DE FEU ET DE SANG

Chapitre 6 : Malaises

Catégorie: T

Dernière mise à jour 10/11/2016 07:17

Bella's POV

 

La nuit avait été courte et sans réel sommeil.

J'étais morte de peur. J'avais failli mourir la veille et me sentir si fragile me décontenançait.

Depuis mes plus jeunes années, j'avais appris à serrer les dents, à ne jamais m'avouer vaincue. Ca m'avait toujours poussé vers l'avant. J'avais un sens de la compétition aiguisé et j'aimais me mesurer aux hommes. Sauf qu'hier, ce que je pensais être ma principale qualité s'est révélée être mon plus dangereux défaut. J'avais péché par orgueil. Mes compagnons auraient auraient pu se faire tuer, et moi aussi d'ailleurs. Je m'étais mise en danger, et j'étais un danger pour les autres.

A l'armée, le rôle premier d'un militaire et de sauver sa peau afin de pouvoir sauver celles des autres, ou à défaut, d'appeler du renfort...

Le sacrifice héroïque et inutile est totalement banni.

J'avais faux sur toute la ligne et, une fois de plus, je m'étais sentie plus forte que les fondamentaux militaires. J'avais tort.

C'est ce dont je voulais parler, hier, avec Edward. Mais je n'avais pas réussi.

Admettre mes erreurs n'était pas chose aisée. J'étais faible, inconsciente et je ne voulais pas l'admettre.

Je n'étais qu'une pauvre humaine. Et surtout, j'étais mortelle.

Je crois que pour la première fois de ma vie j'avais besoin de réconfort et j'étais prête à le reconnaître mais la situation m'avait échappée et ce « dérapage » avec Edward n'avait fait qu'ajouter à ma confusion.

Je n'aurais jamais du me laisser embrasser. Mais qu'est-ce qui m'avait pris? C'était mon supérieur!

Il me plaît, certes, mais nous n'avons aucune affinité et j'avais tout mélangé : la peur, le besoin de me confier avec quelqu'un qui avait vécu la même chose que moi, l'envie de pleurer.

Il fallait que je lui parle, je lui devais des explications et surtout... des excuses.

 

L'occasion se présenta quand je partis me doucher. Il était en train de se raser et nous n'étions que tous les deux, les autres étant déjà au petit-déjeuner.

'Edward, je vous dois des explications', commençai-je

Il ne me répondit pas. Il continuait à se raser.

Je continuai.

'Vous aviez raison, j'avais besoin de parler de l'attaque. Je... je ne sais pas pourquoi j'ai dérapé'

Il me regarda via le reflet dans le miroir.

'Ne change pas les rôles Bella. C'est moi qui t'ai embrassée'

Il parlait d'une voix atone. Il reprit.

'Et je voudrais savoir, Bella : pour toi, c'était un baiser ou un dérapage?'

Il semblait irrité.

La question me prit au dépourvu. Je n'avais jamais jamais envisagé que ce baiser puisse être autre chose qu'un dérapage.

'Un dérapage', lui répondis-je dans un souffle.

'Très bien. Au moins nous savons où nous en sommes!, s'exclama-t'il d'une voix tendue, je crois que tu étais venue pour te doucher, je ne te retiens pas'.

Son ton était cassant et cette dernière remarque m'avait glacée le sang.

J'hésitai puis pris le gel douche que j'avais déposé sur la tablette d'un lavabo et me dirigeai vers la douche.

 

Un bruit me stoppa net.

Un bruit de savon qui glissait au sol.

Edward et moi nous regardâmes, circonspects. La dernière chose dont nous avions besoin était que cette maudite affaire de baiser s'ébruite!

Mike sortit alors de sa cabine de douche.

 

'Je suis désolé, j'aurais du vous manifester ma présence. Je... vous pouvez compter sur ma discrétion, ne vous inquiétez pas.'

Il partit non sans oublier de me jeter un regard désapprobateur.

C'était le bouquet...

 

J'entrai dans une des cabines de douche en claquant la porte derrière moi.

J'y passai 10 minutes à pleurer, l'eau chaude n'apportant aucun réconfort à mon désarroi.

 

***

 

Le rassemblement se déroula dans une atmosphère tendue.

Mike ne m'adressa pas une seule fois la parole et Edward m'évitait clairement.

Je crois que je l'avais mérité.

 

Quand le rassemblement fut terminé, nous exécutâmes chacun notre mission.

Je récupérai des grandes feuilles format A3 et les posai à même le sol, derrière la tente de l'unité.

A l'aide des mesures prises sur le terrain hier, je devais établir un plan.

J'avais du mal à me concentrer. J'entendais Jacob, Edward et Mike discuter des matériels qu'il faudrait acheter pour monter le réseau.

 

Jacob me rejoignit une petite demie-heure plus tard.

'Bella, nous partons dans 10 minutes avec 3 équipes pour essayer de retrouver ton matériel'.

'Je suis conviée?', lui demandai-je

'Oui, mais tu seras en binôme avec moi. Hors de question que tu fasses cavalier seul avec ce qu'il t'est arrivé hier', me dit-il plus comme un reproche que comme un ordre.

'Je n'avais pas l'intention d'y aller en solo', lui répondis-je mollement.

Ma réponse le surprit.

'Je m'attendais à ce que tu protestes! Deviendrais-tu raisonnable?', me dit-il en souriant.

'J'apprends...', m'enquis-je tristement.

'On se retrouve dans 5 minutes devant la tente de l'unité. Et avec ton arme, ça va de soi'.

 

***

 

Je rejoignis les équipes. Notre mission était de ratisser la colline 1. pour retrouver mon matériel – 2. pour trouver des traces de l'assaillant de la veille.

Nous étions tous divisés en binômes et chacun avait un périmètre bien délimité à surveiller.

Une fois les armes chargées, nous partîmes tous dans les différentes directions qui nous avaient été données.

 

Me retrouver seule avec Jacob, en plein milieu de cette forêt, me rappela la veille alors que je gravissais la colline avec Baldwin. J'eus un pincement au coeur.

Jacob était silencieux et concentré.

Nous transpirions à grosses gouttes. La chaleur était écrasante alors qu'il n'était que 10h00 du matin.

J'étouffais sous mon gilet pare-balles.

Jacob avait du lire dans mes pensées car il décida quelques minutes après de faire une pause.

Nous nous assîmes près d'un arbre.

'Ca va, Bella? Ca n'a pas l'air d'être la grande forme... Je n'aurais peut-être pas du t'amener sur cette mission avec ce qu'il t'est arrivé hier'

'Non Jacob, vous avez eu raison. C'est juste que je remets en question mes qualités de militaire.'

Il me fixa.

'Je veux dire, hier, en voulant jouer les « mères-courage », j'ai failli mourir et faire tuer Edward et Baldwin par la même occasion'

'Bella, tu as réussi à blesser cette chose! Que voulais-tu faire de plus?'

'Mais Jacob, c'était un coup de chance! Je n'étais pas sûre de ce que je faisais! J'étais paniquée!', m'écriai-je, les yeux plein de larmes

Jacob se rapprocha.

'Mais j'aurais eu peur moi aussi!'

'Et auriez-vous agit comme moi?', lui dis-je, à bout.

Il soupira.

'Non. Cela va à l'encontre des règles primordiales militaires.'

'Vous voyez...', dis-je tristement

'Mais je suis major, pas sergent. Je suis militaire depuis plus de 10 ans et surtout, le combat est ma spécialité! Ta spécialité à toi, Bella, c'est les transmissions. Il est tout à fait normal que tu aies réagit de la sorte. Et ton instinct était le bon.'

'Je suis un danger pour les autres et pour moi-même, Jacob, comment pourrait-on me confier un groupe d'une dizaine d'hommes après mon comportement d'hier?'

'Baldwin t'est infiniment reconnaissant et...'

Je ne le laissai pas finir.

'Edward me déteste et ne me dîtes pas qu'il a été impressionné par ce qu'il s'est passé hier!'

'Edward est Edward. On ne le changera pas. Quant à ce qu'il pense, nul le sait ni ne l'a jamais su. Après 2 ans à travailler avec lui, je n'ai toujours pas saisi les subtilités de son comportement.'

Je me repassai notre discussion dans le container des douches et je souris malgré moi.

'Je ne crois pas vouloir connaître le fond de ses pensées', murmurerai-je.

'Allez, assez parlé! On grimpe!'

Nous nous levâmes et repartîmes.

 

***

 

Nous inspectâmes la forêt quatre heures durant mais mon matériel restait introuvable.

Nos trois équipes se rejoignirent dans la clairière. Seul un binôme manquait à l'appel.

Jacob prit la radio pour les contacter.

'Charlie Uniform à Bravo 17, répondez.'

La radio se mit à grésiller.

'Bravo 17 à Charlie Uniform, nous vous recevons fort et clair'

'Charlie Uniform à Bravo 17, quelle est votre position?', demanda Jacob

'Bravo 17 à Charlie Uniform, nous sommes sur la zone 4. Nous venons de découvrir un trou de combat. Je répète, nous venons de découvrir un trou de combat.'

Jacob questionna un adjudant qui se trouvait parmi nous.

'Jensen, a-t'on fait une simulation de combat récemment sur la zone 4?'

'Non Major. La zone 4 est très pratiquable et facile d'accès, il n'y avait donc aucun intérêt à y faire s'entraîner nos hommes'.

'Merci Jensen. Il reprit sa radio. Charlie Uniform à Bravo 17, restez sur la position, nous vous rejoignons'.

'Reçu Major, nous vous attendons'.

'Terminé'.

 

Il nous fallut moins d'un quart d'heure pour arriver sur la zone 4.

Le binôme nous attendait devant le trou de combat.

Jacob sauta dedans. Il le scrutait attentivement.

'Ce trou est récent. La terre autour n'est pas encore consolidée.'

Il s'agenouilla, comme s'il se postait.

'Zawski, donnez-moi vos jumelles je vous prie', dit-il en s'adressant au jeune soldat qui était à côté de moi.

Il prit les jumelles et regarda l'horizon.

'Et merde!, maugréa t'il, nous sommes observés depuis plusieurs jours!'.

Cette déclaration eu le don de me refroidir immédiatement. J'étais parcourue de frissons.

'Regardez, dit-il en s'adressant à toutes les équipes, si vous vous postez, vous avez une vue imprenable sur nos tentes. Ce type... ou je ne sais ce qu'il est, connaît toutes nos allées et venues, ce qui explique qu'il ait toujours un coup d'avance sur nous', termina Jacob.

 

 

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Jacob's POV

 

Cette dernière découverte nous avait atterrés. Nous étions tous à cran et nous redescendîmes vers la base sans un mot.

Bella semblait consternée et soucieuse.

Elle s'était confiée à moi tout à l'heure mais je sentais qu'elle ne m'avait pas tout dit.

 

***

 

Je ne la croisai pas de toute la soirée.

Je rencontrai Newton au foyer et lui demandai s'il savait où elle était.

'Certainement en train de travailler, Major', me répondit-il d'un air lasse.

'A cette heure-ci? Sans avoir dîné?

'C'est sa façon de fuir. Elle fait toujours ça'.

Une telle froideur concernant le sort de Bella me choqua. Newton était toujours aux petits soins pour elle et sa réaction me laissa sans voix.

 

***

 

Je partis à sa recherche et la trouvai adossée à sa tente, le regard dans le vide.

'On prend l'air frais?'

Mon intervention la surprit et elle sursauta.

'Oui, un truc comme ça...', me répondit-elle, perdue dans ses songes.

'Tu sais que penser, c'est désobéir... '

'Et je pense trop', me coupa t'elle.

'Et si tu me disais réellement ce qui ne va pas, Bella?'

'Je vous ai déjà dit ce qui n'allait pas ce matin'

'Pas tout, incontestablement', lui dis-je l'invitant à se confier.

Je me plaçai face à elle, mon corps à quelques centimètres à peine du sien.

Elle voulut se dégager mais je la retins en prenant son visage dans mes mains.

'Dis-moi ce qui ne va pas, Bella, s'il te plait. Tu te sentiras mieux après'

'Je me sens perdue. Je fais tout de travers!'

Ses yeux étaient emplis de larmes. Elle reprit.

'Hier soir, Edward m' a embrassée et je n'ai rien fait pour l'arrêter'

Je déglutis. Ainsi Edward avait franchit le pas que moi, j'hésitais à passer.

'Embrassée... ', répétai-je

'Oui, embrassée', me confirma t'elle

'Embrassée... comme ça?'. Je ne tenais plus. Je l'embrassai avec toute la ferveur de mon désir.

Je forçai la barrière de ses lèvres qu'elle gardait scellées et je sentis ses résistances céder.

Je la voulais et ce baiser me rendait fou. Je n'arrivais plus à m'arrêter.

Soudain, je sentis Bella se raidir. Elle me repoussa. Elle pleurait.

'Je suis désolée!'

Et elle partit en courant.

 

J'appuyai mon bras contre la tente, essayant de reprendre mes esprits.

Merde! J'étais trop con! Elle était déboussolée, fragilisée et moi je n'avais rien trouvé de mieux que me laisser aller et que de profiter de son moment de faiblesse!

'Merde, merde, merde! Putain mais je ne suis qu'un imbécile!', dis-je à voix haute en tapant sur la tente.

 

***

 

'Bienvenue au club...', me dit alors une voix que je connaissais bien.

Edward me regardait. Il avait tout vu.

'Une bière s'impose, mon gars', me dit-il.

'Ouais', soupirai-je.

Il me donna une tape amicale sur l'épaule et nous partîmes en direction du foyer.

 

 


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