bras de Frisk.


« Je vais devoir y aller aussi. C'est mon devoir en tant que juge.


— Je vais rester avec Papyrus, répondit l'enfant. On se voit plus tard ? »


Sans hocha la tête, et rejoignit Asgore. L'adolescent se tourna vers Asriel, qui était resté lui aussi, près d'Undyne. Tout s'était passé si vite qu'il n'avait même pas eu le temps d'en placer une. Le prince, rassuré par la tournure des événements, s'autorisa enfin à souffler.


« Maman va te punir pour six mois, tu en as conscience j'espère ? se moqua-t-il.


— Que puis-je dire ? répondit l'adolescent. J'aime vivre dangereusement.


— Redescendez dans le laboratoire, nous dit Undyne. On vous rejoindra une fois le conseil terminé. Et dites à la reine de nous rejoindre.


— D'accord !


— Oh, et gamin ? l'interpella-t-elle. Bien joué. »


Frisk lui offrit un grand sourire, puis Asriel et lui se dirigèrent vers l'ascenseur. Le sort des humains et des monstres se trouvait désormais entre les mains du conseil royal. Frisk était confiant. Il avait déjà vécu cette scène. Il savait qu'ils parviendraient à un compromis, tôt ou tard. Il pouvait leur faire confiance.


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