Kami Stray Cat [Baji Keisuke x OC]
Quelques jours plus tard, lorsqu'elle sortit de l'hôpital, Baji l'attendait devant l'entrée.
– Salut, dit-il. Tu te souviens de moi.
Elle pencha la tête en une mimique qui lui rappela aussitôt la gamine.
– Tu es le garçon qui est venu me voir ?
– Keisuke Baji, dit-il. Tu ne te souviens vraiment pas de moi, hein ?
Taromaru le regarda encore. Elle sembla fouiller dans ses souvenirs, en vain. Il reprit.
– Est-ce que tu sais où aller ? Est-ce que tu as besoin de quelque chose ?
Elle lui montra du menton la voiture de police qui l'attendait au bord de la route.
– Ils ont dit qu'ils allaient m'aider.
– Je vois.
Baji se gratta la tête. Il hésita, puis il lui tendit un petit papier plié.
– Tiens, dit-il. C'est mon numéro de téléphone. Si jamais tu as un problème, ou si tu as besoin de quoi que ce soit, ou même si tu as juste envie de parler, appelle-moi. À n'importe quelle heure, ok ?
Taromaru prit le morceau de papier sans comprendre et il tourna les talons sans attendre de réponse.
Les semaines passèrent sans qu'il ait la moindre nouvelle. Les premiers temps, il surveillait son téléphone presque à chaque instant, puis l'impatience s'émoussa. Lorsque les semaines devinrent des mois, il n'attendait plus. Mais il n'avait pas oublié. Il restait le seul. Autour de lui, personne n'avait aucun souvenir de la gamine aux oreilles de chat.
Chifuyu était retourné travailler à l'animalerie, Kazutora, lui, avait trouvé un job de serveur. Tous avaient repris leurs vies. De temps en temps ils se retrouvaient pour boire un verre et discuter du bon vieux temps. Mikey était de retour dans leur groupe et après quelques bonnes engueulades, ils avaient fait table rase de cette histoire. Mikey était toutefois le seul à garder comme un poids sur la poitrine quand on parlait de la bataille qui avait eu lieu dans la gare de triage et Baji savait bien pourquoi. Il avait dû voir Shinichiro. Lui aussi l'avait entraperçu durant un instant. Baji se demanda ce que les deux frères s'étaient dit et même s'ils avaient pu se parler. Mais il n'avait pas envie de raviver ce souvenir en abordant le sujet avec Mikey. S'il voulait un jour en parler, Baji serait là pour l'écouter, mais il ne ferait pas le premier pas.
Ce fut lors d'une de ces soirées qu'il reçut un coup de fil qui le surprit. Le numéro lui était inconnu et il décrocha.
– Ouais ? Aboya-t-il, la voix rendue rauque par la boisson.
– Baji ? Keisuke Baji ?
Il reconnut aussitôt sa voix. Il se leva et sortit du bar, sous le regard de Chifuyu, Draken et Kazutora.
– Taromaru ?
– Oui.
Baji eut l'impression que de l'air venait à nouveau de pénétrer dans sa poitrine après des mois à étouffer.
– Comment tu vas ?
Elle hésita.
– Ça va, dit-elle. Est-ce... qu'on pourrait se voir ?
– Bien sûr.
Ils se donnèrent rendez-vous le week-end suivant dans un parc de Shibuya. Elle n'avait pas changé, remarqua-t-il quand il la vit arriver. Elle semblait juste un peu plus... normale, dans ses vêtements de tous les jours.
Tous les deux s'installèrent sur un banc pour manger une crêpe et Baji rompit le silence le premier.
– Est-ce que tu m'as appelé parce que tu as besoin de quelque chose ?
Elle secoua la tête.
– Non, non...
Puis elle réfléchit.
– En fait, si, corrigea-t-elle.
Baji finit sa glace et il s'appuya contre le dossier du banc.
– Dis-moi.
– Est-ce que tu pourrais me parler de moi ? Dit-elle.
Il la regarda, surpris, et elle reprit.
– Je n'ai jamais retrouvé mes souvenirs, mais des fois, il y a des choses – des choses étranges – qui me reviennent en mémoire et tu es le seul à me connaître, alors je ne savais pas à qui demander.
Baji réfléchit. Lui parler d'elle ? À l'heure actuelle, s'il lui disait ce qu'il savait, elle allait juste le prendre pour un fou et ne plus jamais lui adresser la parole.
– Je ne suis pas sûr que ce soit une bonne idée, dit-il en se redressant. Il n'y a rien qui puisse t'aider dans ce que je sais.
Il fit mine de se détourner, mais elle tendit la main. Ses doigts rencontrèrent une de ses mèches de cheveux et elle la saisit, comme par réflexe.
– Aïe ! Je t'ai déjà dit d'arrêter de me tirer les cheveux la mioche ! S'exclama-t-il.
Une seconde, Taromaru écarquilla les yeux, puis son regard se perdit dans le vide.
– Tu... m'appelais tout le temps comme ça, dit-elle.
Elle porta la main à sa bouche et les souvenirs affluèrent dans son esprit.