Klothild Hache-Sanglante

Chapitre 4 : Un dragon dans la ville

3915 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 09/08/2021 14:50

   Le soleil brillait, la nature chantait, le froid lui-même semblait plus supportable en ce doux mois de Semailles. Les papillons voletaient, les oiseaux pépiaient, les animaux s’accouplaient, la vie revenait… 

   La saison des amours avait commencé pour les habitants humanoïdes de Tamriel aussi. Sur la route pour gagner Solitude depuis Epervine, j’avais croisé de nombreux couples autour du lac Ilinalta, occupés à roucouler sur les berges dégelées. 

   Moi-même, malgré mon coeur de pierre, j’avais cédé aux avances d’un vieil ami d’enfance. Il m’avait donné rendez-vous dans la capitale de Haafingar, dans le but de me faire découvrir l’unique restaurant de Bordeciel, “Le couteau du boucher”. Un établissement qui venait tout juste d’ouvrir ses portes. D’après Gunnar, le cuisinier avait été l’un des apprentis du Gourmet en personne et le service dépassait tout ce que les nordiques pouvaient connaître en termes de qualité et d’efficacité. Je restais dubitative sur ce dernier point, car auberges et tavernes m’avaient toujours suffi, mais je me devais d’aller prendre un repas là-bas pour en juger. Qui pouvait refuser un repas offert sur un plateau, après tout ? Il avait juste intérêt à être costaud, car, malgré les apparences, j’avais un appétit d’ogre ! 

   Solitude m’apparut bientôt dans toute sa splendeur, perchée au sommet d’une montagne. l’immense voûte de pierre sur laquelle reposait une grande partie de la ville me fit frissonner, comme chaque fois que j’y passais. Si un jour la roche décidait de céder, les dégâts seraient considérables. Et ce jour-là, on aura tout intérêt à avoir dompté quelques dragons pour réparer la ville ! 

   Je décidai de faire un crochet par la plage. Les vagues murmuraient sous le vent léger qui provenait du large et agitait mes cheveux. Je retirai mon casque un instant pour mieux profiter encore de sa caresse fraîche sur ma peau. Malgré les nombreuses plaques de glace un peu partout, les températures s’étaient adoucies. Pour une nordique habituée au froid glacial, il faisait presque chaud. Surtout avec une lourde cotte d’acier sur le dos, des bottes et des gants fourrés, une cape de voyage rembourrée et un épais casque molletonné. 

   Je fermai les yeux un instant, pour profiter des dernières minutes de calme avant de gagner la frénésie de la ville. Une mouette cria, quelque part au-dessus de ma tête. Le son lointain d’une cloche de navire me parvint, vite masqué par la mélodie de l’océan. Mon cheval renâcla. Ses sabots bruissaient dans le sable. 

   Dans le ciel, un cri résonna. Puissant, rauque, effrayant. Ni une ni deux, ma monture se cabra de terreur. Je tentai tant bien que mal de rester en selle, mais mes quelques minutes d’inactivité m’avaient déconcentrée et je perdis l’équilibre. Mon pied, fichu traître, se coinça dans l’étrier. Je me retrouvai donc traînée sur le sable par mon destrier paniqué, à tenter en vain de m’en libérer. L’idée me vint, un court instant, de couper la source de tous mes problèmes, mais ma position fort peu confortable ainsi que la solidité de ma botte me dissuadèrent de tenter cette option. J’attrapai alors ma dague et, au prix d’un effort surhumain, tranchai l’étrivière pour me libérer. 

   Juste à temps. Mon cheval continua sa route quelques secondes, puis une immense créature aux écailles rutilantes l’attrapa entre ses pattes. Un couinement m’échappa lorsqu’elle redécolla. Sonnée autant par les mètres parcourus sur le dos que par la rapidité, il me fallut un peu de temps avant de réaliser qu’un dragon venait de me priver de mon canasson. En fait, je ne m’en rendis bien compte qu’au moment où une goutte de sang me tomba sur la cuisse. 

   Je levai les yeux très, très, très doucement. Le dragon se tenait derrière moi, la tête un peu penchée au-dessus de la mienne. Du sang gouttait le long de sa mâchoire. De toute évidence celui de mon cheval. 

   Un grondement sourd monta de sa gorge. Je n’avais jamais eu peur de la mort, tant que j’avais ma fidèle hache à la main. Là, elle était rangée dans mon dos. A la fois si proche et si inaccessible. Hors de question de la dégainer. Il me faudrait trop de temps. Je devais me rendre à l’évidence : j’étais sans défense, à la merci d’une créature immortelle, puissante et potentiellement affamée. Et oui, pour une fois, j’avais peur. J’étais paralysée par la terreur. 

   Le dragon entrouvrit la gueule. Ses crocs luisaient de sang et de salive. ses yeux jaunes brillaient d’une lueur maléfique et se repaissaient de l’horreur qu’ils m’inspiraient. Je n’avais aucune chance de m’en sortir vivante. Aucune. 

   Jusqu’à ce qu’une flèche ne vienne se ficher dans son aile. Il poussa un hurlement à m’en faire saigner les tympans et se tourna vers la route. Sans chercher à voir qui l’avait attaqué, j’en profitai pour me glisser sur le côté. Sa longue queue hérissée de piquants vola au-dessus de ma tête. Je récupérai mon casque et le recoiffai d’un geste rapide. Je me jetai ensuite sur le reptile prêt à prendre son envol. Mes bras se refermèrent sur sa queue au moment où il prenait appui sur le sol pour décoller. Hors de question de laisser échapper une telle occasion de briller. Il m’avait foutu la trouille, il allait payer. 

   Ma motivation à lui exploser les crocs disparut aussi vite que le contact de la terre ferme sous mes pieds. Un cri m’échappa alors que l’éclat métallique du casque des gardes m’apparaissait et que le monde rapetissait à vue d’oeil. Le dragon grogna, déstabilisé par mon poids au bout de sa queue. 

Il effectua un cercle maladroit jusqu’à Solitude. Les exclamations terrifiées et surprises des habitants me parvinrent lorsque nous survolâmes le marché, après quoi ils furent couverts par le mien et celui de ma monture improvisée lorsque nous atteignîmes les quartiers de la Légion Impériale. Le dragon défonça un mur avec ses pattes. La secousse de l’atterrissage forcé me fit lâcher prise. Je m’écrasai violemment contre un pilier de pierre, qui s’effondra sous la force de l’impact. 

Il me fallut plusieurs minutes pour retrouver mes esprits. Je sentis quelqu’un me tirer hors des décombres. Un gémissement m’échappa. J’avais mal partout, un peu comme si je venais de m’exploser contre une colonne de pierre et que le sommet de celle-ci m’était tombé sur la tête. Je me pris à songer que j’avais bien fait de remettre mon casque et que j’avais de la chance d’avoir le crâne dur. 

Lorsque, enfin, je pus me redresser, le chaos ambiant me frappa de plein fouet : des bâtiments brûlaient, des cris résonnaient de partout, et une ombre agacée voilait par instants le soleil. Des rugissements mêlés au crépitement des flammes venaient masquer les autres sons par instants. Des ordres fusaient, des javelots s’envolaient vers le ciel, accompagnés d’un nuage de flèches. Je devinai que j’avais passablement agacé le dragon et que celui-ci se vengeait sur la ville. Sans chercher à en savoir davantage, je m’élançai à l’extérieur, hache au poing, prête à en découdre avec cette vermine à écailles. 

Je le trouvai occupé à détruire les baraquements des soldats impériaux. Ceux-ci tentaient avec peine de le repousser, mais rien n’y faisait. Un coup de crocs par-ci, un coup de queue par là, et les courageux légionnaires tombaient comme des mouches. Le feu dévorait les bâtiments de bois, les corps s’amoncelaient dans les décombres. Par chance, je me trouvais au-dessus de la créature. Je pris mon élan et sautai dans le vide, hache levée, prête à percer l’épaisse carapace de chitine qui couvrait son corps. 

La lame se ficha dans le dos de la bête, qui lâcha un rugissement de douleur. Fière de moi, je dégageai ma hache et tentai de lui asséner un nouveau coup, dans la nuque, cette fois. Mon ennemi se cambra lorsqu’elle se planta une nouvelle fois dans sa chair. Il tenta de se tourner vers moi pour m’attraper entre ses crocs sanglants. Ses mâchoires claquèrent toutefois dans le vide. Mon pied avait en effet encore décidé de déraper, cette fois sur le liquide poisseux qui coulait de ses plaies, et m’accorda une chute depuis les épaules du monstre. 

Un juron m’échappa lorsque je touchai le sol. Un autre suivit quand ma hache me tomba sur la tête. J’eus tout juste le temps d’en saisir le manche avant de rouler sous le ventre du dragon pour échapper à ses crocs. Il décolla aussitôt, avant que je ne puisse lui coller une balafre sur le thorax. 

Je me relevai. 

-Reviens ici, espèce de lâche ! hurlai-je.

Il se contenta de me balancer les restes d’un toit à la figure. Je me planquai derrière un pilier pour y échapper. Un pierre ricocha toutefois sur mon crâne. 

-Va crever sur un bûcher ! lui lançai-je, hache pointée vers lui. 

   Il se posa au sommet du mur d’enceinte, en face de moi. Sa gueule s’ouvrit dans un grand cri et projeta une gerbe de flammes vers moi. De toute évidence, lui aussi voulait m’envoyer au bûcher. 

   Je me réfugiai derrière mon pilier pour échapper à la chaleur. La créature poussa un nouveau rugissement. Un instant plus tard, la terre vibra. J’en conclus qu’il s’était posé. Un regard rapide m’apprit qu’il se tenait juste derrière ma cachette, prêt à me cueillir au vol entre ses crocs acérés. Parfait. 

   Je pris une grande inspiration, raffermis ma prise sur le manche de ma hache, et m’élançai vers lui pour le frapper. Je n’eus toutefois guère le loisir de le blesser. Un éclair provenu de nulle part lui toucha le nez. Il redécolla pour se mettre à l’abri, et ma lame ne rencontra que du vide.

   Je cherchai alors la source de la magie. Car un éclair si soudain, si puissant, ne pouvait qu’avoir été créé par un mage. J’aperçus une jeune fille de l’autre côté de la cour. Une elfe. Du Thalmor, à en juger par sa tenue. Un cri de rage monta de ma poitrine. 

-Dégage, la môme ! lançai-je avec mauvaise humeur. Tu vas te faire tu...

   Le son qui quitta sa gorge me coupa net. Un rugissement puissant, semblable à celui du dragon, qui provoqua une puissante vague d’énergie en direction de celui-ci. Frappé de plein fouet malgré sa vitesse, il sembla happé par une puissante magie. Ses cris furieux me confirmèrent qu’un sort l’attirait au sol. La gamine, qui ne devait pas avoir plus de quinze ans, s’élança aussitôt vers lui. Une lame éthérée apparut dans sa main gauche, un javelot de feu dans la droite. Elle prit appui sur une grosse pierre pour se projeter en l’air et cria une nouvelle fois. Son corps se déplaça à une vitesse phénoménale en l’air, comme si elle s’était envolée. Sa dague se planta dans la cuisse du dragon, assez profondément pour lui permettre de s’y suspendre. Elle se hissa à la seule force de ses bras jusqu’au dos de la créature, qui poussa un rugissement strident. Elle tenta dans un ultime effort de se débarrasser de l’elfe, sans succès. Celle-ci planta une épée invoquée dans son dos jusqu’à la garde pour pouvoir s’y tenir le temps que le monstre se pose. 

   L’effondrement d’un muret non loin de moi quand le dragon toucha le sol me tira de ma torpeur. Je m’élançai vers la bête blessée tandis que l’elfe lui criblait les ailes d’éclairs et de javelots de feu. La créature se débattait, ruait, tenta même de se rouler au sol pour se débarrasser d’elle, mais elle restait fermement accrochée à lui. Il cracha un jet de flammes vers elle, sans parvenir toutefois à la toucher. J’en profitai pour lui coller ma hache dans une patte, histoire qu’il ne puisse plus bouger. Un craquement affreux résonna. Il poussa un nouveau cri et s’effondra à moitié.

   J’esquivai un coup de queue de justesse. Une roulade sur ma droite me plaça à portée de ses crocs, mais aussi à hauteur de frappe. La gamine avait réussi à détourner son attention, ce qui me laissa le temps de préparer mon coup. Lorsqu’il bougea la tête pour changer d’angle d’attaque, sa mâchoire entra en collision latérale avec ma hache. Le choc le sonna et me résonna dans les bras. Je faillis lâcher prise, mais l’occasion était trop belle. Je balançai un coup droit sur son crâne. 

   Ma lame s’enfonça dans l’os avec un crissement sinistre. Un flot de sang jaillit du trou formé. Le dragon se redressa dans un ultime cri d’agonie, qui fut coupé net par l’elfe, dont le javelot vint couper la trachée du monstre. Pris de spasmes, il s’effondra pour de bon. Un gargouillis quitta une dernière fois sa gorge, puis la lueur maléfique de son regard s’éteignit pour de bon. Il était mort. Enfin. 

   Je relevai la tête vers la gamine, furieuse qu’elle m’ait volé sa mise à mort. 

-Non mais tu te prends pour quoi, toi ? m’exclamai-je. Tu aurais pu… 

Un phénomène étrange me coupa alors. Le dragon avait commencé à fumer, et son cadavre s’embrasa d’un seul coup. Une vive lueur s’en échappa et entoura la gosse à mesure que le corps du monstre se décomposait sous mes yeux éberlués. L’elfe se contenta de hausser les épaules. 

-Normalement, on dit merci au Dovahkiin, lâcha-t-elle simplement. Tu es complètement folle d’avoir affronté ce truc seule. 

-Dovahkiin...soufflai-je, la respiration coupée. Toi ? Sérieusement ? 

Elle désigna les restes du dragon. Un sac d’os blancs, comme polis par le temps. 

-Tu en as la preuve, nordique. 

-Mais… bafouillai-je. Non. Tu ne peux pas être… 

-Je suis une elfe, je sais, me coupa-t-elle. Une elfe élevée par des nordiques. 

Une désagréable sensation glaciale contre ma nuque me fit frissonner. Une dague, ou une épée, de toute évidence. Je me figeai. 

-Au nom de l’empereur, siffla une voix, pas un geste ! Estimez-vous heureuse que je ne vous exécute pas sur le champ, terroriste. 

-Mais… quoi ? couinai-je. J’ai fait quoi, encore ? 

-Vous vous trompez, général, appuya la gamine. Même si cette nordique était avec le dragon, elle ne l’a pas dirigé contre la ville. 

-Comment osez-vous… commença l’autre dans mon dos. 

-Elle a été attaquée non loin d’ici, expliqua-t-elle. Je l’ai vue sur la plage, à la merci du dragon. Avec les gardes sur place, on a attiré son attention pour qu’elle puisse s’enfuir. Mais vous connaissez les nordiques aussi bien que moi, général Tullius. Vous savez qu’à force de se prendre des coups sur le crâne, ils perdent l’usage de leur cerveau. Elle a préféré s’accrocher à ce monstre plutôt que de filer. 

Je fus tentée de répliquer à la remarque de cette sale môme. Celle-ci baissa alors la tête. 

-La seule fautive, c’est moi, avoua-t-elle. Ce dragon, ça fait trois jours que je le traquais. Je l’ai rapproché de Solitude sans le vouloir… et voilà. 

La lame dans mon cou disparut. Je me retournai, hache à bout de bras, prête à frapper.

-Désolée pour la méprise, grogna l’homme qui me faisait à présent face. Filez, maintenant. 

-Un merci vous brûlerait la langue ? sifflai-je. Vous savez à qui vous parlez, au moins ? 

-Klothild Hache-Sanglante, cracha-t-il, aventurière aussi givrée que sa région natale. Vos exploits sont connus dans tout Bordeciel. Et pas nécessairement en bien. Si vous n’avez pas disparu de ma vue dans les dix minutes, je vous colle à la reconstruction de la ville, seule, avec Althana. 

-Je préfère Fahliilyol, répliqua la gamine. 

-Vous, taisez-vous, lui ordonna le général. Elenwen va être furieuse quand je…

-Je me fous de l’avis d’Elenwen, le coupa l’elfe. Elle…

-Dites, intervins-je. Loin de moi l’idée de vous couper dans vos engueulades, mais à cause de toi, la môme, j’ai perdu un cheval. Tu comptes me le rembourser, au moins ? Et puis, j’estime mériter une petite récompense pour avoir quand même sauvé la ville de la destruction intégrale par ce monstre ailé. 

Tous deux se regardèrent. La gamine soupira, le général me jeta un regard furieux. Je devinai que j’avais peut-être été un peu loin dans ma demande. 

-Oubliez la récompense, grognai-je. Mais je veux quand même que cette gosse me rembourse. 

-J’aurais dû laisser le dragon te bouffer… râla l’elfe. Tiens, ajouta-t-elle en me tendant une bourse remplie tirée de sa poche. Il devrait y avoir assez pour le cheval et un tour chez les prêtresses de Mara. Avec un peu de chance, elles te répareront les neurones. 

Je lui jetai un regard noir. Elle m’adressa un sourire innocent. Tullius m’empêcha de lui découper la tête :

-Et maintenant, hors de ma vue, Hache-Sanglante. Et que je ne vous voie plus traîner autour de la caserne, sinon… 

-Adieu ! le coupai-je. 

Foutus impériaux. Foutus elfes. Foutu dragon. Foutue gamine. Je quittai les lieux, agacée par l’attitude de la gosse et de ce fichu général. Moi qui me faisais une joie de manger dans ce restaurant, j’avais perdu toute envie de rester une minute de plus à Solitude. Surtout que, l’elfe avait raison, j’avais été blessée durant le combat. Du sang me coulait dans les yeux et une douleur sourde me vrillait le crâne, maintenant que l’adrénaline retombait. Et comme si cela ne suffisait pas, j’avais faim. Et soif. 

-Klothild ! 

Je me retournai, sourcils froncés. Un légionnaire me courait après. Je lui lâchai d’un ton sec :

-Dégage, l’impérial. 

-C’est comme ça que tu parles à tes vieux amis, toi ? 

-Gunnar ? m’étonnai-je. Désolée, je ne t’avais pas reconnu, avec la jupette… 

-Très drôle, grogna-t-il. Viens par là, tu es blessée. 

-C’est trois fois rien, assurai-je.

-Tu as le crâne perforé par un bout de métal. Je ne sais même pas comment tu fais pour tenir debout. 

-J’ai la tête dure…

-On s’en fout. Tu vas finir par tomber dans les pommes si on ne fait rien. Allez, grouille-toi. 

-Tullius m’a interdit de… commençai-je. 

-On va voir Elisif. La mage de sa cour saura sûrement soigner ça. Et Tullius, sans vouloir manquer de respect à mes supérieurs, est un gros con à la botte du Thalmor.

-Pourquoi tu as rejoint la Légion, alors ? 

-Pas le choix. Tu connaissais mon père, tu sais ce qu’il pensait de l’Empereur… 

Je le suivis sans répondre. Je ne le connaissais que trop bien. C’était lui qui nous avait éduqués, enfants. Il ne m’appréciait guère, en ce temps-là. Il ne m’aurait sans doute pas plus appréciée aujourd’hui. 

-Au fait, reprit Gunnar au bout d’un moment, joli combat. Tu mérites bien ton surnom, Hache-Sanglante. 

Un sourire étira mes lèvres. 

-Merci, répondis-je. Mais cette… sale gosse… m’a volé sa mise à mort. 

-Althana prend sa mission de protectrice un peu trop au sérieux, m’expliqua Gunnar. Il ne faut pas lui en vouloir. 

Je ricanai. 

-Protectrice, hein ? Elle a quoi, quinze ans ? Seize, peut-être ? 

-Trente tout rond. C’est une elfe, ils ne vieillissent pas pareil que nous. 

-Foutus elfes, grommelai-je. 

Gunnar éclata de rire. 

-Elle a du sang elfe, mais une âme nordique. Vous vous entendriez bien, elle et toi. 

-M’en fous, elle m’a volé mon dragon, grognai-je. 

-Klo… soupira-t-il, un sourire aux lèvres. 

-La prochaine fois que je pars à la chasse au dragon, je t’emmène. 

Je sursautai. La gamine m’adressa un regard amusé, adossée à un mur à quelques pas de moi. Elle reprit :

-Par contre, je te laisse te démerder pour le tuer. Je suis dovahkiin, pas baby-sitter pour nordique maladroite. 

-Tu sais ce qu’elle te dit, la nordique maladroite ? la menaçai-je. 

-Un grand merci pour la tournée que je lui paierai une fois son crâne réparé ? demanda-t-elle, une lueur de malice dans les yeux. 

-De l’hydromel Roncenoir, alors ! réclamai-je. 

La gosse nous rejoignit. 

-Si tu veux, répondit-elle. 

-Et après, tu nous laisseras aller dîner ? s’enquit Gunnar auprès d’elle. 

Elle nous fixa un instant, puis répondit, un fin sourire sur les lèvres :

-Vous n’avez qu’à y aller maintenant. Je vous attendrai au Ragnard pervers. 

Elle reprit la direction du marché l’air de rien. Finalement, la journée s’annonçait belle : un beau combat, un bon repas, une tournée dans une auberge… Talos, que rêver de mieux ?



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