Chante pour moi

Chapitre 6 : Découverte

4897 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 24/04/2023 12:37

Chapitre 6 - Découverte

Les jours défilaient et Solfège s’habituait à ce nouveau train de vie plutôt aisément. La majeure partie du temps, elle courait après Bowser Jr qui était un enfant vraiment capricieux … Pour ne pas dire carrément effronté. Il se moquait des gardes qu’ils croisaient dans les couloirs, grimpait n’importe où quand ça lui chantait, faisait de vilaines farces aux cuisiniers … Il menaçait tout le monde dès que quelqu’un avait l’audace de lui refuser quelque chose. Apparemment, cet enfant Roi était surprotégé par son père car il n’hésitait pas à aller se plaindre auprès de lui pour obtenir gain de cause, même si la situation était injuste comme par exemple ce pauvre Koopa qui l’avait malencontreusement bousculé pendant qu’ils faisaient une partie de cache-cache. Dorénavant il sillonnait les terres infertiles avec les autres Skelerex ayant fait les frais d’une justice mal faite.

Solfège n’avait plutôt pas intérêt à le contrarier, ou elle risquait de faire la même mauvaise expérience que ces malheureux. Faisant toujours de son mieux pour satisfaire les besoins d’attention de Bowser Jr, il arrivait parfois qu’elle s’épuise après une journée entière à jouer à des jeux qui demandaient beaucoup d’énergie. Jusqu’à présent, elle avait réussi à trouver de bonnes excuses pour changer d’activité en quelque chose d’un petit moins épuisant. De la peinture sur toile ! A priori, le jeune Koopa hyperactif appréciait l’art, et donc ils pouvaient passer des heures entières à faire des dessins en tout genre. Solfège aussi avait le droit de peindre, cette activité la détendait beaucoup tandis qu’elle dessinait souvent son interprétation du monde. N’ayant cependant pas vu grand-chose de l’extérieur, elle ne pouvait qu’illustrer la dernière planète qu’elle avait visitée avant que l’ombre de Bowser ne l’emporte avec lui.

Concernant Junior, lui préférait dessiner des personnages imaginaires bien souvent accompagnés de lui et de son père faisant la guerre aux royaumes voisins. Constamment représenté dans des prototypes de machines super sophistiqués, Bowser Jr recréait des explosions alors qu’il décimait une partie de la population locale presque systématiquement. Ce genre de dessins mettait mal à l’aise Solfège qui ne pouvait s’empêcher de grimacer au réalisme de ces dessins. D’accord que c’était un enfant avec beaucoup d’imagination, mais de là à faire ce genre de représentations … Elle n’avait vraiment pas envie de se retrouver à la place des personnages champignons sur la toile ! Était-ce réellement le désir de son père ? Là, illustré sur ses toiles ? Ou la propre interprétation d’un enfant ? Curieusement, Solfège pencherait plutôt pour la première hypothèse après avoir eu droit à la furie de Bowser.

En plusieurs jours de servitude pour le jeune prince, elle n’avait croisé le Roi des Koopas que deux fois dans son château. La première fois elle avait rasé les murs pour ne pas risquer de l’importuner avec sa présence, mais il semblerait que Bowser ne lui portait aucun intérêt car il était passé à côté d’elle sans même lui porter un regard. Pas même une menace profanée, rien. La grande tortue avait juste été de passage ce jour-là toutefois Solfège avait remarqué qu’il était complètement absorbé par ses pensées, à tel point qu’il ne faisait attention à personne. S’étant faite petite pour éviter le moindre contact, elle avait attendu qu’il s’éloigne pour regarder sa carapace épineuse avec perplexité. Il l’ignorait mais elle n’allait certainement pas s’en plaindre, au moins elle ne risquait rien ou pas grand-chose ! C’était parfait ainsi. En revanche, elle se questionnait sur l’attitude étrange qu’avait adopté le Roi, pourquoi il paraissait aussi distrait tout à coup …

La deuxième fois, c’était quelques jours plus tard après que le château avait entamé une descente pour faire un amarrage dans des contrées inconnues. Bowser avait reçu une sacrée raclée … Elle ne savait pas contre qui il se battait, mais une chose était sûre, le combat devait être particulièrement violent au vu de ses blessures. C’était aussi la toute première fois où elle avait vu son visage abattu. Presque découragé alors que le grand Koopa avait traversé le couloir pour rejoindre sa chambre tout en regardant le sol, les épaules tombantes. Cela lui donna un pincement au cœur de le voir aussi dépité, même s’il ne méritait pas sa pitié ni une quelconque forme d’empathie après tout ce qu’il avait fait.

Bon, dire qu’elle ne risquait rien était un bien grand mot lorsqu’on était la servante d’un enfant qui faisait énormément de caprices, et qui voulait toujours avoir le dernier mot. À chaque instant. Ce qui faisait que chaque jour qui passait était une véritable épreuve, malgré les nombreux jeux et autres activités ludiques. Bowser Junior ne lui avait fait que deux crises de colère et à chaque fois, elle avait réussi à le calmer en lui proposant de lui raconter des histoires. Mais ce petit stratagème ne pouvait pas fonctionner indéfiniment … Un jour ou l’autre, il s’en lassera d’elle, et elle redoutait de plus en plus ce moment. Car au fil du temps elle avait lié une véritable amitié avec l’enfant Koopa qui lui avait non seulement sauvé la vie, mais aussi offert un toit avec un lit puis de quoi se nourrir tous les jours. Était-il aussi méchant que son père ? Probablement que non, juste trop gâté avec beaucoup trop de pouvoir pour son jeune âge.

«C’est moi qui compte ! C’est moi, c’est moi !» Hurla Bowser Jr tout en sautant à ses pieds avec les mains en poings aux participants de son jeu. Ce jour-là, il portait un foulard rose que lui avait confectionné la princesse Peach lors de sa dernière "visite" il y avait de cela plusieurs mois en arrière.

«Ça me va. Mais attention, pas de triche cette fois-ci !» Prévint Solfège qui leva son index au visage de Junior trépignant d’impatience, les sourcils levés. A côté d’elle, les deux gardes ayant rejoint la partie hochèrent vivement la tête après avoir perdus à la suite d’un tour de passe-passe du petit Koopa beaucoup trop malin mais prévisible.

Attrape-moi si tu peux, c’était le jeu qu’elle avait proposé aujourd’hui pour l’occuper. Mais pour que ce jeu soit encore plus amusant, il fallait recruter des joueurs alors qui de mieux que les deux gardes qui passaient leur journée à surveiller les portes de la chambre ? Ils s’ennuyaient les pauvres. Etonnamment, les deux Koopas avaient immédiatement accepté sa proposition quand elle leur avait proposé cette petite activité sympathique dans les différents couloirs du château. L’endroit était tellement gigantesque qu’il fallait presque compter une heure pour une seule partie, même si certaines zones étaient interdites ou hors d’accès. Par exemple l’aile Ouest, ou encore le rez-de-chaussée qui faisait presque deux fois la taille de l’étage en revanche, ce n’était rien comparé au sous-sol qui battait les deux zones réunies. Impossible de s’y retrouver ou alors il fallait augmenter le nombre de joueurs pour que cela devienne intéressant !

«Je ne triche pas ! Je n’ai pas besoin de tricher pour montrer que je suis le plus fort à ce jeu-là.» Renifla Junior d’un air prétentieux alors qu’il croisait les bras puis levait son petit museau de frustration, n’appréciant que moyennement le statut de tricheur.

«C’est ce qu’on va voir.» Amusée, Solfège imita sa posture puis fit un check au garde à côté d’elle qui lui sourit avec complicité. Ils avaient déjà ciblé leur prochaine cachette ! Et cette fois-ci, ils étaient déterminés à remporter cette troisième manche.

«On se sépare !» Chuchota le plus vieux des Koopas après s’être détourné de Bowser Junior qui avait commencé le décompte contre une statuette de son père.

Leurs pas précipités qui s’éloignaient du grand corridor était la dernière chose que la petite tortue entendit alors que les trois joueurs qui devaient se cacher se dispersaient chacun dans une autre direction. Solfège alla rapidement à gauche pour longer les murs en faisant bien attention de ne pas faire trop de bruits, misant sur la discrétion plutôt que la rapidité cette fois-ci. Pour ne pas être dérangée par ses cheveux pendant qu’elle courait, elle les avait attachés dans une queue de cheval en ne laissant libre que deux mèches pour encadrer son visage souriant d’excitation. Aussi furtivement que possible, elle disparut dans le couloir Ouest puis bifurqua à gauche, puis à droite jusqu’à un autre couloir un peu plus sombre que les précédents. C’était un vrai labyrinthe là-dedans ! Après tout ce temps captive, elle découvrait encore des coins inexplorés.

Elle avait mis suffisamment de distance avec Junior pour ne plus l’entendre compter, ce qui lui permis de ralentir le rythme. À bout de souffle d’avoir autant courut, Solfège traîna les pieds jusqu’à un petit banc sur le côté gauche du couloir, juste en dessous d’un chandelier. Dans cette partie du château, la pierre était plus foncée, ce qui faisait d’autant plus ressortir les différentes œuvres d’art accrochées. Elle pouvait entendre son cœur courir dans ses tempes tandis qu’elle s’asseyait lourdement sur le siège qui n’en était pas un en réalité, car dès l’instant où elle le toucha il se mit à grogner. Laissant sortir un petit cri de stupeur, Solfège bondit hors du banc pour se rendre compte qu’il s’agissait en fait d’un Goomba très en colère d’avoir été confondu avec un siège.

«Mille excuses !» S’excusa-t-elle précipitamment tout en levant les mains vers lui d’une grimace embarrassée. Oups. Cependant le Goomba, ne comprenant pas son langage, se mit à la pourchasser sans jamais s’arrêter de grogner. Deux dents saillantes et des sourcils noirs touffus, la créature brune sans bras courut après la jeune femme qui n’avait d’autre choix que de fuir.

Elle essaya de le semer dans les vastes couloirs du château, mais le Goomba restait sur ses traces … Inarrêtable, prêt à lui faire regretter son geste. Donc elle prit la décision de prendre la prochaine porte sur son chemin en espérant qu’il ne puisse pas l’ouvrir. S’il n’avait pas de bras, il ne pouvait pas l’atteindre, pas vrai ? Après un dérapage maitrisé à l’angle, Solfège se dépêcha d’atteindre la porte mais en sautant sur la poignée elle remarqua avec horreur qu’elle était fermée à double tour. Zut ! Sur le point de reprendre la fuite, elle vit que la créature furieuse ne la suivait plus, elle avait abandonné sa chasse en cours de route. D’un soupir de soulagement, Solfège se laissa tomber contre le bois de la porte avec une main au-dessus de son cœur tambourinant furieusement. Heureusement qu’avec cette robe, elle pouvait courir sur de longues distances ! Sinon le Goomba l’aurait sans doute croquée pour son impolitesse.

«Merci Junior. Sans le faire exprès, tu me sauves encore la vie.» Soupira-t-elle, la tête posée en arrière. Ce qui lui permit de voir que la porte en diagonale de sa position était entre-ouverte.

La curiosité était un vilain défaut, elle l’avait appris à ses dépens … Toutefois elle ne pouvait résister à la tentation alors que ses pieds l’emmenaient vers l’embrasure de cette porte qui laissait un maigre filet de lumière pénétrer dans la pièce. Passant d’abord sa tête pour faire un coup d’œil, elle remarqua que la salle était plongée dans la pénombre sauf pour le côté gauche du mur où un grande armoire style présentoir en bois se dressait. Les rideaux rouges aux fenêtres étaient tirés, une table ovale se tenait au centre de la pièce poussiéreuse avec deux gros fauteuils verts autour. De l’autre côté se trouvait une très grande bibliothèque avec un nombre incalculable d’ouvrages colorés. Absorbée par les détails de cette salle aux dimensions disproportionnelles, Solfège entra calmement pour remarquer qu’un petit Luma était enfermé dans un bocal suspendu par un crochet à côté de l’armoire. C’était lui qui procurait cette luminosité tamisée.

À son approche silencieuse, l’étoile jaune dans le récipient translucide se tourna vers l’humaine pour commencer à faire des pirouettes. Visiblement dépourvu de la parole, le Luma sautillait derrière le verre alors que Solfège se rapprochait du présentoir où se trouvaient tout un tas de photographies dans des formats différents, prises à des moments différents. Quelques bougies blanches avaient été allumées, de la cire se dispersant à leur pied. Tout en haut de l’armoire gigantesque, entre deux bougies, se tenaient trois photos d’une jeune femme aux cheveux d’or vêtue d’une robe facilement reconnaissable grâce à sa couleur atypique rose. Une bague de fiançailles avec un diamant figurait à côté du cadre se trouvant le plus à gauche, il y avait même une représentation de son diadème … La copie conforme.

Solfège commençait à comprendre où voulait en venir Junior quand il disait que son père avait une véritable obsession autour de cette princesse au joli minois. Elle avait un adorable sourire et de beaux yeux bleus ! Son charme était à la hauteur de sa réputation. Mais avec ces photos se trouvaient également des clichés du royaume Champignon, démontrant à quel point son désir de gouverner le monde était grand et insatiable. Ce qui amena Solfège à se demander si Bowser ne cherchait pas à épouser Peach pour obtenir le pouvoir, ce qui ferait de lui le Roi le plus puissant du monde par procuration. Car de ce que lui avait raconté son fils à la langue bien pendue, le royaume Champignon était le Royaume le plus vaste. Et par conséquent, le plus puissant et le plus intéressant en termes de territoire. Ce qui pourrait expliquer tout cet engouement autour de la princesse. Même s’il semblait vraiment avoir de l’affection pour elle sinon, pourquoi tous ces efforts pour obtenir sa main ?

Cette dernière pensée fit de la peine à Solfège. Les mains derrière le dos pour ne pas être tenter de toucher aux bibelots, elle continua de parcourir les différentes photos jusqu’à tomber sur d’autres clichés datant d’une autre époque. Plus lointaine. Rapprochant son visage intrigué de l’une d’entre elles, la jeune femme reconnut presqu’immédiatement Bowser enfant dans un panier rose devant le Magikoopa du nom de Kamek, au pas d’une porte. Comment le reconnaissait-elle ? Eh bien, son fils et lui se ressemblaient comme deux gouttes d’eau à cet âge. Elle était donc certaine de ne pas se tromper. Le Kamek plus jeune souriait sur cette photo et brandissait sa baguette devant la petite tortue dans son panier qui pleurait toutes les larmes de son corps avec un hochet dans la main.

«Un orphelin …» En déduisit Solfège d’un sourire attristé.

Evidemment, pourquoi n’y avait-elle pas pensé avant ? Que Kamek était celui qui l’avait élevé pour devenir le Roi des Koopas, le fort et terrifiant Roi des Koopas d’aujourd’hui. Elle pouvait carrément suivre l’évolution de Bowser parmi les Magikoopas sur différentes photos prises sur le fait, à différents moments de sa vie. De l’enfance à l’âge adulte, le grand monarque devenu malfaisant à la suite de mauvais choix n’avait pas eu une vie très facile à priori. Etant précocement destiné à gouverner le royaume des Koopas, d’après une photo où il avait une couronne enfant, il n’avait pas dû connaître les joies de l’enfance. L’insouciance et l’innocence … Deux choses extrêmement importantes pour l’évolution d’un enfant découvrant le monde. Sur un autre cliché, il brandissait fièrement une baguette magique après avoir invoqué un sort qui ressemblait fortement à de la magie noire sous le regard fier de Kamek en extase devant ses prouesses de jeune mage.

Il semblerait que son parcours de vie ait été difficile dès le début, peut-être même chaotique pour en arriver à ce niveau-là de méchanceté, cependant Solfège ne savait pas comment se sentir vis-à-vis de cette découverte des plus intimes. Elle ressentait un mélange de pitié et de tristesse à l’égard du Roi, malgré ce qu’il lui avait fait subir. Rien n’excusait ses actes de cruauté, toutefois elle avait l’impression qu’il n’avait pas un si mauvais fond que ça et que peut-être il ne savait juste pas comment s’y prendre pour atteindre le bonheur. Un bonheur qu’il recherchait désespérément, c’était une évidence. Il était tellement obsédé par ce dernier qu’il n’hésitait pas à détruire tout ce qui y faisait obstacle sans le moindre scrupule, même si cela signifiait de devoir s’en emparer de force en emportant avec lui des vies innocentes. Le Royaume Champignon et la princesse Peach en faisant malheureusement partis.

Un peu comme une liste de souhaits à cocher.

«Arrêtez ! Ou je vais le dire à papa !»

«Junior.» S’épouvanta Solfège après avoir entendu le cri de détresse du jeune Koopa en écho dans le couloir. Sans attendre, elle sorti en trombe de la pièce pour débouler dans le corridor à la recherche du Bowser miniature, l’inquiétude accélérant la vitesse de ses pas. Elle entendit des éclats de rires moqueurs alors qu’elle tournait à l’angle pour trouver trois Koopalings autour de Bowser Jr.

«C’est quoi cette bavette pour bébé ?» Ricana Ludwig d’un zozotement après avoir attrapé le bandana autour du cou du plus petit Koopa.

«Touche pas à ça ! C’est mama Peach qui me l’a offert.» Rouspéta ce dernier tout en tirant sur le tissu rose pour le sortir de l’emprise du Koopa aux cheveux bleus touffus. Il dévisagea sa grande quenotte.

«Haha, cette andouille croit toujours que Peach est sa vraie mère …» Morton le pointa grossièrement du doigt pendant qu’il riait, Lemmy l’imitant quand Junior devint rouge dans le visage. Cependant les deux cessèrent immédiatement de rire lorsqu’ils virent l’humaine en colère s’approcher d’eux pour crier la chose suivante, les sourcils froncés.

«Hey ! Laissez-le !» Leur somma-t-elle mais Ludwig continua de tirer sur le bandana jusqu’à ce que l’inévitable se produisit. À force de tirer des deux côtés, le tissu se déchira lentement pour finalement se casser en deux ce qui fit tomber Bowser Junior sur la carapace d’un petit cri de surprise.

«Oh oh …» Grimaça Ludwig qui détenait le deuxième morceau du tissu dans les mains, l’autre toujours accroché au cou de Junior. Maintenant il avait fait une grosse bêtise … Si Bowser venait à l’apprendre, il n’osait imaginer l’engueulade monumentale qu’il allait se prendre. Ou pire ! La correction d’un papa surprotecteur.

«Restons pas là !» S’écria Morton après avoir attrapé le bras de Ludwig puis celui de Lemmy pour courir dans le sens inverse, laissant l’humaine dans leur sillage pour s’occuper de leur boulette.

«Junior …» Chuchota Solfège d’effroi alors qu’elle se précipitait à ses côtés pour le redresser dans une position assise, gardant une main sur son épaule pendant qu’elle le regardait avec inquiétude. Heureusement il n’avait pas été blessé durant cet accrochage mais le mal avait tout de même été fait. Attrapant le reste de son bandana rose, il l’étudia un instant avant que son visage ne se crispe puis que de grosses larmes n’envahissent ses yeux noirs adorables. Cette douloureuse image transperça le cœur de Solfège qui voulut dire quelque chose sauf que le petit Koopa se leva brusquement pour fuir vers sa chambre, sans même un regard en arrière à sa servante démunie.

Elle resta assise-là au milieu du couloir, son regard dévasté suivant la fuite de son jeune ami anéanti par ce qui venait de se passer. Les enfants pouvaient parfois se montrer vraiment cruels entre eux … C’était un crève-cœur. Les Koopalings seraient-ils jaloux de la relation qu’avait Bowser Jr avec son père ? Elle se le demandait tandis qu’elle se levait pour courir après son jeune Maître dans l’espoir qu’il ne la repousse pas une fois arrivée devant sa chambre. Elle se sentit infiniment soulagée quand les deux gardes qui avaient arrêté le jeu pour reprendre le travail la laissèrent passer d’un petit signe de tête, lui permettant de rentrer dans la pièce pour y trouver Junior dans son lit en boule. Le pauvre pleurait de manière incontrôlable tout en serrant sa peluche lapin dans ses bras, accablé et humilié. Apparemment il tenait beaucoup à ce bandana … Il devait lui rappeler de bons souvenirs passés avec la princesse lorsqu’elle était à ses côtés par contrainte.

Solfège enjamba rapidement les jouets qui trainaient sur son passage pour atteindre la couverture afin de grimper jusqu’à pouvoir se tenir à côté de Bowser Junior cachant son visage. Plaçant doucement sa main sur sa carapace verte en faisant attention à ses épines, elle écouta ses pleurs déchirants avec une peine immense au cœur. Que pouvait-elle donc faire ? Que pouvait-elle dire ? Evidemment qu’elle se doutait que Peach n’était pas sa vraie mère, c’était frappant, mais de là à se moquer d’un enfant pour ses croyances … Affligée, elle se mit à réfléchir sur ce qu’elle pourrait bien faire pour apaiser les pleurs du jeune Koopa et ainsi lui redonner le moral. Le bandana étant hélas irréparable depuis que Ludwig était parti avec le reste, ils pourraient tout aussi bien en refaire un nouveau ! Oui, en voilà une excellente idée. Sur le point de descendre du lit pour chercher un matériel adéquat pour ce type de bricolage, Solfège s’arrêta dans son mouvement lorsque Junior renifla.

«Est-ce que toi aussi tu vas partir un jour ? Comme mama Peach le fait à chaque fois ?» Questionna-t-il d’une toute petite voix affectée par les larmes, se redressant un instant pour la regarder. Qu’était-elle censée répondre … Prenant un moment pour réfléchir, elle décida qu’il ne valait mieux pas lui mentir car il était assez malin pour le savoir si elle le faisait.

«Un jour il le faudra bien. Mais je serai toujours là, juste ici …» Expliqua-t-elle tout en pausant la paume de sa main sur le torse de la tortue dubitative, juste au-dessus de son petit cœur tambourinant. Quand il la regarda avec étonnement, elle se mit à sourire avant de chuchoter ; «et tu veux savoir un secret ?»

«Oui quoi comme secret ?» Bowser Jr se redressa instantanément pour l’écouter.

«J’ai le pouvoir de me rendre invisible. Donc même si tu ne me vois plus, je suis toujours avec toi. Quoi qu’il arrive.» Lui chuchota-t-elle tout en se penchant vers lui pour lui prendre les bras, voulant à tout prix le rassurer d’une manière ou d’une autre. Toutefois elle ne s’attendit pas à son froncement de sourcils incrédule et encore moins à sa réponse.

«Mais c’est nul comme pouvoir ! Je préfère cracher du feu ou faire des explosions ! Comme ça, je pulvériserai tous ceux qui sont méchants avec moi.» Répliqua ce dernier avec férocité, les poings serrés de détermination. Tel père tel fils … Il voulait tout faire comme son père afin de le rendre fier.

«Dans ce cas tu m’apprendras.» Solfège haussa les épaules d’un sourire nonchalant, ses boucles rouges rebondissants sur ses bras.

«Mais … C’est-à-dire que … Je ne sais pas comment faire.» Admit honteusement Bowser Jr qui grinça des dents, jouant avec deux de ses griffes tout en évitant le contact visuel avec l’humaine assise face à lui par peur d’y voir de la moquerie. Encore une fois, il fut surpris par sa douceur.

«Avec un peu d’entrainement, je suis persuadée que tu y arriveras. Tu es suffisamment fort et courageux pour créer des boules de feu gigantesques !» Exagéra volontairement Solfège d’un grand mouvement circulaire de ses bras pour représenter une boule de feu, son sourire émerveillé offrant du réconfort et de la détermination à Junior accroché à ses mots. Sautillant sur son arrière-train d’enthousiasme, il sourit à son tour.

«Tu crois ?» Euphorique à l’idée de pouvoir faire comme son père, il regarda la jeune femme qui lui hochait la tête avant que celle-ci ne descende du lit pour chercher son ancienne robe blanche.

Solfège attrapa le tissu en question puis chercha une zone qui n’avait pas été souillée par la suie, notamment la partie du dos. Sans hésitation, elle déchira la robe après quoi elle récupéra la paire de ciseaux au bureau pour commencer son travail de découpage. Pendant de longues minutes entrecoupées par le doux bruit des ciseaux, elle taillada le tissu pour obtenir la forme qu’elle voulait, ce qui intrigua rapidement Bowser Jr qui sauta du lit pour la rejoindre sur le sol. Les yeux ronds de curiosité, le petit Koopa qui avait séché ses larmes s’installa aux côtés de l’humaine au talent caché de couturière. Il ne savait pas ce qu’elle faisait, mais tandis qu’elle coupait dans les restes de sa robe il ne pouvait décrocher son regard fasciné de son travail. Tous les deux plongés dans le silence, Solfège fit un petit cri de victoire lorsqu’elle finit enfin le nouveau bandana pour le jeune prince. Pas de la même couleur, certes, mais au moins il était assez grand pour couvrir son torse.

«Et voilà ! Maintenant que dirais-tu de lui donner un aspect effrayant ?» Proposa ensuite Solfège en levant sa main pour représenter une mâchoire, ce qui fit rire aux éclats le petit Koopa heureux d’avoir un tout nouveau bandana.

«Je sais ! Je sais ! Je vais lui faire les mêmes dents que papa ! Je serai aussi menaçant que lui et tout le monde aura peur de moi, niark niark niark !» Ricana vilement Junior après avoir bondit à ses pieds pour se frotter les mains d’anticipation, les sourcils se fronçant au dessin qui prenait vie dans sa tête. Attrapant le bandana blanc des mains de Solfège dès l’instant où elle lui tendit, il s’empressa de rejoindre son bureau pour prendre ses crayons de couleurs et mettre en pratique son idée qu’il estimait brillante.

Sur le sol, la jeune femme le regarda sans rien dire pendant qu’il gribouillait furieusement sur le tissu de son ancienne robe bientôt plus blanc du tout. Un petit sourire contemplatif se dessina sur son visage alors qu’elle fixait Bowser Jr assis dos à elle à son bureau, contente d’avoir pu rendre service. Elle ne pouvait peut-être pas réparer les erreurs, mais au moins elle avait réussi à rendre Junior à nouveau heureux. Rien que l’espace d’un instant. Lui offrant la possibilité d’exprimer sa créativité à travers un tissu qui lui rappelait beaucoup de souvenirs pas forcément positifs, un peu comme une rédemption pour tous les deux. Et son sourire inestimable était selon elle la plus belle des récompenses.

A suivre …

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