Entre infini et au-delà

Chapitre 27 : You've got a friend in me

3647 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 20/02/2020 22:26

— C’est quoi, un Gijinka ?

Ils avaient quitté la salle de bain et s’étaient installés dans la chambre de Régis, où ils avaient étalé sur le lit tous les documents d’Éric, ainsi que les croquis que Cassy venait de réaliser, lorsqu’elle se résolut à poser cette question.

— Une créature mythique mi-humaine mi-pokémon, issue de vieilles légendes. Il existe plusieurs versions de leur histoire, mais toutes confèrent aux Gijinkas une réputation épouvantable. Comme tu le sais, je suis d’une nature plutôt sceptique, et je ne m’intéresse pas beaucoup aux récits qui ne sont pas basés sur des faits avérés, mais il n’empêche que j’en ai entendu parler.

— Raconte-moi ce que tu sais, s’il te plaît.

— Ça risque de ne pas te plaire, prévint Régis, car ce que l’on m’a rapporté remet en question les bases mêmes de la religion arcésienne.

— Ce n’est pas grave. Vas-y.

— Très bien. Selon la Pokible, l’origine du schisme entre Arceus et Giratina résiderait dans le fait que ce dernier ait décidé d’apporter la connaissance aux humains, en dépit de l’interdiction de l’Alpha, ce qui aurait éveillé son courroux. Par la suite, le Dragon, incapable de se soumettre au joug de son créateur, se serait mutiné, entraînant de ce fait son bannissement dans le Monde Inversé.

Cassy hocha la tête. C’était en tout cas l’histoire qu’elle avait apprise enfant, dans le livre saint, mais en dépit de sa foi, elle était curieuse de découvrir une autre version des évènements.

— Dans le récit que je m’apprête à te faire, les Gijinkas sont présentés comme la toute première espèce créée par les légendaires, poursuit Régis. Ils étaient bien plus forts, plus robustes et plus malins que n’importe quel humain ou pokémon, puisqu’en parfait mélange des deux, ils conciliaient tous leurs atouts. Giratina, qui était sans cesse en désaccord avec Arceus, a cru voir en eux le moyen de le renverser. Il est descendu sur Terre pour lever une armée, et nombreux sont les Gijinkas qui ont accepté de le suivre dans son offensive. Ça n’a toutefois pas suffi. L’Alpha serait parvenu, dit-on, à vaincre de justesse les partisans du renégat, avant de bannir celui-ci dans le Monde Inversé, sans autre forme de procès.

Régis s’interrompit un bref instant et posa les yeux sur la copie de l’un des dessins d’Éric, qui lui arracha un frisson.

— Arceus, qui n’avait jusque-là pas pris conscience de la trop grande puissance qu’il avait conférée aux Gijinkas, a estimé qu’ils pouvaient représenter une menace pour l’équilibre, et a donc décidé d’y remédier. Il les a scindés en deux groupes : ceux qui lui étaient restés loyaux sont devenus des pokémon, tandis que ceux qui l’avaient trahi en suivant Giratina ont été transformés en humains. L’Alpha était miséricordieux, cependant. Quand, par la suite, il s’est aperçu que les Hommes se repentaient sincèrement, il a offert aux deux espèces un moyen de recouvrer l’osmose qu’ils avaient perdue, à travers l’art du dressage.

Un bref silence suivit la fin du récit de Régis, permettant à Cassy d’assimiler ce qu’elle venait d’entendre, et surtout d’y réfléchir. Perplexe, elle finit par déclarer :

— Il y a plusieurs points qui m’interpellent, dans cette histoire. Tout d’abord, l’an 0 de notre calendrier est censé correspondre au premier contact direct que Giratina a établi avec les humains. Si son bannissement était antérieur à notre apparition, ça n’aurait pas grand sens.

— Pardonne-moi, Cassy, mais la Pokible n’en a pas forcément plus. Ce n’est jamais qu’un livre qui a été écrit par des mortels, pour d’autres mortels. Il n’a d’essence divine que celle que ses fidèles veulent bien lui prêter.

— C’est justement ce qui me taraude aussi. Éric a toujours refusé de croire au contenu de la Pokible, qu’il qualifiait de « fable ». Or, tu viens d’affirmer que les Gijinkas sont des créatures mythiques, ce qui fait qu’elles n’ont pas plus de fondements que la religion arcésienne. Enfin, et surtout… Qui a parlé de ces hybrides à mon frère ? Nos parents ? Pourquoi à lui et pas à moi ?

— Peut-être parce que tu avais la foi, et que cette légende aurait mis en doute toutes tes convictions.

— Si j’ai la foi, c’est parce que dès mon plus jeune âge, ils me l’ont transmise. Ma mère m’a appris à lire avec la Pokible. Mon père m’encourageait à prier tous les soirs. S’ils croyaient en autre chose que le livre saint, pourquoi avoir fait en sorte que j’y attache tant d’importance ?

La curiosité initiale de Cassy avait cédé la place à la nervosité. Ce n’était pas les Gijinkas qui la rendaient anxieuse, cependant, au contraire de Régis, mais les innombrables questions qui entouraient sa famille. Elle s’en posait tellement qu’elle se surprit à se demander si, finalement, elle les avait vraiment connus.

— Cassy… C’est beaucoup de révélations pour une soirée, et il commence à se faire tard, souligna Régis. Nous devrions éteindre et aller nous coucher avant que mon grand-père nous surprenne. Si j’en crois l’heure, les épreuves du Pokéathlon vont bientôt se terminer.

Cassy acquiesça, quoique sans conviction. Après ce qu’elle venait de découvrir, elle doutait de pouvoir fermer l’œil. Elle espérait que les notes d’Éric lui apporteraient des réponses, au lieu de quoi elles soulevaient quantité d’interrogations supplémentaires. Régis dut remarquer son dépit, car il proposa :

— Tu veux dormir ici ?

— Non, je… Il faut que je réfléchisse, et je n’y arrive jamais aussi bien que lorsque je suis toute seule. Merci pour ton aide, Régis.

Elle l’embrassa sur la joue, puis se mit debout pendant que son ami rassemblait les documents éparpillés sur le matelas. Au moment de quitter la pièce, elle l’entendit refermer le tiroir dans lequel il les rangeait habituellement, après quoi elle gagna sa chambre en traînant des pieds.

Cassy s’étendit sur son lit, les yeux rivés sur le plafond qu’elle ne pouvait distinguer en raison de l’obscurité. Perdue dans ses pensées, elle demeura un long moment ainsi. Le professeur Chen – qu’elle avait entendu marcher dans le couloir – était monté depuis plus d’une heure lorsqu’elle se résolut à bouger.

Elle commença par allumer sa lampe de chevet. Puisque son employeur devait dormir à poings fermés, il ne risquait pas de remarquer la lumière sous sa porte, et même si c’était le cas, elle pourrait toujours prétexter une insomnie, ce qui n’était pas totalement inexact. Elle se munit ensuite d’un calepin et d’un crayon, et entreprit de reproduire de mémoire les symboles qui composaient les notes d’Éric.

À force de les étudier, elle les connaissait par cœur, aussi n’eut-elle aucun mal à y parvenir. Jusqu’à présent, Régis et elle avaient échoué à donner un sens à la plupart d’entre eux, mais peut-être qu’en essayant de les interpréter différemment, à partir de ce qu’elle avait appris au sujet des Gijinkas, elle trouverait peut-être quelque chose.

La fatigue la rattrapa avant l’aube. Cassy avait tenté de lui résister autant que possible à partir du moment où elle s’était manifestée, en n’hésitant pas pour cela à se donner des claques sur les joues à chaque bâillement, car elle ne voulait pas interrompre ses réflexions, mais son corps eut le dernier mot. Ses paupières se fermèrent et elle s’endormit sur la page qu’elle était en train d’examiner.

Le chant d’une Nirondelle la réveilla. Elle était allongée dans le sens inverse du lit, le visage enfoui au milieu des feuilles volantes qu’elle avait arrachées de son calepin au cours de la nuit. Elle battit des paupières, et dès qu’elle fut suffisamment lucide pour réagir, elle se demanda si c’était bien le timbre mélodieux du pokémon qui l’avait tirée du sommeil ou les coups frappés à la porte.

— Cassy ? appela Régis avec insistance. Tu es là ? Cassy !

— Excuse-moi, marmonna-t-elle d’une voix pâteuse en allant lui ouvrir, les yeux gonflés et les cheveux ébouriffés. J’ai passé des heures à analyser les symboles d’Éric sous un autre angle et je suis épuisée. Enfin, ça en valait la peine, parce que j’ai peut-être eu une idée.

— Vraiment ? C’est formidable ! Par contre, j’ai bien peur qu’on ne puisse pas en discuter dans l’immédiat. Je suis désolé de te brusquer, mais il y a beaucoup de travail qui nous attend aujourd’hui. C’est d’ailleurs pour ça que je suis venu te chercher. Tu sais quel jour on est ?

Cassy cligna des yeux. Elle avait du mal à les garder ouverts et son cerveau était encore trop embrumé pour lui permettre d’explorer ses recoins à la recherche de l’information adéquate.

— C’est la distribution d’avril ! s’exclama Régis. Tous les enfants qui ont fêté leurs dix ans au cours des quatre dernières semaines viennent chercher leur premier pokémon.

— Ah oui… Pardon, ça m’était complètement sorti de l’esprit. Je m’habille et je descends, d’accord ?

Elle déroba le croissant que son ami avait à main et referma la porte de sa chambre avant qu’il ait eu le temps de protester. Elle troqua en hâte sa chemise de nuit contre des vêtements diurnes, puis ressortit pour dévaler les escaliers en mordant la viennoiserie à pleines dents.

Elle était en retard, mais moins qu’elle le redoutait, comme le lui révéla la pendule du laboratoire désert, qu’elle traversa au pas de course. Elle prit dans le garde-manger toutes les boîtes qu’elle pouvait transporter en un seul voyage et effectua probablement la tournée d’alimentation la plus rapide qu’elle avait réalisée jusque-là.

— Terminé ! annonça-t-elle fièrement une demi-heure plus tard, essoufflée, en retrouvant Régis.

— Si tu crois que ça m’empêchera de faire un rapport à mon grand-père sur ta négligence… la taquina-t-il. Tu as de la chance qu’il soit parti tôt au Centre Pokémon de Jadielle pour se faire remettre les starters des apprentis dresseurs. Il n’aura pas eu à assister à un tel manque de zèle.

Régis posa le chiffon avec lequel il était en train d’astiquer les différentes fioles qu’il venait de laver pour observer attentivement Cassy. Ses lèvres s’étirèrent pour former un sourire en coin lorsqu’il déclara :

— Puisque tu as fini, tu ferais bien de monter te coiffer. Avec la tête que tu as, tu ressembles à un vieil épouvantail et tu risques d’effrayer ces pauvres petits qui n’ont rien demandé.

L’adolescent fit un pas sur le côté pour échapper au poing que Cassy tenta d’abattre sur son épaule, après quoi elle tourna les talons. Revenue dans sa chambre, elle s’assura qu’elle n’avait pas besoin de changer de tenue, car il n’était pas rare qu’elle rentre couverte de boue, ne fut-ce qu’à cause des pokémon qui se frottaient contre son pantalon pour lui témoigner leur affection, et mit un peu d’ordre dans sa chevelure. Cela fait, elle redescendit.

Comme Régis était encore occupé à nettoyer et à ranger les instruments de travail de son grand-père, elle décida de lui offrir son aide. Si, au début, Cassy se tenait à distance du matériel scientifique, elle avait depuis longtemps prouvé qu’elle n’était pas maladroite et qu’elle pouvait le manipuler sans risque de casse.

— Ce n’est pas ça qui va me faire oublier que tu me dois un croissant, commenta Régis alors qu’ils avaient presque terminé.

— Si on se dépêche, il nous restera un peu de temps avant le retour de ton grand-père et l’arrivée des enfants. Tu pourras en manger un pendant que je t’expliquerai ce que je pense avoir déchiffré cette nuit.

Ils achevèrent de rincer et d’essuyer les dernières éprouvettes qui s’alignaient devant eux, puis Régis monta à l’étage chercher les notes d’Éric. À son retour, Cassy l’attendait dans la cuisine avec un croissant dans une main, un pain au choccolat dans l’autre, et deux grands verres de jus d’oran posé sur la table.

— Alors ? interrogea le jeune scientifique en veillant à ne pas mettre des miettes partout. Qu’est-ce que tu as trouvé ?

— Regarde ce symbole. On dirait une croix, ou un X, mais son aspect bombé nous avait interpelés. En me basant sur ce que nous avons découvert cette nuit, je serais tentée de croire qu’il fait référence aux Gijinkas. Si ce pictogramme a une forme étrange, c’est parce qu’il est constitué de deux hélices, et même si je ne travaille pas dans un laboratoire depuis aussi longtemps que toi, je sais que les hélices représentent…

— L’ADN ! Bien sûr ! Deux segments entrelacés… L’humain et le pokémon. Excellente déduction, Cassy !

— Je n’ai aucun mérite, ça m’a paru couler de source par rapport aux dessins. Le reste est plus intéressant, selon moi. Si tu as effectivement raison et que le huit de l’infini se réfère au commencement, alors je pense que les Gijinkas sont ultérieurs à cette période, en dépit de l’histoire que tu m’as racontée cette nuit.

— Qu’est-ce qui te permet d’en arriver à cette déduction ?

— La façon dont sont placés les pictogrammes. Il y en a beaucoup qui semblent graviter autour de celui qui, d’après toi, marque le début de quelque chose, mais pas le symbole de l’hybride. Hier, tu as souligné qu’il était possible que ce point de départ soit la naissance d’Arceus ou celle du monde, avant de rejeter cette éventualité à cause du manque de foi de mon frère. Or, nous savons désormais que, pour une raison qui m’échappe totalement, il étudiait une légende. Donc… Pourquoi pas ? Et s’il s’agit bien de l’origine du monde…

— Les Gijinkas n’en faisaient pas partie, conclut Régis. Si on veut en découvrir davantage, il faudrait probablement explorer leur mythe plus en détail, mais c’est un sujet très tabou. Nous ne pouvons interroger personne sans risquer d’éveiller les soupçons, voire pire. Il faut une excellente raison pour oser lancer une telle conversation.

— On t’en a pourtant déjà parlé, non ?

— C’était le professeur Orme. Mon grand-père m’a envoyé passer quelques semaines chez lui, l’été dernier, afin que je me familiarise avec un autre environnement et une méthode de travail. À ce moment-là, il étudiait la reproduction pokémon, et ma curiosité m’a incité à poser, dans ma naïveté, la question qu’il ne faut jamais évoquer.

— Laquelle ?

— Est-ce qu’un humain peut avoir un enfant avec un pokémon ? Tu l’ignores peut-être, mais la poképhilie est hautement réprimandée par la loi, alors l’idée d’engendrer une descendance, c’est…

Régis grimaça, nauséeux. Visiblement, il blâmait encore mentalement le jeune ingénu qu’il était à l’époque, et qui aurait mieux fait de tenir sa langue. Même pour Cassy, qui n’avait pourtant qu’une vague connaissance des mœurs du monde qui l’entourait, l’idée de s’accoupler avec un pokémon était tout simplement immonde.

— Et la bibliothèque de Jadielle ? interrogea-t-elle afin de remettre la conversation sur des rails dont il aurait finalement été préférable qu’elle ne se détourne pas. Est-ce qu’ils ont des livres sur le sujet ? On pourrait se rendre sur place et les consulter.

— En fait… Je ne crois pas que ce soit le meilleur endroit où chercher. Pas plus que je ne suis le mieux placé pour t’aider.

— Que veux-tu dire ?

— Tu es revenue à Kanto convaincue que les notes d’Éric traitaient de science, et qu’il serait par conséquent à ma portée de les déchiffrer, or il me paraît clair, à présent, que nous avons fait fausse route. Ce n’est pas moi qu’il te faut pour comprendre les travaux de ton frère, mais quelqu’un qui a de solides bases en matière de mythes et de légendes, bien plus solides que mes malheureuses connaissances. Et ce n’est pas à Kanto que tu trouveras cette personne.

— Cynthia… devina Cassy. Mais elle a déjà eu ces documents entre les mains, et elle n’a pas plus réussi que nous à leur donner un sens.

— Sinnoh, et en particulier le Mont Couronné, sont considérés comme le berceau du monde, ou son origine, si tu préfères. Tu m’as aussi expliqué qu’on pouvait trouver les glyphes utilisés par ton frère pour représenter les types gravés aux Colonnes Lances. Pour moi, c’est évident : même si Cynthia ne détient pas les réponses que tu cherches, vous aurez plus de chance de les obtenir dans sa région.

Cassy perçut très distinctement le soupçon de mélancolie qui faisait vibrer la voix de Régis, et remarqua également le voile de tristesse qui s’était abattu sur son regard. C’était à contrecœur qu’il venait de lui soumettre cette proposition, car il n’avait aucune envie de la voir repartir si vite. Elle-même en était soulagée.

Régis ignorait qu’elle projetait de quitter à nouveau le Bourg-Palette à l’instant même où elle aurait une nouvelle piste à explorer, et bien que cela puisse s’apparenter à de la lâcheté, Cassy préférait ne pas avoir à le lui annoncer de son propre chef. En lui donnant ce conseil, il lui offrait la porte de sortie dont elle avait besoin pour les préserver, son grand-père et lui.

— Régis… murmura-t-elle en posant sa main sur la sienne. Je ne veux pas te faire de peine. Je tiens énormément à toi, tu en as conscience, mais…

— Tu n’as pas à te justifier, Cassy. Si je suis devenu scientifique, c’est en partie parce que j’ai réalisé que rien n’importait plus que le savoir et la connaissance. Si j’étais à ta place, je pense que moi aussi, je voudrais découvrir la vérité, à n’importe quel prix. C’est ta vie, ta famille… Moi, je suis juste un ami, et les amis sont là pour nous soutenir, non ?

Il se força à esquisser un sourire, qui ressemblait davantage à une grimace chagrine. Cassy entrelaça ses doigts avec les siens et se pencha vers lui pour l’embrasser sur la joue, avant de blottir son visage dans le creux de son cou.

— Pas juste un ami. Tu es mon meilleur ami. Et où que je sois, quoi que je fasse, ça ne changera jamais. Même si je devais voyager aux quatre coins du monde pendant des années, il ne se passerait pas une minute sans que je pense à toi.

— Je crois que mon grand-père sera encore plus peiné que moi lorsqu’il apprendra que tu vas de nouveau nous abandonner. Le laboratoire paraît tellement vide et morne, sans toi… Qui aurait songé que ta seule présence nous deviendrait à ce point indispensable ?

Régis porta la main de Cassy à ses lèvres et y déposa un baiser, avant de l’enlacer. Ils restèrent ainsi un long moment, sans prononcer un mot, jusqu’à se détacher progressivement l’un de l’autre. L’adolescente avait beau savoir qu’il s’agissait d’une nécessité, elle ne se réjouissait pas plus que lui de la perspective d’être encore séparés, et cette fois-ci peut-être pour de bon, ou du moins jusqu’à ce que tout danger soit écarté.

— Il faudrait avertir Cynthia de tes plans, non ? songea Régis, qui s’était mis à faire tournoyer un crayon entre ses doigts.

— Comment ? Sa grand-mère n’a pas de visiophone, et si ça se trouve, elle n’est même plus à Célestia.

— Ne t’inquiète pas, j’ai plus d’un tour dans mon sac.

Régis ponctua ses paroles d’un clin d’œil, puis repoussa sa chaise pour se mettre debout. Cassy le suivit du regard jusqu’à ce qu’il disparaisse hors de la pièce, après quoi elle ramena son attention sur les notes d’Éric. Quand elle saurait enfin la vérité, cela lui permettrait peut-être de cesser de fuir, et ainsi de profiter pleinement de la vie que le Bourg-Balette avait à lui offrir.

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