Mon Sorceleur : au-delà du jeu
Chapitre 6 : L'intruse (presque) discrète dans le lit du Loup
1168 mots, Catégorie: M
Dernière mise à jour il y a 23 jours
La conversation avec Vesemir avait laissé une trace. Et pas seulement celle de l'odeur de pipe.
Ses mots, lourds de vérité, avaient éclairci la complexité de Geralt. Il n'était pas froid par manque d'émotions, mais par une discipline héritée de sa mutation, une armure nécessaire dans ce monde brutal.
Et la tension entre nous… il la ressentait. Cela me donna à la fois de l'espoir et une anxiété douce, du genre qui vous fait grignoter les ongles même quand vous n'en avez plus.
La journée toucha à sa fin, et le froid de Kaer Morhen s'intensifiait. Je me sentais épuisée par les informations absorbées et le stress constant de ma situation.
Genre, essayer de ne pas mourir toutes les cinq minutes, ça pèse sur le moral. Vesemir, voyant ma fatigue, me conduisit vers une petite pièce adjacente à la grande salle.
- "Tu peux dormir ici ce soir," dit-il, désignant un lit simple, encombré de quelques peaux de bête et d'une épée posée sur un coffre.
- "Geralt est parti chasser le wyvern. Il ne rentrera pas avant l'aube."
Mon regard se posa sur l'épée. L'une des siennes. Un frisson parcourut ma nuque. J'étais dans la chambre de Geralt. Ou du moins, son espace vital, qui semblait inclure tout ce qui n'était pas infesté de monstres.
Mon cœur s'accéléra. L'air était imprégné de son odeur, ce mélange de cuir, de métal, et de quelque chose d'indomptable. Un peu comme un mélange de forêt après la pluie et de… euh… virilité concentrée.
- "Merci, Maître Vesemir," murmurai-je, le rouge me montant aux joues. J'espérais qu'il ne verrait pas le "fan-girling" derrière mes paupières.
Il sourit, un sourire fatigué, mais bienveillant.
- "Repose-toi. Le repos est aussi important que la connaissance... surtout quand on doit digérer le fait que des jeunes puissent se comporter comme des chèvres en chaleur pour un Sorceleur."
Il marmonna la fin, mais assez fort pour que je l'entende. Je me sentis subitement très concernée par l'état des chèvres.
Je m'allongeai sur le lit, le corps endolori. Le sommeil ne tarda pas à m'emporter, un sommeil profond, bercé par le crépitement lointain du feu dans la grande salle et la pensée que j'étais là, dans son espace. J'avais l'impression d'être une taupe qui venait de trouver le filon d'or.
Le vent hurlait à travers les fentes des pierres, et la lune, pleine et glaciale, jetait de longues ombres déformées dans la pièce. Un bruit de pas lourds, mais feutrés, résonna dans le couloir.
La porte s'ouvrit lentement, laissant entrer une silhouette massive.
Geralt. Rentrant de sa chasse. La hargne du combat était encore palpable sur lui. Ou peut-être était-ce juste l'odeur d'un wyvern fraîchement découpé, difficile à dire.
Ses muscles étaient tendus, et son visage, habituellement impassible, était marqué par la fatigue et la concentration.
Il posa ses épées contre le mur avec un cliquetis discret, et se pencha pour retirer ses bottes. Des bottes qui avaient clairement vu des jours meilleurs. Et des monstres pires.
Puis, il vit le lit.
Et moi.
Endormie, enroulée sous les peaux de bête, mon visage pâle éclairé par la lueur lunaire. Mes cheveux, emmêlés, mais portant encore une trace de mon "shampoing" de l'autre dimension (il fallait bien un minimum de dignité), étaient étalés sur l'oreiller improvisé.
Ma respiration était douce et régulière. Probablement un ronflement à peine perceptible si on avait l'ouïe d'un Sorceleur.
Il s'immobilisa, figé. Ses yeux dorés s'ouvrirent légèrement, une étincelle de surprise trahissant son masque habituel.
- "Hmm. Non, je n'ai pas bu une potion d'hallucination," sembla-t-il pensé, ses pupilles s'adaptant à la faible lumière. Il s'approcha lentement, pas à pas, comme un prédateur qui évalue sa proie. Ou un chat, curieux d'un nouvel objet. Sûrement le chat.
Les prédateurs ont tendance à ne pas se contenter d'observer une proie endormie.
Son regard balaya la pièce, s'arrêtant sur l'épée que Vesemir avait laissée là, puis revint à moi. Il fronça les sourcils, un signe de confusion. Il était clair qu'il ne s'attendait pas à trouver une femme du XXIe siècle endormie dans son lit après une nuit de chasse.
La vie d'un sorceleur n'était jamais ennuyeuse, visiblement.
Il se pencha un peu plus, son corps musclé projetant une ombre sur moi. J'étais inconsciente de sa présence, perdue dans les profondeurs du sommeil. Son regard s'attarda sur mes lèvres entrouvertes (où l'on pouvait probablement lire "nourriture"), puis sur le rythme apaisé de ma respiration.
Une inspiration profonde remplit ses poumons, et je sentis son odeur puissante, mélange de sang de monstre séché, de sueur, et du froid de la nuit. Elle m'envahit aussi enivrante que dangereuse. Un peu comme un bon fromage qui pue, mais que tu adores. Sauf que là, c'était Geralt.
Il tendit une main. Mon cœur, même dans mon sommeil, aurait dû s'emballer. Sa main s'approcha, hésita un instant, puis se posa délicatement sur une mèche de mes cheveux, l'effleurant. Un contact léger, à peine perceptible. Il la laissa glisser entre ses doigts, cette texture douce et étrangère.
Il vérifiait précisément si j'étais réelle et non pas une illusion de nécrophage particulièrement bien réussie.
Son visage, éclairé par la lune, était une énigme. Pas d'émotion brute, mais une réflexion silencieuse. Il resta là, immobile, pendant ce qui sembla une éternité. La tension, même dans le silence de la pièce et mon sommeil, était palpable, un courant électrique entre lui et moi.
Un courant qui aurait pu faire griller un toaster.
Finalement, avec un soupir à peine audible, il retira sa main. Il recula d'un pas, puis d'un autre. Il contourna le lit, évitant mon regard, même endormi, et se dirigea vers le sol. Il étendit une peau de bête loin de moi, et s'y allongea, tournant le dos.
Le Sorceleur n'avait pas cédé.
Pas de réveil de la Belle au bois dormant par un baiser passionné, pas de monologue intérieur sur le fait que le destin l'avait enfin rattrapé. Sa retenue était un mur. Un mur très frustrant. Mais le fait qu'il n'ait pas fui en hurlant, qu'il ait passé un moment à m'observer, à me toucher, même discrètement, était une victoire silencieuse.
Il était là, dans la même pièce, le plus dangereux et le plus désirable des hommes.
Et le fantasme prenait une tournure bien plus complexe, et érotiquement frustrante, que je n'aurais jamais pu l'imaginer.
Parce que bien sûr, il fallait que la vie réelle soit plus compliquée que les jeux vidéo.