Fragments de mémoire

Chapitre 4 : No tears left to cry

3577 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 18/08/2024 12:38

Cette histoire est un one-shot, faisant partie des mémoires des jeunes années de Rin et Klaus, qui apparaissent tous deux dans l'histoire "Une courbure de l'espace temps" (se déroulant au fil des saisons de The Umbrella Academy - liens dans mon profil).

---

Contexte : Rin est une jeune-fille punk de 20 ans, née avec un pouvoir étrange qu'elle met à profit pour des travaux illégaux : elle peut se téléporter, se rendre invisible ou intangible. Au gré de plusieurs nuits de garde-à-vue, il y a un peu plus d'un an, elle a fait la connaissance d'un curieux voisin de cellule prénommé Klaus... lui aussi doté d'un pouvoir extrêmement invasif : celui de communiquer avec les morts.


TW : Références à des usages de drogue - Troubles du stress post-traumatique (TSPT) - Sexualité (non explicite) - maladie d'un proche.


---


Le ciel était vraiment très bleu, ce jour de 2009, je m'en souviens car je sais que la luminosité revenue - après les mois d'hiver - avait tout changé d'un coup à mon humeur. La grisaille et la pluie peuvent être extrêmement tenaces, sur The City, peut-être parce que l'océan n'est pas loin. C'était comme si l'anticyclone avait voulu coïncider avec la sortie de Klaus de désintox. La deuxième, en un peu plus d'un an. J'ai cessé de compter vers vers six ou sept, je crois.


Je n'avais pas sû qu'il y avait été envoyé, cette fois. Je l'ai compris par le silence, et par le fait qu'il ne toquait plus à ma fenêtre, toujours couverte de stickers. Je n'avais pas voulu croire qu'il avait pu se passer quelque chose de pire. J'avais déjà compris, je pense, que peu importaient les comportements à risque qu'il adoptait, Klaus s'en relevait toujours, d'une façon ou d'une autre.


Cette fois encore, il y avait été envoyé pour trente jours, comme à chaque fois après ça. Et autant de soirs - lorsque la nuit venait - je tremblais à cette idée, en regardant en direction de l'escalier de secours par lequel il ne paraîtrait pas. A sa première désintox, l'an dernier - au moins - il n'avait pas vraiment su à quoi s'attendre. Cette fois, à l'inverse, il avait dû y entrer en sachant pertinemment ce qu'il allait s'y passer. Qu'au bout de vingt-quatre heures, il devrait affronter les assauts de l'au-delà, en gérant de concert les symptômes du sevrage. Que la première semaine serait rude, malgré la médicamentation de substitution, car elle qui lui fichait des effets secondaires qu'il détestait, en plus de le vouer à des nuits sans sommeil.


Les services sociaux, les bénévoles, et même le Dr Milligan qui était et est - je le crois toujours - une femme admirable, n'avait vraiment conscience de ce qu'ils lui infligeaient en croyant le sauver : plus ils le rendaient sobre, plus ils l'exposaient à ce qui le consumait et qu'il ne pouvait plus bloquer. Les fantômes l'assaillaient sans cesse - dans des dortoirs de quatre qui plus était - au point que l'isolement était souvent l'option choisie. Il se retrouvait relégué dans une 'chambre' pour lui seul, heureusement pourvue d'une fenêtre et d'une porte qu'ils avaient tous compris devoir ne pas fermer. Mais la solitude n'est pas, et n'a jamais été autre chose qu'un déclencheur, pour ce que Milligan a nommé - chez Klaus - du nom de TSPT.


A la fin de la première quinzaine, cette fois, j'avais appris qu'il m'avait désignée comme 'représentante des proches', auprès du service de désintox de Lakeshore Hills. Quand Milligan m'avait faite venir pour être présente, tandis qu'elle lui délivrait ce diagnostic de trouble de stress post-traumatique qu'il n'était pas en mesure d'écouter. J'étais déjà son contact de référence chez les flics - quelle ironie - ce qui impliquait aussi assez souvent d'aller le chercher, quand ils en avaient marre de le nourrir et de l'héberger. De mon côté et pour vous dire toute la vérité, ma mère était en train de mourir de son cancer, et ma grand-mère était incapable de gérer la paperasse de l'hôpital. A à peine vingt ans, je ne crois pas que j'étais en mesure d'encaisser tout ça. Et je crois qu'on fond de lui, même s'il ne pouvait pas l'exprimer, Klaus s'en voulait terriblement d'être un poids, en plus de tout ça.


Malgré tout ça, ce jour-là, j'étais surtout magnifiquement heureuse que ses trente jours soient terminés, et de pouvoir aller le chercher. Même si je savais quelle serait sa première action en sortant, avant même d'aller manger. Un battement de paupière, et il aurait déjà 'rechuté'. Peu importerait ce qui se serait passé en un mois : de sortir et pouvoir de nouveau faire couler l'une ou l'autre substance dans son sang serait pour lui un soulagement quasi orgasmique, et moi je crois que je ne voulais voir que ça.


Rétrospectivement, je sais que j'aurais dû essayer de lui donner la force de lutter, plutôt que de le laisser s’assommer et s’enivrer. Même si je l'ai aussi aidé à se supporter lui-même, j'ai été un catalyseur de ce avec quoi il se noyait. J'ai même encouragé certains de ses comportements, je le crois. Mais j'étais jeune, dépassée, et peut-être que moi-même j'essayais de fuir tout ça.


Quoi qu'il en soit, c'est avec un sourire inhabituel que j'ai passé les portes de Lakeshore Hills, et que je me suis présentée au comptoir d'accueil dans le couloir, derrière lequel le type de l'époque m'avait considérée de la crête aux Dr Martens. Il s'appelait Gavin Cromwell : je m'en souviens car le suivant se nommait Alvin Campbell, ce qui m'a toujours fait rire. Je l'ai regardé - moi aussi - et malgré son air nonchalant, il semblait me resituer parfaitement. Quand le personnel de la désintox se met à vous reconnaître, c'est que vraiment, votre vie a changé.


"Tu viens chercher Klaus", m'a-t-il dit, et j'ai hoché la tête.

"Il est prêt depuis 6h du matin. On en peut plus de l'entendre chanter Beyonce".


J'ai éclaté de rire, un son dont ce couloir aux murs jaunes qui n'ont jamais été repeints n'était probablement pas souvent témoin. Depuis les portes du fond, Klaus a dû m'entendre, lui aussi, parce qu'avant même que Gavin l'appelle, il est apparu en saluant une dernière fois l'un des types qui avait partagé son mois d'infortune. Il portait un pantalon en tartan lila et un pull à larges mailles, en dessous de son éternel manteau élimé. Il avait l'air heureux comme jamais, même si sa tête trahissait son manque cruel de sommeil.


"Gavin, mon pote", a-t-il lancé, "je t'ai laissé mon sac au casier pour la prochaine fois".


L'homme a soupiré tout en déposant sur le comptoir sa feuille de sortie. Il lui a restitué l'une de ses barres de granola préférées, aux fruits rouges cette fois, ainsi qu'un stick à lèvres glossy à la pèche et son petit couteau multifonctions.


"Tu crois qu'on a que ça à faire de garder ton pyjama au chaud ?"

"Si je le garde moi, je vais le perdre. Je n'ai aucune utilité de ce truc là".


Gavin a râlé, mais lui a jeté son jeton de sobriété. Klaus avait utilisé le premier pour saboter un distributeur automatique de cigarettes, et celui-ci ne connaîtrait certainement pas un sort plus glorieux. Il l'a envoyé dans sa poche, tout comme son papier de sortie froissé, avant de se tourner vers moi en exhultant littéralement de joie.


"Rin-rin ! Tu as changé de couleur de crête !".

Tandis qu'il me serrait à m'en faire tousser, Gavin était en train de fourrer dans sa bouche des chips piochée derrière son comptoir.

"Décampez, avec vos clous et vos paillettes. Klaus, n'oublie pas ton rendez-vous de suivi psy, dans deux semaines".

Oh ça, il l'oublierait, c'était certain, mais il a répondu avec une voix de miel :

"Pour rien au monde je ne manquerais mon petit quart d'heure cosy avec Clémentine".

Gavin a rectifié pour la forme :

"Caroline. Mais pour toi c'est Dr Milligan".


Klaus lui a adressé un petit geste pour lui signifier que ça n'avait pas d'importance, et m'entrainait déjà en direction des portes vitrées qui entérineraient définitivement sa sortie.


"Adios, burritos!" leur a-t-il lancé, et tandis que la porte se refermait derrière nous, il a doublé cette interjection de :

"Catch you later, cauliflower..."


Sur le pas de l'immeuble, sous le soleil de février, je l'ai regardé, réalisant qu'il lui faudrait sans doute moins d'un an pour être de retour pour trente nouveaux jours, recommençant un cycle sans fin. Lui aussi, le savait. Mais dans l'instant, la seule chose que je lui ai dit a été :


"Putain, tes conneries m'ont encore manquées".


Il a cédé à un rire léger, comme si tout ce qu'il venait de vivre était déjà exorcisé, par le simple fait d'être dehors. Et aussi, peut-être, parce qu'il lui faisait plaisir que quelqu'un ait regretté son absence.


"Je suis comme la neige", m'a-t-il dit en descendant les quatre marches et en passant dans le minuscule square qui bordait le bâtiment. "C'est excitant quand elle tombe, mais on en a marre en deux jours".

J'ai secoué la tête et l'ai suivi, songeant qu'il avait peut-être envie de profiter de ce coin de verdure maintenant qu'autre chose que des lumières blafardes aux néons étaient au dessus de sa tête. Mais je me trompais bien sûr lourdement.

"Sans doute", lui ai-je répondu en entrant dans son jeu. "Si elle me gène, je la dégagerai avec une pelle".

"Vraiment ?"

Il s'est arrêté, quelque peu inquiet, et j'ai immédiatement rectifié.

"Bien sûr que non".

Alors il a rigolé légèrement.

"T'es mon humain préféré, tu sais ça ?"

"Ah oui ? Ce n'est plus David Bowie ?"


Il s'est agenouillé près d'une gouttière condamnée, remplacée par une autre plus moderne, plus loin. Là, il a déboité la grille qui en bouchait l'évacuation, et a fourré son bras en entier à l'intérieur, tout en me regardant au dessus de lui.


"Non, il a chuté dans la tier-list".


J'ai remarqué que ses mains ne tremblaient pas, ce qui était vraiment rare. Il m'était vraiment pénible de constater que la désintox faisait du bien à son corps, même si elle érodait son âme, en dehors du manque de sommeil. Aujourd'hui, je sais que ce que Klaus s'est infligé année après année n'était viable que parce que son pouvoir le maintenait en vie, comme par un mince fil, tout le temps. Malgré tout, il s'est usé. Et à vingt ans il l'était déjà.


Il a souri en grand en touchant ce qu'il était venu chercher, et a tiré de sa brillante cachette un petit sachet ziploc transparent, rempli de son trésor. De l'herbe bien emballée, du papier à rouler, un briquet, un petit sachet de meth, trente dollars... et des bonbons LifeSavers.


"Klaus, t'as caché de la dope dans le mur du bâtiment de la désintox ?"

Tout en vérifiant que tout y était bien, il m'a souri radieusement.

"C'est le dernier endroit où quiconque chercherait. Ne suis-je pas magnifiquement futé ?"

Je le savais, qu'il ne passerait pas la soirée sans rien prendre. Mais c'était tellement énorme que je lui ai répondu en pouffant :

"Milligan péterait les plombs".


Je l'ai mentionné, j'ai toujours trouvé que le Dr Milligan avait fait 'de son mieux' avec Klaus, ce qui ne veut pas dire qu'elle n'ait pas fait d'erreurs. S'il y a bien quelque chose que j'ai compris, c'est qu'il est très difficile de vouloir aider Klaus sans se planter à un moment ou un autre.


Même si Milligan savait qui il était et avait encore une forme de mémoire de l'époque médiatique de l'Umbrella Academy, je ne crois pas qu'elle ait jamais eu les moyens de distinguer ce qui relevait de son pouvoir, de son parcours de vie et de ses addictions. Parce que c'était inextricable, de toute façon. Et la solution qu'elle avait choisis était malheureusement de faire comme si les fantômes n'existaient pas, pour se raccrocher à la thérapeutique qu'elle connaissait, je n'en doute pas. Klaus a toujours eu ce problème : son pouvoir, le trouble de l'attention qu'il se trimbale probablement depuis tout petit, et ses traumas, sont - tous - invisibles. Ce n'est pas une jambe en moins très évidente, ou un pouvoir lui permettant de se téléporter comme moi. De mon côté, je peux faire une démonstration pour convaincre les gens que c'est réel. Lui, ne le peut pas. Et comme beaucoup 'd'invisibles', il doit lutter bien plus pour exister.


Milligan a quand même eu le mérite de comprendre, au fil des ans, qu'elle le verrait sans cesse revenir. Faire un pas sans volonté, puis rechuter inlassablement. En essayant simplement de lui donner un espace où souffler, au fil des ans, sans plus réellement essayer de le 'sevrer' définitivement. Je crois qu'à partir de 2017 et même s'il était toujours content d'en sortir, Klaus ne rechignait plus à aller en désintox. Milligan l'aidait à supporter au mieux cette 'formalité', et fermait les yeux sur le fait qu'il se débrouillait pour ne pas prendre ses médicaments.


"Et il y a autre chose, viens voir", m'a-t-il dit en fourrant le ziploc dans sa poche, puis en se relevant. Puis il a trottiné jusqu'au niveau d'un buisson, situé sous l'une des fenêtres à barreaux stylisés.

"Je les ai gardés pour qu'on se les partage, regarde moi ce magot".


Là, derrière le buisson, se trouvait tout un petit tas de Twinkies soigneusement emballés, qu'il avait dû laisser tomber par la fenêtre dans le but de les capitaliser, jour après jour.


"T'as vraiment pas perdu ton mois".

"J'ai aussi lu 'L’Être et le Néant' de Sartre, et toutes les BD de Bob l'éponge".

Pendant qu'il extirpait un sac en plastique froissé de sa poche et rassemblait son butin, je lui ai demandé plus sérieusement :

"Comment tu as géré, cette fois ?"


Je savais pertinemment que son attitude en apparence radieuse du moment n'était possiblement en rien représentative de la façon dont il avait vécu son 'séjour'. Au rendez-vous de mi parcours et diagnostic, c'était un vieux chiffon froissé que j'avais littéralement croisé. De lui-même, il n'en parlerait pas. Mais je savais que - si je le demandais - il me le confierait. Il a secoué la tête en regardant ses Twinkies, perdant juste son sourire.


"J'ai eu le droit de garder ma musique..."


Ses écouteurs étaient autour de son cou, et pour - toutes ses désintox suivantes - ceci allait se poser comme une constante absolue. La musique l'aidait à s'isoler de son pouvoir. Celle de son walkman, celle des concerts, même celle qu'il m'arrivait de fredonner. Ce n'était pas un remède miracle, bien sûr que non. Mais ça le raccrochait au moins à la réalité et lui provoquait une forme de descente d'endorphines qui faisait barrage aux esprits. Et d'ailleurs, dans le même ordre d'idée, il ajouta :


"... et j'avais toujours l'option de me taper l'un ou l'autre de ces junkies".


Il m'a fallu du temps pour comprendre que le pouvoir de Klaus n'était pas seulement lié à la mort, mais aussi à la vie. Que cette partie de lui serait toujours prépondérante, et que ce qui passait sans doute pour des attitudes de frivolité un brin perverse et déjantée auprès du monde extérieure, était en fait aussi lié à sa personne que le fait de se faire harceler par les morts. L'un semblait d'ailleurs capable d'annuler l'autre, pour un temps en tout cas, comme si les pulsions de vie pouvaient transitoirement le dessus : lorsqu'il couchait avec quiconque et pendant un moment après, l'effet ne lui était pas si différent d'un shoot de kétamine.


Vous savez comme il est. Il recherchait cet effet, ayant ancré sans nul doute l'une des multiples facettes de sa pansexualité. J'ai toujours eu coutume de dire que le 'P' de 'pan' était - en ce qui le concernait - pour 'Plaisir', le A pour 'Attirance' et le N pour 'Nécessité'. Malheureusement, nous aurions pu continuer ainsi l'exercice et ajouter que le S suivant était trop souvent pour 'Subsistance', lorsqu'il négociait un endroit où dormir ou un financement pour sa dope. 'Amour' - malheureusement pour lui - n'a fait partie de l'équation que des années plus tard, dans sa définition romantique en tout cas. Et cette histoire ne s'est pas bien terminée.


"Sérieusement ? Vous avez le droit de faire ça en désintox ?"

Ma question était posée de façon idiote. Je me demande encore pourquoi je l'ai formulée comme ça.

"Oh, c'est - comment dire - autorisé si tu ne te fais pas choper. Mais tu me connais, je suis très créatif".

Il a passé le sac plein de Twinkies par dessus son épaule, avec une innocence aberrante au regard de la conversation que nous étions en train d'avoir.

"Entre le risque de me faire un peu sermonner et ma stabilité mentale, le choix était vite fait, tu sais".


Il s'est arrêté, il a passé sa main 'Hello' dans ma crète. Visiblement, il y avait quand même des détails qu'il était capable de ne pas oublier.


"Alors finalement c'est violet ?"

J'ai souri, et je lui ai dit :

"J'ai prévu d'aller au Nexus ce soir. Ingrid peut nous faire entrer à l'oeil".

"Ingrid, hein ? Je croyais que tu étais encore avec... ce grand baraqué jamaïcain qui te faisait passer pour un chihuahua à côté d'un Saint-Bernard. Je l'adorais..."

"Malik. Finalement c'était un con".

"T'as raison. En fait je ne pouvais pas le sentir non plus. Mais le Nexus, c'est bien, ça... vraiment très bien".


Le Nexus Bar était - et est toujours - un incontournable de la scène underground de The City. Une salle immense en sous-sol de West-Argyle, accessible uniquement par un escalier dans un bar hipster servant des alcools du monde entier. Dotée d'une unique sortie de secours : une aberration du point de vue de la sécurité incendie, c'est probable. Mais un fleuron de la musique rock et électro, où Klaus comme moi aimions aller nous enivrer de son, de basses et de lumières noires. Nous laisserions la nuit nous emporter loin de tout : libres et sans fantômes. Peu importaient les trente derniers jours, tout comme de quoi les trente suivants seraient faits.


"C'est ce qu'il me faut ce soir", a-t-il murmuré. "Exactement ce qu'il me faut".


Aujourd'hui - en repensant à tout ça - il me décrirait certainement son attitude d'alors comme celle de sa chère Ariana Grande dans 'No Tears Left to Cry', dont il avait fait un Véda en 1962 : se mettre dans un état d'esprit positif - quoique possiblement aveugle - tout oublier un temps, et remonter la pente.


Ce soir-là, il ne penserait pas à la désintox, ni à tous les souvenirs que le Dr Milligan avait pu remuer. Il allait consommer ses petites provisions, il laisserait son système nerveux vibrer au son de pistes qui ne sortiraient jamais dans les charts, puis trouverait un nouveau canapé à squatter ou viendrait s'introduire chez Granny. Ce soir-là, je ne penserais pas à ma mère et aux tuyaux qui la maintenaient en vie. Au nouvel espionnage industriel que PezziCola m'avait proposé, et que j'avais décidé de refuser pour mettre derrière moi cette vie. A l'argent que je ne savais plus où trouver. Au boulot que j'envisageais de chercher et à la crête qu'il me faudrait peut-être raser. Ce soir-là, nous trouverions possiblement le P, le A et le N. Ce soir, nous nous nourririons de Twinkies et nous abreuverions de ce que Klaus saurait négocier.


Et une nouvelle fois, jusqu'à l'aube, nous fêterions nos vies sans avoir conscience de les consumer.


---


Notes :


C'est un chapitre moins léger qu'il n'y paraît, à bien des égards, comme ils le sont toujours par delà les éclats de rire de Klaus. Ce sont des thèmes que la série, et surtout les comics, évoquent entre les lignes pour l'un, et plus frontalement pour l'autre. Ici, j'ai choisi de les aborder avec le regard de Rin sur sa jeunesse.


Nous avons fait un bond d'un an dans le temps, par rapport aux trois premiers one-shots. Ces bribes de mémoires sont aussi une courbure de l'espace-temps. J'espère qu'elles éclaireront certains questionnements que vous pourriez avoir eu en lisant la fic principale, et peut-être qui sait en regardant la série.

Laisser un commentaire ?