Le Convoi de la dernière chance (Vol. 1.)

Chapitre 6 : Chapitre 5 : jour 0

Catégorie: M

Dernière mise à jour 09/11/2016 17:23

Bonjour ! Voici donc le chapitre 5 en version corrigée. Merci à Gaia pour la correction !
N’oubliez pas de commenter ! Bonne lecture !


Chapitre 5 : Jour 0

Driss ferma les portes du fourgon du SWAT et s’assit à sa place : en bout de rangée et en face de Jedd, le commandant de l’unité.
Tung, le pilote, lança la sirène au son modulé du véhicule et démarra en trombe. Le policier n’aimait pas trop monter là-dedans, les véhicules étaient assez inconfortables : ils étaient tous entassés sur deux bancs se faisant face et se situant le long des parois latérales de l’espace réduit. 
Tout le monde était en tenue d’intervention. Ils avaient l’équipement standard : un casque de combat à visière, leur uniforme de tissu, un gilet pare-balle dans le dos duquel on pouvait « SWAT », des épaulières, des genouillères ainsi qu’un masque à gaz pendant à leur côté.
Leurs armes étaient des fusils d’assaut à silencieux.

-Voici le topo ! commença Jedd. La banque centrale a été attaquée par un commando lourdement armé, ils seraient une dizaine. D’après les premières infos ils auraient dessoudé tous les membres de la sécu pendant l’attaque puis cinq otages sur la trentaine qu’ils ont pris. Inutile de vous dire que ça va pas être rigolo…

L’officier marqua une pause avant de reprendre.

- Il s’agit d’un building d’une vingtaine d’étages. La banque se situe sur les quatre premiers, rez-de-chaussée compris... D’autres unités du SWAT sont en phase de déploiement et le commandement nous détache un hélicoptère avec tireurs d’élite, la police de la ville participe évidemment aux opérations. Des questions ?

-Des détails sur l’armement des braqueurs chef ? lança un des hommes.

-En effet : armes de guerre, explosifs et j’en passe…

-Sait-on à quel étage se situent les otages ? s’enquit Driss.

-D’après les premières observations, ils se situeraient au deuxième étage de la banque mais on n’en est pas sûrs et c’est un problème… lui répondit le chef avec un air grave. Maintenant, fini pour les questions, je dois consulter les plans… termina-t-il.

Le bruit modulé de la sirène résonnait toujours pendant que le fourgon du SWAT fonçait à travers la ville.
Cette intervention s’annonçait à haut risque et les visages de ses camarades étaient tendus. Quelques-uns tripotaient nerveusement les courroies de leurs gilets, d’autres caressaient leurs armes d’un air distant.
Il y eut une secousse, le policier tourna la tête en direction du conducteur : celui-ci rouspétait avec  son copilote contre les civils qui mettaient trop de temps à s’écarter.
Les freins crissèrent et le véhicule s’immobilisa avant de redémarrer immédiatement.

-Va te faire foutre ducon ! cria le pilote. On ne respecte plus rien maintenant, refuser la priorité à un fourgon de police ! J’aurais dû lui défoncer sa caisse…

-Du calme Tung! lança Jedd à l’attention du conducteur en relevant le nez du plan qu’il consultait. Concentre-toi sur la conduite et reste poli !

L’officier replongea dans la consultation dans ses plans. Quelques minutes s’écoulèrent pendant lesquelles personne ne parla en dehors des quelques jurons du pilote.
Driss regarda par la fenêtre de l’une des portes arrière. Il aperçut plusieurs camions de militaire qui filaient dans la direction opposée à la leur. Cela l’étonna dans un premier temps puis il se souvint que la radio avait annoncé que l’armée effectuerait des manœuvres pendant la journée dans la ville.
D’après ce qu’on leur avait dit, il s’agissait d’exercices de prévention en cas d’attaque bactériologique.
En tout cas, cet évènement conjugué à l’attaque de la banque semblait avoir mis la ville sens dessus-dessous pour qu’on leur refuse ainsi la priorité.

-On arrive chef ! cria Tung alors que le véhicule ralentissait.

-Enlevez la sécurité de vos armes ! lâcha Jedd.

Une série de déclics répondit immédiatement à l’ordre. Le véhicule s’immobilisa.

-On y est ! commenta le conducteur.

Driss se leva et ouvrit immédiatement les portes. Il descendit, les autres le suivirent. Le boulevard était encombré de voitures de police et d’agents des forces de l’ordre aux traits tirés par la fatigue vêtus de leurs gilets pare-balles.
Des ambulances étaient également stationnées à l’écart, les brancards prêts à accueillir d’éventuels blessés. Le policier aperçut plusieurs camions de pompiers garés à l’écart.
Les gyrophares allumés de tous ces véhicules se reflétant sur les façades des buildings aux alentours lui donnaient l’impression de se trouver en discothèque.
Un vaste espace avait été dégagé autour de l’entrée de la banque qui se trouvait à une centaine de mètres de l’endroit où ils s’étaient arrêtés. Des voitures derrière lesquelles se tenaient plusieurs membres des forces de l’ordre en position de tir cernaient le périmètre.
Un vrombissement lui fit lever la tête et un hélicoptère du SWAT passa à la verticale de leur groupe.
Jedd passa devant Driss, un policier accourut immédiatement à leur rencontre et interpela le commandant de l’unité.

-Bonjour ! le héla-t-il. Nous avons plus d’informations, les otages se situent au deuxième étage. Je vous conseille de parler aux fédéraux en ce qui concerne l’intervention, ajouta-t-il en désignant un attroupement un peu à l’écart du barrage établi près de l’entrée de la banque.

Jedd leur fit signe de le suivre et ils s’avancèrent en direction du groupe tout en gardant un œil sur le bâtiment de la banque, rien ne semblait bouger derrière les vitres mais la tension régnante rappelait tout du drame qui se jouait entre ses murs.
L’officier les arrêta à quelques distances de l’attroupement et alla seul à la rencontre des fédéraux.
Ceux-ci étudiaient des cartes étalées sur le capot d’un fourgon de police. Un des membres du groupe se retourna et serra la main de Jedd puis l’invita à consulter les cartes.
Le commandant se pencha au-dessus et les hommes se mirent à lui parler tout en lui indiquant certains points sur les plans.
Après quelques minutes, le chef revint vers eux avec l’air grave.

-Ça ne s’annonce pas super bien les gars, commença-t-il d’un air gêné. Ils auraient des armes chimiques avec eux, le port du masque est donc obligatoire pour l’assaut. Les otages sont tous au premier étage d’après les observateurs situés dans les autres bâtiments. En ce qui concerne le plan d’attaque, vous allez passer dans une ruelle contournant la banque, il y a une bouche d’aération à la hauteur du premier étage à l’arrière de la banque.

Jedd marqua une très courte pause avant de reprendre.

-Driss, ajouta-t-il en se tournant vers lui. Tu emmèneras l’assaut, vous passerez par les conduits de ventilation et vous éliminerez le plus rapidement possible les gardes, les tireurs d’élite ouvriront le feu à votre signal. En ce qui me concerne, je vous guiderai par Radio. Utilisez les caméras spéciales avant de descendre des conduits afin de savoir ce qui vous attend en bas. Maintenant, allez-y !

-Bien, chef ! se contenta de répondre Driss. Suivez-moi vous autres ! reprit-il en se tournant vers le reste troupe.

Le policier s’élança vers la ruelle en question au pas de course, il se retourna : les autres le suivaient bien. Ils s’engouffrèrent dans celle-ci. Il y faisait sombre, ce qui était normal vu qu’elle était bordée par des buildings. Des poubelles débordantes de déchets étaient alignées le long des murs et des cartons vides étaient entassés çà et là.
Ils contournèrent le bâtiment et se retrouvèrent dans une arrière-cour dégagée et grillagée.

-Mettez vos masques à gaz et déposez vos sacs ici ! lança Driss à sa troupe en mettant son masque. On n’emporte que les caméras !

Tous s’exécutèrent et ils repérèrent la bouche d’aération dans un angle formé par le bâtiment, elle se situait assez haut et ils durent empiler quelques poubelles afin de pouvoir y accéder.
Ils dévissèrent précautionneusement la grille qui l’obstruait et s’engagèrent dans le boyau. Driss passa en premier après avoir vérifié que son oreillette et son micro étaient bien en place.

-On entre, chuchota-t-il à l’attention de Jedd.

 La conduite était assez large, ce qui leur permit de progresser en rampant sans être trop à l’étroit.
Après quelques secondes, ils parvinrent à une grille surplombant un couloir.
Le policier fit signe à ses coéquipiers de lui faire passer la caméra et fit pendre légèrement l’épais câble rigide, l’appareil se situait au niveau de l’embout. 
Il consulta le petit écran portatif qu’il avait en main auquel était reliée la caméra : le couloir était désert.
Alors qu’il s’apprêtait à dévisser la grille, son oreillette grésilla.

-Mais bon sang ! Qu’est-ce qu’il se passe là-bas ! crachotait la voix de Jedd. Les preneurs d’otage vont s’énerver !

Des cris et des coups de feu lointains résonnaient en fond.

-Que se passe-t-il chef ?  murmura Driss dans son micro.

-Excusez-moi ça ne s’adressait pas à vous, ma radio s’est activée toute seule, lui répondit immédiatement l’officier. Il semble y avoir une émeute un peu plus loin, continuez votre mission.

La communication s’interrompit, Driss se concentra à nouveau sur sa mission. Il dévissa la grille et descendit dans le couloir, les autres l’imitèrent lorsqu’il leur fit signe.
Le groupe d’assaut constitué d’une dizaine de policiers se retrouva donc dans la banque et s’apprêta à progresser.

-Chef, on est sorti du conduit à la première grille et on est prêt à donner l’assaut, signala Driss dans son micro.

-Très bien, grésilla la voix de l’officier. Dès que vous serez en situation d’affrontement imminent, tu me préviens et un groupe d’assaut entrera par la porte principale pendant que les tireurs d’élite ouvriront le feu. Un autre groupe pénétrera dans la banque par le troisième étage depuis les étages supérieurs… Pour ce qui est de la direction à prendre… renchérit-il après une pause. Vous continuez jusqu’au bout du couloir et vous allez arriver dans un couloir aux parois vitrées donnant sur la salle des bureaux, les otages s’y trouvent. A vous de gérer la situation ensuite, bonne chance.

-Bien reçu, répondit Driss en coupant son micro.

Le policier fit passer deux de ses équipiers devant et ils progressèrent jusqu’au bout du couloir en longeant les murs. Ils se baissèrent avant de passer la porte entrouverte se situant au bout.
Ils vérifièrent si le couloir suivant était dégagé grâce à la caméra puis poussèrent légèrement la porte et passèrent un par un en rampant.
Ils se plaquèrent immédiatement contre le mur où se trouvaient les fenêtres. Celles-ci se situant à mi-hauteur, ils étaient donc parfaitement dissimulés. Les volets et les rideaux étaient tous baissés aux fenêtres, la salle était seulement éclairée par les lampes situées au plafond.
Une porte d’accès à la salle se situait un peu plus loin, Driss y envoya deux hommes.
Driss leva légèrement le câble au-dessus de sa tête et consulta les informations renvoyées sur son écran : il y avait six preneurs d’otages lourdement armés et cagoulés répartis dans la pièce, les otages étaient solidement attachés et dispersés dans toute la pièce avec un pain d’explosif autour du cou.
Le policier serra les dents et repéra un des braqueurs qui tenait en main ce qui s’apparentait à un détonateur. C’était celui qu’il leur fallait abattre en premier mais l’homme portait un gilet pare-balle intégral agrémenté d’un casque de combat.
Driss étudia encore un moment la scène et répartit ses hommes dans le couloir en leur désignant leurs objectifs approximatifs en utilisant le langage des signes.
Les criminels semblaient nerveux et agités, il valait mieux ne pas trop tarder.

-On est prêt ! lâcha-t-il par radio à l’attention de Jedd.

-Très bien, c’est parti !

Driss fit signe à ses hommes et tous se levèrent en même temps, le policier aligna le porteur du détonateur qu’il s’était réservé car il était le meilleur tireur.
Plusieurs explosions retentirent au rez-de-chaussée. Les vitres explosèrent au moment où Driss et ses équipiers ouvraient le feu.
Trois balles se logèrent dans le système de commande, le boîtier explosa dans la main de son possesseur qui commença à pivoter dans sa direction avec l’arme brandie.
Le policier ouvrit à nouveau le feu et toucha l’homme au bras et à la jambe, une dernière balle atteignit sa cible en plein visage.
L’homme s’effondra et il changea de cible mais il n’y en avait pas d’autres. Les agresseurs gisaient tous au sol, en sang.
Driss franchit les vitres brisées, ses hommes l’imitèrent. Les otages regardaient le spectacle avec un air horrifié et le policier comprenait pourquoi mais cela était nécessaire pour les sauver.
Il fit signe à ses équipiers de détacher les otages et de les séparer des explosifs puis il vérifia que les braqueurs étaient bien morts.
Des coups de feu crépitaient dans les étages inférieurs et le sang du policier se glaça lorsqu’il s’aperçut que ce qu’il prenait pour des cris poussés dans la fureur du combat étaient en réalité des cris d’horreur à l’étage supérieur.
Il fit signe à ses hommes de se presser et surveilla les issues de la salle du coin de l’œil.

-Chef, les otages sont en notre possession ! lança-t-il par l’intermédiaire de sa radio. Vous savez ce qu’il se passe à l’étage supérieur ?

-Non Driss, j’en sais foutre rien ! crachota la voix de l’officier qui semblait pris de panique.

Des coups de feu lui parvinrent par la radio, accompagnés de cris. Ces mêmes sons lui parvinrent assourdis depuis l’extérieur.

-Bordel, faites quelque chose ! se mit à hurler Jedd à un autre interlocuteur. Repoussez ces gens ! Mais qu’est-ce qu’ils ont tous aujourd’hui ? Que les secours prennent en charge les blessés.

-Je sais, mais ces gens sont bizarres ! hurla une personne qui devait être un des fédéraux. Ils ont sauvagement ….

La communication fut à nouveau coupée sans que Driss n’ait pu entendre la fin de la phrase. Les coups de feu devenaient moins nombreux à l’étage et ceux du rez-de-chaussée s’étaient tus.
Driss sursauta lorsqu’une des portes du couloir pivota violemment sur ses gonds et s’écrasa contre le mur. Il épaula immédiatement son arme, ses équipiers qui avaient capté son mouvement avaient agrippé leurs armes.
Des hommes en tenue d’intervention firent irruption l’arme brandie, le policier baissa immédiatement son arme : l’uniforme était celui du SWAT. Les membres de l’unité qui venaient de faire irruption abaissèrent également leurs fusils.
Il devait s’agir de ceux qui avaient franchi la porte d’entrée au début de l’assaut, celui qui devait être le leader du groupe s’avança vers Driss.

-Les otages sont libérés ? Parfait ! lâcha brutalement l’homme. On va vous aider à les faire sortir.

-Une minute, intervint Driss. Il m’a semblé que les unités à l’étage avaient des difficultés. Nous devrions peut-être aller voir…

-Vous vous faites ce que vous voulez, cracha l’homme d’un ton cassant. La mission est de faire sortir les otages dès qu’ils sont libérés et c’est mon seul objectif. Si vous voulez aller voir là-haut je ne vous retiens pas, mais vous devez le faire sans mon unité. Je ne tiens pas à assumer une quelconque responsabilité si ça tourne mal et que d’autres otages sont tués.

-Très bien, en avant les gars ! lança Driss à ses hommes en s’engouffrant dans le couloir.

Les membres de l’autre unité d’intervention les laissèrent passer avant de s’engouffrer dans la salle à leur tour.
Les tirs et les cris dans la rue redoublèrent en intensité.

-… Tirez ! Hurla soudain Jedd à la radio. Descendez-les ! Attent….

Une violente explosion interrompit la communication. Driss entendit distinctement la détonation venant de l’extérieur.
Plus aucun bruit ne provenait de l’étage supérieur, il se précipita vers la porte sur laquelle se trouvait un petit écriteau « Escaliers », talonné par ses équipiers. Il monta quatre à quatre les marches et fit irruption dans un couloir obscur.
Les murs étaient étoilés d’impacts de balles et deux cadavres baignant dans leur sang étaient étalés au sol. Driss dut retenir un haut le cœur : ces cadavres arboraient ce qui ressemblait fortement à la tenue d’intervention du SWAT mais celles-ci étaient en lambeaux et les corps n’étaient pas dans un meilleur état. Les membres en avaient été sauvagement arrachés et semblaient avoir été grignotés.

-Merde ! ne put s’empêcher de dire un des hommes qui l’accompagnait.

-Restez vigilants les gars, ceux qui ont fait ça ne rigolent pas.

Il reprit sa progression, toujours suivit du groupe d’intervention et tomba au détour d’un coude du couloir sur d’autres cadavres : trois d’entre eux appartenaient au groupe d’intervention, l’autre qui avait la tête éclatée arborait l’uniforme d’agent de la sécurité.
Il s’agissait sûrement d’un des agents qui avait été tué pendant l’attaque comme on le leur avait dit, rien d’inquiétant.
Au fur et à mesure de leur progression dans l’étage, ils rencontrèrent d’autres cadavres d’agents du SWAT affreusement mutilés mais également ceux de deux braqueurs ayant subi le même sort, et même le corps d’un civil. Les murs portaient les traces d’un combat acharné et étaient éclaboussés de sang.
Curieusement, seuls les cadavres dans agents des forces de l’ordre et des bandits semblaient avoir subi un traitement aussi horrible.
Le nombre de cartouches qui avaient été tirées était tout simplement impressionnant, ce n’était pas normal étant donné les forces en présence. Le fait que tout l’étage soit ainsi ravagé révélait également que l’on s’était battu de façon peu ordonnée dans tout l’étage et cela ne ressemblait pas à des techniques employées par son unité.
La salle de conférence dans laquelle ils finirent par déboucher leur réserva une bien mauvaise surprise : deux silhouettes se tenaient penchées au-dessus d’un cadavre, des bruits de mastication lui parvenaient.
L’obscurité régnant dans la salle l’empêchait de voir distinctement ce qu’il se passait mais ces bruits ne lui disaient rien de bon.
C’est alors qu’une porte latérale s’ouvrit violemment, Driss brandit son arme et la baissa rapidement : un agent de sécurité venait de la franchir.
Il se tenait bizarrement et semblait avoir été gravement blessé à la tête et à la poitrine, l’homme semblait raidi.
Tous eurent le même mouvement de recul devant cette vision mais un des membres de l’escouade s’enhardit et s’avança vers le blessé pour lui proposer de l’aide.
Les deux silhouettes n’avaient pas bougé pendant ce temps.

-Vous avez besoin d’aide m’sieur ? s’enquit celui qui s’était improvisé secouriste. Vous inquiétez pas tout va bien se passer.

Le blessé gémit lorsque l’agent voulut lui prêter son épaule pour qu’il s’y appuie.

-Hey, Vous! risqua Driss en s’adressant aux deux silhouettes. Vous mettez les mains sur la tête tout de suite ou nous tirons !

Les intéressés ne semblèrent pas prêter attention aux paroles du policier. Le mugissement puis le cri de douleur qui résonna dans la pièce reportèrent l’attention de Driss sur le blessé et son secouriste : la victime était en train de mordre sauvagement son sauveur au cou, à la jonction du masque à gaz et du gilet pare-balle.
L’agent se débattit pour se libérer et son agresseur lui arracha un grand morceau de chair. L’homme tituba en se tenant le cou et en s’étouffant dans son sang puis s’effondra.
Les silhouettes semblèrent réagirent en même temps et se retournèrent en grondant. Il s’agissait d’un civil et d’un agent de la sécurité comme il put le constater lorsqu’ils passèrent dans une raie de lumière. Tous deux étaient couverts de sang et l’un d’entre eux tenait une main déchiquetée.

-Feu ! Abattez-les ! s’époumona Driss.

Ils levèrent leurs armes et tirèrent en même temps, plusieurs rafales touchèrent les cannibales mais cela ne sembla pas les déranger et ils continuèrent de s’approcher comme si de rien n’était.

-On recule ! hurla le policier.

Ils refluèrent tous vers la porte qu’ils avaient franchie en entrant sans cesser de tirer sur ces cadavres ambulants qui ne semblaient pas vouloir mourir.
À peine furent-ils dans le couloir qu’un de ses équipiers poussa un hurlement : il venait d’être mordu à la jambe par un des cadavres qui étaient étendu au sol lors de leur précédent passage, il parvint à s’en libérer et se mit à boiter pour les rejoindre après s’être fait légèrement entrainé à l’écart par la chose.
Plusieurs silhouettes se découpèrent dans l’obscurité tout autour d’eux.

-On est encerclé ! constata Driss en tentant de garder son calme. Il faut qu’on se fraie un passage jusqu’aux escaliers !

Ils tirèrent de nouvelles rafales sur les créatures qui s’avançaient vers eux, il n’y eut aucun effet sur leurs cibles à l’exception de l’une d’entre elles qui fut touchée à la tête et qui trébucha.

-Visez la tête ! s’empressa de crier Driss.

Ils parvinrent ainsi à se dégager du piège qui menaçait de se refermer sur leur groupe et reprirent leur avancée.
À peine avaient-ils franchi un coude du couloir qu’une porte céda et que plusieurs de ces choses se jetèrent au milieu de leur groupe. Chacun se retrouva isolé dans la cohue, les autres cadavres les ayant rattrapés.
Driss tenta de se libérer à grands coups de crosses, tout en repoussant les bras que les cannibales tendaient dans sa direction afin de l’attraper.
Il préférait éviter de tirer pour ne pas tuer ses équipiers par inadvertance. Cependant, certains d’entre eux semblaient avoir perdu le contrôle de leurs nerfs et avaient ouvert le feu pendant que d’autres hurlaient de douleur sous les morsures.
Un des agents de police s’effondra atteint d’une balle en pleine figure, un autre s’effondra après avoir reçu une balle dans la jambe et fut immédiatement taillé en pièce par les attaquants.
Le policier ouvrit le feu pour dégager son camarade mais c’était peine perdue car d’autres cadavres s’étaient rués dans la mêlée et il dut reculer afin de s’extraire complètement de la mêlée avant de se prendre une balle perdue ou de se faire dévorer.
Une fois parvenu à l’écart, il fit feu sur les choses pour tenter de sauver ses équipiers en faisant attention de ne pas les descendre. Il ne tirait que sur les cadavres qui étaient occupés à l’écart des hommes encore debout.

Quatre d’entre eux parvinrent finalement à le rejoindre. Ils étaient couverts de sang, l’un de ceux qui s’étaient dégagés était celui qui s’était fait mordre à la jambe.
Les autres ne semblaient malheureusement plus en état de les rejoindre, il fit donc tirer plusieurs rafales directement dans le groupe afin d’abattre un maximum de ces choses puis il battit en retraite avec ses derniers équipiers.
Ils descendirent à l’étage inférieur en faisant attention au moindre mouvement suspect et prirent soin de bloquer les portes de la cage d’escalier puis ils en profitèrent pour recharger leurs fusils.
La grande salle était vide, les otages avaient visiblement été évacués mais il pouvait distinctement entendre des hurlements et des tirs à l’extérieur.
Ils descendirent au rez-de-chaussée et se retrouvèrent dans le hall, celui-ci était sens dessus-dessous. Il s’agissait clairement des ravages causés par l’explosion qui était survenue au début de l’assaut mais ce qui attira l’œil de Driss fut le spectacle qui s’offrait à lui dehors.

Des volutes de fumée noire balayaient la rue principale, des policiers ensanglantés réclamaient de l’aide. De nombreux cadavres de civils, de secouristes et d’agents des forces de l’ordre gisaient un peu partout. Certains de ces corps étaient affreusement mutilés et plusieurs civils portaient des blessures qui avaient visiblement été faites par des armes à feu.
Des coups de feu claquaient dans toutes les directions sur toute la portion de l’avenue. Des policiers luttaient contre des personnes dans un état similaire à celles qui les avaient attaqués à l’étage. La scène était totalement surréaliste, ces gens ne voulaient pas mourir alors qu’ils étaient quasiment hachés par les rafales des armes automatiques.
Une ambulance démarra en trombe et fut suivie d’un camion de police, visiblement quelques personnes semblaient préféré la fuite devant l’ampleur de la catastrophe.
Il n’aperçut ni Jedd, ni les fédéraux. Le blessé de leur unité se plaignit de la jambe. Étant toujours leader de son unité il se devait de les tirer de là avant toute autre chose, ils avaient parfaitement vu de quoi ces cadavres étaient capables et les corps éparpillés un peu partout confirmaient que la situation était hors de contrôle à cet endroit.
De nombreux cannibales rôdaient dans la zone et visiblement les derniers combattants n’avaient aucune coordination. De plus, ils avaient quelqu’un à amener à l’hôpital et il fallait qu’il s’assure que Tara et Jill allaient bien.
Étant donné qu’il y avait en ce moment des manœuvres militaires pour parer à une attaque bactériologique, il était fort probable que des soldats se trouvaient là-bas. Il pourrait donc leur laisser le blessé et libérer ses hommes là-bas avant d’aller chercher sa famille.
Il doutait en effet que ceux-ci le laissent en paix s’il allait chercher sa femme et sa fille d’abord. Mort, il ne serait d’aucun secours.
Il se rassura en se disant qu’ils habitaient hors de la ville et que Jill n’avait pas école aujourd’hui, sa femme et sa fille se trouvaient donc obligatoirement ensemble. De plus, Tara avait un caractère bien trempé et elle saurait donc quoi faire en l’attendant.
Driss repéra leur fourgon stationné un peu plus loin et fit signe à ses équipiers de le suivre. Ils coururent aussi vite que possible jusqu’à celui-ci, ils éliminèrent plusieurs des cadavres qui tentaient de les attaquer d’une balle dans la tête.
Ils atteignirent finalement le véhicule, Tung et son copilote n’étaient plus là. Driss s’installa au volant et verrouilla toutes les portes lorsqu’il fut certain que tout le monde fut bien installé à l’intérieur.
Le policier démarra en trombe, les cannibales s’agglutinaient déjà autour du camion. Il zigzagua un peu entre les voitures abandonnées et se retrouva hors de la zone tampon établie par la police.

Un chaos incroyable régnait dans la ville : des voitures filaient à toute allure en fauchant ceux qui se trouvaient sur leur chemin, des gens en sang étaient poursuivis par des personnes mutilées, des pilleurs profitaient de la situation pendant que les quelques policiers de patrouille tentaient vainement d’abattre leurs agresseurs.
Il dut faire des écarts au tout dernier moment à plusieurs reprises pour éviter d’écraser les gens qui traversaient en courant en tous sens.
Driss vit également des personnes se défenestrer des immeubles, la ville était complètement folle et hors de contrôle. Les gens hurlaient et courraient dans tous les sens, des cannibales dévoraient ceux qui n’avaient pu s’enfuir à temps ou qui n’avaient pas couru assez vite.
Il vit même des policiers abattre froidement des gens sains avant d’être assassinés par d’autres personnes. Des voitures étaient abandonnées au milieu de la route ou étaient tout simplement accidentées. Le policier était obligé de slalomer et risquait à chaque instant de perdre le contrôle de son fourgon.
Il aperçut quelques ambulances à l’abandon sur les bas-côtés, les brancards renversés au côté desquels gisaient parfois les corps méconnaissables des secouristes.
Certains véhicules brûlaient et il n’y avait évidemment personne pour tenter de les éteindre. Driss aurait voulu s’arrêter à tous les coins de rue pour aider mais il savait que ce n’était pas possible, ils n’étaient pas assez nombreux et les gens ne semblaient plus être eux-mêmes.
Si lui et ses coéquipiers descendaient du fourgon, ils pourraient se le faire voler ou se faire tuer voir même les deux.

Le policier écrasa plusieurs personnes qu’il avait identifié comme étant des cannibales.
Quelques personnes visiblement à bout agitèrent les bras dans sa direction lorsqu’il passa à leur niveau, réclamant de l’aide, n’ayant apparemment pas perdu l’espoir d’être secouru à cet instant.
Plusieurs fois Driss aurait voulu piler et les prendre à son bord mais les visions cauchemardesques le retinrent.
Le policier conduisit ainsi son véhicule à travers la ville en faisant hurler la sirène pour inciter les gens à dégager le passage.
Il arriva enfin en vue de l’hôpital et écrasa la pédale de frein lorsqu’il aperçut ce qui l’y attendait: deux chars et des véhicules blindés barraient l’accès à l’enceinte du complexe hospitalier.
Des militaires en tenue de combats étanches agrémentées de masque à gaz veillaient dans des nids de mitrailleuses qu’ils avaient aménagé et de puissants projecteurs avaient été fixés au mur bétonné encerclant l’hôpital.
Plusieurs dizaines de voitures civiles étaient garées à moitié dans le fossé au bord de la route et des cadavres déchiquetés gisaient au milieu de la chaussée.
Driss fit un appel de phare tout en laissant son gyrophare allumé et attendit la réaction des militaires. L’un des hommes posté dans un des postes de tir lui fit signe d’avancer. Il obtempéra et roula lentement jusqu’au barrage, les canons des chars étaient braqués dans sa direction.
Le militaire qui lui avait fait signe s’approcha en compagnie de six autres factionnaires et lui fit comprendre qu’il devait ouvrir sa fenêtre. Le policier s’exécuta.

-Vous devez me remettre vos armes et descendre du véhicule ! l’apostropha le soldat.

Driss fit passer la consigne à ses camarades, récupéra leurs armes et les tendit à l’un des militaires qui s’était approché avant de déverrouiller les portes et de descendre. Le soldat recula en le tenant en joue.

-Très bien, vous vous mettez à genoux devant les véhicules avec les mains sur la tête maintenant, reprit ce dernier. Dites à vos camarades de faire de même.

Le policier transmit le message et suivit les consignes qui lui avaient été données, plusieurs autres soldats s’approchèrent.

-Enlevez vos masques et posez-les au sol! leur ordonna le militaire lorsque les cinq policiers furent alignés devant le camion dans la position qu’il leur avait demandé d’avoir.

Ils s’exécutèrent tous et les soldats se rapprochèrent un peu pour les examiner de plus près, l’un d’entre eux qui arborait une croix rouge sur son casque tenait un thermomètre à sonde. Il se positionna devant Driss et maintint la sonde à quelques centimètres de son front. L’appareil produisit un unique bip et l’écran digital que l’homme tenait s’éclaira d’une lumière verte.
Driss se demanda pourquoi il était si important de contrôler ainsi leur température avant de les laisser passer.
Le soldat répéta l’opération sur ses autres équipiers. Le dernier à bénéficier de l’examen fut Trife, le blessé. L’appareil se mit à produire une série de bip et l’écran digital s’alluma en rouge, le militaire recula immédiatement et tint le policier en joue. Les autres soldats imitèrent leur camarade.

-Est-ce que tu as été mordu ? cracha agressivement l’homme à l’adresse du blessé.

-J..Je… Eh..b.. Eh bien oui… bafouilla l’intéressé déstabilisé par la réaction brutale du militaire. A la jambe…

-Emmenez-le à l’écart les gars ! repartit le soldat. Vous savez ce que vous avez à faire !

-Une minute ! intervint Driss. Cet homme est sous ma responsabilité ! Qu’allez-vous lui faire ?

-Ceci n’est plus de votre ressort ! riposta le militaire pendant que les autres relevaient le blessé et l’emmenaient à l’écart. Vous ne pouvez plus rien pour lui.

-Vous n’avez pas le droit ! s’énerva le policier en faisant mine de se relever.

-Bien sûr que j’ai le droit ! Et calmez-vous ou je vous fais tous abattre ! dit-il d’un ton menaçant.

-Mais pourquoi ? s’enquit Driss en tentant de reprendre le contrôle de ses nerfs.

-Parce que nous avons tout un hôpital plein de civils à protéger de ces saloperies qui ont envahies la ville, répondit abruptement le militaire. Si vous vous faites mordre, alors vous devenez comme eux et je ne tiens pas à prendre de risques. Vous voulez toujours jouer au héros pour qu’il subisse un sort pire que la mort ?

-Non, se résigna le policier en regardant son équipier se faire traîner à l’écart. Mais ces « saloperies » comme vous dites sont toujours humaines non ?

-D’après ce que j’ai pu observer, elles n’ont plus grand-chose à voir avec nous et je doute que qui que ce soit veuille prendre le risque d’aller s’assurer du contraire. Trêve de bavardages, vous devez subir des examens médicaux et vous serez libre de rester dans l’enceinte de l’hôpital. Suivez-moi !

Driss et ses équipiers se relevèrent et suivirent le militaire. Le claquement d’un coup de feu retentit derrière eux. Lui qui croyait sauver son homme, il l’avait conduit directement à l’abattoir mais si ce que ce soldat avait dit était vrai alors il avait peut-être fait le bon choix après tout.
Il se rappela brutalement qu’il lui fallait  retrouver sa famille, tout ce qu’il avait vu sur le chemin lui avait presque fait sortir de la tête ce qu’il avait à faire après son arrivée à l’hôpital.

-Il faut que je reparte, lâcha-t-il en s’arrêtant et en s’apprêtant à faire demi-tour.

-Hors de question ! dit fermement le militaire en le retenant. Vous allez d’abord passer les examens, il n’y en a pas pour longtemps.

-Je dois retrouver ma famille, insista Driss en se libérant d’un violent coup d’épaule.

-Vous n’irez nulle part tant que vous n’aurez pas passé la visite médicale, s’obstina le soldat d’un ton menaçant. Si vous n’obtempérez pas, vous serez abattu et je pense que cela ne sauvera pas votre famille.

Driss aperçut les militaires qui revenaient après avoir exécuté le blessé. Ils pouvaient tout à fait lui couper la route avant qu’il ne puisse atteindre le fourgon, il lui fallait donc se résigner à se plier aux exigences du soldat et à laisser sa famille faire face au danger sans lui encore quelques temps.
Le militaire leur fit passer le barrage et ils arrivèrent sur le parking de l’hôpital. Des camions de transport militaire y étaient stationnés aux côtés de humvees.
Il aperçut des tentes de couleur kaki dont la toile arborait la croix rouge des secouristes et de nombreux civils. Certains étaient assis sur des caisses, d’autres allongés sur des lits de camps.
Beaucoup d’entre eux arboraient des blessures, des brûlures ou des ecchymoses.
Les regards de ces personnes étaient perdus dans le vide, tous avaient l’air terrorisés et certains regardaient avec méfiance les soldats en tenues de combat étanches qui déambulaient parmi eux.

-Nous accueillons tous ceux qui veulent se réfugier ici du moment qu’ils n’ont pas été mordus et nous les prenons en charge, commenta leur guide. Le problème c’est que l’hôpital est saturé, nous sommes donc obligés de soigner les nouveaux arrivants dehors.

Le militaire les fit entrer dans l’un des hauts bâtiments constituant l’hôpital. Le hall d’accueil avait été transformé en salle d’auscultation. Des soldats étaient postés en faction à toutes les issues, plusieurs personnes étaient en cours d’examens.
Le militaire conduisit Driss jusqu’à une table d’auscultation sur laquelle ce dernier s’installa, un infirmier portant un masque de protection s’approcha immédiatement pendant que le militaire s’éloignait avec les compagnons du policier.
Celui-ci lui fit faire des exercices respiratoires, reprit sa température, vérifia sa tension, ausculta sa langue et sa gorge et termina une prise de sang. Il plaça ensuite l’échantillon dans un appareil portatif qu’il avait avec lui et lut les données qui s’affichaient sur un écran latéral.

-Vous êtes parfaitement sain, tout va bien, constata l’infirmier.

-Si je puis me permettre… risqua Driss. Pourquoi est-ce que vous m’avez fait subir cette batterie de test pour arriver ensuite à cette conclusion.

-Il se trouve que c’est la procédure en cas d’évènement extraordinaire, répondit brièvement le médecin. Nous devons pour des raisons sanitaires nous assurer de la bonne santé des personnes venant se réfugier ici. Maintenant j’ai à faire, au plaisir ! ajouta l’homme en s’éloignant.

Le policier n’était pas du tout satisfait de cette justification mais au moins l’analyse n’avait pas duré trop longtemps. Ses équipiers étaient toujours en train de se faire examiner.
Driss sortit donc du bâtiment et se dirigea vers la sortie du complexe mais le militaire qui les avait conduit jusqu’à la salle d’examen lui barra la route.

-Je regrette, mais vous n’irez pas plus loin, dit celui-ci d’un ton ferme.

-Qu’est-ce qu’il se passe ? demanda quelqu’un avant que le policier ne put répondre.

Driss se retourna : Derek, un de ses équipiers, l’avait rejoint.

-Il se passe que personne ne peut sortir sans autorisation de cette zone, je sais que vous alliez tenter de partir, répondit le militaire.

-Il est hors de question que je reste ici en sachant que ma femme et ma fille sont en danger, cracha Driss d’un ton ferme. Vous ne pouvez pas m’empêcher de porter secours aux êtres qui me sont chers.

-Vous êtes sous protection de l’armée et vous faites partie des forces de l’ordre, vous n’irez pas plus loin, insista le soldat. Nous agissons pour votre sécurité et dans votre intérêt. Si votre femme et votre fille sont encore là-bas, elles sont soit déjà mortes. Dans le cas contraire, elles se sont barricadées  ou elles vont venir. Nous avons fait transmettre la position des points de secours par la radio et la télévision locale. Elles sont même peut-être déjà en sécurité et il est de mon devoir de vous garder ici.

-Je n’en ai rien à faire, s’énerva le policier. Il faut que j’aille les sauver, vous avez une famille vous aussi non ? Vous devez me laisser y aller et je reviendrai ensuite, je le jure.

-En effet j’en ai une, mais je dois faire mon devoir avant de penser à ma famille et mon devoir est ici, riposta le militaire. De plus, ma famille est à Washington et même si elle se trouvait ici ça ne changerait rien. Je ne peux vous laisser sortir seul et votre devez également faire votre devoir. Pas aller vous faire tuer dehors.

-Il ne sera pas seul, je l’accompagne et je l’aiderai à ramener sa famille ici, intervint Derek.

-Et ta famille alors ? s’enquit Driss en se tournant vers l’homme.

-Je suis célibataire et le reste de ma famille vit à New York, répondit l’intéressé. Cela ne me gêne pas de vous aider, chef.

-Très bien alors, lâcha Driss. Vous avez deux de mes hommes, donnez-leur de quoi s’occuper. Moi et mon équipier nous allons chercher ma famille et nous revenons aussi vite que possible.

Le militaire sembla sur le point de vouloir répondre quelque chose, mais il se ravisa.

-Ok allez-y, j’ai autre chose à faire que de discuter avec des obstinés comme vous, grogna-t-il en les chassant en les incitant à le suivre d’un geste brusque. C’est par là…

Le soldat leur fit franchir le barrage à nouveau puis on leur rendit leurs armes. Driss sentit le regard hostile des factionnaires peser sur lui et devina qu’une partie d’entre eux auraient bien aimé quitter leur poste également mais ils ne bronchèrent pas.
Driss et Derek coururent au fourgon, le policier se réinstalla au volant pendant que son équipier prenait la place du co-pilote.
Il démarra en trombe, le temps pressait. Ils assistèrent aux mêmes scènes d’horreur pendant tout le trajet puis ils finirent par pénétrer dans la banlieue pavillonnaire où il résidait.
Les évènements n’épargnaient pas l’endroit mais le désordre en résultant était moins flagrant. Ils échappèrent de justesse à plusieurs collisions, d’autres n’eurent pas cette chance.
Quelques maisons brûlaient çà et là et la fumée résultant des incendies conférait un aspect encore plus sinistre à ce qu’il se passait.
Le policier aperçut enfin sa maison et donna un coup d’accélérateur avant d’écraser sa pédale de frein.
Il se munit de son arme, ouvrit sa portière et courut vers la porte d’entrée. La maison semblait bien fermée, et il n’y avait aucune trace d’agression quelconque.
Driss tambourina à la porte pendant que Derek le rejoignait.

-Tara ! cria-t-il sans cesser de tambouriner. Tara ! C’est moi Driss ! Si tu m’entends ouvre-moi ! Je suis venu vous mettre en sécurité !

Un mugissement proche le fit pivoter sur lui-même et il aperçut plusieurs cannibales qui franchissaient le mur du jardin de la maison voisine pour se jeter sur eux.
Driss épaula immédiatement son arme et tira, il atteignit sa cible à la tête du premier coup. Un autre tomba juste après, touché par Derek. Ils éliminèrent les derniers agresseurs et Driss s’apprêta à tambouriner à nouveau mais le déclic de la serrure l’en dissuada.
 La porte s’ouvrit et dévoila le visage aux traits tirés par l’inquiétude de Tara. Driss ne put se retenir, il baissa son arme et enlaça très fort sa femme d’un bras tout en lui déposant un baiser dans le cou.
Il remercia Dieu de l’avoir maintenue en vie jusque-là et lui promit de prendre le relai à partir de maintenant.
Il huma ses cheveux, l’écarta légèrement de lui et l’embrassa.

-Driss … soupira-t-elle en l’écartant.

-Qu’est-ce qu’il y a ? s’inquiéta Driss. Tout va bien ? Jill est en sécurité ?

-Oui ne t’en fait pas, tout va bien, lui répondit-elle en l’entrainant à l’intérieur. J’étais juste soulagée que tu sois rentré.

Elle ferma la porte à la suite de Derek.

-Que va-t-on faire maintenant ? s’informa sa femme. C’est terrible ce qu’il se passe dehors.

-Je suis venu pour vous emmener à l’hôpital, expliqua Driss. Les militaires ont établi un périmètre de sécurité autour du complexe, nous y serons en sécurité jusqu’à ce que tout revienne à la normale. J’en reviens.

-Si tu le dis… Aide-moi à rassembler le strict nécessaire alors…. Jill, descends ! Papa est là !

La petite fille dévala les marches en courant et se jeta dans les bras de son père pendant que Tara s’éloignait en compagnie de Derek qui avait proposé son aide
Le policier les rejoignit rapidement avec Jill et ils collectèrent de la nourriture, les albums photos et quelques vêtements de rechange ainsi que quelques jouets peu encombrants pour la petite fille.
Tara insista pour prendre le monospace à la place du fourgon et Driss finit par céder bien qu’il aurait préféré se trouver dans l’imposant véhicule blindé.
Ils chargèrent donc le véhicule familial puis Driss et Derek sortirent à l’extérieur afin de veiller à ce qu’aucun cannibale ne les surprenne pendant que la femme du policier sortait la voiture.
Ils en éliminèrent plusieurs qui s’étaient rassemblés devant la maison puis, lorsque le monospace fut sorti du garage, ils fermèrent toutes les issues de la maison.
Driss s’installa au volant, Tara s’assit à l’arrière en compagnie de Jill. Derek finit par les convaincre de le laisser prendre le fourgon afin de leur ouvrir le passage, il passa donc devant eux avec son véhicule.

-Tara, il vaut mieux que Jill ne voit pas ce qu’il se passe en ville, lâcha-t-il en démarrant.

Le trajet de retour vers l’hôpital sembla plus rapide à Driss, les deux véhicules filaient à un train d’enfer dans la ville livrée au chaos et ce fut un miracle qu’ils n’aient pas d’accidents.
Les sanglots de terreur de Jill manquèrent de le faire ralentir à plusieurs reprises mais ralentir pouvait aussi rimer avec périr dans ce genre de situations.
Lorsqu’ils arrivèrent en vue de l’hôpital, Driss poussa un soupir de soulagement. Il le ravala bien vite lorsque Derek se gara sur le côté de la route à quelques dizaines de mètres de l’entrée.
Une masse grouillante se déplaçait autour de l’enceinte, les murs au niveau de l’accès au parking s’étaient effondrés et la carcasse d’un imposant semi-remorque en feu se trouvait à l’endroit où avait été précédemment dressé le barrage. D’autres véhicules en feu côtoyaient la carcasse, il s’agissait sûrement des véhicules militaires.
Les nids de mitrailleuses semblaient avoir été balayés par une explosion, il n’y avait aucun soldat en vue. Mais il pouvait distinctement entendre les crépitements des armes automatiques et les hurlements de terreur.
Plusieurs bâtiments du complexe étaient la proie des flammes.

-Alors c’est ici que tu comptais nous mettre en sécurité ? lui demanda Tara d’une voix où perçait le désespoir.

Driss maudit intérieurement le ou les irresponsables qui avaient forcé le barrage militaire, ils n’avaient nulle part où se mettre en sécurité désormais. Ils étaient coincés.
Derek descendit prudemment du fourgon et s’approcha du véhicule.

-Vous avez un plan maintenant ? s’informa-t-il. Il n’y a plus rien pour nous ici…

-Je le vois bien, mais c’était notre unique solution, se désespéra Driss. Je pense que je vais tenter de rejoindre Atlanta pour y retrouver mes parents et ceux de Tara, ce phénomène est sûrement propre à la région avec un peu d’espoir… Tu fais ce que tu veux maintenant.

Le policier vit dans le rétroviseur que sa femme approuvait.

-Je pense que je vais vous suivre, dit simplement Derek. J’aimerais vous accompagner un moment, on a plus de chances si on reste ensemble et de toute façon  je n’ai plus de famille. J’ai menti au soldat pour qu’il nous relâche.

-Très bien, alors en route... Ne moisissons pas ici ! conclut Driss.

Derek remonta en voiture après avoir éliminé deux cannibales qui s’approchaient de trop et ils firent demi-tour. Ils roulaient depuis une minute lorsque Driss aperçut un groupe d’une dizaine de personnes aux habits éclaboussés de sang qui se dirigeaient vers l’hôpital.
Ils arboraient des armes de poing ainsi que divers objets contondants mais ne semblaient pas hostiles, certains d’entre eux avaient l’air hagards et semblaient un peu perdus.
Le policier vérifia qu’il n’y avait pas de danger proche et klaxonna à l’attention de son équipier puis stoppa à la hauteur du groupe. Le fourgon s’arrêta à son tour quelques mètres plus loin.

-Chéri je ne pense pas que ça soit une bonne idée… murmura sa femme.

-Bonjour ! lança Driss à l’attention du groupe en ignorant l’objection. Si vous allez à l’hôpital, vous pouvez faire demi-tour.

-On nous a dit à la radio que c’était sûr là-bas, lui répondit un grand afro-américain qui marchait en tête.

-Ce ne l’est plus, reprit le policier. Nous en revenons, ceux qui ne sont pas encore morts le seront bientôt.

Lorsqu’ils ça, le visage des membres du groupe se décomposa.

-Nous n’avons donc plus nulle part où aller… lâcha l’homme d’un air abattu.

-Vous avez l’air exténués et vous avez dû en voir de dures, nous comptons nous rendre à Atlanta où nous espérons que ça se passe mieux. Vous pouvez tous venir si ça vous tente, proposa Driss à son interlocuteur.

-Merci, nous allons aller avec vous alors. Pas forcément jusqu’à Atlanta mais en tout cas jusqu’à une zone plus sûre, répondit celui-ci.

-Très bien, montez tous dans le fourgon ! Il y a assez de place pour tout le monde.

-Merci beaucoup. Au fait moi c’est Eugene. Et voici Banon, Lydia, Jim, Judy, Brad, Stacy et John, ajouta l’homme en désignant les intéressés tour à tour.

-Enchanté, moi c’est Driss, repartit le policier. Le conducteur du fourgon c’est Derek, nous discuterons plus tard. Il faut qu’on bouge ! conclut-il en faisant un appel de phare à son équipier.

Eugene eut un hochement de tête et fit monter tout le monde dans le fourgon avant de s’y installer à son tour et de fermer les portes.
Ils se remirent en route immédiatement après, le fourgon ouvrant toujours la marche. Ils rejoignirent le périphérique afin d’éviter de se retrouver de nouveau dans le chaos régnant dans le centre-ville.
La circulation y était dense très dense car beaucoup de monde tentait de fuir la ville mais ils parvinrent à rejoindre l’autoroute.
Le policier mit alors l’autoradio en marche.

…. Dont l’origine reste toujours inconnue.
Les autorités recommandent à tous les citoyens de l’état de se barricader chez soi et de rationner eau et nourriture. Il est également demandé à tout le monde de garder son calme et de ne pas tenter de fuir la ville, les axes urbains sont en effet saturés.
Des centres d’accueil ont été mis en place à la mairie, dans la zone d’activité, au commissariat central, à la caserne des pompiers, à l’aéroport, à la gare et ici-même au centre de la radio et de la télévision régional. L’armée des Etats-Unis et la police garantissent la sécurité de tous les lieux cités précédemment.
Nous avons perdu le contact avec celui de l’hôpital il y a une heure, il est donc strictement déconseillé de se rendre à ce point d’accueil.
Les responsables des pillages qui se sont déroulés seront sévèrement punis lorsque la situation se sera apaisée, le réseau de vidéo-surveillance est en effet actif et le maire a fait savoir que tout ce flot d’images serait analysé…


Des coups de feu retentirent en fond accompagnés de cris.

… Mais qu’est-ce qu’il se passe ?
Chers auditeurs,
Nous allons devoir interrompre temporairement nos émissions en raison d’un problème technique.
Nous reprendrons la suite de nos programmes dès que la situation sera rétablie.
C’était Diana Zucker.
Bonne chance à vous et que Dieu protège l’Amérique.


Un grésillement continu succéda à l’émission puis un message continu se lança avec un bruit modulé en fond.

Ceci est le système d’émission d’urgence. Ceci n’est pas un exercice. Je répète. Ceci n’est pas un exercice. Veuillez basculer sur une chaine d’information continue afin de vous tenir au courant des évènements. Des  instructions officielles suivront ce message.
Ceci est le système d’émission d’urgence. Ceci n’est pas un exercice. Je répète. Ceci n’est pas un exercice. Veuillez basculer sur une chaine d’information continue afin de vous tenir au courant des évènements. Des  instructions officielles suivront ce message.
Ceci est le système d’émission d’urgence….


Le message se répétait, Driss changea de chaîne de radio : celles qui n’étaient pas branchées sur le système d’émission d’urgence parlaient des dernières informations. D’après ce qu’il put comprendre, ces évènements n’étaient pas localisés et s’étaient répandus dans tout le pays.
Le policier éteignit la radio et reporta son attention sur l’autoroute.
 Le fourgon filait toujours devant mais dans son rétroviseur il pouvait encore apercevoir la ville, des filets de fumée s’élevaient dans le ciel. Dans l’autre sens des gens s’étaient arrêtés sur la bande d’arrêt d’urgence et étaient descendus de leurs véhicules, ils désignaient la ville d’un air effaré.
Jusque-là il avait pensé que peut-être les choses pouvaient revenir à la normale mais peut-être qu’en fait le monde était en train de s’effondrer aujourd’hui et il était le spectateur impuissant de cette chute.
Il capta le regard de Tara dans son rétroviseur intérieur et y lut toute sa détresse. Qu’allaient-ils devenir désormais si tout le pays avait ainsi sombré ?

 

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