Usual suspect

Chapitre 2 : Superstition ain't the way

1836 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 19/08/2023 20:42

Chapitre 2


When you believe in things

That you don't understand

Then you suffer

Superstition ain't the way



La Cadillac avançait lentement vers la bâtisse, ses passagers devant se familiariser avec la singularité du décor.

Les yeux de Winston n'arrivaient pas à quitter les hautes tours aux vitraux scintillants sous le soleil déclinant.

Tout fasciné qu'il était également, ce fut Venkman qui brisa le charme du moment :

-"Toto, j'ai l'impression qu'on n'est plus au Kansas."

Scolaire, Egon exposa une théorie qu'il savait parfaitement exacte :

-A en juger par l'emplacement du soleil, nous avons traversé cinq fuseaux horaires.

Il pointa du doigts le lac noir qui s'étendait au loin derrière le château, sur lequel se reflétaient les roches sombres couvertes de verdure du rivage. Il continua :

-Ajoutons à celà la topographie spécifique de cette région, je miserai sur...

-... l'Écosse. Ajouta Stantz, fébrile.

Sur la droite du panorama s'étendait une étrange installation, comme un stade habillé de tissus bariolés, élevant au-dessus de son enceinte de longs poteaux surmontés de larges anneaux. Levant un sourcil, Venkman commenta :

-Il est bizarre leur terrain de basket.

La ecto-1 contourna enfin une élégante fontaine bordée de généreux massifs de fleurs, puis s'arrêta au pied d'un escalier montant vers une lourde porte de bois à double battant, sous les ombres grandissantes du château.

En haut des marches se trouvait un homme d'âge incertain, visiblement là pour accueillir les chasseurs de spectres. Comme courbé sous le poids des responsabilités, il avait un regard mauvais et le visage déformé par des années de méfiance. Chutant de son crâne dégarni, une fine chevelure grasse et grise tombait en cascade sur le veston en tweed de son antique costume marron. Une fois rendu au bas de l'escalier, il ajusta sa cravate puis pointa la rutilante Cadillac blanche et rouge de son doigt crochu :

-Vous en avez une sacrée conception de la discrétion, lança-t-il de sa voix grinçante aux quatre Ghostbusters qui venaient de descendre de voiture.

-C'est qui celui-là ? Glissa discrètement Venkman à Stantz. Garcimore ?

Sans relever cette remarque, Raymond tendit la main à leur hôte.

-Vous avez là un impressionnant domaine, Monsieur. Je suppose que vous êtes notre... Client ?

Le regard inquisiteur se portant tour à tour sur les membres de l'équipe, le vieil hurluberlu précisa :

-Je ne possède rien du tout: je suis le concierge.

Il se décida enfin à saluer Raymond d'une poignée de main douloureuse avant de se présenter :

-Rusard. Argus Rusard.

-Raymond Stantz, commença ce dernier avant d'indiquer ses collègues : et voici le Dr Venkman, le Dr Spengler et Winston Zeddemore.

Rusard sembla n'accorder que peu d'attention à ces détails. Il tira sur la chaîne d'une montre à gousset qui glissa hors de la poche de son veston. Il grogna en constatant l'heure, puis annonca :

-Suivez-moi.

-Si je peux me permettre, commença Egon alors qu'ils montaient l'escalier, j'aurais quelques questions à vous soumettre.

Rusard balaya l'air de sa main:

-Oui, oui… Allons manger d'abord.



Ils traversèrent un hall gigantesque duquel partait un grand escalier de marbre. Rusard le contourna et conduisit le quatuor dans ce qu'il appelait la Grande Salle.

Deux rangées de tables de bois y étaient aligné, cadrées par des bancs. De vitraux ouvraient les murs entre de hauts piliers de pierres montant jusqu'à d'étranges poutres. La structure du plafond paraissait transparente, laissant apparaître un doux soir d'été naissant.

Le nez en l'air, Winston était abasourdi :

-Mais comment font ils ça ? S'interrogea-t-il à haute voix.

-C'est un réfectoire ! S'amusa Raymond.

Venkman ne partageait pas son enthousiasme :

-Oui merci, je vois.

Egon, lui, scannait les environs à l'aide de son éternel PKE. La lecture était peu concluante: les ailettes s'affolaient mais le compteur, lui, restait tranquillement dans le vert...

-Attendez-moi ici, Intima le concierge d'un ton bourru avant de disparaitre dans les couloirs. Je reviens.

Toujours le nez dirigé vers les poutres, Winston contemplait quelques bougies flottantes dans les airs à quelques mètres au-dessus des tables. Il se répéta :

-Mais comment font-ils ça ?

Venkman enjamba un banc et prit place face à Ray. Il haussa les épaules :

-Par magie, répondit-il.

Frustré, le grand scientifique éteignit de nouveau son détecteur et s'installa à son tour à l'extrémité de la longue rangée de table. Il posa son PKE devant lui et exprima son inquiétude, en faisant tourner le petit appareil de l'index sur le bois brut.

-Je ne sais pas dans quel genre d'endroit nous venons de mettre les pieds, mais il apparaît clairement qu'un certain nombre d'entités se cache dans ses murs.

Pete s'étira et bâilla.

-C'est bon pour le business, articula-t-il.

Spengler se pencha vers son ami :

-Il y a ici une énergie qui semble protéger ces entités, précise-t-il.

Faisant danser ses doigts, Raymond chantonna :

-C'est la magie !


Le concierge réapparu enfin par la grande porte. Toujours aussi miteux, il portait un plateau chromé recouvert d'une cloche d'argent au bout de son bras tendu et une bouteille de vin rouge dans sa main gauche.

-On ne pourra pas mettre en défaut l'hospitalité d'Argus Rusard, argua-t-il en dévoilant le repas.

Une pile de sandwich s'amoncelaient devant les convives. Visiblement fait maison, ils étaient composés de pain, de bacon et de cheddar. Couchés sur le tout se trouvaient cinq verres à pied, que Rusard distribua.

-Vous n'auriez pas dû, annonça Raymond, avec une certaine reconnaissance.

Venkman commenta, moqueur :

-Oui, c'est agréable d'être reçu comme des hôtes de marques.

Le drôle de bonhomme venait juste de déboucher la bouteille. Il lança un regard noir à l'impertinent tout en faisant couler l'alcool dans les flûtes.

-Vous n'espériez tout de même pas que je vous fasse apparaître un festin comme par magie.

Winston, qui avait fini par prendre place à son tour, répondit à cette remarque :

-Mais, et le plafond…

-...N'est pas de mon fait, coupa Rusard, piqué au vif. Mangez, il faut qu'on parle.

Il mordit son sandwich à pleine dents, provoquant une avalanche de miette sur sa cravate. Pointant ses convives de son sandwich endommagé, Rusard repris :

-Ce château est rempli d'esprit de toutes sortes. Mais si je vous ai fait venir ce soir, c'est pour que vous en attrapiez un. Un seul. Et vous laisserez tout les autres tranquilles.

Un léger bruit métallique résonna dans le hall, attirant l'attention de Winston l'espace d'un instant. Spengler pris la parole :

-Malheureusement M. Rusard. Il émane de ce château des interférences qui entravent le bon fonctionnement de notre appareillage. Débusquer un spectre n'est pas une chose aisée…

Le concierge posa son casse-croûte et se mit à farfouiller dans son veston.

-Oui, j'avais prévu cette éventualité.

Ses doigts fins déposèrent un petit objet au milieu de la table : une petite toupie antique faite de verre et de métal.

-Voici un Scrutoscope. Il se mettra à tourner et émettra une lumière lorsque vous serez proche d'un danger.

Les yeux écarquillés, Ray se pencha sur l'objet. Winston demanda :

-Ça aussi, c'est de la magie ?

Le vieux Argus s'emporta :

-Vous avez fini avec ça ?!

Il réajusta son veston, soupira et annonça :

-Maintenant, une dernière question…

Mais, avec toute la délicatesse dont il était capable, Peter l'interrompit :

-Comment vous allez nous ramener chez nous ? Parce que je vous annonce tout de suite que les frais de déplacement sont facturés au kilomètre…

Le regard en coin, le concierge n'avait pas apprécié être coupé dans son élan. Il articula lentement, un peu pour se calmer :

-Vous rentrerez de la même façon que vous êtes arrivés. Ça, j'en fais mon affaire.

Puis, il sortit un petit pochon de cuir de sa poche et le jeta sur la table :

-Ceci devrait couvrir vos frais, déclara-t-il en désignant le petit sac qui venait de tinter en s'écrasant sur le bois.

Venkman glissa la bourse dans sa poche, sans en vérifier le contenu. Stantz fit de même avec la toupie :

-Quelle était votre question ?

Argus se pencha vers Raymond, l'œil suspicieux :

- Savez-vous faire la différence entre un fantôme et un poltergeist ?


Imperceptiblement, le petit bruit métallique résonna à nouveau dans le hall. Sans éveiller l'attention cette fois-ci. Le grand hall était plongé dans les ombres. Accroché au-dessus d'une armure décorative, un cadre représentait un champ de tulipe balayé par un vent calme. Se pensant à l'abri des regards, dissimulé derrière un fin tilleul, un chevalier nerveux venait d'espionner la discussion. Vêtue d'une armure scintillante, la visière de son heaume levé laissait apparaître un visage émacié arborant une moustache entretenue et une certaine inquiétude. Appuyé sur sa lourde épée, il siffla. Apparu alors dans un coin du cadre un petit âne gris replet. La monture s'approcha tranquillement de son maître qui se hissa son dos. Entre ses dents, il laissa s'échapper :

-Le pendard! Le traître !

Il tira sur les rennes. Le chevalier et sa monture disparurent ensuite dans un coin du cadre, traînant derrière eux la lourde épée.

Ils ne mirent pas longtemps à réapparaître quelques étages plus haut à la lueur des torches d'un long couloir. Ils bousculèrent un vénérable sorcier dans son portrait qui n'eut pas le temps de se plaindre, le terrible duo ayant de nouveau disparu. Traversant portraits et décors, bravant les nuits sombres et les tempêtes des différents tableaux de Poudlard, le chevalier et sa monture se stoppèrent au sommet d'une montagne enneigée baignant dans la lueur de la lune, dans un cadre de guingois oublié dans un escalier en colimaçon que la lueur fantomatique d'une noble silhouette remontait tranquillement. Vêtu du pourpoint décoré de fines coutures, arborant autour du cou une large fraise, le spectre se faisait indéniablement un devoir de hanter les lieux avec toute la distinction dont il faisait déjà preuve de son vivant.

À la vue du petit personnage, le fantôme le salua d'une courbette, maintenant sa tête de la main pour éviter qu'elle ne se détache. En effet, son cou était à demi tranché.

-Mes hommages, Chevalier.

La vue du noble transparent sembla atténuer quelque peu les inquiétudes de l'homme en armure qui venait de descendre de sa monture.

-Ha ! Sir Nicholas ! L'heure est grave ! Il nous faut nous hâter de prévenir notre camarade Peeves!

Le Chevalier du Catogan venait de transmettre son inquiétude à Sir Nick-quasi-sans-tête:

-Que se passe-t-il mon ami ?

L'homme en armure laissa aller sa colère :

-Ce pleutre de Rusard vient de mandater quatre mercenaires afin d'en finir avec notre bon vieux Peeves!

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