La Destiné de la Terre des Illusions (DdlTI)

Chapitre 19

Des réponses attendues

       « Nous sommes en direct depuis Tokyo. Pour le moment, nous avons dénombré une dizaine de zones où se sont produit des attaques. Le gouvernement se refuse à tous commentaires mais précise qu’il mettait tout en œuvres afin de maîtriser la situation. On ignore à l’heure actuelle le nombre total de victimes mais les premières estimations les situeraient vers plusieurs centaines de morts et un nombre indéterminé de blessés. D’après des témoins oculaires que nous avons pu interroger, il s’agirait de ce qui pourrait être des humains génétiquement modifiés. Plusieurs politiques ont d’ores et déjà accusés les puissances étrangères de tenter de renverser le Japon. Nous vous donnerons plus d’informations dès que celles-ci nous parviendront. C’était Shina Kano de NHK News Worlds. »

La vieille dame éteignit la télévision et soupira. Elle se demandait si les responsables étaient vraiment des yokais. Elle se tourna vers Mamizou, Tom et Marisa revenus depuis peu. Celui-ci était effaré par ce qu’il était en train de se passer à Tokyo. La magicienne ne comprenait pas comment cela pouvait être arrivé. Cependant, ce fut Mamizou qui se questionnait le plus. Les yokais devaient avoir disparu depuis longtemps. Il n’était donc pas normal de les voir revenir, en si grands nombres, aussi violents et autant visibles. Tom lui demanda ce qui pouvait avoir provoqué cela. Elle ne répondit pas, trop perdue dans ses pensées, n’arrivant pas à trouver la raison à ces événements. C’est alors que sa vieille amie lui demanda comment les yokais pouvaient naître à partir de rien. Cette question surprit les deux apprentis magiciens. La tanuki fut surprise par ce type de demande mais elle voyait très bien qu’elle connaissait la réponse.

– Les yokais ont besoin que les humains croient en eux et les craignent, c’est leur but d’exister…

– Oui et ?

– Comment les humains de cette époque pourraient croire en leur existence ?

– C’est un phénomène nouveau, raconta la vieille dame.

– Que veux-tu dire ?

– Il y a quelques mois, des phénomènes étranges ont commencé à se produire. Des fissures dans le ciel, des sortes de « trous » donnant sur une terre inconnue, des disparitions de personnes de plus en plus nombreuses et des apparitions d’événements surnaturelles. Les gens ont commencé à croire, en cachette, qu’il existait des choses que la science n’avait pas ou ne pouvait pas expliquer. En plus, les groupes occultes et autres se sont multipliés. On raconte même qu’une organisation secrète tentait de provoquer une catastrophe.

– Mais, en Gensokyo il y a la même chose, répondit Tom.

– Tom… soupira Mamizou.

– Le nombre de personnes venant du monde extérieur a fortement augmenté récemment et le ciel, la nuit, semble fissuré.

– Des gens se sont mis à y croire, ce qui a renforcé les événements et les yokais, ce qui a fait encore plus croire à leur existence. C’est un cercle vicieux…. conclut Mamizou.

– Mais pourquoi cela est apparu… demanda le jeune homme avant de s’interrompre.

– Tom ? Demanda Marisa.

– Je… je suis le responsable… n’est-ce pas Mamizou ?

Elle se contenta de le regarder avant de soupirer. La vieille femme se demandait ce qu’il s’était passé alors que la jeune apprentie en magie répétait à son petit ami qu’il n’était pas responsable de tout.

– Oui, c’est le cas…. affirma-t-elle finalement.

Marisa la regarda, comprenant où elle voulait en venir.

– Mes combats contre Marisa et Reimu ont abîmé à ce point-là barrière. Ils l’ont trouée…

– Tom… murmura l’humaine aux cheveux blonds.

– Je suis… responsable de la mort de centaines de personnes à Tokyo… comme je suis responsable du futur de Gensokyo…

Le jeune homme s’effondra sur lui-même, se recroquevillant. Marisa allait vers lui mais la tanuki la prit par l’épaule et lui fit un non de la tête. Là, madame Sato alla voir le jeune homme et s’agenouilla devant lui.

– Il ne faut pas être comme ça.

– Pardon ?

– Vous ne saviez pas ce que vous alliez provoquer. Vos actes ont été involontaires. Vos amies m’ont parlé de ce que vous avez fait. Vous n’êtes nullement responsable de cette attaque de yokais.

– Même si je ne savais, j’en suis responsable… j’ai encore fait couler des flots de sang…

– Vous cherchez à résoudre cela ? Et à vous faire pardonner ?

– Snif… oui…

– Sois fort. J’ai pu voir que tu n’étais pas n’importe qui.

– Comment ça ?

– J’ai côtoyé des yokais toute ma vie. Je peux voir le plus profond des gens à force.

– Et ?

– Je vois un jeune homme tourmenté par le regret, celui d’avoir provoqué beaucoup plus de tort que quiconque pourrait le supporter. Votre mission n’est pas de pleurer mais de sauver votre monde, de réparer vos erreurs et de satisfaire les dieux qui ont prévu quelque chose pour vous.

– Mais… qu’ont-ils prévu ?

– Je ne sais pas, je ne communique pas avec les dieux. Je ressens juste leur influence autour de vous.

À ce moment, le groupe de Sanae, Sakuya et Reisen entra. Elles étaient fatiguées et ravies d’être revenues. Elles racontèrent ce qu’ils s’étaient passés. Mamizou leur raconta qu’ils avaient vécu des choses similaires et que cela s’étaient passées partout dans la ville. Sanae alluma alors d’urgence la télévision et constata avec horreur le premier bilan, provisoire, des tueries yokais à travers la ville : 624 morts et presque deux mille blessés.

C’est alors que la présentatrice commença à parler de personnes qui se seraient opposées aux « armes biologiques » qui auraient frappé Tokyo. Elle put reconnaître Olivier et Youmu se battre, filmer par un témoin de la scène. Elle demanda s’ils étaient revenus. La réponse fut négative. La miko commença alors à s’inquiéter pour eux. Elle leur parla alors de ceux qu’elles avaient affrontés. Mamizou leur parla des yokai qu’ils ont dû vaincre.

Tom se releva et prit son sabre lunarien par le fourreau et le regarda. Il baissa la tête, contracta son poing et serra les dents. Une larme se forma sur son visage. Il rouvrit alors les yeux et ceux-ci se contractèrent à leur maximum, formant des yeux de chats jaunes. Marisa le vit et se décida de le prendre dans les bras en arrivant dans le dos, elle espérait le calmer, craignant qu’il redevienne le monstre qu’il était.

Il caressa l’une des mains de sa petite amie avant de tourner la tête sur le côté, tentant de la rassurer. À ce moment, elle le relâcha. Il regarda Mamizou, d’un air déterminé.

– Je vais retrouver le Dieu-Dragon, le ramener en Gensokyo et réparer la barrière !

– C’est ton travail. Le nôtre, c’est de surveiller que tu le fasses, répondit la tanuki.

– Je vais arrêter ces yokais qui menacent la quiétude de Gensokyo !

– Et comment tu vas faire ? Demanda Sanae.

– Normalement, les yokais sont solitaires.

– C’est exact, répondit la tanuki.

– Ils se regroupent sous la domination d’un chef mais il semblerait que ceux-ci en aient un au-dessus d’eux.

– Pourquoi tu penses cela ? demanda Mamizou.

– Leur chef avait une marque verte sur la main.

– Il en avait une ?! s’étonna Sakuya.

– Oui pourquoi ?

–Le yokai qu’on avait affronté avait une marque verte sur la main aussi.

–Une marque verte… sur deux « chefs » yokais à deux endroits de la ville et deux races différentes... C’est bien la preuve de ce que j’avance.

À ce moment, le panneau s’ouvrit. Olivier et Youmu entrèrent, visiblement fatigués. Tom accourut vers eux et leur demanda comment ils allaient et ce qu’il s’était passé. Olivier lui demanda un peu de repos avant de légèrement le bousculer. Le jeune épéiste regarda alors son ancienne professeure qui détourna le regard. Il sentait bien la tension entre eux. Tom recula alors, laissant la demi-humaine aux mains des autres. Il se rapprocha d’Olivier qui était en train de boire cul-sec un verre d’alcool. Il resta planter-là une poignée de secondes avant que son ami ne lui parle.

– Tu sais ce qu’il se passe ?

– Oui.

– On en a affronté.

– Leur chef avait-il une marque verte sur la main ? demanda Tom.

– Ouais, comment tu le sais ? demanda son ami surpris.

– Le chef qu’ont affronté Sanae, Reisen et Sakuya et le chef que j’ai affronté avec Marisa et Mamizou avait tous…

– Une marque verte ?

– Oui.

– C’est quoi cette histoire de yakuza yokai à la fin ?

– Hein ?

– Ils cherchent à montrer leur force et à prouver leur existence, répondit Olivier.

– C’est plus que cela, répondit Mamizou.

– Comment ça ? Demandèrent les deux jeunes hommes alors que l’assistance écoutait.

– Les yokais sont solitaires. Mais quand ils sont en groupe, c’est qu’ils ont un puissant chef à leur tête. Au vu du nombre de yokais, ce n’est pas n’importe quoi leur chef.

– Que veux-tu dire ? demanda Olivier.

– Il y a mille ans, un très puissant yokai mena une armée pour la capitale lunaire.

– Je connais cette histoire… dans les bouquins d’Akyuu…

– C’était Yukari, effectivement.

Un léger silence se posa dans la pièce. C’est alors que Sanae posa une question.

– Quel est le rapport avec notre histoire ?

– Il est simple. Il y a mille ans, l’échec de la conquête de la Lune puis il y a 500 ans, le Projet d'Expansion Yôkai.

– C’est-à-dire ? demanda Sakuya.

– Elle nous a envoyés ici car elle savait que les yokais reviendraient en nombre dans le Monde Extérieur. « Tant que le monde extérieur reste entre les mains des humains, Gensokyo sera le domaine des yôkais » … c’était écrit dans les bouquins !

– Tom, précise-toi à la fin ! s’exaspéra Olivier.

– L’équilibre Monde Extérieur-Gensokyo est en train de se rompre. Les deux univers, humains et yokais, vont de nouveau n’en faire plus qu’un. Cela signifiera une guerre qui provoquera la mort de milliards de créatures.

– Et le rapport avec la Lune ?

– Un puissant yokai peut réunir plusieurs autres sous son influence. Il existe une créature extrêmement forte qui rassemble les yokais dans un dessin meurtrier.

– Tom, c’est un peu compliqué tes histoires de Lune et du reste.

– Yukari nous a envoyé, non seulement réparer la Grande Barrière, mais aussi réparer l’équilibre entre les deux mondes. Et le Dieu-dragon… conduira les derniers yokais de ce monde dans le nôtre et l’équilibre sera rétabli.

– Yukari Yakumo ? demanda une petite voix, celle de la vieille dame.

– Heu… oui, pourquoi ?

– C’est une brave femme.

–Vous la connaissez d’où ? demanda Olivier.

– Comme je l’ai dit, ma famille tient cette auberge depuis des siècles. Elle venait régulièrement ici.

– Et c’est combien ce régulièrement ? demanda Tom dont il semblait deviner la réponse.

– Plusieurs fois par an.

– Autant que ça ?! s’étonna-t-il.

– Oui mais cela fait des années maintenant…

Le silence se posa. C’est alors qu’un terrible grognement se fit entendre. Les différentes personnes dans la salle avaient faim. La vieille dame, forte amusée, déclara qu’elle allait s’occuper de la cuisine et qu’elle les invitait à s’installer en attendant, ce qu’ils firent.

Sur la devanture en pagode, Yukari avait entendu l’intégralité de la discussion. Elle était à la fois amusée et inquiète. Amusée de voir son « pion » résoudre les problèmes qu’étaient la barrière et l’équilibre entre les deux mondes, mais aussi inquiète car elle sentait une multitude de puissances apparaître un peu partout au Japon et savait que résoudre cet incident externe à Gensokyo serait long, que les règles seraient bien différentes. Elle  regarda vers le ciel, vers la Lune et repensa à sa tentative de dissuader les yokais de tenter la moindre conquête.