Woes Chapter
Chapitre 24 : Le courage du dragon occidental.
1797 mots, Catégorie: G
Dernière mise à jour 12/12/2022 07:47
Chapitre 24 : Le courage du dragon occidental.
Les jours précédant les émanations de Planitaíos sur le Sanctuaire, en Chine, Qi Lao Feng, Mont du Feu, cascade de Huǒshé.
Shoryu contempla la cascade ondoyante, comme des flammes aqueuses, qui grondait sous ses yeux. Sa Shield s'était réfugiée dans le bouillonnement au pied de la chute d'eau. Il se laissa envahir par la beauté du Mont qui l'avait appelé et apprécia ce moment. Il avait toujours aimé la solitude, peut-être était-ce dû au fait qu'il avait été laissé seul dans la montagne quand il était bébé. Shunreï lui avait raconté qu'il ne pleurait même pas quand elle l'avait trouvé. Sa mère adoptive lui avait certifié qu'elle avait lu un profond courage dans ses yeux lorsque leurs regards s'étaient croisés pour la première fois. Un courage qui, pour l'occasion, aurait pu lui être fatal. Elle l'avait ramené à la maison, Shiryu l'accueillant de suite comme leur propre fils. Ils l'avaient élevé avec amour, selon les mêmes principes et valeurs dont le Vieux Maître les avait gratifiés. Malgré son adoption, jamais ses parents ne l'avaient traité différemment, même après la naissance de ses deux petits frères, Ryuho et Ryufeng.
Shiryu s'était rapidement occupé de son entraînement. Il maîtrisa les techniques de Lushan avec aisance, faisant preuve d'un sérieux sans conteste dans ses apprentissages. Il n'avait pourtant aucunement l'intention de devenir chevalier. Il accepta les préceptes transmis par son père, respectant le temps que le Grand Pope consacrait ainsi à ses enfants, malgré son rôle très prenant à la tête de la chevalerie d'Athéna. Shoryu développa un potentiel qui lui aurait valu d'accéder à la position de chevalier d'argent directement. Mais il ne passa jamais l'épreuve qui lui aurait ouvert la voie des Saints. Shiryu respecta cela et quand son entraînement fut terminé, il demanda à son fils ce qu'il souhaitait. Shoryu répondit qu'il voulait suivre des études en Occident et, malgré la tristesse de le voir partir, Shunreï et Shiryu se démenèrent pour lui trouver une place dans un établissement lui convenant.
C'est ainsi que Shoryu se retrouva dans une école internationale en Islande. Il y mena une scolarité aussi assidue que son entraînement et obtint rapidement des résultats brillants. Il se trouva néanmoins facilement du temps pour explorer seul la nature islandaise. Son enseignement l'avait rendu proche des esprits de la Nature et il entendait sans cesse ses camarades de classe parler du folklore de leur île. Il entreprit de suivre la piste d'une légende urbaine contant l'existence d'un être capable de vivre dans les profondeurs des volcans. Alfe, Troll ou autre, il décida d'enquêter, convaincu que cette histoire possédait une part de vérité. Il se servit de ses capacités surhumaines pour visiter un certain nombre de sites volcaniques où, disait-on, une silhouette vivante avait été aperçue marchant sur le magma, nageant dans la lave ou dormant dans les cratères.
— Tu me poursuis avec une telle insistance que je n'arrive plus à profiter de ma retraite, jeune homme, entendit-il un jour dans son dos alors qu'il explorait un tunnel volcanique.
Shoryu sursauta et se retourna, réveillant son cosmos, prêt à se défendre contre une créature mythologique. Mais devant lui se tenait un homme dans la force de l'âge, aux habits sommaires, aux cheveux d'un blond si clair qu'ils tiraient vers le blanc et aux yeux d'un bleu sous-glaciaire perçants comme ceux d'un rapace. Un demi sourire amusé adoucissait son visage.
— Tu possèdes un cosmos impressionnant pour ton jeune âge.
Shoryu vit avec étonnement un cosmos brûlant et intense envelopper l'homme. La maturité et la profondeur de sa cosmo-énergie lui fit penser à celle de son père. Il avait devant lui un combattant expérimenté et aguerri. Et pourtant, il ne capta aucune menace là où l'homme aurait pu probablement le tuer sans qu'il s'en aperçoive.
— Allez, suis-moi, jeune curieux. Je t'offre mon hospitalité, c'est la moindre des choses pour te récompenser de ta persévérance.
L'homme guida Shoryu à travers un labyrinthe de couloirs et de cheminées volcaniques. Le cheminement se fit dans le silence le plus total, l'inconnu persuadé que l'adolescent le suivrait sans une explication. Et il avait raison. Shoryu, posé et patient comme à son habitude, le suivit sans poser de question. Ils parvinrent dans une caverne, ancienne chambre magmatique évidée. Au centre trônait une armure écarlate… mais pas n'importe laquelle.
— La Robe perdue de Jormungand… murmura Shoryu.
L'inconnu siffla d'admiration.
— Cultivé avec ça ? J'apprécie beaucoup. Tu as tout à fait raison.
— Vous êtes un Guerrier Divin ? Mais, pourquoi n'êtes-vous en Asgard ?
— Je suis en exil, banni par Hilda pour avoir refusé de partir en guerre contre Athéna à l'époque. Odin et Athéna sont alliés depuis le départ. C'est grâce à la déesse de la guerre que les Guerriers Divins ont obtenu leurs Robes. Je n'ai pas voulu trahir cette alliance.
— « Athéna rencontra Odin qui accepta de veiller sur la partie nord de la Terre, empêchant par son pouvoir la fonte des pôles en échange de la protection de ses terres par les Saints si les dieux asgardiens venaient à disparaître. Pour que les guerriers d'Asgard puissent mener à bien leur mission, Athéna demanda aux alchimistes de Mü de construire les Robes, des armures qui firent des soldats d'Odin des Guerriers Divins. » Récita le jeune garçon.
— Hilda a toujours espéré que je revienne après qu'elle eut retrouvé ses esprits. Mais la rancune est solide chez moi et je ne m'y suis jamais résolu. Je m'appelle Raken, Guerrier Divin de Jormungand. Et toi ? Qui es-tu mon garçon ? Es-tu un Saint ? Tu en as le cosmos.
— Je ne suis pas un chevalier d'Athéna. Mais j'en ai suivi l'entraînement. Je suis Shoryu, fils du Grand Pope Shiryu, chevalier d'or de la Balance.
Une amitié profonde lia les deux solitaires. Shoryu entama même un deuxième entraînement et s'enrichit de l'état d'esprit des Guerriers Divins d'Odin. Malheureusement, le soldat d'Asgard perdit la vie lorsque les Gladiateurs, puis des chevaliers d'or menés par un Sanctuaire d'une dimension parallèle , s'attaquèrent à leur propre dimension. Le désastre avait été évité avec la défaite d'un Aiolos alternatif devenu un Antipope déicide et fratricide, tombé dans la folie. Raken avait défendu Shoryu et s'était sacrifié pour lui sauver la vie. Ainsi le jeune garçon avait-il connu la souffrance liée à une guerre. Il avait enterré son ami dans l'ancienne chambre magmatique, laissant la Robe de Jormungand en guise de stèle funéraire. L'armure luisit un instant à son contact mais il n'en tint pas compte et quitta le tombeau volcanique la mort dans l'âme.
Il obtint de changer d'école et opta pour la Norvège, se rapprochant d'Asgard sans pour autant y pénétrer. Il ne revint à Lushan que lorsque les Calamités, pourtant pas encore incarnées, commencèrent leur oeuvre d'extinction et y retrouva sa famille et ses racines. Son père étant occupé, il s'occupa de l'entraînement de ses petits frères, qu'il aimait par-dessus tout. Pour eux, il aurait donné sa vie, bien qu'ils ne fussent pas du même sang. Mais malgré son courage, il n'avait pas réussi à les protéger lors de l'attaque de Kýma.
— L'amour des siens et le courage de les protéger est la source de la véritable puissance, Shoryu, fit une voix dans les méandres de son inconscient.
Le jeune garçon orienta la concentration de sa méditation vers la présence qui venait de s'y immiscer. Un homme jeune, cheveux en bataille, l'air à la fois sérieux et espiègle, lui apparut. Mais les tréfonds de son regard trahissaient un âge très avancé, plus vieux que quiconque de sa connaissance. Quiconque sauf…
— Je suis Dohko, se présenta le Vieux Maître.
— Le maître de mon père ? Mais comment ?
— Méditer à Lushan permet de s'ouvrir à bien des possibilités, mon garçon. L'une d'elle est de lier entre eux tous les disciples de cette terre unique.
— Et tous ses maîtres, complétèrent deux voix.
Un dragon immaculé et un être hybride mi-homme mi-dragon d'une noirceur inquiétante apparurent aux côtés de Dohko.
— La Robe de Jormungand est venue à toi, jeune dragon, fit remarquer le dragon blanc.
— Et a évolué en Shield du Feu à ton contact, poursuivit le sombre hybride.
— Tu es digne de cet héritage, Shoryu. N'en doute jamais, le rassura le Vieux Maître.
L'adolescent fixa intensément ses interlocuteurs, son regard passant de l'un à l'autre. Son père lui avait raconté bien des histoires sur son Vieux Maître. Mais il ne s'attendait pas à le rencontrer au cours d'une méditation, encore moins accompagné de ses propres maîtres, Hakuryu de la Contrée Mystique et Sennenryu de Lushan. Il baissa un instant les yeux avant de les relever avec aplomb.
— Le courage ? Railla-t-il. Ça n'en était pas. J'ai plutôt été téméraire et c'est pour ça que j'ai échoué. La prochaine fois, je leur montrerai ce que peut réaliser le vrai courage !
Pas question de se trouver des excuses, mais pas question de perdre confiance pour autant. Il savait très bien où il avait péché, à lui de ne pas reproduire l'erreur. Il n'avait pas honte de sa puissance, il était seulement frustré de ne pas l'avoir déployée entièrement, d'avoir cédé à la précipitation sans faire honneur ni à l'enseignement de son père, ni à celui de Raken. De la fierté illumina les visages de ses vis-à-vis qui n'eurent rien à ajouter.
— Je ne sens aucune dépréciation dans ta voix, jeune homme, intervint une présence flamboyante.
La radiance de la manifestation dissipa celles de Dohko, Hakuryu et Sennenryu qui disparurent en lui souriant chaleureusement. La Quiddité du Feu étincela dans son esprit.
— Le courage irradie de ta personne. C'est une bonne chose. Promets-tu d'incinérer nos adversaires avec ?
— Je ferai ce qui doit être fait, promit Shoryu.
— Alors je te confie mon essence, jeune dragon occidental. Calcine les Calamités en mon nom, lui ordonna la Quiddité du Feu avant de se dissiper dans la brise fondatrice qui soufflait sur les Qi Lao Feng.