Huis-clos...trophobie
Chapitre sept
(Auto) Destructions
L’eau s’infiltre partout sans aucune retenue. Le froid et la fatigue gagnent également du terrain. En revanche, la progression des deux terriens est de plus en plus lente et laborieuse.
Heureusement, au détour de ce qui devait être l’un des Avengers de l’escadrille 19, le docteur McKay aperçoit enfin le jumper. Le petit vaisseau est au trois quart sous l’eau, mais le sas arrière semble être accessible sans grande difficulté. Requinqués par cette vision, Sheppard et McKay accélèrent le pas, faisant fis de l’eau qui atteint maintenant leur poitrine. La pression de l’eau et sa température extrêmement basse freinent considérablement leur marche, mais l’espoir est le meilleur des moteurs.
McKay arrive le premier devant la porte du jumper. Il glisse sa main dans un petit interstice visible uniquement pour l’œil averti. Ses doigts sont ankylosés, tout comme le mécanisme qui semble un peu grippé. McKay grimace un court instant avant d’enclencher le mécanisme salvateur. Un bruit mécanique se fait entendre, aussitôt suivi par l’ouverture du sas. Rassuré, McKay se hisse à l’intérieur puis aide le colonel Sheppard à en faire autant. Sans un mot, John retire son gilet militaire gorgée d’eau et souillé de sang, puis s’étale sur le plancher. Il ferme les yeux et se laisse enfin aller au relâchement. Sur son front le sang a cessé de couler et forme maintenant un épouvantable masque rouge sombre. Sa peau infiltrée d’eau est boursouflée aux niveaux de ses diverses plaies, donnant une désagréable impression d’infection purulente. Le colonel n’y prête plus attention. Après avoir enflammé ses blessures, le sel de l’eau de mer les a provisoirement anesthésiées. Trop de douleur camoufle la douleur… le colonel Sheppard ne s’attarde donc plus sur des souffrances qu’il ne peut définir.
Comparé à son ami, Rodney McKay est au mieux de sa forme. Il est si heureux d’être encore en vie qu’il déborde d’une énergie positive. Plein d’entrain, il transite par le compartiment arrière du jumper, sans faire particulièrement attention au militaire qui fait carpette. Il se précipite devant le tableau de commande et d’une impulsion psychique redonne vie à l’appareil Ancien.
-Colonel, il faut y aller.
-Deux minutes Rodney, je peux ?
-Non ! Il faut retourner auprès de la porte, tout de suite, avant qu’elle ne soit totalement submergée.
Le colonel Sheppard se redresse, étonné et subitement curieux.
-Pour quoi faire ? Je croyais que la porte ne pouvait pas nous être utile ?
-La porte non, mais dans la précipitation j’y ai laissé mon ordinateur.
-Et vous comptez nous sortir de là avec votre PC ?
Le ton légèrement sarcastique du colonel aurait du agacer le docteur McKay, mais celui-ci est au contraire particulièrement heureux de retrouver enfin le bon vieux John Sheppard, taquin et horripilant à souhait.
-Ha ha ha ! Je n’ai jamais dit que j’allais pouvoir nous sauvez.
-Non, mais vous allez quand même le faire…n’est-ce pas? N’est-ce pas ?!
Une grimace à la McKay pour toute réponse et un sourire à la Sheppard en retour.
Sans plus de commentaire, le colonel s’extirpe de son trop court repos et s’installe aux commandes du vaisseau. Le jumper s’extrait sans mal de sa gaine aquatique et s’élance vers le centre du bouclier.
La sensation de liberté est erronée mais Sheppard ne sent revivre. Entre ses mains et ses pensées le jumper obéit à ses moindres demandes. Une perception bien agréable quand depuis un temps faussement infini, on a l’impression d’être un jouet au dessein inconnu.
Vu du haut du dôme le laboratoire n’est plus que désolation. Ce qui était magnifique une heure plus tôt n’est plus maintenant qu’un immense désastre.
Le jumper s’approche doucement de la porte. C’est la première fois que Sheppard la voit de si près et sa taille démesurée l’impressionne énormément.
-Pourquoi une si grande porte ?
-Franchement je l’ignore. Tous les vaisseaux capturés par le rayon tracteur sont projetés à travers un vortex aboutissant sous cette coupole. Là, le faisceau téléporteur frappait les occupants, sans distinction aucune, les baladant d’un vaisseau à l’autre au grès d’un programme sans doute préenregistré, mais dont je ne comprends pas le mode opératoire.
-Mouais. Ils leur fallaient des cobayes et ils nous ont trouvé.
-Je ne pense pas que se soit si simple. Il y a forcément un élément qui manque à notre compréhension. Tenez, voila mon ordinateur. On a de la chance, l’eau ne l’a pas encore atteint.
Sheppard se colle au plus près des tableaux de commandes. La plupart sont totalement noyés sous la masse contacte de l’eau, mais certains sont encore visibles, exhibant les restes de l’immense et monstrueusement diabolique machine.
La porte du sas arrière s’ouvre et d’un geste rapide McKay attrape son précieux engin. D’une main ferme, il saisit l’ordinateur ainsi que des composants translucides, témoignages de l’implication des Anciens.
A l’avant du vaisseau, le colonel s’inquiète de la suite des évènements.
-Et maintenant ?
Pas de réponse. Un regard derrière son épaule apprend au militaire que le scientifique œuvre. McKay est concentré sur sa bécane. Sheppard maintient le jumper en position statique avant de rejoint silencieusement le scientifique.
-Rodney ?
-Chut, laissez-moi me concentrer.
-Oui mais le bouclier va bientôt céder… et vous aviez dit que le jumper ne résisterait pas à la pression alors…
-Alors ?
-Alors, j’aimerais savoir quel est votre plan.
-Qui vous dit que j’ai un plan ?
-Rodney !
-Bon, et bien on va simplement dériver l’énergie de l’occulteur pour créer un bouclier.
-Tien, tiens. Cela me rappelle quelque chose. Ce n’était mon idée ça, par hasard ?!
-Voui. Vous avez déposé un brevet ?
Le docteur McKay n’a pas quitté un instant des yeux ses calculs. Heureusement, sinon il aurait vu le sourcil relevé et le sourire en coin du colonel Sheppard.
-Très amusant Rodney ! Mais si c’est si simple que cela, pourquoi ne pas l’avoir dit plus tôt ?
-Parce que ce n’est malheureusement pas si simple. Nous ne pouvons pas détourner assez d’énergie pour avoir un bouclier suffisamment performant. Au mieux, il résistera quelques minutes.
-Merci, vous avez l’art d’annoncer les bonnes nouvelles.
-La bonne nouvelle c’est justement que j’ai là de quoi booster un peu le bouclier de notre jumper.
-Qu’est-ce que c’est ?
McKay est rayonnant. Il exhibe son trophée comme un gamin ayant subtilisé la page centrale d’un playboy.
-Un souvenir que j’ai fauché à la porte. Un petit réacteur à Naquadah.
***
Le colonel Steven Caldwell est particulièrement attentif aux relevés que lui communique régulièrement le docteur Novak. Il y a beaucoup d’agitation sous cet océan. Les perturbations créés par le champ électromagnétique sont depuis peu instables et laissent filtrer quelques données intéressantes.
Ils perçoivent bien la présence d’ondes qui pourraient parfaitement être générées par une porte des étoiles, mais aucunes traces du jumper ou de quelques présences vivantes.
Caldwell est néanmoins optimiste. En de maintes reprises le colonel Sheppard lui a prouvé qu’il savait se sortir des pires situations. Caldwell ne porte pas particulièrement le soldat Atlante dans son cœur. Même si Sheppard est un bon militaire et globalement un très bon stratège, le colonel Caldwell ne digère pas totalement s’être fait souffler sous le nez la place de chef militaire d’Atlantis. Cette rancœur a été dernièrement mauvaise conseillère (Fanfic : Autres) et le colonel garde un goût amer de cette mésaventure. A deux doigts d’être pris en faute devant son équipage et devant le personnel d’Atlantis, il aurait pu être rétrogradé et quitter définitivement ses rêves de promotion. Il a déjà été difficile pour lui de réimposer le respect après sa possession alien, une telle gaffe aurait été la goutte en trop. Mais le temps a passé et grâce à l’intelligence d’Elisabeth Weir, son honneur est resté sauf.
Caldwell voudrait tirer un trait sur tout cela et l’occasion de revenir en héros dans la cité des Anciens est trop belle.
Le colonel est extrait de ses pensées par un appel de Novak.
-Colonel, Hermiod capte énormément de fuite d’énergie en provenance de la zone. Pour l’instant aucun signe du jumper, mais nous sommes prêt à intervenir à l’instant où il apparaîtra.
-Bien. Opérateur radio, mettez-moi en relation avec le commandant du DDG 85.
Plusieurs centaines de mètres sous le Deadale, un destroyer américain attend des instructions. Envoyés par les pontes du Pentagone, les militaires du navire doivent repêcher tout ce qui sera récupérable. Les pauvres marins sont bien en peine. D’une part ils ignorent tout de la nature du matériel à rechercher, d’autre part sonars, radars et autres appareils de détection sont définitivement muets.
Le commandant du vaisseau de guerre est un vieux baroudeur ayant à peu près tout vu, du moins le croit-il.
-Colonel Caldwell. Je suis ravi de vous entendre. On m’a demandé de vous rejoindre et d’attendre vos directives, mais je n’ai nulle trace de votre présence. Où êtes-vous donc ?
- Pas loin, amiral Block…mais nous disposons d’un vaisseau furtif.
-Quel genre ?
-Secret défense ! Amiral, je vous contact car nous enregistrons de fortes turbulences dans les fonds marins et il n’est pas exclus que des objets remontent à la surface. J’aimerais que vous les récupériez.
-Si je comprends bien, vous nous avez fait venir pour une mission de récupération et non de sauvetage.
-Un peu des deux, amiral. Il est possible que des hommes soient prisonniers de ces structures.
-Quelles genres de structures?
-N’importe, même et surtout celles qui vous semble étranges.
-Attendez, je…
-Le reste est secret défense, désolé amiral.
Caldwell coupe la discussion. Moucher un amiral de la Navy a toujours un petit côté jubilatoire. Etre dans le secret des Dieux est particulièrement gratifiant, mais lorsque personne sur Terre n’est au courant, et que l’on se retrouve régulièrement au mess avec des ignares arrogants…
Une petite vengeance douce et pas bien méchante, pense le colonel en son fort intérieur.
***
-Docteur Weir, vous devriez venir au laboratoire.
L’appel provient du major Lorne. Lorsqu’Elisabeth le rejoint, Evan et Ronon sont toujours scotchés à la vidéosurveillance de la porte aquatique. Lorne ne laisse pas le temps à Elisabeth de le questionner. Il l’attrape par le bras et l’attire vers l’écran.
-Il y a de l’agitation là-dessous. La porte semble toujours inactive mais des voyants se sont allumés et clignotent sporadiquement. Il va se passer quelque chose. Docteur Weir, j’aimerais y retourner.
-…
-Je vous promets de me sauvez illico presto si je capte le moindre signal suspect.
-…
-Ronon va m’accompagner.
Elisabeth ne répond pas de suite. Ayant eu la parole coupée à deux reprises, elle attend d’être certaine de l’attention qu’on lui porte. Elle jette un regard amusé au guerrier de Pégase.
-Vous voulez partir avec le major Lorne ?
-Oui. Ici je ne sers à rien et j’aimerais voir cette porte de plus près. Peut-être y verrais-je des signes qui ne vous évoquent rien, à vous autres Terriens.
Le docteur Weir ne relève pas la remarque acerbe d’impuissance et accède à leur requête.
-Bien, mais ne vous en approchez pas de trop. Entendu ?
La question tombe dans le vide. Le major Lorne et Ronon sont déjà partis. Une réponse collective parvient tout de même à Elisabeth mais elle est étouffée par la distance.
-On essayera !
***
Un énorme bruit sourd résonne dans le jumper. Le bouclier vient de céder et le plafond aquatique semble s’effondrer sur tout ce qui restait encore intact. Une forte poussée propulse le vaisseau vers le fond de l’océan et malgré les inhibiteurs inertiels, Sheppard et McKay perdent aussitôt connaissance.
Le jumper descend lentement et se pose comme une feuille morte sur le fond marin. Dans l’habitacle, deux corps gisent, inertes. Le souffle silencieux de leur respiration fait buller le sang qui s’écoule de leur nez.
Sous l’océan le calme règne en maître. Au-dessus de leur tête, la dépression d’eau a créé la tourmente. John et Rodney dorment, inconscients du drame qui se joue loin au-dessus du ciel de mer.
***
Ronon et Evan s’approchent de la porte. Une multitude de voyant clignote à un rythme aléatoire. Subitement le jumper semble se mettre en phase avec le tumulte visuel. Un, puis deux voyants s’activent. Si le major Lorne n’avait pas sombré dans un profond sommeil hypnotique, il aurait sans doute reconnu les signes avant-coureurs d’une transmission psychique via le jumper. Ronon quant à lui, n’a pas réalisé que le jumper et les commandes de la porte s’étaient connectées. Il examine abasourdit l’étrange tableau.
-Etait-ce ainsi à votre première approche ?
L’absence de réponse du major Lorne lui donne l’occasion de visualiser ce que peut-être le fardeau d’avoir de l’ADN Ancien. Non sensible aux ondes émises par le jumper et le programme de la porte, Ronon ne peut qu’être spectateur.
Le major Lorne est affalé sur le tableau de bord du petit vaisseau. Ses mouvements oculaires ne laissent aucun doute quand à la nature de son sommeil. Ronon a déjà vu cela auparavant et n’en garde pas un souvenir particulièrement heureux (Fanfic : La tombe).
Ce qu’il découvre en revanche, c’est l’imagerie qui va avec le songe.
Des séquences ultra rapides d’images apparaissent sur l’écran holographique du jumper. Des formes et des couleurs si fugaces, que Ronon ne peut en saisir la nature.
Du bleu… la mer pense aussitôt Ronon.
Du rouge… serait-ce du sang ?
Et du blanc…
Ronon ne peut qu’attendre.
***
Depuis le départ du major Lorne, Elisabeth ne peut se défaire d’un sentiment de danger immédiat. La tension accumulée ces derniers mois et la culpabilité qui l’assaille depuis l’expérience « Michael » l’ont énormément fragilisée, bien plus qu’elle ne l’imaginait. Lorsque toute cette histoire sera finie, elle s’octroiera un repos bien mérité.
Dans l’attente de ce répit salutaire, le docteur Weir doit gérer au mieux la situation de crise. Elle aimerait contacter la Terre mais cela ne ferait que gêner SGC dans ses manœuvres. Etre le chef d’une expédition comme Atlantis requière aussi du sang froid. Cependant le détachement que l’on attend d’elle lui donne l’impression parfois d’être déshumanisée.
Le docteur Zelenka n’a pas quitté sa console depuis le début de l’aventure.
Le nez plongé au plus profond de la mémoire des Anciens, le scientifique dissèque la moindre donnée. Aussi lorsque celle-ci lui semble importante, c’est avec délectation qu’il la partage avec le docteur Weir… Et si possible, pas en Tchèque.
-Je pense avoir enfin déniché une explication à tout ceci. Les Anciens avaient conscience qu’un jour futur les Oris referaient leur apparitions. Certains parmi les plus grands chercheurs ont demandé à pouvoir étudier toutes les technologies existantes et les confronter les unes aux autres dans l’espoir de pouvoir rivaliser avec la technologie des Oris. Je ne saisis pas tout mais il semble qu’un problème éthique se soit posé mais qu’il ait été levé au vu du rapport bénéfice/sacrifice… Bon là je pense que cette partie, vous la traduirez bien mieux que moi.
Bref, les recherches ont commencé sur la Terre où fut installé le laboratoire. Lorsque les Anciens se sont sauvés vers la galaxie de Pégase, l’expérience a été mise en veille.
-Pourtant la porte aquatique était parfaitement opérationnelle ?
-Oui, il semblerait qu’ils aient relancé le programme à l’apparition des wraiths. Sans doute ont-ils, tout comme nous, été incapable de passer outre le bouclier des vaisseaux ruches. N’oublions pas que l’expérience avait pour but de maîtriser la téléportation au sein d’un vaisseau ennemi, quelqu’il soit.
-Quand même, je trouve le procédé assez disproportionné. Et pourquoi ne l’ont-ils pas arrêté à leur départ ?
-En fait, il semblerait que cela aurait dû être le cas, mais j’ignore comment.
-Bon, on traduira tout cela plus tard. Y a-t-il les coordonnées exactes du laboratoire terrien ?
-Oui, les voila…Non attendez !
-Qu’est-ce qui se passe ?
-Il y a un virus. Tout se détruit, je n’ai pas le temps d’enregistrer la moindre donnée. Ca va trop vite. Stop !!!
Elisabeth regarde médusée le scientifique qui s’acharne sur l’écran.
Tout ce que celui-ci montre, c’est une série de chiffres et de lettres qui apparaissent et disparaissent avec une vélocité que l’œil humain ne peut suivre.
Aussi rapidement qu’elle était apparue, la frénésie virtuelle s’interrompt, ne laissant plus qu’un écran vierge de tout symbole.
Le docteur Zelenka est abasourdi.
-Un virus. Il y avait un virus. Voila comment les Anciens comptaient stopper l’expérience. Il y avait un système d’autodestruction.
-Et qu’est-ce qui a lancé le programme ?
-Je l’ignore.
Elisabeth Weir garde le silence avant d’émettre une hypothèse peu rassurante.
-Lorne !
***
Le major Lorne nage dans une eau glaciale. Le froid le brûle avec violence. D’un geste désespéré il tend le bras vers le ciel. Une main s’agrippe à lui et le hisse en hauteur, le sortant des eaux troubles.
McKay ne le lâche pas.
-Courez, vite on s’enfonce !
Sans se poser plus de question, poussé par les remous de l’eau qui s’agite frénétiquement derrière lui, le major Lorne court à en perdre haleine.
Il court sur le pont d’un immense paquebot qui s’enfonce inexorablement dans la mer. Le navire se verticalise brusquement, faisant sombrer tous ce qui n’était pas bien amarrés.
Lorne regarde les formes qui disparaissent dans l’océan déchaîné. Elles ressemblent à des ombres fantomatiques qui en pénétrant dans l’eau laissent à la surface leur drapé blanc. L’eau devient diaphane. L’épais tapis d’ectoplasmes blancs dissimule le bleu de l’océan et lui donne une structure tout en relief.
Un blanc façonné de glaces tranchantes et assassines. Un iceberg qui éperonne le paquebot sans aucune pitié.
McKay n’a pas lâché la main du major. Ensemble ils grimpent jusqu’au sommet du navire. Rodney y marque un temps d’arrêt puis saute dans le vide, entraînant dans sa chute un pauvre major hurlant de terreur.
Sa vue se brouille.
Il est au sec dans une petite bulle d’air qui cherche à gagner la surface.
Merci Archimède !
La bulle se cogne soudain à une petite couche de glace. Au-dessus de sa tête se joue un match de hockey sur glace. Malgré les suppliques du major, personne ne semble deviner sa présence. Le match se joue comme si de rien n’était. Le match se joue de lui.
Lorne reconnaît aussitôt le docteur McKay, aux couleurs du Canada, qui fait danser agilement le palet d’une caresse de sa crosse. Face à lui, le colonel Sheppard exhibe fièrement le drapeau américain. Il est le gardien de son équipe. Son visage est caché derrière un affreux masque rouge sang. McKay pousse rageusement le palet. Celui-ci vole vers la cage et y pénètre dans une explosion de joie.
L’explosion est plus visuelle que sonore. Tout semble se désintégrer derrière les pupilles du major.
Lorne pousse un cri et se réveille en sursaut. Cette fois-ci, il reconnaît aussitôt les stigmates du cauchemar induit. Céphalées, nausées et sensation de profonde déprime.
Il se tourne vers Ronon.
-Je crois qu’il est trop tard.
Comme pour confirmer ses sombres propos, tous les voyants de la porte s’illuminent d’un coup puis un souffle repousse violement le jumper. Lorsque celui-ci se stabilise, Ronon et Evan découvrent stupéfaits que la porte s’est effondrée, dispersant au gré des courants, des morceaux de sa charpente.
Lorne remonte rapidement vers la surface.
-Docteur Weir, ici le major Lorne. La porte s’est autodétruite !
***
Sheppard se réveille le premier. McKay ronfle doucement sur le plancher du jumper. Un regard circulaire lui apprend qu’il ne reste rien de l’expérience des Anciens. Les épaves ont été désintégrées par l’intense pression de l’eau et la porte, ainsi que les diverses tableaux de commandes, ne sont plus que partiellement reconnaissables. De nombreux débris remontent doucement vers la surface. Le colonel Sheppard admire le paysage de désolation avec beaucoup de respect.
Tant de pertes humaines et sans doute aliennes pour aboutir là. La tristesse qui l’accable ne l’empêche pas d’être conscient du danger, toujours présent au-dessus d’eux. Des milliards de tonnes d’eau qui n’attendent qu’une chose, les écraser de leurs masses.
Sheppard se met donc aux commandes du jumper et entame la lente et salvatrice remontée.
***
-Commandant, l’amiral Block nous fait savoir qu’ils sont actuellement en train de repêcher de très nombreuses structures métalliques mais qu’il n’y a aucune trace de nos hommes, vivants ou morts.
-Merci lieutenant.
Depuis plus d’une heure des débris remontent à la surface, mais rien ne laisse présager un dénouement heureux.
Soudain Novak contact le colonel Caldwell.
-Commandant, Hermiod a repéré une structure dont la résonance serait bien de nature ancienne. Sa masse paraît légèrement inférieure à celle d’un jumper mais au regard de la faible qualité de nos enregistrements, cela pourrait fort bien être ce que l’on recherche.
-Parfait ! Dès que possible, téléportez-le sur le pont.
-Bien commandant. D’après Hermiod se sera fait dans quinze secondes.
Dix…
***
La couleur de l’eau s’éclaircit, traduisant la proximité de la surface. Même si elle n’est que visuelle, la clarté du soleil réchauffe le colonel Sheppard. Il regarde les mètres le séparant de la surface diminuer avec l’oeil pétillant de l’enfant en extase devant une monstrueuse pâtisserie. Derrière lui un grognement traduit le réveil de McKay.
-Où sommes-nous ?
-Bientôt à l’air libre.
-Mon bidouillage a marché alors?
Sheppard rit de l’innocence de Rodney.
-Ben sinon, on ne serait plus là. Par contre le jumper fonctionne vraiment à capacité réduite. Je peux juste le faire remonter. Il ne faut pas m’en demander plus.
-Personnellement, je m’en contenterai largement.
-Je me disais aussi…
Tout deux se regardent avec un sourire complice quand une étrange sensation secoue le jumper.
***
-Cinq secondes…
Téléportation achevée.
Novak a égrainé les secondes comme une machine bien huilée, mais au fond d’elle-même un nœud s’est fortement serré.
Elle a travaillé à plusieurs reprises avec le docteur McKay et malgré sa haute opinion de lui-même, c’est un homme charmant qu’elle a en grande estime. D’autant plus grande que Rodney ne se privait pas d’argumenter avec Hermiod, donnant un peu de baume au cœur de l’humaine soumise qu’elle était parfois face au Asgard.
Sur le pont de Deadale, une silhouette métallique s’est matérialisée… les restes d’une petite porte des étoiles.