Truth End

Chapitre 3 : Rencontre inattendue

2627 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour 24/11/2020 15:59

Affalé sur l'accoudoir d'un fauteuil de seconde classe, dans le train le menant à sa prochaine destination, Fumiya était en train de regarder fixement une feuille de papier unique, imprimée par ordinateur, dont la lecture n'aurait dû lui prendre en tout que quelques minutes. Cela faisait bien une dizaine de minutes qu'il relisait celle-ci en boucle, en jetant parfois un coup d'oeil aux photos qui se trouvaient à côté. " Cher père, chère mère, cher frère, je suis désolée de ne pas avoir trouvé la force de rester à vos côtés plus longtemps. Sachez que si j'ai décidé d'en finir... ", et la lettre continuait ainsi, durant près d'une demi-page. Cela lui semblait en effet bien pouvoir correspondre à sa soeur, ainsi que son écriture, dans ce qu'il pouvait voir des photos qui lui avaient été fournies de la lettre originale. Elle aurait vraiment décidé de se pendre, alors que le seul pépin qu'elle avait eu à sa connaissance, était un souci avec son mari qui l'avait trompée ? Eh franchement, il savait qu'il aurait dû lui casser la tronche, quand sa grande soeur lui en avait parlé la première fois.

Mais bon, cela n'aurait sans doute rien changé à vrai dire. Ce qu'il lui importait pour l'instant, était principalement le fait de faire la vérité sur cette affaire, afin de savoir si sa soeur s'était suicidée, ou avait été tuée, et s'arranger que le coupable soit punit le cas échéant. Car avec la police qui trouvait soi-disant le coupable, et sortait une histoire bizarre de suicides déguisés en meurtre, avant que ceux-ci ne reprennent à nouveau, il y avait de quoi être dérouté. Avec tout cela, il n'avait même pas pu récupérer la lettre originale de suicide de Kumi, comme l'aurait voulu sa mère, la police ayant finalement décidé de la garder comme pièce à conviction. Hum... Il avait pris deux semaines de vacance au restaurant, pour s'occuper de l'affaire, mais il se demandait si tout cela allait être suffisant. Dans tous les cas, pour une fois qu'il ne travaillait pas autant en profiter. Il rangea donc toutes ses affaires liées à l'enquête, et regarda par la fenêtre pour profiter pleinement des paysages montagnards qui défilaient maintenant. Ici, pas de champs, ou d'habitations, la région étant trop montagneuse pour permettre de bien s'y installer, et le temps étant trop hostile à une quelconque forme de culture. La végétation elle-même avait du mal à pousser, mais on y trouvait quand même de temps en temps quelques arbres, un peu d'herbe jaunie par la chaleur, ou quelques champignons. Il vit également à un moment les ruines de ce qui ressemblait à un temple Shinto au loin, mais le train l'éloigna vite fait de ce lieu d'intérêt.

Quelques heures plus tard, il se trouvait près de la maison de la dernière victime d'End. Il lui avait fallu aller assez loin de Kitakanada, ce meurtre-ci faisant partit de ceux qui étaient relativement éloignés de l'emplacement de la plupart des meurtres. Et puis y aller en transport en commun n'arrangeait pas les choses, mais sa voiture étant actuellement hors-service, il n'avait pas le choix. Il sonna alors à la sonnette, et entendit un son de musique depuis l'intérieur.

- Oui, oui, j'arrive. Répondit une voix d'homme, en arrivant.

La porte fut ouverte brusquement, et l'homme à la mine sombre et à la barbe de trois jours qui se trouvait derrière, parla alors sèchement et rapidement.

- C'est pour quoi ?

- Euh, bonjour. Je m’appelle Fumiya Nichizawa, je viens vous voir au sujet de l'affaire d'End, et ...

- Je n'ai rien à dire aux journalistes, vous pouvez aller voir ailleurs si j'y suis.

Sur ces quelques mots, la porte fut refermée aussi rapidement quelle avait été ouverte, le laissant seul devant la lourde porte en chêne massif de l'entrée. Il essaya malgré tout de toquer à nouveau, et de parler plus fort, pour espérer pouvoir être entendu.

- Euh, désolé de vous déranger. Je ne suis pas un journaliste, je suis le frère de la dernière victime d'End. Euh, enfin je veux dire la victime avant celle-ci. Si on pouvait parler, cela m'arrangerait.

Il crut entendre, un bruit derrière la porte, mais toujours rien d'autre de perceptible. Il continua à parler plusieurs fois, avant que le mec apparemment toujours de mauvaise humeur ne lui ouvrit.

- Bon, on dirait que vous avez l'air décidé de me gâcher ma journée si je vous laisse dehors, donc vous pouvez rentrer. Par contre, vous n'emmenez pas de journalopes avec vous, et si vous m'avez menti et que vous êtes avec eux, ça ira mal pour vous. Il y en a marre de tout ces pseudo-journalistes, qui n'ont que ça à faire d'emmerder les gens pour des détails pour leurs feuilles de choux, alors que certains essayent de faire leur deuil. Cela vous va ? Vous voulez toujours entrer ?

Finalement, Fumiya pu donc rencontrer ainsi un proche de la neuvième victime d'End. Un des rares ayant accepté de lui parler, ainsi qu'une certaine Kaoru, et un certain Kyoji. Trois personnes sur six qui avaient accepté sa visite, il faut croire que les gens n'aimaient pas trop remuer le passé. Surtout que comme lui, la plupart avaient aussi eux la visite de journalistes indiscrets, friands de la moindre information sur l'affaire. Même si à vrai dire, la personne qu'il avait en face de lui était sans doute la plus importante dans l'affaire, car étant la seule liée à ces nouveaux meurtres, après l'emprisonnement du coupable présumé. Finalement, après une brève discussion, l'homme accepta de lui montrer la maison où avait été tué la 9ème victime, dès fois que cela pourrait lui être utile. Il s'agissait de son ex-femme, qui habitait légèrement plus loin dans le village. Il avait récupéré les clés le temps de faire le nettoyage, récupérer les affaires de la petite... Suite au décès, une bonne partie du plancher était encore souillée, le sang bien qu'ayant été nettoyé s'étant incrusté dans celui-ci. Comme les autres, il parait que le corps avait été démembré, ce qui avait provoqué de larges flaques de sang, d'où les dégâts. Il n'avait pas vraiment eu le coeur à regarder cela. La police s'en était occupée, après la découverte du corps par une voisine. Fumiya essaya d'examiner la pièce, mais la police ayant déjà tout regardé, et récupéré ce qui était intéressant, et puisqu'il n'était pas un enquêteur professionnel, sa recherche se révéla infructueuse. Il demanda s'il avait une idée de pourquoi son ex-femme avait put-être tuée, à celui qui l'avait guidé ici, ce au quoi l'homme répondit qu'il ne savait pas. Il avait régulièrement des contacts avec elle, mais pas au point d'être intime, la plupart des fois où ils se voyaient étant pour récupérer la petite, voir de temps en temps à un dîner, leur relation s'étant légèrement améliorée depuis qu'ils s'étaient séparés. Et qu'il ne songeait même pas à interroger sa fille, elle était déjà bien assez traumatisée comme cela avec ce qui était arrivé. Pff... On dirait qu'il avait fait choux blanc pour cette fois-ci, pour son enquête. Tant d'espoirs déçus en si peu de temps. Il remercia quand même son interlocuteur, avant de prendre congé.



***



Un restaurant familial banal près de chez lui. Fatigué d'avoir parcouru tant de route aujourd'hui, Fumiya avait décidé de se faire un petit plaisir en allant au restaurant, en se disant qu'il était de toute façon trop fatigué pour cuisiner aujourd'hui. Alors qu'il s'était mis à une table pour deux, afin de ne pas trop gêner, une femme portant une queue de cheval, et à l'air plutôt sérieux, lui demanda si elle pouvait se mettre à sa table. Alors que Fumiya regardait à nouveau les tables à côté qui étaient vides, et se demandait ce qui lui valait cette faveur, la femme ouvrit alors un portefeuille en disant "Je me permets d'insister". Un insigne de la police, indiquant Akina IGARASHI, brigadière. Soudainement il se trouvait beaucoup plus stressé, le fait que la femme se trouvait être plutôt grande n'arrangeant rien à son stress, cela la rendant d'autant plus intimidante . Il espérait qu'elle n'avait pas une matraque, ou un flingue, planqué quelque part dans son manteau.

Tout en se grattant le menton, et en faisant mine de réfléchir, il accepta finalement qu'elle mange avec lui. Il lui souhaita bonne appétit, et elle fit de même, avant que la discussion ne prenna un tour plus sérieux.

- Alors, il parait que vous enquêtez à votre compte sur l'affaire End, Mr Fumiya ?

Il manqua de recracher le ramen qu'il était en train de manger, directement sur le visage de son interlocutrice. Oh, putain, il se passait quoi la ? On le suivait ou quoi?

- Oh, vous avez l'air surpris. Pourtant vous avez dû me croiser il y a peu chez Kyoji, vous vous rappelez ? C'est le gérant d'un club, dont le père a été tué par End. Il passe pas mal à la télé en ce moment comme commentateur, afin de parler de l'affaire d'End principalement.

- Ah, mademoiselle Igarashi, c'est bien cela ? Vous me filez donc depuis mon passage chez lui. C'est limite un coup de foudre à ce niveau la, non ? Il fit mine de plaisanter, pour donner l'impression qu'il serait encore détendu.

La brigadière lui lança ensuite un regard tellement noir, qu'il se crispa instantanément. Il se dit également qu'il vaudrait mieux éviter de recommencer les blagues, elle n'avait pas vraiment l'air d'avoir le sens de l'humour.

- Pas vraiment, je vous ai juste vu par hasard il y a quelques minutes. Et comme je vous ai vu précédemment sortir de chez Kyoji, puis que j'ai interrogé plusieurs personnes qui m'ont dites avoir été approchées par quelqu'un ayant une description physique qui vous correspondait, j'ai donc pensé que vous deviez faire votre propre enquête. Du coup, étant donné ce coup du hasard, je me suis dit que l'on pourrait peut-être parler un peu ensemble, à propos de l'affaire.

- Ah, vraiment désolé de vous décevoir dans ce cas. Je n'ai pas vraiment beaucoup de choses. Juste la lettre de suicide de ma soeur, ou un faux du meurtrier selon la version choisie, que vous avez au commissariat. Et j'ai interrogé quelques personnes, mais je pense que vous devez déjà avoir les procès-verbaux de celles-ci. Il n'y a pas vraiment d'intérêt pour la police.

- Oh, je pense que vous faites erreur. Même si je suis bien policière, je ne suis pas particulièrement chargée de cette affaire, enfin plus depuis quelque temps, j'en ai été déchargée. Je n'ai donc pas accès aux éléments du dossier actuellement. Même si en tant que brigadière, je suis tenu moins au courant que les chefs, par ailleurs. Je peux voir la lettre ?

- Hum... Bien sur.

Fumiya fouilla son sac à dos, et lui tandis donc la version retranscrite par ordinateur obtenue au commissariat, ainsi que les photos de la lettre originale, que l'on lui avait passées. La policière regarda les documents longuement, puis les lui redonna les documents, en lui disant.

- Et vous votre avis ? Vous pensez que cette lettre est un faux ? Qu'il s'agit de meurtres, ou bien de suicides ? Et pour le nouveau meurtre de End, vous en pensez quoi?

- Hum... disons que si l'on maquille des meurtres en faisant par la suite croire que c'est des suicides, cela pourrait être une bonne couverture, cela est sur. Par contre, pourquoi avoir alors laissé pensé au départ que cela était des meurtres ? Cela est assez embrouillé pour moi. Ou alors c'est la police, ou le gouvernement, qui a voulu camoufler par la suite ces meurtres pour une raison x ou y. Bref, la première thèse des suicides camouflés en meurtres par une personne m'a l'air plus plausible, surtout d'après les propos qui ont été obtenus du coupable, comme quoi pour lui un meurtre, cela était toujours moins difficile à vivre pour la famille que un suicide. Que au moins l'on avait quelqu'un à blâmer, plutôt que s'en prendre à soi-même, se dire que l'on aurait pu empêcher cela si on avait agi différemment avec la personne s'étant suicidée. Une logique bizarre, mais bon, je peux comprendre. On va dire que je reste sur la thèse des suicides camouflés en meurtres donc.

- Et que pensez-vous du fait que les victimes continuent ? Continua Igarashi.

- Bah le plus simple. Il devait avoir un complice pour l'aider dans son travail. Et votre avis ?

La policière sembla un instant réfléchir, la conversation restant un peu en suspens, puis elle répondit tout en continuant de manger.

- Hum... En partit le même que le vôtre. L'hypothèse des suicides semble bien plus possible que les meurtres, entre autres d'après ce que disent les anciens proches des victimes. Je pense juste personnellement que au contraire il pourrait ne pas s'agir d'un complice, mais plutôt d'une personne souhaitant protéger le pseudo-meurtrier, qui aurait été condamné même s'il n'a fait que mettre en scène les corps. Et cela, en faisant ainsi croire qu'il n'y aurait aucun lien entre Masato Haruno, et End. D'ailleurs, un des derniers éléments que j'ai eu, avant d'être retirée de l'affaire, était que le mode opératoire du 9ème crime, était le même que celui des autres pour les détails donnés officiellement, mais pas pour ceux que la police n'avait pas diffusés. L'hypothèse d'un complice étant à mon avis assez improbable donc, car il aurait vraiment connu le mode-opératoire des crimes.

- Et sinon mademoiselle, pourquoi vous continuez d'enquêter alors que vous avez été retirée de l'affaire ? Vous y avez un intérêt personnel ? Vous n'avez pas confiance en vos coéquipiers, pour résoudre l'affaire ?

Igarashi, fit un petit son d'agacement en tournant légèrement la tête, puis en se grattant un peu les cheveux, avant de répondre.

- Hum... Disons que je crains que quelqu'un que je connaisse puisse être impliqué ici. Disons que j'ai quelques autres hypothèses, et cela ne va pour l'instant pas trop dans le bon sens. Enfin bon, si cela venait à être le cas, je préférerais pouvoir m'en occuper moi-même. Et sinon, à part cela, cela vous direz de faire équipe à deux, plutôt que d'avancer chacun de notre côté ?

Finalement, Fumiya accepta donc sa proposition, même si il était quand même un peu hésitant, la policière ayant le don de le mettre assez mal à l'aise. Bah, de toute façon il n'avait jamais été particulièrement à l'aise avec la police, cela était sans doute une impression un peu rapide. La nuit suivante, Fumiya se réveilla alors en sursaut. Et il se dit "Merde, j'espère que ce n'est pas elle la meurtrière, en fait". Puis finalement il se dit que non, cela serait impossible voyons. Et il se rendormit aussi sec, sans plus y penser.

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