Prends garde

Chapitre 14

5138 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour il y a plus de 8 ans

Le motel accueillait ses derniers clients tandis que Derek caressait doucement le dos de Stiles, blotti contre lui et dormant à poings fermés. Il était un peu moins de vingt heures et le loup avait entendu le téléphone de l’adolescent sonner par trois fois déjà, oublié dans la poche gauche de son pantalon. Sans doute des appels du shérif se demandant où était passé son fils unique.

Le loup-garou fixait le plafond d’un air absent, laissant courir ses doigts sur la peau pâle de l’adolescent avant de s’arrêter sur la nuque de ce dernier pour la masser délicatement. Son esprit était déchiré entre l’envie de rester blotti contre Stiles pour le reste de la soirée — et pourquoi pas, la nuit — et de l’autre, cette raison lui criant de le réveiller et de le renvoyer chez lui en argumentant sur ce besoin de prendre du recul et de faire le point sur leur relation. Il ne se faisait cependant pas d’illusion. Même si ce « contretemps » avait été une agréable surprise, il ne pouvait pas se résigner à accepter le retour de Stiles de cette manière. Il avait certes envie d’être avec lui, mais d’un autre côté, il était bien incapable d’oublier certaines choses passées. En premier lieu la rupture un peu brusque de l’adolescent. En second lieu, la morsure. En troisième lieu, tout ce qui concernait le comportement et les sentiments de Stiles à son sujet. Durant leur relation, l’adolescent avait toujours été indifférent à son affection. Maintenant que le loup semblait vouloir prendre volontairement du recul vis-à-vis de lui — de le repousser en quelques sortes —, Stiles sautait dans ses bras tout étant aussi perdu que le lycanthrope.

Combien de temps allaient-ils jouer à ce petit jeu de « suis-moi, je te fuis et fuis-moi, je te suis » ? Derek était certain ne pas avoir assez de patience pour le découvrir. Et son cœur non plus.

C’était de sa faute après tout. Il avait fait le premier pas, très maladroitement qui plus est, ne connaissant même pas les sentiments de l’adolescent vis-à-vis de lui. Il avait saisi sa chance pour voler un baiser ; tout comme, il avait saisi une très maigre chance pour récupérer Stiles en le mordant.

Et si, pour une raison ou pour une autre, ils tentaient à nouveau de se mettre ensemble, et que l’indifférence et la peur irraisonnée de Stiles amenaient une nouvelle rupture, Derek laisserait tout tomber. Pour de bon. Il tirerait un trait sur tout cela, se forcerait à ne plus penser à l’adolescent ou à le croiser. Il partirait pour de bon, très loin de Beacon Hills. C’était ce qu’il avait essayé de faire et, malgré tous ses efforts, il n’avait pas réussi à un seul instant à oublier Stiles. Néanmoins, il savait au fond de lui qu’il ne serait pas capable de supporter une deuxième rupture avec lui. Il avait juste besoin d’un peu de temps et de recul pour mieux affronter les difficultés de cette relation maladroite et tumultueuse avec le fils du Shérif.

Stiles grommela dans son sommeil avant de tourner le dos au loup et de continuer à ronfler doucement. Derek poussa un soupir, déposa un baiser sur l’épaule dénudée de l’adolescent avant de s’asseoir au bord du lit et de se passer la main dans les cheveux. Il décida de laisser encore un quart d’heure de repos à Stiles avant de le réveiller et de tenter de lui expliquer ce qu’il avait sur le cœur sans risquer de provoquer une énième dispute. Il pourrait tout aussi bien le jeter dehors par mauvaise humeur et de lui rappeler à bon escient que l’adolescent avait cours le lendemain et que le shérif de Beacon Hills devait être en train de sillonner dans toute la ville à la recherche de la jeep de son avorton. C’était certes une des choses les plus sensées à faire ; pourtant, le loup ne pouvait pas s’empêcher de savourer chaque seconde passée avec Stiles près de lui. Il n’avait aucune envie de partir ou de le laisser partir.

Il se trouvait devant ce dilemme entre ce qu’il voulait au plus profond de lui et ce qu’il s’était convaincu et obligé à faire.

Pour l’heure, Stiles dormait paisiblement dans le lit de la chambre miteuse tandis que le loup enfilait des vêtements en se demandant comment il allait expliquer à l’adolescent que malgré « le contretemps agréable », ils ne pourront pas redevenir comme avant. Du moins, pas avant un long moment. Peut-être que Stiles n’y verra aucun inconvénient compte tenu du fait que ce fût lui qui avait expressément demandé d’avoir la paix ; tout en étant celui qui, dans un autre côté, avait tout fait pour retrouver le loup.

Derek secoua la tête pour chasser le flot de pensées qui l’envahissaient et sortit de la chambre sans faire de bruit, refermant doucement la porte derrière lui. La fraîcheur de la nuit le fit frissonner. Il jeta un regard en direction de la réception se trouvant en contre bas un peu plus bas. Il remarqua trois personnes qui attendaient devant la porte en fumant une cigarette. Il reconnut la femme qui l’avait reçu et donné la clef de sa chambre — qui se trouvait au premier étage. Il descendit les escaliers en effleurant la rampe du bout des doigts, l’oreille de loup-garou attentive sur les ronflements de Stiles.

Les mains dans les poches, il se dirigea d’un pas lent vers sa voiture, scrutant les environs sans réel but. La jeep de Stiles était garée juste derrière la Camaro noire. Le loup laissa échapper un autre soupir avant de passer une main fatiguée sur son visage. Si le Shérif venait à vérifier cet endroit et qu’il reconnaissait la voiture de son fils… Derek ne préférait pas y penser. Il ouvrit la portière de son véhicule et chercha à tâtons le chargeur de son téléphone dans la portière. Ses doigts effleurèrent un câble fin puis une surface plane qui s’avérait être une sorte de carte de visite. Le loup prit ce qu’il était venu chercher ainsi que le carton de forme rectangulaire. Il l’observa un instant, perplexe avant de reconnaître l’écriture de Stiles.

Sur la carte, on pouvait lire l’enseigne d’un café ainsi que des notations écrites en rouge.

Derek ferma la portière de son véhicule, glissa le petit carton dans sa poche avant de se diriger vers un distributeur pour y prendre deux canettes et ainsi que des barres chocolatées pour l’adolescent. Il grimpa les escaliers quatre à quatre, ouvrit la porte de la chambre pour y trouver Stiles toujours endormi et ayant laissé tomber la position couchée sur le côté pour celle sur le ventre avec un bras pendant et une jambe sortie de la couverture. Le loup déposa son butin sur la petite table à côté de la télévision où passait une émission de variété. Il se dirigea d’un pas lent vers le lit, s’allongea à côté de Stiles avant de lui enlacer gentiment la taille et de lui déposer un baiser chaste dans le cou. L’hyperactif grogna dans son sommeil, sentant le torse du loup-garou peser sur son dos. Il se retourna, le visage tourné vers Derek, les bras ramenés vers son visage. L’Alpha ne put s’empêcher de sourire et de le serrer un peu plus l’adolescent contre lui, enfouissant la tête de l’adolescent sous son menton.

Ils ne bougèrent pas d’un centimètre jusqu’à ce que le portable de Stiles sonna pour la quatrième fois et que Derek se dégagea de cette étreinte pour ramper jusqu’au pantalon de l’adolescent pour s’emparer de l’appareil qui vibrait comme si le monde allait s’écrouler dans les minutes à venir. Le loup ne décrocha pas même s’il en eut l’envie en voyant le nom du correspondant. Il s’allongea derechef à côté de Stiles et entreprit de le réveiller d’abord avec des caresses du bout des doigts sur la joue puis en le secouant doucement. Stiles émit un grognement agacé avant de tourner le dos au loup et de ramener la couverture au-dessus de la tête d’un geste de protestation. L’Alpha poussa un soupir mi-agacé mi-amusé. Alors que le portable venait s’arrêter de vibrer, il fit le tour du lit avant de s’agenouiller devant le côté de l’adolescent, utilisant ses coudes comme appui sur le bord du matelas. Il retira doucement la couverture avant de murmurer de sa voix la plus calme et ferme à la fois à un Stiles dont le visage trahissait son envie de ne faire absolument rien d’autre que dormir :

« Ton père a essayé de te joindre quatre fois. »

Stiles se frotta les yeux du bout des doigts avant de s’étirer en long et en large et de répondre sur un ton somnolent :

« À la cinquième fois, je décrocherai. »

Derek se leva, posa le téléphone sur le matelas avant de réunir les vêtements de l’adolescent et de les jeter près des jambes de l’adolescent. Il le désigna du doigt et fit d’une voix nettement plus autoritaire :

« Tu t’habilles. Tu l’appelles. Et tu rentres chez toi ; tu as école demain matin. Ce n’est pas négociable. »

Stiles s’assit, prenant appui sur les mains, dévisagea le loup avant de rétorquer, légèrement frustré :

« Après tout le mal que j’ai eu pour retrouver tes fesses de loup-garou aigri, tu me mets dehors ? »

Derek étouffa un grognement, secoua la tête d’exaspération avant de brancher le chargeur de son téléphone dans une prise murale, près de la porte de la chambre. Stiles enchaîna :

« Tu n’as pas le droit de me demander de partir.

— Stiles, tu veux que ton père débarque, te trouve dans mon lit et me colle un pistolet sur la tempe ?

— Il ne sait pas que je suis là, fit l’adolescent en haussant les épaules comme si cela résolvait la question. »

Derek arpenta la pièce avant de prendre place sur le lit, près des jambes de l’hyperactif qui avait croisé les bras dans un signe de défi.

« Appelle ton père, répéta le loup en détachant chaque syllabe.

— Si je lui dis que je vais bien et tout, je pourrai rester ? demanda Stiles, mutin. Ne me sors pas que tu n’as aucune envie que je reste. »

Derek le dévisagea tandis que l’adolescent se gratta l’arrière du crâne en baillant à s’en décrocher la mâchoire. Le loup n’avait aucune envie de provoquer une énième dispute, une énième discussion sur des sujets où ils ne feraient que tourner en rond pendant dix minutes. Les choses avaient été pourtant claires. Même si Stiles se tenait tout près de lui, cela ne changerait rien au fait que le loup avait besoin d’être seul. De réfléchir. De prendre du recul.

D’un tout autre côté, il avait envie de passer la nuit avec l’adolescent, de se coller à lui, de le serrer contre lui et de l’étouffer sous des baisers passionnés et enivrants. Néanmoins, il se doutait que ce ne serait pas une bonne idée, même si Stiles n’avait pas eu cours le lendemain. Même si c’était le soir de la Saint-Valentin. Même si c’était la veille de l’anniversaire de leur premier baiser devant la demeure des Stilinski. Un samedi soir. Il y avait un mois de cela.

Stiles se jeta en arrière sur l’oreiller, prit son téléphone entre les mains et consulta sa messagerie tandis que les yeux de Derek Hale changèrent un court instant de couleur, trahissant son humeur quelque peu exaspérée.

« Tiens, Scott m’a envoyé un message pour me dire qu’il s’était remis avec Allison, déclara l’adolescent sur le ton de la conversation. Pourtant ce matin, ils ne voulaient même pas se croiser. »

Devant le silence soudain de Derek, Stiles tourna la tête en sa direction et ajouta :

« Oui, je sais. J’appelle mon père. Pas la peine de faire cette tête de “loup-garou très en rogne”. »

Toujours allongé sur le dos, il composa le numéro du Shérif. Derek bascula en avant pour poser sa tête sur le torse de l’adolescent qui s’empressa de jouer avec ses cheveux. Le Shérif Stilinski décrocha à la deuxième tonalité et Stiles entama un long récit explicatif sur son absence ponctué par des petits mensonges dont Derek ne prêta pas la moindre attention. Le loup retira d’un geste un peu brusque la couverture avant de se coucher sur l’adolescent et de lui enlacer délicatement la taille, la tête sur sa poitrine, la tête tournée vers la porte de la salle de bain. Après avoir raccroché, Stiles poussa un long soupir avant de se masser la tempe du bout de l’index. Comme il le craignait, son père avait eu vent de son absence au dernier cours de la journée et il avait voulu quelques explications. L’adolescent s’en était plus ou moins sorti avec deux ou trois mensonges très tarabiscotés. Il avait promis au Shérif de rentrer avant minuit sinon ce dernier allait lui imposer un couvre-feu extrêmement sévère. Pas sûr que Derek fasse quelque chose contre cela.

Le loup se mit à embrasser la peau blême de l’adolescent, se promenant vers sa gorge avant de descendre au niveau de son ventre. Il sentit Stiles se crisper une fraction de seconde au premier coup de langue sur la hanche. Il s’y attarda quelques instants tandis que Stiles glissa ses doigts frêles dans la chevelure de l’Alpha. Celui-ci prit appui sur une main, s’empara des lèvres de son vis-à-vis dans un baiser langoureux tout en lui caressant le visage de sa main libre. Stiles agrippa le t-shirt du loup-garou et, avant même qu’il amorçât un geste pour lui retirer, Derek interrompit leur étreinte et le dévisagea tandis que l’adolescent émit un grognement de frustration, lui donnant une tape sur l’épaule par punition d’avoir osé arrêter sur échange.

Le loup eut un sourire carnassier alors que sa main se faufila vers la poche gauche de son pantalon pour en sortir le petit carton rectangulaire. À sa vue, Stiles fronça les sourcils, perplexe. Derek prit appui sur les coudes, l’objet entre l’index et le majeur :

« Cela ne te dit rien ? Je l’ai retrouvé dans ma voiture. »

Stiles leva les yeux au ciel :

« Ce ne serait pas ce machin du jour où l’on a fait un bowling ? demanda-t-il, la voix légèrement haletante.

— Faisons un marché. J’accepte que tu restes avec moi jusqu’à vingt-trois heures — étant donné que tu dois faire la route et retourner chez toi avant minuit, si j’ai bien compris ta conversation avec ton père, ce sera pas plus tard que cela — si tu me donnes ma récompense pour t’avoir battu au bowling. »

Stiles ouvrit la bouche pour répliquer, mais la referma aussitôt, totalement pris au dépourvu.

« Tu m’as battu uniquement parce que tu as des pouvoirs de méchant loup-garou, fit-il de mauvaise foi.

— Stiles, tu sais très bien que j’ai gagné uniquement parce que tu joues très mal. Tu avais lancé trois fois la boule dans la rigole. Et je ne compte pas les fois où tu as failli t’écraser le pied avec.

— D’accord, je suis totalement nul au bowling. Et pourquoi subitement, tu as envie de ta récompense, là, maintenant, tout de suite ? Je croyais que tu voulais me mettre dehors parce que demain j’ai école et blablabla. »

Derek montra le revers du petit carton où se trouvaient les notes griffonnées par l’adolescent : des scores de parties de bowling. Si Stiles avait pris soin de les noter de la sorte, c’était uniquement pour les étaler sous le nez du loup au cas où il l’aurait battu à plat couture.

« Si j’accepte ton offre, tu me donneras ton numéro de téléphone et tous les trucs à savoir quand tu seras parti je ne sais où ? demanda doucement Stiles en ne quittant pas la carte des yeux. Je veux dire… Ça m’aidera. Enfin, je ne dis pas que je t’enverrai des messages tout le temps ou que je te téléphonerai. Juste…

— Non, fit le loup, catégorique. Tu n’auras pas mon numéro de téléphone tout comme je n’aurai pas le tien.

— Pourquoi ? s’écria Stiles, terriblement frustré. Tu veux vraiment disparaître et couper les ponts jusqu’à ce que tu te décides à revenir ?

— Je ne vois pas en quoi ça te pose un problème, Stiles. Dois-je encore te rappeler que c’est toi qui as voulu tout cela ?

— Oui, j’ai voulu qu’on rompe. Oui, j’ai voulu qu’on arrête tout. Oui, j’ai voulu que tu me laisses tranquille. Mais jamais j’ai voulu que tu partes de la sorte.

— Stiles, on ne va pas encore avoir cette discussion.

— Et pourquoi pas ? »

Derek se retira du torse de l’adolescent pour s’asseoir à côté de lui tandis que ce dernier s’empara de la couverture tombée par terre pour se couvrir des pieds à la tête dans un geste de défense.

« Je t’ai dit que j’avais besoin de temps pour faire le point. Ce n’est pas difficile à comprendre, ajouta le loup.

— Ce n’est pas une raison pour refuser de me donner de quoi communiquer avec toi, merde ! s’exclama l’adolescent en secouant vivement la tête de gauche à droite. Et si jamais j’ai des problèmes ou que.. Voilà [il désigna de l’index la partie de sa gorge parsemée de marques de morsure], il y a un problème avec ça.

— Il y a Scott, Isaac, Deaton, même le père d’Allison qui peuvent t’aider, répondit Derek sur un ton sans réplique. Pourquoi tu ne peux pas juste accepter mon choix par rapport à tout cela ?

— Et mon choix à moi dans tout cela, hein ? Tu y as pensé avant d’enfoncer tes dents dans ma gorge, peut-être ? rétorqua Stiles s’abandonnant totalement à la colère. Ou peut-être tout ce machin avec le fait que tu décides toujours tout sans me demander mon avis ? »

Les yeux du loup virent au rouge pas suffisamment longtemps pour que Stiles le remarque.

« Stiles, je ne vais pas me répéter une nouvelle fois. Je compte prendre du recul et c’est ce que je ferai, que cela te plaise ou non.

— Très bien, fais ce que tu veux, lança l’intéressé d’un geste théâtral de la main. Va donc t’isoler dans les montagnes ou sous une cascade en réfléchissant au sens de la vie pendant que je me casse le cul à résister à l’envie de te suspendre par les crocs !

— Bordel, Stiles, arrête d’être égoïste ! S’emporta à son tour le loup.

— Moi, égoïste ?! »

L’adolescent bondit hors de lit, prit ses vêtements, les enfila le plus vite qu’il le put avant de mettre ses chaussures en sautillant sur un pied puis l’autre tout en fixant le loup avec amertume.

« L’égoïste va rentrer chez lui plus tôt que prévu, cracha-t-il.

— Tu m’emmerdes, Stiles, avoua Derek en se levant à son tour. Vraiment. Tu dépasses les bornes.

— Si je suis venu t’emmerder comme tu le dis c’est parce que peut-être tes putains de crocs et tes putains d’yeux qui font peur quand ils brillent me manquaient juste un tout petit peu. Mais non, ça c’est trop difficile à comprendre pour un putain d’Alpha.

— Tandis que toi, tu comprends tout à fait ma volonté de prendre le recul, peut-être ? ironisa Derek, en serrant les poings.

— Je ne sais pas comment on le dit en “loup-garou”, mais je vais le tenter tout de même : va te faire foutre. »

Stiles fit volte-face avant de se diriger d’un pas rapide vers la porte de la chambre. Il fut plaqué, le dos contre le mur, par Derek qui lui emprisonna les poignets et les tint en hauteur au-dessus de la tête.

« Tu m’as maintes fois repoussé alors que j’ai pratiquement cédé à tous tes caprices, lâcha l’Alpha dont le visage était tout proche de celui de l’adolescent, les yeux rouge-écarlate. Tu me plaques pour des raisons absurdes. Tu joues avec mes nerfs, mes sentiments et ma patience. Tu me prends presque pour ton chien. Par-dessus tout, tu n’es pas fichu de respecter ou d’accepter mon choix de prendre du recul vis-à-vis de notre relation. Et je dois sauter de joie parce que soudainement tu t’es rendu compte que mon absence te posait un problème ? »

Tout en lui soutenant le regard, Stiles garda le silence. Il déglutit avec peine tandis que le loup resserra sa poigne :

« Tu crois que si je tiens temps à faire le point c’est uniquement pour plus te voir ? Tu n’as pas pensé que c’est justement pour essayer d’arranger les choses entre nous ? Mais ça ne peut pas marcher si tu te comportes de cette manière. Ou si tu n’as aucune envie que cela fonctionne entre nous.

— Je n’ai pas envie que tu t’en ailles, murmura Stiles d’une voix pâteuse, sentant les larmes lui monter. C’est tout. J’ai commis des erreurs, je le sais. Mais je ne veux pas que tu t’en ailles. Je veux vraiment pas que tu t’en ailles. C’est… j’ai besoin.. de toi, Derek. »

Le loup grogna d’exaspération. Stiles enchaîna :

« Je sais que je suis insupportable. Tu as tout à fait raison de le penser. Je sais aussi que le fait que je sois crispé, indifférent, légèrement obsessionnel par rapport à tout ce qui était en relation de près ou de loin à nous deux percé au grand jour par les autres, puisse t’être totalement.. désagréable ou frustrant. Je sais. Je le sais très bien. Je me donnerais des baffes si je le pouvais. Mais… j’ai besoin de toi. Vraiment besoin de toi. »

Derek libéra les poignets de l’adolescent, lui tourna le dos avant de murmurer d’une voix sombre :

« Laisse-moi tranquille, Stiles. Tu n’aurais pas dû venir jusqu’ici. Tu n’aurais pas dû me chercher. »

L’estomac de l’adolescent se tordit tandis que son cœur lui donna l’impression d’être soudainement lourd. L’Alpha continua en marchant doucement vers le lit :

« Comme je te l’ai dit : ce n’est pas parce que tu es là, devant moi, que tout s’arrange en claquant les doigts. On est pas dans un film ou une série à l’eau de rose où les deux héros oublient tout ce qui s’est passé une fois qu’ils ont couché ensemble. La relation que nous avons est nettement plus bancale et fragile que je le croyais. Ça fait du mal autant qu’à toi, mais tu dois l’accepter ; il faut que tu l’acceptes. Je dois m’en aller un temps. M’éloigner de toi. »

Stiles se mordit la lèvre inférieure presque à sang pour contenir ses larmes avant d’acquiescer doucement. Il bafouilla quelque chose d’intelligible, même pour les oreilles d’un loup-garou avant de s’en aller, refermant doucement la porte derrière lui.

Derek donna un coup de poing dans le mur avant de passer une main moite sur le visage. Son ouïe aiguisée lui parvint les sanglots de Stiles.

Il se fit violence pour ne pas le rejoindre et le consoler. Et ce fut la chose la plus difficile qu’il dut faire de toute son existence.

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