Usual suspect

Chapitre 4 : One way or another

1646 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 01/09/2023 20:21

One way, or another, I'm gonna find ya

I'm gonna get ya, get ya, get ya, get ya


Une série de sanglots réguliers résonnèrent dans les toilettes du deuxième étage, puis cessèrent.

-Moui, c'est pas mal, se dit Mimi.

Flottant au-dessus des cabines, transparente et luminescente, l'adolescente fantomatique se mit alors à pousser un long râle, puis stoppa.

-Voilà qui est mieux, s'encouragea-t-elle.

Elle réfléchit en tapotant son index sur sa joue ronde. Critique, elle émit à haute voix l'hypothèse de mélanger les deux. Ce qu'elle fit, mêlant râles et sanglots. Avec un rire satisfait, elle ajouta, tel un chef d'orchestre :

-Plus de larmes maintenant !

La virtuose de complainte se lança alors dans une symphonie aérienne mêlant gémissements et lamentations, inondant ses lunettes et le carrelage des toilettes sous une pluie de larmes.

Elle s'essuya le nez du revers de la manche de son uniforme. Celle qui avait été un jour une élève se congratula, s'applaudissant entre ses rires satisfait.

-Oui, parfait ! Personne n'osera s'approcher de Mimi l'année prochaine !

Elle était reconnaissante de pouvoir hanter un lieu avec une telle acoustique. La ritournelle reprit de plus belle. Malheureusement, aux hoquets de Mimi se mêlèrent rapidement un caquètement parasite montant de l'une des cuvettes en contrebas.

Levant l'abattant en éclaboussant les parois d'une cabine, une forme sombre émergea en ligne droite depuis la cuvette sous l'éternelle adolescente avec une vélocité telle que Mimi était encore en pleine vocalise lorsque la chose la saisie par la cheville.

-Boutonneuse ! Boutonneuse ! Hurlait la voix désagréable de la créature.

D'un mouvement brusque, la forme poussa la fillette dans les remous de la cuvette, enfonçant sans peine la forme spectrale.

-J'espère que tu sais nager, Mimi!

S'ensuivit un mauvais ricanement puis Peeves tira la chasse.



Les casseurs de fantômes avaient finis par s'habituer aux tableaux vivants qui décoraient les murs de Poudlard. Les personnages qui habitaient ses étranges œuvres d'arts n'étaient pas tous avenants, mais ils étaient, dans l'ensemble, de bons guides. L'équipe avait tout de même l'impression que certaines peintures représentaient plusieurs fois les mêmes protagonistes. Ils auraient en effet pu jurer, par exemple, que le même petit chevalier était représenté dans de nombreux décors.

Après s'être retrouvés et concertés, les Ghostbusters empruntèrent donc le chemin du deuxième étage. La cage d'escalier était digne d'une gravure d'Escher tant les escaliers semblaient se croiser, s'entre-croiser ou même ne mener nulle part. Venkman subissait plus durement le décalage horaire et la longueur de cette nuit anglaise que ses amis.

-Avec une bicoque de cette taille, ils peuvent pas faire installer un foutu ascenseur? Se plaignit-il.

Étrangement, l'une des composantes les plus pénibles de leur travail étaient les escaliers. En effet, les immeubles New-yorkais étaient souvent mal entretenus, les ascenseurs souvent à l'arrêt et les chasseurs de spectres appréhendaient toujours de monter les étages avec leurs lourds bardas.

Une fois le deuxième étage atteint, Venkman, en queue de peloton, se laissa tomber sur la dernière marche, tournant le dos à ses collègues en plein débat. Il appuya sa joue contre la rambarde de pierre puis ferma les yeux. Il émana rapidement de lui un léger ronflement.

Egon infligeait de violentes secousses à son PkE qui refusait toujours d'indiquer une lecture claire de la situation.

Penché par-dessus le garde-corps, Winston contemplait le vide :

-On est bien certain d'être au deuxième étage ?

Spengler perdait patience.

-Oui, mais reste à savoir dans quelle direction se trouvent les commodités.

Raymond était moins perturbé par l'exubérante étrangetée des lieux. Il se posta devant un cadre représentant une jeune femme assise devant une coiffeuse, dont le miroir reflétait son visage angélique mais sévère. Elle s'affairait à libérer ses longs cheveux bouclés d'une meute de bigoudis. Ray toussota pour signifier sa présence. Engoncée dans sa robe Victorienne de soie rose, la coquette ne se retourna pas. Dans le reflet, ses yeux lançaient des éclairs. Raymond tenta tout de même :

-Je suis navré de vous déranger Madame, sauriez-vous m'indiquer la direction des toilettes pour dames ?

Outré, le reflet refusa :

-Il n'est pas convenable pour un gentleman de se rendre aux lieux d'aisance réservés aux dames.

-Justement… Ray chercha le mot juste : Milady ?

Pas de réaction. Il reprit :

-Un… Maraud doit en être sorti scéance tenante.

La coquette leva le menton :

-Je ne veux rien savoir.

Rageuse, elle fit pivoter le miroir sur son axe, le retournant complètement, laissant Raymond avec son abondante chevelure pour seule interlocutrice. Le solide Ghostbuster abandonna rapidement.

Lorsqu'il rejoignit Zeddemore et Spengler, ils étaient toujours contrariés du peu d'entrain de leur appareil. Fatigué, Winston pointa Stantz du doigt :

-Pourquoi il a fallu que tu casses la toupie magique, Ray?

Celui-ci haussa les épaules et ne trouva rien de mieux pour sa défense que :

-Quoi qu'il en soit, elle ne donnait pas plus de résultats que le PKE... Sûrement un attrape-nigauds pour touristes...

Il écarquilla soudain les yeux, paniqué :

-Les mecs ? Où est Venkman ?

En lieu et place de l'escalier se trouvait désormais une ouverture béante sur le vide. Chacun appela Pete en direction des couloirs, cherchant derrière les tentures ou penché au-dessus de la cage d'escalier sans fin. La réponse leur parvint en écho depuis les hauteurs :

-Mais bordel ! Pourquoi vous êtes redescendu ?!

Venkman était appuyé sur la rambarde de son escalier, quelques étages plus haut, fusillant Stantz du regard. La tête de Winston apparue ensuite :

-Mais pourquoi toi, tu es monté là-haut ?!

Spengler soupira. Remonta ses lunettes de l'index, et, grave, annonça à ses camarades :

-À partir de maintenant, nous restons groupés. Ces lieux sont vivants.

La voix de Winston se répercuta dans les étages :

-Hey, Peter, tu descends ?!

-Pourquoi faire ?

Un long râle fatigué résonna ensuite. Venkman emprunta à nouveau, dans l'autre sens cette fois-ci, les marches qu'il venait de monter.

-Mon royaume pour un ascenseur...


...


Finalement réunis, ils déambulaient de nouveau dans les interminables corridors du château, sous la faible lueur des torches murales. Les portraits ne supportant pas d'être réveillés à cette heure avancée de la nuit ne leur apportaient plus leur soutien, comme avait pu le constater Raymond. Egon avait abandonné l'idée de se servir du PKE. Ils avançaient donc tous les quatre aux aguets et le canon à proton ronronnant entre les mains. Tous sauf Peter qui trainait des pieds, les mains dans les poches.

En dépit de son manque de motivation légendaire, ce fut lui qui demanda à ses collègues :

-Vous avez entendu ça ?

Ses trois comparses se regardèrent. Seul le bruit de leur appareillage se faisait entendre.

-Couper moi vos machins ! Ordonna Venkman d'un geste agacé de la main.

Tournant le dos à Winston, Ray lui demanda à voix basse :

-Éteins-moi.

Son collègue atteignit l'interrupteur au milieu des composants électroniques de l'engin qu'il portait sur le dos. Raymond lui rendit la politesse. Puis ce fut au tour d'Egon de demander l'assistance de ses collègues. Devant le manège de ses camarades, Venkman perdit patience :

-Le poltergeist aurait pu nous tomber dessus une dizaine de fois...

Egon le prit comme une attaque personnelle :

-Nous n'avions pas envisagé travailler à l'aveuglette ! s'emporta-t-il en chuchotant.

-Si tu te tais, je te file un crunch.

Spengler détestait quand Peter l'infantilisé de la sorte. Mais il aimait le chocolat.

Le silence était complet. Ou presque.

Un léger sanglot semblait provenir de derrière l'une des portes à quelques mètres du quatuor. Venkman dépassa ses amis, glissant au passage sa main au travers les éléments du pack à proton de Stantz, rallumant l'appareil dans un léger vrombissement. Il se tourna vers le groupe, plaça son index sur ses lèvres. Puis, il poussa la porte.

Le carrelage blanc reflétait la faible lumière de quelques torches. C'était une petite pièce offrant une poignée de cabine et quelques lavabos à la robinetterie chromée ouvragée derrière lesquels s'élevaient deux hauts vitraux qui laissaient filtrer les rayons de la lune.

Les sanglots provenaient bien de derrière l'une des cabines entrouvertes.

Du bout de son canon, Raymond poussa la porte, ses trois collègues derrière lui.

La cuvette était sale. Le rouleau de papier était déroulé jusqu'au sol, absorbant quelque peu la flaque de liquide qui entourée le trône de faïence. En effet, un long bras transparent semblait se débattre au milieu de l'assise, inondant le carrelage.

-Au moins, c'est pas un jeu de crocs acérés, positiva Zeddemore.

D'un coup d'épaule, Venkman encouragea Stantz:

-Allez mon p'tit père, serre-lui la main.


...


Tels des chevaliers face à une Excalibur flasque et moite emprisonnée d'une céramique blanche et glissante, les chasseurs se relayèrent pour tirer le bras à tour de rôle, extirpant finalement Mimi des remous odorants.

Reine d'un instant, Mimi était désormais assise sur le trône. À grand renfort de larmes et de cris, l'éternelle adolescente faisait le récit de ses malheurs à ses sauveurs.

-...et puis... et puis... Il tira la chaaaassse! Conclue-t-elle au bout de longues et coûteuses minutes.

-J'aurais fait pareil, avoua Pete à voix basse.

Egon se pencha vers le spectre :

-Vous voulez dire que Peeves n'est plus ici ?

Mimi secoua si fort la tête que ses tresses sombres voletèrent de part et d'autre de son visage blafard. Elle déglutit puis, satisfaite, répondit, comme il s'agissait de l'évidence même :

-Bah, non.

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