Un sorceleur spécial
Après la fête des moissons, nous sommes revenus à notre quotidien dans lequel je passe mes journées à m'entraîner et à raconter des histoires et sans nous rendre compte 1 an se passa dans lequel j'ai eu 14 ans et Ciri 11 ans.
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"AIDEN, COURS ET PRENDS CIRILLA."
"GRAND-MÈRE, NON !"
Les yeux de la reine se posèrent sur moi, son regard traversé d'une douceur fragile, malgré la dureté de ses mots.
"Aiden," murmura-t-elle, sa voix chargée d'une tristesse contenue, "c'est un ordre."
Je sentis le poids de sa décision, et, luttant pour ne pas céder à mes propres larmes, j'attrapai Ciri et m'enfuis dans les bois. Ses cris déchirants résonnaient derrière moi, m'implorant de revenir, de sauver la reine, mais je savais que je ne pouvais pas désobéir. Elle nous avait confié cette mission, et, au fond de moi, je sentais qu'il n'y avait pas de retour possible.
Alors que je courais, le cœur battant et l'esprit embrouillé, les bruits de la poursuite se rapprochaient, leurs voix s'élevant dans l'obscurité :
"Ils sont là-bas ! Attrapez-les !"
Des soldats étaient sur nos talons, et bien que je tente de presser le pas, une fatigue écrasante s'abattait sur moi, lourde et inexplicable. C'était comme si chaque pas drainait mes forces, ralentissait mes mouvements. Pourtant, mes sens étaient étrangement aiguisés ; j'entendais le moindre bruissement de feuilles, sentais les présences derrière nous, chaque mouvement autour de moi devenant une alerte.
Juste au moment où l'un des soldats levait son épée pour frapper, une silhouette apparut, aussi silencieuse que l'ombre elle-même. L'homme abattit les soldats avec une aisance glaciale, un flot d'efficacité mortelle. Puis, il se tourna vers moi, et je fus figé par son regard : des yeux dorés, fendus comme ceux d'un chat, perçants et inhumains.
Sans un mot, il leva la main dans un geste mystérieux. Avant que je ne comprenne ce qu'il faisait, le monde tout entier bascula dans l'obscurité.
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"Ahah!" Je me redressai en sursaut, le cœur battant, la sueur coulant le long de mon front. Mon souffle était court, comme si j'avais vraiment couru pour échapper à ces soldats.
"Ces rêves deviennent beaucoup trop fréquents," murmurai-je, troublé.
Au début, ce n'étaient que des images floues, des ombres et la sensation de fuir quelque chose d'invisible. Mais avec le temps, les visions étaient devenues plus nettes, plus claires, comme si elles me montraient un futur que je ne pouvais pas éviter. Une sorte de clairvoyance, une fenêtre vers des événements à venir, m'entraînait chaque nuit dans des scènes qui me paraissaient étrangement réelles.
"J'espère que je me trompe…"
Je pris une profonde inspiration et me dirigeai vers le bassin d'eau que les servantes avaient préparé pour moi. Ces derniers temps, je m'étais fait une place dans le palais ; la reine m'avait accordé le titre de chevalier protecteur de la princesse, une position presque aussi honorable que celle de baron.
En plongeant mes mains dans l'eau fraîche, mon reflet attira mon attention. Mes cheveux, autrefois noirs, étaient maintenant presque entièrement blancs. Ce changement, progressif mais inexorable, m'intriguait chaque jour un peu plus. D'où venait-il ? Était-ce réellement la magie, ou bien quelque chose de plus sombre, de plus puissant, qui modifiait lentement mon corps ?
Je passai une main sur mes cheveux et notai un autre détail troublant. Mes yeux, autrefois tous deux d'un bleu profond, avaient changé. L'un d'eux était maintenant d'un vert intense, brillant dans la lumière du matin comme un écho de ces rêves étranges. Plus troublant encore, mes réflexes semblaient décuplés. Parfois, je percevais des mouvements avant même qu'ils n'aient lieu. Comme cette fois où un vase était tombé du rebord d'une fenêtre ; ma main l'avait attrapé avant même que je ne réalise ce que je faisais.
"Je ne m'y habituerai jamais," murmurai-je en m'écartant du bassin, laissant mon reflet flou disparaître dans l'eau.
Ces changements, bien sûr, n'étaient pas passés inaperçus. Ciri, plus inquiète que jamais, avait supplié sa mère de faire venir un médecin. La consultation de cet homme me semblait encore si proche dans mes souvenirs.
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"Votre Majesté, je ne vois aucun problème avec Aiden," déclara le vieux médecin en s'inclinant respectueusement.
"C'est impossible ! Regardez-le, il a changé," insista Ciri, la voix pleine de crainte, ses yeux passant tour à tour de mon visage à ceux du médecin.
Le médecin lui adressa un sourire rassurant. "Votre Altesse, je vous assure qu'il n'est pas malade." Puis, se tournant vers moi avec un air d'intérêt, il ajouta : "Cependant, je crois que son corps commence à s'adapter à la magie. Ce n'est qu'une hypothèse, bien sûr, mais ces signes pourraient en être des preuves."
La reine hocha la tête, soucieuse. "Merci, vous pouvez disposer." Le médecin s'inclina et quitta la pièce en silence.
Elle nous laissa seuls, mais avant de sortir, elle s'arrêta devant la porte, observant un moment le lien entre Ciri et moi. Un sourire tendre passa sur ses lèvres en nous voyant parler, avant qu'elle ne disparaisse dans le couloir.
"Aiden, tu es sûr que ça va ?" demanda Ciri, la voix presque tremblante, comme si elle craignait de me perdre.
Je posai une main réconfortante sur son épaule et lui souris. "Bien sûr, Princesse. Ne vous inquiétez pas. Vous vous souvenez de ma promesse ? Je vous ai dit que je veillerai sur vous, coûte que coûte."
Elle hocha la tête et, sans prévenir, se blottit contre moi, ses petits bras m'enlaçant avec une force surprenante. "Mais… promets-moi de ne pas faire de choses dangereuses, d'accord ? Je ne veux pas que tu disparaisses."
Je sentis sa prise se resserrer, et je la serrai doucement en retour. Ses mots trahissaient son angoisse, et j'aurais voulu lui promettre que rien ne pourrait nous séparer. Elle leva ses yeux vers moi, mouillés de larmes.
"Je veux que rien ne change, Aiden. Que ça reste comme ça… pour toujours."
Je hochai la tête, ému par ses paroles. "Ne t'inquiète pas, Princesse. Souviens-toi de notre promesse."
Elle m'adressa un faible sourire, une étincelle de confiance dans son regard.
"Oui… je m'en souviens," murmura-t-elle, avant de reprendre plus fort : "À partir d'aujourd'hui, toi et moi serons toujours ensemble jusqu'à la fin des temps. Et même si le monde se retournait contre nous, nous resterons forts."
J'achevai la phrase avec elle, la voix emplie de la même détermination : "Si des malheurs et des souffrances devaient arriver, nous les supporterons ensemble."
Ensemble, nous prononçâmes les derniers mots, un écho de promesse entre nous : "Simul usque ad finem."
Nos voix s'élevèrent comme un murmure solennel, et je sentis notre lien se resserrer, presque palpable. Nous éclatâmes de rire, comme si cet instant de légèreté pouvait nous protéger de tout ce qui nous attendait.
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En repensant à ce moment, un sourire apparut sur mon visage.
"Cette promesse… Je ne regretterai jamais de l'avoir faite."
Je sortis de ma chambre, prêt à aller réveiller la princesse.
"Votre Majesté, n'est-il pas l'heure ?" demanda un serviteur.
"Vous avez raison. Il est temps de conquérir le Nord. Dites aux armées de se préparer."
"Bien, Votre Majesté." Le serviteur s'inclina et quitta le bureau où un homme se tenait, observant pensivement la capitale depuis la fenêtre.
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Les noms, les souvenirs, les promesses, tous des éléments puissants qui forgent notre monde. Cette promesse, scellée entre deux âmes, apparut dans un lieu invisible aux yeux de tous, où deux cordes, l'une noire et l'autre blanche, s'entrelacèrent de plus en plus. Elles vibraient d'une énergie presque vivante, comme un battement de cœur commun. Chaque mot, chaque souvenir semblait les renforcer, et elles se tordaient, inébranlables, prêtes à affronter ensemble les épreuves du destin, unies à jamais.