Une nouvelle vie pour Sarah
L’université de Durham, à Middlesbrough, était un grand château bâti de briques. Un portail en ferraille donnait sur une immense cour parsemée de cercles de pelouse verdoyante et parfaitement tondue, parmi des chemins en dalles. Des tables et des bancs étaient disposés sur les cercles de pelouse, des étudiants déjeunaient ou lisaient. Il y avait également une énorme fontaine en pierre. Le cadre était vraiment sublime.
« Comme c’est grand ! s’exclama Becky.
— Oui, nous allons nous rendre à la réception, répondit Sarah.
— Oui allons-y, conclut en retour son amie. »
Arrivé dans l’établissement, le groupe fut impressionné par l’architecture de ce château, qui avait été réhabilité pour accueillir des étudiants. Sarah se présenta à la réception.
« Bonjour Madame.
— Mademoiselle. En quoi puis-je vous aider ?
— Je recherche une amie qui étudie ici, Marguerite Saint-John.
— Un instant je vous prie. »
La femme regarda la liste des élèves dans son registre et s’arrêta sur le nom de Marguerite.
« Son cours ne devrait pas tarder à finir. Voulez-vous patienter ici ?
— Oui nous attendons. Merci. »
La réceptionniste leur indiqua où se trouvaient les sièges et le groupe s’assit.
« C’est vraiment une belle université. Marguerite a de la chance, dit Sarah.
— Oh oui c’est vrai ! C’est vraiment beau !
— J’ai moi aussi étudié à l’université en Inde, mais cela n’avait rien à voir avec tout cela, intervint alors Ram Dass.
— Ah oui ? Et qu’avez-vous étudié ? demanda alors Becky.
— Les soins aux animaux. J’ai travaillé dans un parc naturel en Inde. »
Leur conversation fut coupée par un petit cri et un bruit sourd. Des rires s’élevèrent dans tout le couloir. Une jeune fille avait trébuché et se retrouvait au sol les quatre fers en l’air, avec ses livres éparpillés autour d’elle. Elle était rousse et ses cheveux étaient noués en deux longue nattes qui lui tombaient jusqu’à la poitrine. Elle se releva, rouge de honte et regarda les personnes assises devant la réception. Le groupe fit de même et quand le regard de la jeune fille rousse croisa le regard de Sarah, ses yeux s’illuminèrent de joie.
« Sarah ! cria-t-elle.
— Marguerite ! cria à son tour la jeune fille en se jetant dans ses bras.
— Oh Sarah ! Mais qu’est-ce que tu fais ici ? »
Elle se tourna ensuite vers Becky et l’embrassa à son tour. Elle fit un signe de tête à Ram Dass qui la salua dans sa révérence habituelle.
« Nous sommes venus te voir Marguerite. Tu ne t’es pas fait mal au moins ?
— Oh non ! Je suis habituée tu sais ! Rappelle-toi la gaucherie dont je faisais preuve déjà au pensionnat.
— Oui c’est vrai. Tu avais l’art de la maladresse, répondit Sarah en rigolant.
— Oh la la ! Qu’est-ce que j’étais gourde et ça ne s’est pas arrangé avec le temps. Et toi Becky comment vas-tu ?
— Très bien merci. Tu as de la chance d’étudier dans un si bel établissement !
— Oui c’est vrai. »
Elle marqua une pause et regarda Ram Dass.
« Oh ! Mais je vous reconnais ! Vous êtes le serviteur de Mr Crisford ! C’est grâce à vous si Sarah est toujours parmi nous ! dit-elle avec de grands yeux admiratifs.
— Oui Mademoiselle. Je m’appelle Ram Dass.
— Enchantée Monsieur Ram Dass. »
Ce dernier s’inclina de nouveau pour la saluer.
« Je comptais déjeuner à l’extérieure aujourd’hui. Vous m’accompagnez ? dit soudain Marguerite.
— Oui bien sûr ! Nous aurons tout le loisir de discuter ainsi, répondit Sarah.
— Très bien. Je connais un endroit parfait ! ajouta Marguerite enjouée. »
Le groupe quitta alors l’établissement et se rendit dans un petit salon de thé où ils s’assirent à une table.
« Alors Sarah ? Tu es enfin revenue ? Cela fait une éternité ! Tu m’as beaucoup manquée tu sais, commença Marguerite
— Oui je sais. Et je suis désolée de ne pas être revenue comme promis. Vous m’avez toutes manqué aussi. J’ai dû m’occuper des suites à donner au décès de mon père et le temps a fait que je suis restée en Inde.
— Vous avez aussi rencontré Daniel ! rétorqua alors Becky.
— Oui c’est vrai, confirma alors Sarah.
— Daniel ? Tu es mariée Sarah ? dit Marguerite.
— Non. Nous sommes juste fiancés. Le mariage est prévu pour la fin d’année, répondit-elle avec un sourire forcé.
— Oh la la ! Tu m’inviteras dis ?
— Oui. Bien sûr. »
Sarah ne comprenait pas cette gêne qu’elle ressentait. Pourtant elle avait été heureuse de se fiancer avec Daniel. Ses pensées n’arrêtaient pas de tourner autour de Peter et cela la décontenançait grandement. C’est pourquoi elle changea tout de suite de sujet.
« Alors Marguerite ? Comme ça tu as décidé d’étudier la littérature ?
— Et oui ! J’ai réussis à lire tous les livres que mon père m’envoyait, et je lui demandais même de m’en envoyer d’autre. Il était ravi !
— Cela ne m’étonne pas, répondit Sarah.
— Et attend, j’ai aussi appris assidûment le français, et aujourd’hui je suis capable de lire des livres écrits dans cette langue !
— Je suis contente et je t’en félicite ma petite Marguerite.
— Merci Sarah. »
Becky se mit soudain à sourire sous le regard interrogateur de ses deux amies.
« Vous vous souvenez quand nous nous sommes amusées à être de grandes dames invitées au château de Versailles ?
— Oh oui ! Comment pourrions-nous l’oublier ! Sarah, grâce à ton imagination tu nous avais fait vivre une soirée féérique ! dit Marguerite.
— C’est exact ! Ce fut une merveilleuse soirée, répondit-elle.
— Et ensuite, ce beau moment a été gâché par Mademoiselle Mangin, répliqua Becky.
— Oh la la ! Comme elle t’avait punie ! répondit Marguerite encore peinée.
— Oui. Elle m’avait de nouveau privée de manger, dit alors Sarah songeuse. Mais cela est du passé et nous ne devons penser qu’à ce merveilleux moment, poursuivit-elle.
— Oui tu as raison ! dirent en chœur Becky et Marguerite. »
Elles ne purent s’empêcher de rigoler. Ram Dass, lui, écoutait patiemment leurs récits et était toujours subjugué par Becky. Il la trouvait tellement attendrissante et belle. Et elle était d’autant plus rayonnante en présence de ses amies. Une fois leurs rires estompés, Sarah demanda :
« Dis-moi Marguerite. As-tu des nouvelles de Lottie ? »
Marguerite hésita à répondre.
« Et bien… Non. Quand je suis partie, elle m’a dit qu’elle ne tarderait pas à quitter le pensionnat si tu ne revenais pas.
— Elle m’en a voulu n’est-ce pas ? dit Sarah d’une voix pleine d’angoisse.
— Tu sais Lottie était jeune quand tu es partie, répondit alors Marguerite.
Elle hésita un instant et poursuivit :
« Et c’est vrai qu’elle attendait que tu reviennes quelques mois plus tard…
— Tu ne sais donc pas où elle est aujourd’hui ?
— La dernière fois que j’ai eu de ses nouvelles, elle était rentrée chez elle à Manchester.
— Et bien nous nous y rendrons. Je veux absolument la voir pour m’excuser et savoir si tout va bien pour elle. »
Le groupe continua alors leur déjeuner. Sarah, Becky et Marguerite auraient voulu discuter pendant des heures, mais cette dernière devait reprendre ses cours et il fallut écourter leur conversation. Elles se dirent au revoir, Sarah et Marguerite échangèrent leurs coordonnées et le groupe repartirent.
« Que faisons-nous maintenant Sarah ? dit Becky.
— Nous devons aller à Manchester mais vu l’heure je ne sais pas ce qui serait le plus judicieux.
— Si vous permettez Mademoiselle, nous pourrions retourner à la gare, nous renseigner sur les trains à destination de Manchester et voir si nous pouvons partir ce soir ou bien si nous devons attendre demain ?
— Oui c’est une bonne idée Mr Ram Dass. »
Ils arrivèrent en début de soirée à la gare et décidèrent de passer la nuit dans un hôtel et de partir le lendemain matin. Il y avait environ deux heures de trajet en train. Le mieux était de se reposer puis de repartir lors d’une nouvelle journée.