La Destiné de la Terre des Illusions (DdlTI)

Chapitre 22

Le plan

       Le soleil brillait sur Tokyo. Alors que les aventuriers de Gensokyo étaient sur le point d’atteindre le sommet de la montagne, un étrange rendez-vous avait lieu sur les toits de la mégalopole.

Trois personnes se trouvaient là. La première était assise sur le rebord du bâtiment, les pieds à presque mille mètres de haut, fixant vers l’horizon. La seconde se trouvait quelques mètres derrière, se tenant debout et silencieuse. La troisième se promenait un peu partout, écoutant et observant la ville.

Alors que la deuxième se mit à observer sur le côté, la première l’interpella.

– Qu’y a-t-il ?

– Je me demande pourquoi nous sommes là ?

– Parce que je l’ai dit.

– Vous doutez de…

– Je ne peux pas douter de mon cavalier, affirma celle assise les pieds dans le vide.

Le silence se posa sur le toit du building uniquement brisé par les remous provoqués par la troisième personne. La seconde se rapprocha lentement de la première qui n’y prêtait même pas attention. Elle finit par poser les deux mains sur le rebord et à regarder vers le bas.

– Pourquoi doutes-tu ? Demanda la première personne.

– J’ai estimé ses chances… et elles sont faibles maintenant. Il n’est plus que l’ombre de lui-même, le maillon faible de leur équipe.

– Ce n’est pas grave. Après tout, son but n’est-il pas d’aller chercher la chose dont nous avons besoin ? Il n’a pas besoin de se battre lui-même, les autres sont là pour protéger le «fils».

– L’est-il vraiment ?

– Il ne fait aucun doute. Yuyuko comme la Yama en sont certaines. Son âme a été pénétrée par le souffle du Dieu-Dragon. C’est pour cela que c’est lui la clé.

– Il est porteur d’un très lourd fardeau.

– Même s’il ne peut le supporter, ses compagnons le supporteront.

– Vous êtes bien confiante.

– Tu devrais savoir. Celui et celles qui l’accompagnent ne sont pas faibles. Il s’agit des meilleurs éléments qu’on puisse trouver.

– Vous accordez trop de confiance à un simple humain.

– Cet humain a dominé à lui seul Gensokyo, l’aurais-tu oublié ?

La seconde personne se tut, gênée par la réponse de la première.

– L’humain… Tom… que devra-t-il faire alors ?

– Sa puissance est bien plus faible qu’à son apogée mais il peut survivre.

– D’ailleurs, madame… pourquoi ne vous vous êtes pas battue à fond lors de votre combat ?

– Pardon ?

– Je voyais bien que votre puissance… était bridée…

– Son combat devait être un test. Je voulais connaître la véritable puissance de mon chevalier. Malheureusement, il a dépassé mes pronostics.

– Mais… comment ?

– Une simple erreur de calcul.

– Comment ? s’étonna la deuxième aux cheveux courts et blonds.

– Un humain est par nature imprévisible et j’avais sous-estimé son imprévisibilité.

– Mais…

– Il a dépassé toutes mes espérances. Sa puissance en est la preuve. C’est un « fils » engendré par la puissance de Ryūjin dont le but est de sauver les mondes.

– Les mondes ?

– Oui. Gensokyo est menacée de disparition. Mais ce monde aussi, à cette époque, est menacé et aucun des deux ne peut survivre sans l’autre désormais. Voilà sa véritable mission, celle confiée par notre protecteur et je dois m’assurer que cela arrive à son terme.

– Mais… s’il échouait ?

– Il faudra que je m’occupe moi-même du problème…

– Madame…

Le silence s’imposa par la gravité des propos de la femme aux longs cheveux dorés.

– J’ai beau contrôlé beaucoup de chose, j’ai beau manipuler des pions pour parvenir à mes objectifs, je ne peux pas influer sur le destin.

– Vous croyez vraiment en lui ?

– Il m’a bien tuée, non ? Et puis, c’est un humain, tu sais de quoi ils sont capables.

– Du pire…

– Comme du meilleur. Tom pourra vaincre cette menace mineure et ramener le Dieu-dragon. Même si c’est vrai qu’il n’aura pas réussi à donner son meilleur visage.

– Et pour son âme ?

– Pour éviter l’Enfer ? Eh bien, je ne suis pas la Yama mais je pense que cela ne le sauvera pas. Ses actes qu’il a commis en Gensokyo ont changé la donne. Il ne doit pas savoir pour ça par contre. La survie de Gensokyo en dépend.

– Depuis le début vous le manipuliez mais…

– Tu sais que j’ignorais sa vraie nature lors de notre première rencontre, lorsque Chen l’a fait tomber dans ma brèche. Tu sais bien qu’avant de le laisser aux yokais, on avait découvert qu’il n’était pas un simple humain du Monde Extérieur. Il avait une étincelle de magie en lui.

– Vous en avez fait plus qu’un pion.

– Yuyuko m’avait informé sur lui. Je suis allée voir la Yama et j’ai découvert ses origines. Son incroyable puissance et son apprentissage accéléré ne sont que des facteurs qui nous renseignent sur sa vraie nature. Il n’était qu’un simple pion insignifiant, il est devenu notre cavalier, l’autre étant la miko du sanctuaire Hakurei.

Le silence se posa de nouveau alors que la deuxième était enfouie dans ses pensées. Elle entendit alors sa maîtresse se mettre à rire doucement.

– Madame ?

– Il voulait boire le sang d’un dieu alors qu’il a lui-même le « sang d’un dieu ».

– Il n’était pas dans son état normal à ce moment.

– Tu te trompes. C’était sa vraie forme, pervertit par ce maudit yokai. Un pur dominateur et conquérant. D’ailleurs, as-tu des nouvelles de la kappa ?

– Elle a décidé de vous écouter et de réparer sa lame.

– Il a besoin d’une bonne lame, digne de mon chevalier, de ma chose.

– S’il réussit, que ferez-vous ?

– Il mènera une vie humaine ordinaire puis mourra, allant probablement en Enfer malgré son comportement héroïque en allant sauver deux mondes. Au moins, la déesse sera contente.

– La déesse des Enfers ?

– Oui, elle le convoite. Une âme imprégnée par Ryūjin pourra toujours lui servir, peut-être servira-t-il de trophée.

La deuxième personne décida de s’asseoir à côté de sa maîtresse alors qu’elle installa tranquillement ses queues, elle lui parla.

– Tu sais, un humain, cela vit plusieurs vies.

– Où voulez-vous en venir ?

– J’ai étudié son passé jusqu’à l’origine, sombre et obscure de Sélénite.

– Je ne vous suis pas.

– C’est moi qui ai trouvé son lien avec les vampires et qui aie informé la déesse du Makai afin de le tester.

– Il était vraiment un proche des vampires ?

– Cela était plus probable que pour la Hieda, à qui j’ai joué quelques tours dans sa mémoire. Elle ne doit pas être au courant de toutes les vérités, cela risquerait de mettre beaucoup de choses en danger.

– Mais pourquoi lui faire croire à une ancienne relation ?

– Il devait savoir le plus possible, il devait avoir accès à ses livres. Le vrai pouvoir est la connaissance.

– Un auteur d’Europe ?

– Oui.

– En parlant de l’Europe, je ne comprends pas…

– Olivier ? demanda la jeune femme aux longs cheveux blonds.

– C’est ça.

– La première fois, c’était un simple caprice. Voir un homme s’agiter autant pour retrouver son ami disparu… cela avait quelque chose d’amusant. Je l’ai donc aidé.

– Il y a plus que ça, vous n’êtes pas du genre à faire quelque chose sur un coup de tête.

– Effectivement. Son père est un aventurier du Monde Extérieur qui ait déjà entré en Gensokyo.

– Comment ?

– Je surveille tous les aller et venus de Gensokyo. Son père arriva et décida de s’installer, fuyant son monde. Un vrai passionné d’aventure, et les yokais, cela ne lui faisait pas peur.

– Je crois l’avoir croisé…

– Tu l’as rencontré au village et je l’ai personnellement rencontré aussi.

– Mais pourquoi Olivier vient du Monde Extérieur ? Sa mère doit donc y habiter.

– Sa mère est morte, tuée par un yokai.

– Mais… cela veut dire…

– Olivier est originaire de Gensokyo de par sa mère et c’est sa terre natale.

– Mais… pourquoi alors ? Se demanda la créature à neuf queues dorées.

– Il n’a pas supporté et est rentré chez lui, avec son fils. Mais cela a influencé le jeune homme.

– Comment ça ?

– La magie de Gensokyo avait déjà pénétré son esprit, bien avant sa naissance. C’est pour cela qu’il manipule la magie plus facilement qu’un humain venant du Monde Extérieur.

Le silence se reposa sur le toit, seulement interrompu par un hélicoptère de l’armée qui passa au-dessus d’eux. La troisième personne fila droit vers la seconde et se cacha contre elle en attendant que l’engin s’éloigne. Elle tendit alors son oreille puis retourna se balader sur le toit, tentant d’attraper les rares oiseaux.

– Ran ?

– Oui madame ?

– Tu l’avais dit. Je ne fais rien sans réfléchir. Tu dois me faire confiance. Tom sauvera Gensokyo et son existence en sauvant ce monde. Après, savoir s’il ira en Enfer ou non, cela nous importe peu. Un cavalier est une pièce chère, mais on doit savoir la sacrifier quand il le faut.

– Cela veut-il dire que vous le…

– Il mourra, un jour. Par sacrifice pour accomplir sa mission ? Par mort naturelle humaine ? Par le meurtre ? Je ne connais pas l’avenir, j’essaie juste de faire correspondre l’avenir à mon plan.

– S’il redevenait mauvais ?

– C’est un risque, au fond de lui, il y a une autre facette de lui-même. Tout le monde à deux facettes, plus ou moins distinctes mais elle existe. Chez lui, c’est son opposé.

– Est-ce de la multiplicité de la personnalité ?

– Dans un sens, oui.

– Comment ça ?

– Il a deux âmes mélangées en lui. Qu’en tires-tu comme conclusion ?

– Soit c’est vraiment un trouble dissociatif de l'identité soit… il y a vraiment deux personnes en un corps.

– Oui mais l’âme dominante garde le contrôle. Et c’est celle de Tom.

– S’il a perdu le contrôle, c’est qu’il…

– Il a laissé l’âme dominée prendre le contrôle.

– Mais pourquoi ?

– Il ne voulait pas mourir et pour cela, il avait laissé l’autre prendre le contrôle. Un pur docteur Jekyll et Mister Hyde.

– Mais la miko l’a exorcisé.

– On exorcise une possession d’une personne, pas ce qu’est la personne. Elle a annulé la puissance du second mais il demeure, endormi, prêt à se réveiller au bon choc et à se voir accorder par Tom le contrôle de son propre corps, de façon intentionnelle.

– C’est une véritable bombe à retardement !

– Et cette bombe est le seul espoir de plusieurs mondes, quelle ironie non ?

– Effectivement madame.

Là, un corbeau arriva et elle tendit la main vers l’avant. L’oiseau se posa sur celle-ci et elle le porta à son oreille. Le volatile semblait lui parler. Elle afficha alors un sourire inquiétant qui déstabilisa Ran.

– Madame ? Madame ?

– Ils sont arrivés.