Huis-clos...trophobie
Chapitre quatre
Ombres et fantômes
McKay est fasciné par la sphère d’où émane l’intense lumière téléporteuse. Celle-ci est prisonnière d’un écrin dont la matière lui paraît inconnue. N’osant la quitter des yeux, il progresse lentement vers les tableaux de commandes. Ces derniers sont plus familiers à McKay et cela le rassure. Il quitte aussitôt l’œil inquisiteur pour se pencher sur ce qu’il pourrait apprendre des ordinateurs, habituellement assez bavards en sa présence.
Avec tout le savoir faire dont il a le secret, il fait parler les données informatiques, apprenant d’abord que ce sinistre lieu est bien l’œuvre des Anciens et ensuite…qu’ils sont fichtrement mal barrés !
***
Le major Lorne se sent vraiment mal. Son estomac se contorsionne dans tous les sens, le secouant de spasmes douloureux. Son front ruisselle d’une sueur froide et piquante. Les yeux embués par des larmes qu’il ne se souvient pas avoir laissé couler, le major reprend peu à peu conscience de sa présence dans le jumper et non dans l’antre du cyclope.
Un goût amer lui reste néanmoins dans la bouche lorsqu’il quitte le hangar pour rejoindre les équipes qui s’attèlent à retrouver le colonel Sheppard et le docteur McKay. Il avance d’un pas rapide, espérant trouver auprès d’eux des solutions et des réponses autres que celles de son cauchemar.
La traversée des couloirs d’Atlantis lui semble particulièrement sinistre. Ses lugubres songes ont laissé en lui une petite trace, comme la peur d’un évènement prémonitoire. Evan tente désespérément de quitter cette crainte mais le regard unique du cyclope le hante. Il frissonne toujours lorsqu’il rejoint les docteurs Weir et Zelenka.
Tous deux sont scotchés à leur ordinateur et ne semblent pas avoir perçu sa présence. Lorne s’avance doucement, à pas de loup, de crainte d’interrompre leurs réflexions. Zelenka est plus ébouriffé que jamais. Les cheveux indomptables sur les yeux, il pianote frénétiquement sur son clavier. Quelques brides de mots lui échappent, comme le témoignage de pensées intimes. Le major tend l’oreille mais les syllabes s’entrecroisent sans aucun sens. Par habitude, Evan sait que lorsque le scientifique parle en tchèque, cela n’est pas bon signe. Le major Lorne se tourne alors vers le docteur Weir, pensant la trouver tout aussi plongée dans son ordinateur qu’à son entrée. A sa grande surprise, Elisabeth a quitté ses recherches et le regarde d’un œil qui serait presque amusé si la situation était autre.
-Vous cherchez quelque chose major Lorne ?
-J’aimerais bien madame, mais vous m’avez interdit d’utiliser les jumpers.
-Pour votre sécurité uniquement.
Evan ne peut cacher un petit sourire.
-Je pensais que pour retrouver le colonel Sheppard…
-Et bien vous pensiez mal major ! Le colonel est un grand garçon et il est responsable de ses actes. En aucun cas je ne mettrais en péril la vie de quelqu’un d’autre. Ce n’est pas la première fois que cette situation se produit et je suis certaine qu’il comprendrait.
-Oui mais normalement, c’est moi qui aurais dû accompagner le docteur McKay et s’il…
-Vous aussi Evan, devez assumer vos choix.
-Oui madame. En attendant puis-je vous être utile ?
Elisabeth farfouille dans le tas de paperasse qui s’étale sur son bureau et en sort une feuille qu’elle tend au militaire.
-Faites circuler cette feuille auprès de tout le personnel et des athosiens présents dans la cité. Si cela évoque quelque chose à quelqu’un, qu’importe ce que c’est, je veux en être informée.
-Bien madame.
Le major Lorne attrape la feuille et y jette machinalement un regard emprunt de curiosité. Sur le papier est imprimé un dessin stylisé, symbole de l’expérience ancienne. Le major Lorne blêmit aussitôt. Un militaire qui devient blanc comme un linge, cela ne passe guère inaperçu. Le docteur Weir se lève et soutient le major qui commence à perdre pied. Lorne est de nouveau couvert de sueur froide. Il lève les yeux vers Elisabeth mais n’arrive pas à émettre le moindre son. Celle-ci le fait promptement asseoir à sa place. Le major distingue à peine Elisabeth et Radek qui se penchent vers lui avec inquiétude. Il regarde la feuille entre ses doigts tremblants. Un losange avec en son centre un œil unique, celui du cyclope de son rêve. Evan ignore ce qui l’effraie le plus, le fait d’imaginer Sheppard et McKay réellement prisonniers de son cauchemar ou le fait d’être capable de les voir, tout simplement.
***
John ne sait plus très bien s’il est dans le réel ou s’il navigue dans les effluves d’un cauchemar. Il n’a pas ouvert les yeux car il perçoit très bien l’obscurité qui l’entoure. Un froid intense le paralyse, comme s’il était pris dans une congère. Le sol lui semble dur comme de la pierre, loin du confort de son lit. Le colonel s’étire doucement, espérant réveiller son corps et son esprit mais cela n’a pour effet que de ranimer une douleur qu’il avait vainement tenté de nier. Parfaitement convaincu malheureusement de ne pas être la proie d’un vilain songe, il se force à ouvrir les yeux et à affronter la réalité.
La première chose qui l’accueille est évidement le noir intense, tout aussi saisissant que la brûlure du froid glacial. La seconde perception est celle de la morsure qui continue de mâchouiller sadiquement sa cheville. Sheppard tente de bouger son pied, mais malgré sa prudence, le petit mouvement déclenche aussitôt une souffrance qu’il n’imaginait pas. Le colonel respire profondément en se laissant aller sur le dos, bras écartés loin du lui.
Tout son corps est baigné de transpiration, majorant de fait son refroidissement et l’engourdissement qui en résulte. Toujours dos à plat contre le sol, Sheppard glisse une main dans l’une des multiples poches de sa tenue et en sort un petit Zippo au motif du chat noir de la butte Montmartre. Un souvenir de jeunesse qui pourrait bien lui être utile. Un petit glissement du doigt et la flamme jaillit, éclairant la cale d’une étrange aura. Sheppard regarde la petite flammèche danser et les ombres qu’elle projette contre les parois. Leurs concavités donnent l’illusion d’arabesques dont la fluidité hypnotise presque le colonel. De fait, il utilise ces formes afin de distraire son esprit de la douleur qui risquerait de le paralyser le moment venu. Lorsque celui-ci semble adéquat, le colonel jette un œil furtif sur sa jambe et ce qui l’enserre. Un rire d’abord rauque et sonore puis plus geignard et saccadé sort de sa gorge sans qu’il ne puisse le retenir.
-Un piège à loup ! Me voilà fait comme un rat.
Doucement, en prenant bien soin de ne pas bouger sa cheville, Sheppard se redresse tout en pliant légèrement ses genoux, pour arriver à hauteur du piège. L’engin de torture avait sans doute pour but d’éloigner des vauriens d’une cale où s’entassait trésors d’or et de diamants…ou plus vraisemblablement d’éviter que les marins ne se saoulent discrètement.
Les deux mâchoires ferriques sont usées par une épaisse couche de rouille.
-Me v’là bon pour un rappel anti-tétanique.
L’usure du temps, de l’eau et de l’humidité a grippé le mécanisme qui par chance n’a pas fonctionné avec toute sa force de frappe. Une chance sinon il y aurait deux morceaux de John Sheppard dans la soute du vaisseau. John imagine sa silhouette couchée, inerte et livide et la petite forme à côté, posée comme un pied de nez ! Sheppard rit de plus belle à cette ridicule évocation.
Une fois passé le cap de la surprise et du fou-rire nerveux en ayant résulté, le colonel décide de prendre les choses en main et d’agir. Grâce au faible éclairage que lui procure son briquet, il découvre rapidement l’outil qui lui sera nécessaire. Un morceau de ferraille idéal pour faire levier et jouer le rôle du pied de biche. Sheppard pose son Zippo près de lui et défait la chaussure qui enveloppe son pied meurtri. Après une rapide recherche visuelle sans aucun résultat, il glisse une main dans sa combinaison et en sort hésitant son Beretta M92. Le colonel regarde son arme de poing comme s’il la voyait pour la première fois. D’une certaine façon, c’est bien la première fois qu’il envisage une telle utilisation de son pistolet. Il vérifie que la sécurité est bien enclenchée et prend la crosse entre ses dents. Sans attendre davantage il glisse la barre métallique entre les deux mâchoires du piège et exerce une pression sur le mécanisme. Celui-ci tarde à réagir puis dans un grincement lugubre fini par bouger et finalement céder. La pression se relâche légèrement, juste assez pour laisser le pied s’extirper de son étau. Sheppard serre férocement les dents alors qu’il retire son pied qui racle méchamment les dents de fer au passage. La sueur qui coule sur ses tempes et dans son dos n’est plus froide et piquante mais chaude et désagréable. L’effort lui paraît surréaliste face au peu de centimètres parcourus. Cependant, lorsque la pointe de son pied apparaît au-dessus de la gueule béante du piège, c’est avec soulagement qu’il relâche la pression qu’il exerçait sur le levier. Erreur de débutant. La mâchoire claque avec tant de violence qu’elle entraîne avec elle le levier et le bras de Sheppard. Ce dernier, emporté par le mouvement, bascule sur le côté, évitant de peu de se retrouver le bras pris dans le piège. Le sang affluant de nouveau dans sa cheville redonne vie au membre agonisant et à la souffrance qui y faisait son lit. Etalé sur le flanc, le colonel Sheppard lâche la crosse de son arme. Une rangée de dent s’y est imprimée, mais ce n’est que bien plus tard qu’il le découvrira. Pour le moment, John Sheppard est au pays où les rêves ne sont ni bleus ni heureux, mais ont au moins le mérite d’être indolores.
***
Si la colère était une couleur, celle du docteur McKay serait le noir rougit de la braise incandescente. Plus il décortique les données en sa possession, plus la situation lui semble grotesque. Un piège vieux comme le monde, oublié de tous et surtout des Anciens. Un piège qui continue de semer la mort au hasard des galaxies. La magnificence des Anciens est exposée sous cette cloche d’énergie. Aucune limite dans leur pouvoir, aucune limite et aucune déontologie autre que pour eux-mêmes.
-Ne pas intervenir dans l’évolution des espèces ! Hum !
Le scientifique est furieux.
-Mouais ! On ne se mêle pas des affaires des autres, mais dans notre propre intérêt nous ferons une petite exception.
Le ton est sarcastique et traduit tout le dégoût que lui inspire l’expérience dont il est le jouet.
***
-Et vous dites que Rodney escaladait quoi ?
Le ton ironique de Zelenka n’échappe à personne. Le tchèque est penché sur le major Lorne comme si les paroles de ce dernier soulageaient un besoin vital. Les yeux de Radek ne sont plus que deux fentes ornementées de petites rides plissées qui brillent avec avidité.
Si le scientifique voit dans les propos du militaire matière à plaisanter, ce n’est pas le cas d’Elisabeth Weir, loin de là. D’un ton qui ne laisse aucune place à la réplique, elle interrompt le scientifique. Le docteur Carson Becket est également de la partie depuis qu’Elisabeth lui a demandé de vérifier l’état de santé du major. Elisabeth parait prendre particulièrement au sérieux le rêve d’Evan.
-En tant que médecin qu’en pensez-vous Carson ?
-Le major Lorne est en excellente condition physique. Et comme vous me demandez mon avis, j’ajouterai que ces derniers temps, c’était loin d’être le cas du colonel Sheppard.
Si la réponse avait pour but de culpabiliser Elisabeth, c’est raté. En revanche le major Lorne prend la remarque du médecin comme une claque en pleine figure.
-Je sais que je n’aurais jamais du supplier le colonel de me remplacer, mais…
Il termine sa phrase tout en regardant ses chaussures.
-…mais je n’ai pas eu besoin d’insister beaucoup.
Le major Lorne s’avachit dans son fauteuil, écrasé par le poids de la culpabilité.
Dans un grand fracas, une pluie de feuilles et de croquis tombe au pied du militaire. Sidéré, il lève les yeux vers le point de mire de tous les regards. Elisabeth Weir a ses deux poings crispés sur le bureau.
-Bon cela suffit maintenant ! Major redressez-vous bon sang !
Docteur Beckett, docteur Zelenka, avez-vous une explication logique à tout cela ?
Une cacophonie insupportable fait suite à cette question.
Zelenka tente d’expliquer que cela ne résulte que du hasard alors que Beckett essaye de faire une analogie avec les transes du colonel Sheppard lors de son périple souterrain. (cf fanfic « La tombe »)
-STOP !!!
De nouveau le silence et les regards. Elisabeth pousse un terrible soupir.
-Je ne comprends pas bien le rapport Carson ?
- Les cauchemars du colonel étaient induits par des impulsions électriques qui agissaient directement sur les connections neuronales du colonel.
Elisabeth fait un signe de main appelant le médecin à poursuivre mais surtout à abréger.
C’est Zelenka qui prend la relève et conclue les pensées du docteur.
-C’est exact ! On aurait dû y penser avant. C’est vraiment bête, je…
Le regard assassin du docteur Weir écourte aussitôt les divagations du scientifique. Celui-ci poursuit donc son explication sans plus de commentaires.
-N’ayant personne sur place lors de leurs expériences, les Anciens devaient forcément avoir un moyen de contrôler de visu leurs déroulements. Le jumper répond aux impulsions psychiques du pilote. On peut parfaitement supposer que le processus est réversible et qu’un programme peut ainsi être transmis au pilote via le jumper.
Elisabeth semble étonnée.
-C’est vraiment possible ?
Zelenka hausse les épaules en un geste d’impuissance.
-Plus nous apprenons des Anciens et plus on a le sentiment de régresser. J’ignore si c’est possible mais c’est ce qui se rapproche le plus d’une explication logique.
Lorne quant à lui, est partagé entre le soulagement et l’inquiétude.
-Donc, je ne suis pas extralucide c’est déjà rassurant, mais pourquoi projeter les informations sous forme de cauchemar ?
- Je pense plutôt que c’est votre cerveau limité qui n’a pas su interpréter les renseignements correctement.
Zelenka sourit à pleines dents en poursuivant sa phrase.
-Vous avez fait ce que vous avez pu major Lorne.
Voyant apparaître un éclair de rage dans le regard du militaire, le scientifique s’empresse de temporiser sa remarque acerbe.
-Nous n’avons pas les mêmes capacités que les Anciens, c’est bien regrettable, mais c’est un fait. Votre cerveau a utilisé des données en sa possession pour retranscrire les images psychiques du colonel et de Rodney. Je pencherai pour l’Iliade, non ?
-Hum…oui. Avec un mélange de Rabelais pour le côté glouton du géant.
Elisabeth secoue doucement la tête en un geste de grande lassitude. Décidément ces hommes sont vraiment de grands enfants parfois.
-Messieurs, quand vous aurez fini de supputez, on pourra peut-être tenter d’y voir plus clair. Radek, vous avez dit que les Anciens n’étaient pas sur place lors des expériences, c’est bien cela ?
-Oui. Mais ils avaient sans doute une ribambelle d’ordinateurs pour leur transmettre, si ce n’est des images, au moins des données informatiques.
-Pourquoi pas une caméra, ça me parait bien plus exploitable et plus facile d’accès?
-Peut-être même trop justement.
-…
-D’abord parce que l’image aurai pu être interceptée par des non-initiés, ensuite…parce que je ne sais pas tout docteur Weir !
Elisabeth Weir ponctue le dialogue d’une phrase chuchotée pour elle-même.
-Mais qu’est-ce qu’ils testaient bon sang ?
Zelenka devient subitement écarlate.
-Ha, parce que je ne vous l’ai pas dit ?
***
Rodney est perplexe. L’étude des ordinateurs lui a donné matière à s’inquiéter. Le faisceau, la porte, le bouclier, tout ce qui nécessite de l’énergie fonctionnent grâce à une machine très complexe plongeant dans le magma de la Terre.
L’équipe d’Atlantis avait déjà connu ce type de fonctionnement, non basé sur des E2PZ mais sur l’énergie géothermique de la planète. Cette aventure les avait plongés au cœur d’un volcan, près de la chambre magmatique.
Mais la situation présente est bien différente. Ils ne sont pas dans un méga volcan mais sur une dorsale océanique d’où s’écoule du magma, refroidi et cristallisé. McKay sait qu’à l’inverse de l’océan Pacifique, où la vitesse d’expulsion du magma est rapide (17cm/an), dans le Pacifique, elle œuvre au rythme de 2 centimètres par an. Une telle progression est certes faible à l’échelle d’une vie humaine, mais pour cette construction qui date de plusieurs millénaires, elle est incroyable. Pour McKay il y a des conséquences inquiétantes à ce mécanisme immuable de la croûte terrestre.
La faible vitesse d’expansion a créé une vallée axiale de plus de dix kilomètres de large et de presque deux kilomètres de profondeur. Le bouclier est donc prisonnier d’un rift bien plus profond qu’il ne l’était à l’époque de l’expérience. De plus, les mouvements des fonds marins ont étiré et malmené les appareillages des Anciens qui ne sont quasiment plus en contact avec la dorsale et le magma. Le fonctionnement récent de la porte et du faisceau a largement pompé dans les réserves. Cependant celles-ci sont encore suffisantes pour de nombreuses années et ce n’est pas ce qui tourmente le plus le scientifique. McKay s’interroge quand à la conduite à tenir. Détruire l’œil est une priorité absolue afin de retrouver le colonel et de se mouvoir en toute sécurité. Mais il a beau tourner les solutions dans tous les sens, il ne trouve pas comment désactiver l’œil sans arrêter l’alimentation géothermique…ce qui signerait leur arrêt de mort.
McKay est plongé dans ses réflexions quand une ombre le fait sursauter. Il se retourne, souriant.
-John, c’est vous ?
Seul le silence répond à son sourire.
Depuis son arrivée près de la porte le scientifique a la désagréable impression d’être observé. Son sentiment ne repose sur aucun élément concret et son esprit cartésien le sermonne, mais la sensation est persistante. Son regard se pose sur les vestiges autour de lui. Certains sont si vieux qu’ils feraient le bonheur d’un archéologue. McKay pense immédiatement à Daniel Jackson, l’imaginant comme un enfant dans la caverne d’Ali Baba, farfouillant de droite à gauche, les lunettes encrassées par la poussière et les cheveux ébouriffés. Cette évocation le rassure temporairement car dès que son regard se porte sur des bateaux ou des avions, c’est l’image de fantômes de marins ou d’aviateurs qui s’ancre dans son esprit.
D’un mouvement brusque de la tête, il chasse les spectres qui hantent les lieux et se concentre sur la sphère.
-Comment détruire cet engin ?
-Je ne sais pas, les Anciens ont oublié de laisser le mode d’emploie.
Le scientifique entame un dialogue avec lui-même. McKay utilise fréquemment cette technique qui dit-il, l’aide à se concentrer et à raisonner. Pourtant en l’occurrence cela l’aide essentiellement à canaliser sa peur et ses phobies qui tout doucement progressent en lui.
-Que ferait Sheppard ?
-Ha ! Lui, évidement, il prendrait son flingue et dégommerait tout ! Du boulot de militaire quoi !
-Et moi ?
-Et moi, je… oh et puis zut !
McKay plonge sa main dans sa combinaison et en sort le petit colt 19-11 que Sheppard lui a donné. Il met la sphère dans sa ligne de mire et tire sans plus réfléchir.
Le recul est puissant et le tireur inexpérimenté. McKay se retrouve assis par terre, un peu étourdi. Il lève les yeux et n’en revient pas.
-Ce n’est pas vrai ! Pour une fois la solution Sheppard était parfaite.
Aussitôt des voyants s’allument sur les divers écrans et tableaux de commandes. McKay se relève et examine les données.
-Je me disais aussi. C’était impossible qu’une idée à la Sheppard soit si simplement efficace. Voici le second effet Kisscool de Sheppard.
Le teint blafard et le front couvert de sueur, le scientifique regarde la jauge d’énergie chuter.
Derrière lui une ombre se profile. McKay la perçoit et se retourne de nouveau, pris de panique. Des auras blanchâtres semblent nager autour et au-dessus de lui. Oubliant l’alarme qui clignote frénétiquement, McKay se met à courir en quête de Sheppard et du jumper. Un bruit de tôle puis celui des claviers… quelqu’un l’a remplacé au pied de la porte.
***
La dernière marche est la plus difficile. Péniblement, Sheppard s’extrait de la carcasse de bois, retrouvant avec plaisir l’air aseptisé et métallique de la cloche sous-marine. Il s’étale sur le pont du navire, le dos contre le plancher et le regard perdu dans l’infinité de l’océan. Il reste ainsi plusieurs minutes, noyé dans le bleu de l’eau avant de réagir. Aucune onde n’est venue le frapper. McKay a donc réussi à désactiver le faisceau téléporteur. Sheppard se sent soulagé. Il n’avait aucune envie d’être de nouveau la proie de glacial rayon. De plus, cela signifie que McKay est en vie et avec lui l’espoir de trouver une sortie. Loin dans un angle de son champ de vision, un petit mouvement titille sa curiosité. Sheppard sursaute et y porte son attention. Rien que le silence, puis soudain un bruit bien reconnaissable pour le militaire. Celui du colt qu’il a donné à McKay.
Un coup.
Le colonel se questionne sur ce qui a bien pu motiver McKay au point qu’il sorte son arme. L’inquiétude n’est pourtant pas de mise car il sait que son ami est du genre plutôt prompt à tirer au moindre bruit suspect.
Un coup…puis un deuxième.
Cette fois-ci c’est bien de l’anxiété qui assaille le colonel. McKay ne tirerait pas pour rien à de multiple reprise. Une question tracasse le militaire. McKay sait-il que son chargeur ne contient que sept balles et qu’il en a déjà utilisé trois ?
Faisant fi de sa douleur et de sa démarche ridicule, Sheppard se met à courir aussi vite que possible vers le centre du bouclier. Il ignore qu’en réalité son ami Rodney McKay a tiré quatre fois… ne gardant en réserve que peu de coup face à son adversaire.
Sheppard court et courait encore s’il n’avait été arrêté en chemin par une vision extraordinaire en ce lieu. Extraordinaire et terrifiante.