Chevalier, mais pas trop ...

Chapitre 4 : QUEL TEMPERAMENT!

1269 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 22/11/2023 11:28

Disclaimer : cf. chapitre 1

CHAPITRE 4

QUEL TEMPERAMENT !

 

      C’est avec une certaine nostalgie, parfois tristesse, qu’Iris se replongeait dans les six premières années de sa vie, du moins, dans ce dont elle pouvait se souvenir à un si jeune âge. Ce fut la période la plus heureuse avant ce terrible « accident » qui fit d’elle le combattant qu’elle est devenue. Tout paraissait tellement simple à cette époque ! Elle avait une famille : Daphné, sa mère adoptive ; Polydeukès, son père par procuration ; et Saga, son bien-aimé « grand-frère ». « Bien-aimé » tout court suffisait.


         Elle n’avait aucun souvenir du jour où il l’avait trouvée mais lui et Daphné se pliaient volontiers à la répétition de l’histoire si elle le demandait. La seule chose dont elle puisse vaguement se souvenir se résume à une sensation de chaleur bienveillante. C’était celle de Saga qui la portait du haut de ses quatre ans. Elle n’a jamais su qui était véritablement sa mère mais aux dires de l’apprenti chevalier, elle était son véritable sosie : même chevelure, même pâleur. Seuls les yeux différaient de sa génitrice par son intensité. C’est d’ailleurs ce qui lui valut son nom. La seule chose qui la reliait à elle était cette dague. Ce curieux héritage l’a toujours accompagnée ; peut-être que Daphné souhaitait qu’elle puisse, un jour, retrouver ses origines. Elle n’aurait pu le dire.


         Quoi qu’il en soit, ses premiers pas dans la vie furent semblables à ceux des autres enfants. Daphné lui rappelait sans cesse que l’apprentissage de la parole fut bien plus rapide que celui de la marche. Elle devait reconnaître qu’aujourd’hui encore, elle était si loquace qu’elle donnait rarement le temps à son interlocuteur de répondre.


         Elle était énormément choyée. Daphné qui n’avait pas d’enfant la considérait comme sa propre fille. D’ailleurs, elle avait même pensé un temps que la praticienne était mariée au chevalier. La jeune femme passait des heures à faire découvrir à sa petite le monde qui l’entourait malgré son emploi du temps chargé. Saga venait également lui prêter main forte quand il revenait, pourtant éreinté, de son entraînement. Et à bien y réfléchir, c’était lui qui lui avait fait prononcer son premier mot. Ainsi, pendant que Daphné préparait le souper, Saga, assis sur une chaise tout à côté de Daphné, s’amusait à faire sauter l’enfant sur ses genoux et à lui désigner Daphné de l’index :


—    Allez ! Dis « maman » ! MA-MAN ! MA-MAN !

—   Voyons ! Elle est beaucoup trop jeune ! Tu te fatigues pour rien, Saga !

—   A-GA.


Stupéfaction chez l’un comme chez l’autre.


—   Elle … elle a parlé ! bredouilla Saga. Elle a dit « maman » … enfin … ça y ressemblait.

—   Ce n’est pas vraiment ce que j’ai compris, contra Daphné qui se remit à sa préparation une fois sa surprise passée. Je dirais plutôt que c’est ton nom qu’elle a écorché.


Daphné laissa provisoirement ses ustensiles de côté et s’adressa directement à la petite :


—   Alors ? Tu peux parler ma puce ? Mais je suis quand même jalouse que tu préfères Saga à ta maman !

—   A-GA, répéta inlassablement la petite prodige.


Les années s’écoulèrent. Iris parlait, marchait et par moments, devenait une véritable petite peste, force est de le constater. Pauvre Saga ! Elle lui en avait fait subir des crises de larmes ! Elle était sûre qu’il préférait de loin se battre contre un adversaire coriace plutôt que d’avoir à calmer sa « sœur ». Les autres compagnons d’entraînement de Saga, à savoir Milo, Aiolia, Camus et Shura, pour ne citer que les contemporains de la petite, surnommaient cette dernière « la pleurnicheuse », ce qui avait le don la faire enrager et la faire pleurer encore plus abondamment. Saga s’interposait avec majesté entre ses camarades et la malmenée pour la consoler.


Ses attentions faisaient quasi instantanément tarir le flot de larmes.


—   Oh ! Les amoureux ! persifla Milo déjà très moqueur pour son âge.


Saga se retourna et le fusilla du regard. Iris fit de même dans l’intention d’imiter son grand frère.


—   C’est pas vrai ! T’as pas le droit de dire ça ! C’est pas mon amoureux : c’est mon grand frère !


Saga resta interloqué par cette réplique ; cinq minutes auparavant, la petite versait toutes les larmes de son corps quand Milo et les autres la traitaient de pleurnicharde et tout à coup, la voilà qui extériorisait son agressivité quand on osait mal parler de son « frère ».


—   C’est pas ce qui me semble ! Alors pourquoi tu vas dormir chez lui pendant quelques jours ? Vous jouez déjà au papa et à la maman ?

—   Milo ! Tais-toi maintenant ! Ça suffit ! Si tu continues, je serai obligé de te donner une bonne correction ! grogna Saga les poings serrés.


Pour Iris, c’en était trop également. Saga n’eut pas plutôt fini sa phrase qu’elle se jeta sur l’auteur des blasphèmes et lui asséna un magistral coup de poing en pleine figure. Milo chancela et se retrouva sur son séant, le nez en sang et les yeux complètement hagards. Saga resta médusé et observa longuement la petite, surpris devant cet incompréhensible accès de violence.


—   La prochaine fois que tu dis encore ce genre de bêtises, je te …

—   STOOOOP ! coupa Saga in extremis. Ne dis pas des choses pareilles.

—   Mais c’est lui qui a commencé ! Il l’a cherché !

—   Laisse tomber. C’est pas grave. Le mieux, c’est encore de l’ignorer. Viens ! On s’en va. De toute façon, il faut aussi vérifier que tu ne t’es rien cassé.


Saga prit la main assurément endolorie d’Iris et les deux enfants rentrèrent chez Daphné.


—   Mais enfin ! Vous voyez bien que ces deux-là sont amoureux ! Ils s’en vont main dans la main.

—   Tais-toi, lui conseilla Aiolia. Tu vas encore te prendre une raclée … ou pire. Si Saga s’en mêle…

—   Oh que oui ! conclut Shura d’ordinaire taciturne. Ce n’est plus un débutant comme vous autres !


Toute vérité n’est pas bonne à dire et encore moins à entendre. Des années plus tard, Iris était bien forcée de reconnaître que Milo était déjà très perspicace à l’époque. Néanmoins, Milo n’avait pas à savoir les raisons qui poussaient la fillette à occuper de temps à autre la cabine de Saga.


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