Quand Sonne le Glas
– Chapitre VII –
« Ça ressemble presque à un piège.
– Je ne sais pas... Ça ne lui ressemble pas de proposer un rendez-vous directement en face-à-face.
– Qu'est-ce que tu veux faire alors ?
– Je ne sais pas... Y aller ? Il faudrait juste que je couvre nos arrières, si on peut se débarrasser au moins de lui, ça sera toujours une chose de moins dont il faudra s'occuper. »
*
« La fin de la supercherie ? répéta Chris en fronçant les sourcils. De quoi tu parles ? »
Elle dévisagea avec incompréhension Raphaël, assis en face d'elle sur la chaise de bureau qu'il avait retournée pour lui faire face ; jambes croisées et dos appuyé sur le dossier, il affichait un air nonchalant et espiègle, mais tout autant hostile. Elle remarqua qu'il avait changé sa tenue, et troqué ses vêtements décontractés contre d'autres plus formels, un costume bleu marine taillé près du corps l’amincissait, sa chemise blanche agrémentée d'une cravate d'un rouge flamboyant contrastait avec la couleur foncée du reste de sa tenue. Un chapeau de la même nuance bleutée que le costume avait été posé sur le bureau, sûrement parce que par politesse il l'avait ôté. Pourquoi se vêtir d'une manière aussi classe juste pour parler avec elle – et quelle discussion visiblement – alors que l'envie n'y était très clairement pas.
Elle croisa les bras sur sa poitrine, son air se renfrognant. Lui répondit par un rictus dévoilant ses dents blanches.
« Tu m'as très bien compris. Ne fais pas celle qui ne comprend pas.
– Malheureusement tu ne t'es pas tourné vers la plus futée des nôtres, fit-elle sur le même ton, entrant peu à peu dans son jeu bien qu'elle ignorât où il souhaitait en venir.
– Au contraire. Je pense que tu te caches plutôt bien, quand tu te sens à l'abri... »
Il leva le bras droit ; de sa main pendait le collier au cristal rougeoyant de Chris, dont la ficelle se trouvait enroulée entre les doigts du rouquin. La pierre était froide, la texture ne ressemblait à celle d'aucune pierre précieuse existant, pour le peu qu'il avait pu toucher dans sa carrière de voleur.
Lorsqu'elle vit son bien précieux en sa possession, une sueur froide lui parcourut le dos, depuis la nuque, tout le long de la colonne vertébrale. Quand avait-il mis la main dessus...!?
Elle jeta un rapide coup d’œil dans la pièce et se souvint qu'elle l'avait ôté avant de prendre sa douche ; elle avait été stupide, elle aurait dû se douter qu'elle ne serait pas tranquille.
« Qu'est-ce que tu veux ? grogna-t-elle en se plaçant sur la défensive.
– La vérité.
– Tu la connais déjà la vérité, qu'est-ce qu'il te faut de plus ? »
Le sourire du rouquin s'agrandit un peu plus. Elle n'aimait pas ça.
« J'ai cru comprendre que sans ça vous ne pouviez vous battre, grimaça-t-il en forçant au pendentif un mouvement de balançoire de droite à gauche. Ce serait dommage de le perdre, ou bien de le casser... »
Il le lâcha un instant, avant de le rattraper tout juste avant qu'il ne heurtât le sol. Chris retint un cri. Bon sang, elle perdait peu à peu son sang-froid.
Une douce brise vint soulever légèrement ses cheveux encore humides. Les fins rideaux flottaient eux aussi, emportés par le vent qui s'engouffrait dans la pièce par la fenêtre grande ouverte. Elle fit un rapide calcul mental. Oui, ça pouvait le faire.
« Je n'hésiterai pas à appuyer sur cette faiblesse qu'est la vôtre.
– Sans nous, votre univers est condamné, rétorqua Chris.
– C'est ce que vous affirmez. Étrangement, le bruit est apparu suffisamment longtemps avant vous pour que vous puissiez agir en héros.
– Mais enfin, pourquoi ferait-on ça ? » soupira-t-elle avec agacement, ce qui déplut au rouquin
Il fronça les sourcils, et jeta un coup d’œil dans son dos. La fenêtre était juste derrière lui.
« Ne me provoque pas, grommela-t-il. Ou bien je le détruis.
– Et comment comptes-tu t'y prendre ? » sourit la jeune femme en haussant les sourcils.
Son sourire s'agrandit et, sous les yeux effarés de la Japonaise, il envoya valser le collier par la fenêtre, dans la faible ouverture qui apparaissait entre les rideaux.
Chris sentit son sang ne faire qu'un tour, et sans réfléchir, en laissant son instinct guider ses pas, elle traversa l'espace la séparant de Raphaël en deux foulées, avant de sauter à son tour par la fenêtre.
Dans l'obscurité, elle vit une faible lueur briller ; l'éclat de la lune se reflétait dans le métal de son collier. Elle tendit le bras, étirant son corps le plus possible, jusqu'à sentir la cordelette entre ses doigts.
Killter ichaival tron...
Il y eut un flash aveuglant émanant de son corps qui illumina les environs le temps d'un battement de cils, suivi d'un bruit sourd et d'un cliquetis de métal s'entrechoquant ; elle était parvenue à activer à temps sa relique, lui permettant ainsi de se réceptionner sans heurt. Raphaël pesta, et se précipita à travers le couloir afin de la rejoindre à l'extérieur. Il fallait à tout prix qu'il y arrivât avant qui que ce fût d'autre. Ce fut sans compter la porte d'un couloir adjacent qui s'ouvrit à l'instant où il passa devant, le stoppant net dans sa course. C'était Marie, qui sortait d'un bureau dans lequel elle avait cherché un livre dont elle avait besoin, livre qui avait été posé là pour une raison inconnue. En un premier lieu, elle s'excusa platement d'avoir heurté la personne alors qu'elle passait par là ; lorsqu'elle vit que c'était Raphaël, elle retint un hoquet de surprise, et lui demanda pour quelle raison se trouvait-il là. Il répondit par un bégaiement hésitant, qu'elle coupa en surenchérissant quant au fait qu'il portait sa tenue de Fantôme R. Sa nouvelle hésitation la fit rapidement comprendre qu'il ne s'en était pas tenu à là pour ce soir-là avec les trois adolescentes. Elle posa ses poings sur ses hanches et afficha un air agacé.
« Je peux tout t'expliquer, commença-t-il.
– Oh ça oui, tu vas tout m'expliquer, fit-elle en fronçant les sourcils. Qu'est-ce qui s'est passé ?
– Je suis juste allé voir Chris... mais maintenant je dois sortir. Maintenant. »
Il tenta de s'échapper, mais elle le retint fermement par le poignet.
« Pourquoi ? Qu'est-ce qui s'est passé ?
– Je ne sais pas... Mais je dois y aller, vraiment. »
Il secoua sa main, ce qui fit lâcher prise à Marie, et s'élança dans les grands escaliers ; elle le suivit de près, appelant son prénom et son ton se faisant de plus en plus pressant. Et si Chris le dénonçait ? Bon Dieu, il était foutu, Marie ne lui pardonnerait jamais.
Que puis-je faire pour que le soleil protège la lune ?
Il entendit une voix résonner sitôt eut-il posé le pied dehors, il eut du mal à la reconnaître au premier abord, mais il comprit rapidement qu'il s'agissait là de Kirika. Alors comme ça l'ennemi avait attaqué ?
« Marie, ne reste pas là, va te cacher dans le manoir. Préviens Élisabeth ! » ordonna-t-il sèchement en étendant les bras vers elle, s'excusant intérieurement d'être aussi sec envers elle.
Elle parut hésiter, mais le bruit, le cri, harmonieux d'une créature tranchée par une lame la fit changer d'avis et elle se hâta jusqu'à la pièce où se trouvait sa mère.
Le rouquin, quant à lui, suivit la voix qui chantait à tue-tête.
Rassemblons et tenons chaleureusement notre amour,
Allons, ne faisons qu'un !
Les sons d'un champ de bataille – balles tirées par des mitraillettes et lames s'entrechoquant, ainsi que les cris d'efforts des adolescentes – devenaient de plus en plus clairs tandis qu'il s'en approchait. Lorsqu'il les aperçut enfin, il resta caché et silencieux, et son regard se figea sur Kirika, tant sa tenue, son Symphogear, était elle aussi particulière.
Là où Chris portait une tenue essentiellement dans les tons rouges, Kirika, quant à elle, était vêtue d'un Symphogear dont la couleur dominante était le vert. Le détail qui frappa en premier Raphaël était l'espèce de chapeau de sorcière haut et pointu qui semblait d'une manière ou d'une autre protéger son crâne. Une petite croix blanche était non sans rappeler l'accessoire de la même forme qu'elle gardait accroché dans ses cheveux. Le second détail de sa tenue qui sautait aux yeux était les étranges épaulettes élongées dont les extrémités avaient l'allure de flèches, ou bien de queues de diable, c'était au choix. D'un vert sapin aux reflets métalliques, ce segment de sa tenue lui semblait ne pas être d'une grande utilité, jusqu'à ce qu'il vît des flammes s'en échapper, le faisant comprendre ainsi que cela pouvait servir de propulseurs. À cela s'ajoutaient deux autres petits propulseurs situés à la base de sa nuque. En les observant avec attention, il remarqua les oreillettes qu'elle portait, qui devaient sûrement avoir la même utilité que celles que portait Chris.
À la base de son cou se trouvait un col foncé avec deux bandes d'un vert foncé avec deux bandes plus claires, et entre ses clavicules se trouvait cette espèce de cristal déployé. De là s'étendaient deux bandes blanches partant de chaque côté de son torse, longeant sa poitrine habillée par une sorte de justaucorps de la couleur de l'anis qui descendait jusqu'à son bas-ventre. Le dessous de sa poitrine, ainsi que ses flancs étaient recouverts d'un tissu plus foncé, et dans ce prolongement, une mini-jupe dissimulait des regards le haut de ses jambes. Hormis le haut de ses cuisses, ses jambes étaient recouvertes de collants rayés de vert clair et de blanc ; un petit accessoire en forme de croix du même vert sapin que ses propulseurs était accroché et les maintenait certainement sur le côté. Ses chaussures remontaient jusqu'en dessous du genou, et se constituaient d'une partie de la même teinte de vert foncé puis d'une autre blanche. De hauts talons lui accordaient quelques centimètres de plus, et prenaient une forme particulièrement pointue.
Enfin, ses bras étaient gantés de vert clair jusqu'au milieu du bras, ses avant-bras étaient quant à eux recouverts de tissu blanc. Un gros bracelet foncé serrait chacun de ses poignets en remontant quelque peu sur le dos de sa main, et la dernière phalange de chacun de ses doigts contrastait par sa couleur foncée. Ceux-ci étaient resserrés fermement sur le manche d'une grande faux aux mêmes couleurs que la tenue de sa propriétaire.
Je déborde de « je t'aime » Yes!
En s'entraidant, devenons plus fortes.
Elle se précipita vers un énième monstre qu'elle trancha en deux d'un coup sec entre deux inspirations. Elle planta sa faux dans le sol par la pointe, lames en haut, et se pencha quelque peu en avant, ses deux mains agrippant fermement le manche. Elle resta là, pliée en deux, à reprendre difficilement sa respiration. À côté d'elle, Chris paraissait elle aussi à bout de souffle. Il ne vit pas Shirabe cependant, mais sa voix lui parvint, et elle semblait se porter bien à l'entendre. Dans un éclat lumineux plutôt intense au vu de l'heure et de l'obscurité, les tenues des adolescentes s'évaporèrent, et elles se retrouvèrent toutes trois en pyjamas et chemises de nuit.
Elles échangèrent un regard, et retournèrent à l'intérieur du manoir. Les deux plus jeunes furent agréablement surprises de croiser Raphaël sur le seuil de la porte, mais Chris n'afficha pas la moindre émotion sur son visage, hormis un faux sourire qui servait simplement à faire bonne figure.
« Pourquoi tu es là ? demanda Shirabe en écarquillant ses grands yeux rosés.
– J'ai entendu du bruit... je me suis inquiété.
– Est-ce que tout le monde va bien ? »
La voix hésitante de Marie leur parvint, alors qu'elle s'approchait d'eux aux côtés de sa mère. Cette dernière avait les traits tirés et fatigués, l'annonce d'une attaque sur son domaine avait dû lui faire un choc.
« Venez vous reposer, invita la jeune femme. Il y a des boissons chaudes et des gâteaux. »
Elle ne se fit pas prier deux fois, et rapidement tout le monde la suivit jusqu'au salon de réception situé non loin du point de retrouvailles de fortune. Raphaël resta quelque peu en retrait derrière, et Chris vint lui adresser discrètement quelques mots.
« Il ne s'est rien passé. Je ne t'ai pas vu ce soir. »
La salle où ils arrivèrent était doucement éclairée, chacun prit place sur un des fauteuils, formant ainsi un cercle autour de la table basse où se trouvaient des tasses attendant de recevoir le liquide fumant patientant dans la cafetière fumante remplie de boisson chaude. Kirika et Shirabe restaient serrées l'une contre l'autre, partageant un siège pour deux, et se tenaient fermement la main. Raphaël prit place près de Marie, qui lui murmura quelques mots discrètement.
« Qu'est-ce qui s'est passé ?
– J'étais dans la chambre que vous m'aviez attribuée, fit Chris, quand j'ai entendu du bruit dehors. C'était du noise. Alors j'ai sauté par la fenêtre pour y accéder plus rapidement et ai appelé les filles. »
Elle réalisa que la question ne lui avait pas été posée, et rougit quelque peu, avant de s'excuser. Le jeune homme l'observa en silence, ne comprenant pas la raison pour laquelle elle dissimulait la vérité. Voulait-elle s'en servir comme moyen de pression sur lui ? Non, elle ne pouvait pas être si tordue. Ça n'avait aucun sens.
« Mais, Raphaël, interrogea Élisabeth en penchant la tête d'un air malicieux, pourquoi es-tu Fantôme R ce soir ?
– J'avais un rendez-vous... Vous savez ce que c'est, on ne peut pas se présenter sans une tenue décente. »
De son côté, Kirika chuchota à sa voisine que la situation et les dires du rouquin lui paraissaient louches. Elle eut un hochement d'approbation en retour.
« Tout de même, soupira Marie en sirotant une tasse remplie d'un chocolat chaud sucré, pourquoi l'attaque a eu lieu au manoir... ?
– Le noise ne ressent rien et attaque sans raison. C'est toujours au mauvais endroit, au mauvais moment, annonça tristement Shirabe en portant à son tour une tasse près de ses lèvres. Nous avons juste eu de la chance d'être présentes.
– Vous devez résoudre ce problème, dit alors la duchesse d'un ton grave, en plongeant son dur regard glacé tour à tour dans ceux des adolescentes. Je ne peux me permettre de voir mes concitoyens se faire tuer plus longtemps. Cessez cette folie, je vous en prie.
– Nous le ferons, assura Chris en soutenant son regard. Nous sauverons votre monde. »
Elle entrevit Raphaël rouler des yeux à l'insu de tous, mais ne rajouta rien. Ce problème devra attendre d'être réglé une autre fois.
*
« Tout de même.... Une attaque ici... »
Marie passa une main distraite dans ses cheveux. Ses yeux fixaient le sol avec une lueur d'inquiétude.
« Ça fait froid dans le dos, tu ne trouves pas ? »
Le silence fut sa seule réponse. Elle ne montra pas de réaction quelconque.
« Heureusement que les filles étaient là...
– Ouais, c'est sûr, soupira Raphaël qui tentait tant bien que mal de dissimuler son agacement. C'est sûr qu'elles sont arrivées au bon endroit, au bon moment.
– Toi-même tu le dis, » sourit la jeune femme avec joie.
Elle tourna son visage radieux vers celui du rouquin, un peu plus blasé.
« Je suis vraiment curieuse tout de même. D'où leur vient ce pouvoir... Est-ce que nous aussi on pourrait l'utiliser ? Ça serait bien... »
Le jeune homme se prit un instant à imaginer Marie dans une tenue semblable à celle de Chris ou de Kirika ; il sentit ses joues bouillir et se racla la gorge afin de chasser cette idée bien loin d'être désagréable.
Elle se tourna vers Raphaël, qui fixait le plafond de la chambre, couché sur le lit de la jeune femme. Elle se rapprocha de lui, et vint s'allonger à ses côtés ; elle entoura des siens le bras droit du rouquin en le serrant contre elle, et appuya sa joue sur son épaule. Ses yeux quittèrent l'étendue blanche pour scruter le visage de sa petite amie.
« Est-ce que ça va ? Tu as peur ?
– Un peu, confia-t-elle. Mais comme les filles étaient là... je n'ai plus eu peur.
– Tant mieux alors. Tu sais, si tu as besoin, je peux te réconforter, tu peux me parler. Je serai toujours là pour toi, pour te protéger. Même contre le bruit.
– Tu me le promets ?
– Je te le promets. »
Elle esquissa un sourire et ferma les yeux. Le parfum du jeune homme emplissait agréablement ses narines, et elle resserra un peu plus son étreinte.
« Merci Raphaël. Je ne sais pas ce que je ferais sans toi. »
Il y eut un léger silence entre eux. Puis le rouquin l'embrassa sur le front, et lui murmura :
« Je t'aime, Marie. »
Lorsqu'elle s'éveilla au petit matin en entendant le chant d'un rossignol – si elle ne le confondait pas avec un autre, – Marie fut surprise de constater un vide dans son lit. Bien qu'elle eût été convaincue que Raphaël fût resté toute la nuit avec elle, son absence la surprit. Pourquoi était-il parti, alors qu'il ne perdait pas la moindre occasion pour passer du temps avec elle ? Il devait sûrement avoir ses raisons, comme son emploi à temps partiel ou un énième rendez-vous avec le destin.
Marie soupira, et repoussa le fin drap dans lequel elle s'était enroulée pendant la nuit. Elle posa les pieds sur le sol, enfila les chaussons moelleux qui reposaient au pied du lit, et se prépara à descendre prendre le petit-déjeuner.
*
« Bien. C'est l'heure, comme convenu, au bon lieu, comme convenu. Maintenant, sors de ta cachette, Fantôme R ! »
La voix grondante résonna entre les façades encadrant la ruelle, laquelle possédait un carrefour de chaque côté, offrant de nombreuses possibilités pour la traverser.
Cette voix était celle d'un homme atypique qui se tenait droit en plein milieu de l'allée. Il était plutôt grand et plutôt mince, on eût presque dit un squelette. Son teint était foncé, et cela accentuait d'autant plus la couleur violacée des cernes qui bordaient ses yeux rougis par la fatigue et l'épuisement. Son allure éreintée était elle-même renforcée par sa chemise blanche froissée et déboutonnée au niveau du col, ce dernier étant plus ou moins maintenu par une cravate au nœud défait. Une ceinture foncée maintenait son pantalon brun visiblement un peu trop grand au niveau des hanches ; sûrement avait-il subitement maigri à cause de son travail beaucoup trop prenant et surtout excessivement stressant.
À ses côtés se tenait une jeune personne dont l'âge devait tourner autour de la vingtaine. Son apparence était androgyne ; les traits de son visage étaient particulièrement fins, mais sa silhouette se camouflait sous sa tenue, si bien qu'on ne pouvait en distinguer les formes. Elle aussi avait revêtu une chemise, mais en portait le col boutonné jusqu'en haut. Un balo dont la corde verte était maintenue par une agrafe ornementale entourait son cou. Un large pantalon gris lui recouvrait les jambes, c'était à se demander comment elle supportait la chaleur. Une imposante casquette reposant sur ses cheveux blonds en bataille et une longue veste, toutes deux de couleur foncée, semblaient ne pas aider non plus.
« Excusez-moi pour le retard, lança une voix amusée. Je ne pouvais pas résister à la vue de vos mines agacées. »
Apparaissant dans leur champ de vision comme s'il était sorti de nulle part, Fantôme R s'avançait d'un pas déterminé, sa tignasse rouge vif flottant légèrement dans la mince brise qui soufflait. À ses côtés trottinait son fidèle compagnon, un canidé au poil blanc court qui d'ordinaire n'en perdait pas une pour grogner et mordre les officiers de police.
« Bonjour, inspecteur, Charlie, fit-il en inclinant la tête vers ses deux interlocuteurs. Comment vous portez-vous ? »
Il n'y eut aucune réaction. Il ne releva pas.
« Ainsi je vois que vous avez reçu mon message. Je suis flatté que vous ayez pris du temps pour moi Rassurez-moi, vous êtes bien venus seuls ?
– On a fait l'effort de nous plier à tes exigences, tonna la voix de l'homme. Alors parle !
– Qu'est-ce que tu entends par « moyen de combattre le bruit » ? renchérit la jeune personne, dont le timbre laissait grandement supposer que c'était une jeune femme.
– Bien, bien, je vais vous expliquer. »
Il se gratta quelque peu la tête, et commença sa maigre explication. Vu de loin, cela paraissait étrange de voir un individu se tenir à deux mètres de distance de ses deux interlocuteurs.
« J'ai rencontré trois individus qui ont la capacité de se battre contre le bruit, et de le détruire, sans se faire tuer s'ils les touchent. J'ai fait quelques recherches, et il semblerait que ces armes soient des reliques des temps anciens. Je ne peux malheureusement pas vous le montrer de moi-même, car seules ces personnes peuvent s'en servir, mais peut-être feront-elles leur apparition d'elles-mêmes.
– Tu dis n'importe quoi, cracha Charlie.
– Je perds mon temps avec toi, grommela l'inspecteur de police en sortant de la poche arrière de son pantalon un paquet de cigarettes dont il en sortit une, avant de l'allumer et d'en tirer quelques bouffées. Je savais que je n'aurais pas dû croire à ce message... »
Son grognement fut interrompu par celui du canidé, qui regardait dans sa direction. Depuis quand ce chien montrait un quelconque signe d'affection en lui reprochant de fumer ? Il haussa les épaules. Puis en voyant Fantôme R reculer en affichant une mine inquiète, il fut pris d'un léger doute. Il se retourna, afin de constater de ses propres yeux s'il y avait ou non un problème.
Lorsqu'il vit les monstres s'approcher lentement vers lui, il en fit tomber sa cigarette.
D'un réflexe, il sortit son arme à feu et les pointa. Il savait que les armes banales n'avaient aucun effet sur ces choses, mais tout de même, il espérait qu'elles eussent un tant fût peu de conscience et comprissent que c'était une menace. En vain.
Cela ne s'annonçait pas pour le mieux.
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Sidenotes
La chanson utilisée ici est Dangerous Sunshine (デンジャラス・サンシャイン), chantée par Akatsuki Kirika (CV. Kayano Ai), et est sa chanson d'attaque utilisée dans la S4, Symphogear AXZ.