Mechamon Iris

Chapitre 45 : Pardon

2816 mots, Catégorie: M

Dernière mise à jour il y a 5 mois

VI - Safrania


Chapitre 45 - Pardon


“Sabrina…?”


Je sens mon corps devenir de plus en plus froid, alors que la tête de ma meilleure amie se décale peu à peu dans une position étrange… avant de se détacher de son corps.


Le bruit sourd de l’impact entre sa tête et le sol de mon cockpit résonne dans mes oreilles, stoppant mon cœur pendant une milliseconde.


Qu’est-ce qu’il se passe…? C’est quoi ce sentiment étrange que je ressens…? Comme… un déjà-vu…?


J’ai envie de hurler, mais aucun son ne sort. Mes mains tremblent, mais j’essaie quand même de tirer le col de la robe de Sabrina afin de voir son cou.


Il n’y a pas de sang. Et des fissures s'étendent en partant de l’endroit où la tête fut séparée du corps. Je ravale alors ma salive, puis, prenant mon courage à deux mains, regarde directement la « blessure ».



“Un robot…”


Il y a un trou avec des pièces mécaniques ainsi que des fils s’enfonçant plus loin à l’intérieur de son corps. Pas de sang. Pas de chair. C’est comme une poupée à qui on aurait arraché la tête.


Sabrina est un robot… depuis le début ? Je me sens loin de tout soudainement. Comme si le monde qui m’entoure n’existait plus. Comme si j’étais spectatrice de ma propre vie, alors que je repense à chaque moment passé avec elle.


C’est… C’est logique maintenant que j’y pense. Elle a toujours été un peu bizarre. Elle était super intelligente, mais ne voulait jamais courir ou faire des activités physiques. C’était par peur de se casser…?


Un instant…


Je lève les yeux en direction du robot de chantier qui, au passage, ne bouge plus depuis plusieurs minutes maintenant. La voix de son pilote… C’est la même que celle du pilote du robot qui nous a attaqué lorsqu’on fuyait Céladopole !


On en avait parlé, plus tard, avec Azul et Erika. Ils ont dit que le pilote avait hurlé mon nom d’emprunt avant de se crasher. Sur le coup, je n’y ai pas prêté plus attention que ça, mais…


“... Sabrina ? C’est toi, pas vrai ? Dans ce robot…” je demande d’une voix calme, posant doucement le corps de la poupée que je tenais sur le sol, avant de fixer mon adversaire du regard.


“......”


Aucune réponse. Mais j’ai le sentiment que ce silence parle plus que ce qu’il n’y paraît.


“J.. Je ne comprends pas tout ce qu’il se passe… Mais c’est un malentendu, n’est-ce pas ? O.. On est toujours amies, n’est-ce pas…?”


Finalement, un son sort du robot me faisant face. On dirait une personne qui a du mal à respirer, ainsi que des reniflements. Est-ce qu’elle pleure…?


“Nous n’avons jamais été amies…” dit-elle, entre deux snifs.


Alors c’est bien elle. La situation est vraiment bizarre. Une personne avec une voix d’adulte, qui pleure comme un bébé, parlant au nom d’une enfant… Mais peu importe. Même si mon cerveau a du mal à suivre, je dois rester calme en attendant d’avoir plus de réponses.


“Tu peux m’expliquer ce qu’il se passe…?”


Quelques secondes s’écoulent avant que la personne que je suspecte d’être Sabrina me réponde enfin.


“Je t’ai menti depuis le début. Je ne suis pas Sabrina. Je ne suis pas une enfant. Et surtout, je ne suis pas ton alliée…”


Alors tout était un mensonge…? C’est difficile à avaler… Ça veut dire qu’elle a fait tout ça pour me manipuler ? Mais alors, pourquoi…


“Tu commences à comprendre ? Ce sont les méthodes de la Ligues… Nous sommes une organisation dangereuse, alors arrête de—”


“Non.”


Je l’entends chuchoter des choses presque inaudibles. Je pense qu'elle n'a pas aimé le fait que je la coupe.


“Si tu étais vraiment dangereuse, alors tu ne serais pas aussi nulle,” je reprends.


“Uhhh…”


“Et puis on serait pas en train de parler de ça ! C’est comme si tu me préviens pour me protéger !! J’ai déjà vu des gens dangereux, et ils font pas ces trucs-là !!!”


“Ce n’est pas…”


“Et puis moi aussi, j’ai menti !” Je la coupe à nouveau, ne la laissant pas reprendre l’ascendant. “Je ne m’appelle pas Emily. Et Azul ne s’appelle pas Abdul. Et puis… je ne suis pas une magical girl non plus !!!”


“O.. Ouais… Ça me semble évident…”


Hein ? Comment ça ?! Elle ne m’a jamais cru ?!! Il y a pourtant eu cet épisode où j’ai transformé Azul en vraie fille juste en le touchant !!! Un instant… E.. Et si c’était Azul la magical girl…?


“Mais ça ne change rien !” Reprends « Sabrina ». “Tu n’as pas menti par malice ! Alors que moi…”


“On s’en fiche de ça ! Un mensonge reste un mensonge. Peu importe la raison. Donc si tu es prête à pardonner les miens, j’ai aussi le droit de te pardonner pour les tiens.”


“Me pardonner ?! Tu as perdu la tête ou quoi ?!! Je suis un membre de la Ligue !! Ton ennemie !!!”


“Hey ! T’es mal placée pour me dire que j’ai perdu la tête, d’abord !!! Et puis c’est pas toi qui décides !!!”


Je l’entends prendre une grande inspiration avant de hurler dans les hauts-parleurs de son robot.


“JE NE SUIS PAS TA PUTAIN D’AMIE, EMILY !!!”


“DANS CE CAS, POURQUOI TU PLEURES ?!!”


Une soudaine aspiration est audible, juste avant que le micro captant la voix de mon « amie » ne se coupe. Elle est surprise. Ça veut dire que j’ai touché juste. Je décide donc de reprendre, frappant le fer tant qu’il est chaud.


“Si tu fais partie de la Ligue, alors tu n’as rien à voir avec les autres membres. Tu n’es pas une méchante. Tu n’as jamais cherché à me blesser. La seule personne que tu as envoyé valser, c’est Anzu, mais n'importe qui l’aurait fait tôt ou tard !”


“T.. Tu es sûre que c’est ton amie…?”


“Oui. Et pourtant, c’était pas gagné au début. Alors ne pense pas que « parce que tu fais partie du camp des méchants » cela fait de toi mon ennemie !”


C’est après une nouvelle pause de plusieurs secondes qu’elle me répond enfin.


“Je vois que t’es toujours aussi têtue… Mais très bien, allons dans ton sens dans ce cas. Je ne suis pas comme les autres membres de la Ligue, comme tu le dis. Les autres sont des fous sanguinaires, et, tout comme toi, j’ai fait l’erreur de m’attaquer à eux autrefois. Où est-ce que ça m’a mené ? Je suis leur putain d’esclave maintenant ! Si je ne réponds pas à leurs putains d’attentes, alors c’est ma vraie tête qu’ils feront rouler sur le putain de sol !”


Il y a un grain de folie dans sa voix. Mêlé à de la peur. Pour ma part, ce n’est ni de la folie, ni de la peur qui m’envahit… mais une colère immense.


“C’est impardonnable !”


“T’as pas du tout compris ce que j’essayais de te dire…” murmure-t-elle. “Tu dois arrêter de chercher à les combattre ! Tu n’es pas assez forte—”


“Si ! Et je continuerais de devenir de plus en plus forte ! Tellement forte que plus rien ne te fera plus jamais peur !!!”


“Q.. Qu’est-ce que tu sous-entends…?”


Un sourire se dessine peu à peu sur mes lèvres. J’attrape les restes de la poupée sur le sol, et descends du Proto-Vyzard. Mes pieds clapotant dans les flaques d’eau au sol alors que je marche doucement en direction du robot de chantier.


Autour de moi, les lumières de la ville s’allument progressivement, tandis que l’obscurité envahit le ciel de Safrania.


“Tu as dit que la Ligue te traite comme une esclave, et qu’en cas d’échec ils te tueraient… Ça veut dire que tu n’as aucune raison de retourner auprès d’eux.”


“H.. Hah…” sa voix semble soudainement calme et sereine, comme si elle venait de prendre conscience de cette nouvelle réalité. “M.. Mais si les trahis, ils vont—”


“Te tuer ? Je ne vois pas la différence.”


Qu’elle reste où qu’elle parte, son sort est le même. Alors autant qu’elle…


“Et si tu venais avec nous ?” J’ajoute, levant la tête afin de faire face aux caméras de son mecha.


“A.. Avec… vous…?”


“Oui ! Je te protégerais des méchants ! Et puis il y a Azul. Il est super fort !! Il a l’habitude de protéger les gens. C’est, genre, la seule chose qu’il fait en fait…”


Peu importe qu’elle s’appelle Sabrina ou pas. Peu importe son âge, ou ses erreurs passées. Elle est ma meilleure amie. Et je protégerais notre relation !


“Emily…”


Après avoir posé la poupée aux pieds du robot, je pose doucement une main sur la paroi de ce dernier, tournant ma tête de gauche à droite avant de la corriger.


“Ember.”


“Hah… C’est—”


“Mon vrai nom ! Et toi ?”


“...... Morgane.”


Morgane… À présent, il n’y a plus de mensonge. Notre relation peut prendre un nouveau départ, beaucoup plus saint.


“Tu peux ouvrir ton cockpit ?”


“E.. Euh… Je ne suis pas dedans. Je le contrôle à distance,” répond-elle, bafouillant un peu. C’est assez drôle de se dire que cette personne est la même qui contrôlait Sabrina…


Un instant. Elle le contrôle à distance ? Comme Tête-de-choux-fleur avec ses araignées ? Ce sera sûrement vachement pratique plus tard ! Azul ne pourra pas refuser qu’on la prenne avec nous cette fois-ci !!


Mais bref. Il faut qu’on la trouve avant la Ligue !


“Tu es à Safrania, pas vrai ? Dis-moi où que je puisse venir te cherch—”


!!!


M.. Mon crâne !!! J.. Je commence à voir flou… Ce n’est pas bon signe…


“J.. Je t’envoie mes coordonnées……”


J’entends la voix de Morgane au loin, mais je n’arrive pas à lui répondre, ni même à comprendre tout ce qu’elle me dit…


A̸̯̼̠͂͐͒̎͘̚z̵̪̜͉͈͚͚͠ṷ̵̾l̵̨͉͎̖͉̰̍͑͠.̵̲̜͇̯̣̻͆̈́.̶̰͆͛̀.̶̡̬͍̞̮̭̈́̏̒.̶̹͙̥̓͒̾̈́̈́͗.̸̣̥͎̐́̌.̶̢̘͛͛̑Ḏ̶̛͚͂̔̂a̶̧͍̯̮̾̕̚n̴̨̞̺̟͍̿g̶̗̲̜̲̱̻̎͛̽̾̓ę̴̦̦̞̪͗͠ȓ̴̠̼̪̤…


Hein ? Q.. Qui me parle ?


VITE.


“HAH !”


“H.. Hein ?! E.. Ember ?!”


“J’ai une urgence ! J’enverrais les coordonnées à Farida pour qu’elle vienne te chercher !!!”


Sur ces mots, je m’empresse de courir en direction du Proto-Vyzard.


“Q.. Quoi ?!! M.. Mais je—”


Désolé, Morgane… Mais je n’ai vraiment pas le temps là ! Une fois à l’intérieur du cockpit, je propulse ma machine dans les cieux, fonçant désormais en direction du grand bâtiment au centre de Safrania. La Sylphe SARL.


“Azul…”





















Mes yeux s’ouvrent doucement, dans une sensation de douleur que je n’ai pas ressentie depuis longtemps.


Et alors que j’essaie de repenser aux événements qui auraient pu me laisser dans un tel état, je prends peu à peu conscience de l’endroit où je suis.


Une tente ? En vue des ustensiles posés un peu plus loin, je dirais qu’il s’agit d’une tente médicale, pour être plus précis.


De mon seul œil encore utilisable, je lance un regard sur l'horloge posée à côté de mon lit. Il est tard. Mais surtout, si je me fie à la date, cela fait presque deux jours que nous avons combattu Koga et le Spectrum…


Mon poing se serre tandis que je prends conscience de la situation actuelle. Mon corps ne s’est toujours pas totalement régénéré, et nous avons perdu l’Eevolv. De plus…


“Enfin réveillé ? Ce n’est pas trop tôt.”


Cette voix…


“Major…”


L’homme venant d’entrer dans la tente, qui jusqu’alors était vide hormis ma présence, est une personne que je connais bien. Le Major Bob Ray.


Il y a deux ans, lorsque je servais l’armée kantonienne, cette personne était mon supérieur. Je n’en garde pas un bon souvenir, mais d’autres événements, qui sont survenus entre-temps, m'empêchent de lui en vouloir.


“T’aurais pu ouvrir les yeux lorsque la gamine était encore à ton chevet. La pauvre refusait de dormir tant que tu ne te réveillais pas,” dit-il en s'asseyant lourdement sur une chaise posée à côté de mon lit.


Ember…


“Comment va-t-elle…?”


“Elle dort enfin. Demain, elle partira pour Safrania avec une de vos amies et Farida, une soldate en qui j’ai confiance.”


“Quoi ?! Safrania ?! Comment ça ?!!” Je me redresse soudainement, créant involontairement une puissante douleur dans tout mon corps.


Bordel… Pourquoi faut-il que je sois aussi faible à un moment pareil ?!!


“Hey. Calme-toi. Elle dit vouloir se rendre au dojo de ta famille pour s’entraîner.”


Le dojo…? Je vois. Ember ressent le besoin de devenir plus forte… Car je n’ai pas été à la hauteur.


“Je peux voir sur ton visage que tu penses à des conneries…” dit-il en poussant ma tête de retour sur l'oreiller, me procurant une nouvelle vague de douleur dont je me serais bien passé… “Tu t’es bien battu, Leeves. T’as vaincu ces abrutis du clan Fuschia, dont leur putain d’assassin légendaire. Sans parler de tes exploits passés. J’ai entendu dire que tu as tenu tête à Giovanni ? Et puis, il y a la raclée que tu nous as flanquée à Carmin sur Mer.”


Ah. Le crime de foi… J’avais presque oublié, avec tout ce qu’il nous est arrivé ces dernières semaines.


“Major… Je—”


“Économise ta salive. Ce qu’il s’est passé ce soir-là était étrange, même pour vous. Je l’ai compris, t’en fais pas. Et même si j’ai un putain de milliard de questions, je me retiendrais de les poser si ça ne t’arrange pas.”


Depuis quand est-il aussi compréhensif ? C’est comme si je parlais à une version alternative du Major Bob… Mais je ne vais pas me plaindre.


Le fait est qu’il m’a sauvé la vie. Sans eux, nous serions dos au mur. Au point où nous sommes, autant jouer cartes sur table.


“Vous m’avez sauvé. De plus, nous avons un ennemi commun. Ça ne me dérange pas de partager certaines infos que nous avons. Cependant, si vos questions concernent ma survie après la guerre, où l’existence du Soldat d’Ember, je préfère vous prévenir dès maintenant : J’en sais putain de rien.”


Un grand sourire apparaît sur les lèvres du Major, qui ricane en se mettant à l’aise sur sa chaise.


“Je vois que tu t’es débrouillé pour retirer le balai que ta famille t’avait inséré dans le cul à la naissance. C’est bien.”


“Mon cul et ma famille vous emmerdent, Major…”


“HAHAHAHA !”



Nous avons parlé pendant des heures. Des monstres d’Argenta et d’Azuria. Du prof Chen. De Green. Mais aussi de la Team Rocket et des cristaux de rappel.


De son côté, il m’a partagé ce qu’il savait sur la Ligue. Leurs mouvements, ainsi que les mouvements de l’armée de Kanto en général. Il a également partagé certaines routes et lieux que nous pourrions utiliser pour nous cacher en cas de besoin.


Et enfin…


“La totalité de Safrania est actuellement sous le joug de la Team Rocket,” dit-il, se levant enfin de sa chaise.


“Quoi ?!!”


“Nous allons former plusieurs groupes d’assaut afin de libérer la ville. Le groupe de Farida devrait être en sécurité là où ils vont, si ça peut te rassurer.”


“.....”


“J’ai compris quelque chose le soir de notre affrontement, à Carmin sur Mer. Kanto a besoin de vous, Leeves. Toi et cette fille, vous avez le pouvoir de renverser ce gouvernement pourris.”


“Nous n’avons pas cette ambition. Tout ce que je souhaite, c’est protéger Ember et Erika.”


“Et tu crois pouvoir les protéger longtemps dans un monde aussi dangereux ? Ce n’est pas en fuyant que tu offriras une vie normale à la gamine.”


Il n’a pas tort… Koga m’avait également fait la remarque à un moment. Fuir n’est pas une solution. Et c’est d’ailleurs en faisant face aux problèmes du clan Fuschia que j’ai pu débloquer la situation. Bien que le prix à payer fut…



“D’accord. Quel est le plan ?”

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