Mechamon Iris
VI - Safrania
Chapitre 44 - La sorcière
“À quoi on joue aujourd’hui ?!”
“Chat ?”
“Encore…? On peut pas jouer à quelque chose de nouveau ?”
“Morgane ! Invente-nous un jeu !!”
“Hein ? Mm… Ok ! On est combien à jouer ?”
« Morgane, invente-nous un jeu. » « Morgane, laisse-moi copier tes devoirs. » « Morgane, aide-moi. »
Lorsque j’étais petite, les autres enfants de ma classe m’ont rapidement attribué le rôle de leader en vue de mon intelligence et de ma créativité. J’ai été déléguée de classe jusqu’à la dernière année de primaire, et mes notes étaient toutes excellentes, pour le plus grand plaisir de mes parents.
La vie était belle. Tous les yeux étaient posés sur moi. J’étais la protagoniste évidente de ma propre histoire. Et afin de prolonger ce bonheur le plus possible, je travaillais dur pour être toujours plus intelligente.
Tant que les autres me voyaient comme une fille supérieure, alors ma place au centre de leur vie était garantie. Où du moins, c’était ce que j’imaginais. Car j’ignorais que le savoir pouvait également être une malédiction pour ceux qui en débordent.
Pensant que je ne pouvais m’épanouir dans un environnement normal, ces adultes stupides qui sont mes parents ont pris la décision, contre mon gré, de m’arracher à mon royaume. Pour résumer, ils m’ont fait sauter des classes. Je n’ai pas tout de suite compris leurs intentions. Et je le regrette encore aujourd’hui.
Je devais dire au revoir à tous mes amis. Et tout reconstruire de zéro, dans une classe composée d’élèves beaucoup plus vieux que moi. J’avais dix ans à l’époque, et même si j’étais intelligente, ma maturité ne dépassait pas celle d’une enfant de mon âge.
Ce fut horrible. Personne ne voulait traîner avec une gamine, évidemment. Et ceux qui étaient suffisamment “gentils” pour m’intégrer à contre-coeur dans leur groupe étaient terriblement ennuyeux. À leur âge, les ados ne parlent que de romance où de leurs dernières soirées, le tout sans bouger du banc qu’ils ont désigné comme étant leur territoire.
Avec le temps, la vie perdait peu à peu ses couleurs. Je ne m’amusais plus. Je n’étais même plus au centre de quoi que ce soit. J’ai donc abandonné et pris la décision de rester seule. Si mon intelligence à créer ce problème, alors que je me servirais de cela afin de le résoudre !
Lorsqu’on perd nos amis, il devient rapidement évident que ceux-ci étaient extrêmement chronophages. Effectivement, le temps est une ressource attribuée de manière égale à chaque être humain à la base. Nous utilisons cette ressource pour tout ce dont nous avons besoin. Et le prix d’une relation peut varier selon l’importance de cette dernière.
Si on souhaite avoir des amis, et les garder, il faut être prêt à leur consacrer une grande partie de notre temps.
Mais que faire de ce temps lorsqu’on n’a pas d’amis ? Eh bien, on l’utilise pour d’autres choses, dans d’autres buts. Mon temps, personnellement, fut quasiment entièrement consacré à mes études. Mon objectif étant de sauter le plus de classes possible afin d’en finir au plus vite avec l’école. Ainsi, je pourrais retrouver mes amis !
…
Vous la voyez venir, non ? La chute de cette blague de très mauvais goût. À quatorze ans, je suis enfin sortie du lycée avec mon diplôme. J’avais encore mes années universitaires devant moi, mais peu importe. Je souhaitais revoir mes anciens compagnons.
Sauf que ces derniers m’avaient déjà oublié, pour la plupart.
“« Morgane » ? Tu la connais, toi ?”
“Je crois qu’on avait une Morgane dans notre classe à un moment… Mais je ne sais plus quand.”
J’ai été votre déléguée pendant quatre ans ! On a presque grandi ensemble !! C’est impossible que vous ayez oublié, bande d’abrutis !!!
“Au pire, passe-moi ton numéro, je suis sûr que ça me reviendra au fur et à mesure qu’on parlera !”
“Pfft… T’es vraiment un énorme caninos !”
“Hey ! Dis pas ça devant elle ! T’es un fou, toi !!”
…ah.
Évidemment. Ça m’avait totalement échappée. À leur âge, il n’y a plus de jeux d’enfant. Ils doivent passer tout leur temps libre sur ce fichu banc, à parler de leurs conquêtes amoureuses.
Ils ont changé… Pendant que j’ai utilisé tout mon temps pour les rattraper, ils ont fait usage du leur pour grandir.
En rentrant ce jour-là, je marchais dans les rues surchargées de Safrania, réalisant que les gens qui m’entouraient ne me captaient pas. Je suis devenue un fantôme, prisonnière du passé. Une ombre errant dans une ère qui n’est pas la mienne…
Après cela, je me suis enfermée dans ma chambre, et n’en suis pas ressortie avant plusieurs jours. À vrai dire, encore aujourd’hui, à moins d’y être obligée, je ne sors que très rarement de ma chambre.
Mais revenons au passé. J’ai continué mes études dans mon coin, nourrissant ce cerveau assoiffé de savoir. Puisque mon intelligence m'avait ruiné ma vie, autant que j’en profite. Et j’avais bien l’intention d’en être la seule à en profiter.
Voyant la direction que prenait le monde à l’extérieur, et le fait que je ne souhaitais plus avoir à faire à d’autres être humains, j’ai concentré tous mes efforts afin d’affiner mes connaissances et ma compréhension de l’informatique.
Je suis devenue forte. Très forte. Trop forte pour cette époque. Utilisant mon savoir, je me suis attaqué à toutes sortes de personnes fortunées, d’entreprises multinationales, de gouvernements que je considérais comme corrompus.
Passant outre les systèmes de sécurité, je compilais les dossiers compromettants, et demandais des rançons s’élevant à des chiffres exorbitants. Pour une personne comme moi en tout cas. Pour eux, c’était une goutte d’eau qu’ils pouvaient se permettre de laisser tomber dans cet océan que devenait mon argent de poche.
On me surnommait « La Sorcière Électronique ». Un pseudonyme donnant froid dans le dos lorsqu’il était associé au logo en forme d'œil que je laissais sur chacun de mes messages.
L’argent volé était utilisé afin d’améliorer mon setup. A tel point que tout mon studio de l’époque s’est vite transformé en un ordinateur géant. Le sol, les murs, le plafond… Tout était couvert de câbles, d’écrans, de ventilateurs et de composants. Mais je vous rassure, je connaissais la structure de ma machine par cœur, ce n’était donc pas si chaotique que ça en a l’air ! … Pour moi en tout cas.
Les années passèrent, et je pouvais de nouveau me considérer comme étant en haut de la pyramide sociale. Mon intelligence me donnait un pouvoir absolu sur tous les ignorants qui prolifèrent sur le web. Contrairement à l’époque de la primaire, cependant, ces derniers sont beaucoup moins bienveillants que mes anciens camarades de classe. Cependant, moi non plus, je ne suis plus la petite fille bienveillante que j’étais autrefois.
Je n’hésite donc pas à leur faire comprendre qui ils sont à chaque fois qu'ils perdent dans un jeu, ou qu’ils me provoquent sur les réseaux sociaux. Certains me considèrent comme étant toxique. Personnellement, je suis d’avis que ceux qui ont de grands pouvoirs ont pour responsabilité d’en faire l’usage qui les arrange. Si je peux les utiliser afin de gonfler mon ego tout en rabaissant le leur, alors cela m’arrange plus que tout.
Mais quelque chose me frustrait toujours, après tant d’années. Je n’avais aucun ami. Et je ne souhaitais pas m’en faire sur internet. Bien que certaines personnes semblaient me vouer un culte, pensant que je pouvais résoudre tous les maux du monde juste en hackant des gouvernements. Grand bien leur fasse, mais ces idiots le sont encore plus que ceux qui me haïssent.
J’ai donc décidé d'investir mes gains dans un nouveau projet : me faire une amie. Littéralement. Pour ce faire, j’ai développé une intelligence artificielle capable de simuler le comportement humain, et l'ai intégrée dans une poupée grandeur humaine que j’ai fait faire pour l’occasion.
Son nom était Sabrina. Je n’y ai pas énormément réfléchi, j’ai juste toujours aimé ce prénom… Bref ! J’ai entraîné son IA afin qu’elle soit l’amie idéale. Une personne avec qui je pourrais rattraper toutes les années que j’ai perdues auparavant.
Cependant, au fur et à mesure que je passais du temps avec Sabrina, un problème majeur devenait de plus en plus apparent. Elle n'était pas crédible. Une amie parfaite, certes, mais dépourvue d’effet de surprise, d’émotions réelles, d’une histoire et de nuances.
Ce que je recherchais n’était pas trouvable dans une poupée. Il me fallait un ingrédient que je n’étais pas capable de créer. De l’humanité.
J’ai alors compris qu’il était vraiment trop tard pour moi. On m’avait volé plusieurs années de ma vie, et il m’était impossible de les retrouver.
Déprimée et blasée, j’arrachais les composant de Sabrina, abandonnant ce projet stupide avant de ranger la poupée dans un coin de ma chambre.
J'avais de la haine à revendre. Et en scrollant les actus du jour, une cible évidente apparaissait en boucle dans le feed. La Ligue. Une organisation ayant pris le contrôle du gouvernement durant la guerre, aujourd’hui acclamée par le peuple pour avoir mené Kanto vers une victoire écrasante contre nos voisins johtonnais.
Habituée des magouilles en tout genre que j’ai pu voir en fouillant dans des dossiers compromettants de nombreux gouvernements, j’ai tout de suite su que ceux-là n'étaient pas nets non plus.
La question était « que faire d’eux ? ». Normalement, je me contentais de faire cracher du fric à mes victimes, mais ce jour-là, j’étais particulièrement de mauvaise humeur.
M’en souciant peu, je me suis contenté de préparer mon assaut. Il ne fut pas difficile de passer outre leurs systèmes de sécurité et de paralyser toutes les machines de leurs QG. C’était même plutôt facile. J’ai donc naturellement entamé mon extraction des fichiers confidentiels.
Un labo louche à Cramois’île… Un projet de base souterraine… Des cristaux étranges trouvés à Johto… Ça, c’est ce que j’appelle un putain de jackpot !
Sauf qu’au moment de cliquer sur l’un des dossiers, après m’être assurée que tout était safe, tous mes écrans se sont éteints. Une coupure de courant. Au pire moment, bien sûr. Heureusement, j’avais des générateurs de secours, mais à l’instant où ceux-ci se sont actionnés, rallumant les écrans, l’image diffusée par ceux-ci ne correspondait pas à ce qu’ils étaient censés afficher.
J’étais encerclée par des logos de la Ligue, sur chaque écran éparpillé partout dans ma chambre. J’ai d’abord pensé qu’il s’agissait peut-être du contenu du dossier que j’avais ouvert avant la coupure. Dans la panique, il n'était pas impossible que j’aie cliqué sur un fichier image…
Sauf que l’image fut rapidement remplacée par le visage d’un homme en gros plan. Il avait des cheveux d’une couleur flamboyante, et un sourire assuré qui n'avait pas pour effet de me mettre à l’aise.
C’était comme si mon cœur s’était arrêté pendant un instant, le temps que je comprenne ce qu’il venait de se passer. Ils m’ont hacké en retour… je suis tombée dans un piège ! Mais comment a-t-il fait ?!
Pendant que je cherchais à comprendre ce qui m’arrivait, l’homme a l’écran se mit à parler.
“Bonsoir, Sorcière. Laissez-moi me présenter, je suis Lance. Le maître de la Ligue et nouveau souverain de Kanto.”
Comment sait-il qui je suis ? Je n’ai même pas encore eu le temps d’entrer en contact avec eux pour la rançon… Un instant. La coupure de courant. Ce n’est pas un hasard ! Il sait où j’habite !! Il faut que je parte d’ici—
“Je ne tenterais rien à votre place. Les personnes qui ont coupé les câbles électriques reliés à votre appartement sont également équipées d’armes à feu. Il serait dommage de perdre la vie de manière aussi stupide, n’est-ce pas ?”
Tremblant de terreur, je laissais doucement mes bras tomber le long de mon corps. J’étais à sa merci. Je venais de perdre ma place en haut de la pyramide…
“J’ai une offre à vous faire. C’est pourquoi nous vous avons laissé envahir notre système informatique. J’avais besoin de confirmer vos compétences. Je dois dire néanmoins que je suis un peu vexé que cela vous ait pris plusieurs jours avant de le faire.”
De quoi il parle…? Je tremble tellement que ça en devient douloureux. Que quelqu’un me sorte de ce cauchemar, par pitié !
“Bref. Le fait est que je tente de réunir les personnes les plus puissantes dans leurs domaines respectifs, habitants nos territoires actuels. Il s’agit d’une invitation à rejoindre un groupe d’élite au sein même de la Ligue. Qu’en dites-vous, mademoiselle Morgane ?”
“Ç.. Ça ne m'inté—”
“Ça ne vous intéresse pas ? Votre manque d’ambition est accablant.”
Une soudaine envie de vomir me prit alors. Aucun micro n'était connecté à mes appareils. Comment avait-il fait pour m’entendre ? De plus, son sourire s'étendait peu à peu sur son visage, comme s’il pouvait voir l’expression de terreur sur le mien.
“Je vous attendrai au Plateau Indigo dans une semaine.”
Après cela, mes écrans redevinrent normaux, à l’exception que tous mes logiciels de hack étaient fermés, coupant tout accès avec la Ligue. Aussi, les fichiers que j’avais volés ont tous disparu.
S’ils ont des hackers meilleurs que moi, alors a quoi bon me recruter ? Quoi que… Ils ne sont peut-être pas meilleurs. Ils savaient juste d’avance que je les attaquerais. Et surtout quand je le ferai, en vue de la présence d’agents au niveau du compteur électrique avant la coupure de courant.
Doucement, alors que le calme avait repris le contrôle de la pièce, je sentis les larmes monter et mon souffle se raréfier. C’est après un hurlement d’horreur que je me suis empressé de vomir le peu de chose que j’ai mangée ce jour-là, dans les toilettes.
Moins d’une semaine plus tard, pour la première fois en quatre ans, je suis sortie de ma chambre dans un autre but que celui de sortir les poubelles où de recevoir des colis. J’ai pu constater que Safrania, la ville de mon enfance, avait changé. Et ses habitants aussi.
Des panneaux ou des feux qui n’étaient pas là avant. Des styles vestimentaires qui n’étaient pas populaires à l’époque. Des bâtiments aux insignes différents que dans mes souvenirs.
Le monde avançait toujours sans moi. Et maintenant, en plus d’être prisonnière du passé, je devais servir d’esclave au gouvernement.
Cela fait maintenant deux ans que je travaille pour la Ligue. Comme l’a dit Lance, j’ai été intégrée à un groupe d’élite nommé « Le Conseil ».
Tous les membres de ce groupe sont des fous avec un ego surdimensionné. Des personnes que j’aimerais ne pas avoir à côtoyer aussi souvent… Surtout le roux avec des lunettes qu’ils surnomment « Le Professeur ».
Ils ont déjà essayé de me faire travailler avec pour son développement de Soldats, mais ce type est un énorme psychopathe. Après sa douzième menace de mort en moins de deux heures, j'ai suppliée Lance de me donner une autre quête.
Bien qu’il soit extrêmement intimidant, le Maître est un boss plutôt raisonnable avec moi. Même si je n’oserais jamais lui en demander trop… Ce mec a quand même les méthodes de recrutement les plus terrifiantes que je connaisse.
Après la réunion de juin, à laquelle le Prof n’a pas assisté pour des raisons que j’ignore, je suis sorti de la salle du Conseil complètement lessivée. Ces réunions sont censées servir à parler de problèmes ayant lieu sur le territoire kantonnien, et des missions qui nous seront attribuées afin de répondre à ces problèmes.
La réalité, c’est que ces réunions servent surtout aux autres membres afin de gonfler leurs egos en rabaissant les membres plus faibles, comme moi.
Le fait est que quelques jours auparavant, le Prof a échoué à intercepter une cible qu’il traquait depuis Bourg Palette, si j’ai bien compris. Le résultat fut qu’un type du nom d’Azul Leeves a commis un crime de foi en soumettant l’armée stationnée à Carmin sur Mer.
Afin de répondre à la menace, nous avons tous été choisis, individuellement, afin de surveiller une ville de Kanto chacun. Personnellement, la ville qui m’a été attribuée était Céladopole.
Les autres l’ont assez mal pris. Ils s’attendaient à être plusieurs à surveiller la capitale, en vue de la surface à recouvrir, et de la complexité de la ville. Mais le maître ne voyait pas les choses sous le même angle.
“La Sorcière est une des membres les plus faibles du Conseil ! C’est une blague, pas vrai ?!!”
“Elle est la personne la plus qualifiée pour ce rôle. À moins que vous ayez un meilleur plan, Magicien ?”
Le regard de Lance était impitoyable. Comme s’il défiait l’homme que l'on appelle « le Magicien » de le contredire.
“L.. Loin de moi l’idée de prendre le contre-pied de votre raisonnement, Maître ! M.. Mais Céladopole est une région complexe et importante… La Sorcière aura du mal à couvrir toute la capitale à elle seule !”
“Est-ce qu’on pourrait faire vite ? Je crois que Clément s’est fait dessus.”
“Karen… Espèce de sale—”
Lance se leva soudainement de son siège, poussant sa cape dans un geste aussi imposant que majestueux. Il fixa le Magicien et la Belle d’un regard froid avant de se prononcer à nouveau.
“Puisqu’aucun argument intéressant ne semble ressortir de vos bouches, nous allons mettre un terme à cette réunion. Chaque membre recevra sa propre mission par mail.”
Il est rare que le Maître intervienne dans une dispute au sein du groupe. D'habitude, il semble y prendre du plaisir. Peut-être est-il de mauvais poil ? Si c’est le cas alors je ferais mieux de partir avant qu’il ne—
“Morgane. Attends un instant,” dit-il alors que tout le monde a déjà quitté la pièce, à part moi et lui.
NOOOOOOOOOOOOON !!!
Je vois la Dame, l’une des membres les plus terrifiantes du conseil, me lancer un regard méprisant avant de fermer la porte derrière elle, me condamnant officiellement à subir le tête-à-tête malaisant avec mon boss.
J’hésite de longues secondes avant de me retourner vers lui, calculant chaque mouvement au millimètre près afin de ne pas le froisser.
“O..O.. Oui ?!”
“Ne prends pas à coeur les mots du Magicien. Cette ambiance est nécessaire dans un milieu réunissant tant de personnes talentueuses. Mais le fait est que tu es l’une de nos membres les plus puissantes.”
Haha… Ça fait du bien d’être complimentée de la sorte. Surtout quand je pensais que j’allais me faire passer un savon ! Il y a juste un détail dans sa façon de parler qui me perturbe, mais je ne saurais pas dire quoi…
“Morgane, je n’en ai parlé à personne, et je compte sur ta discrétion. Mais il ne fait aucun doute que leur groupe s’arrêtera à Céladopole.”
Ha. HAH ?! N.. Non ! Un instant !! Il est en train de me dire qu’il sait que le groupe de criminels le plus recherché actuellement va se pointer à la capitale, et que je serais seule pour les intercepter ?!!! Le Magicien avait raison… Je n’en suis pas capable…
“Je perçois de la panique dans ton regard.”
Urgh !!
“Mais n'aie crainte. Je n’ai pas menti lorsque j’ai dit que tu étais la personne la plus qualifiée pour ce rôle. Vois-tu, Azul Leeves n’a que peu d’importance. Il n’a jamais été une menace.”
“O..Oh… Ah bon…”
Je savais que Lance n'entrerait pas dans les détails. Au final, la Ligue est une organisation composée d'égoïstes trouvant chacun leurs intérêts sans se soucier des objectifs des autres. Nous étions tous des pièces d'échiquier pour le Maître. Mais lui aussi, était un outil que les membres du Conseil utilisaient pour atteindre leurs objectifs personnels.
Perso, ils me font tous beaucoup trop peur pour que je n’ose ne serait-ce que considérer la possibilité de les manipuler…
“Ta vraie mission consiste à localiser l’enfant qu’il traîne derrière lui. Et lorsque ce sera fait, tu devras la retenir dans la capitale.”
La retenir ? On ne les arrête pas ? Et puis comment je suis censée faire ?!! Je ne sais ni me battre, ni tenir une conversation !!!
“Euh… P.. Pour les localiser cela devrait être simple… M..Mais la retenir…”
Lance se massait les yeux en soupirant, ce qui me fit paniquer instantanément. Je me préparais à m'excuser, comme à chaque fois que ma jauge de peur atteignait sa limite. Mais il me coupa avant même que le son de ma voix n'ait le temps de sortir de ma gorge.
“Tu as toujours cette poupée articulée que tu traînes avec toi à chaque mission. À quoi sert-elle au juste ?”
Sabrina ? Pourquoi me parle-t-il de ça maintenant ? Est-ce qu’il cherche à changer de sujet ? Est-ce que mes passe-temps l'intéressent ? Maintenant que j’y pense, il me tutoie toujours quand nous sommes seuls… J’espère que ce n’est pas un de ces cas où le patron essaie de draguer sa petite employée dix ans plus jeune que lui…
Non pas qu’il soit moche ou quoi, mais je ne me vois pas m'investir dans une relation. Je devrais prendre une douche au moins trois fois par semaine et passer chez la coiffeuse… Tout ça pour plaire à un type pour qui le seul sentiment que j’éprouve est de la peur ? Haha. Sûrement pas.
“Tu réfléchis ? J’imagine que cela veut dire qu’elle n’a pas vraiment d'utilité autre qu’exposer ton salaire sous la forme de robes onéreuses.”
Guh… Laissez-moi au moins la liberté de dépenser mon argent comme bon me semble !!!
“La cible baissera sa garde si tu l’approches sous la forme d’une enfant. Je m’occuperais des démarches nécessaires pour que tu puisses t’infiltrer dans une école et simuler une vie « normale » dans la capitale.”
Wow… Ce type veut que je me fasse passer pour une gamine afin d’approcher une vraie gamine ? C’est carrément malsain. Mais puisque c’est son idée, et qu’il est impossible pour moi de lui tenir tête, alors je n’aurais aucun remord à avoir !
Jouer les poupées dans Céladopole… Héhé. C’est la meilleure mission de tous les temps. Il me faudra un programme pour contrôler Sabrina à distance. Et aussi une fiche de personnage avec un lore, une personnalité, des répliques…
Belle et intelligente, Sabrina est une jeune fille populaire excellant dans tous les domaines. Son ton froid et supérieur lui donne un air presque mystique, faisant d’elle une personne trop parfaite pour le commun des mortels. Ah. Mince… J’ai oublié que c’était une poupée, et qu’un mauvais coup risquerait de la briser. On aura qu'à dire que son unique faiblesse est le sport ? Qu’elle a une maladie rare l’empêchant de participer à toute activité sportive ? Genre… De l’asthme…?
…je dois vraiment avoir l’air stupide actuellement. Bref, on finira bien par trouver quelque chose ! Passons aux stats maintenant…
Suivant les instructions laissées par Lance, j’ai inscrit Sabrina dans une école louche du District Académique. L’École Marguerite. Leurs uniformes sont d’un mauvais goût atroce, mais le Maître dit que si la cible devait rejoindre une école, ce serait probablement celle-ci.
Et en effet, comme par hasard, le jour de mon transfert, une autre fille rejoignait également la classe 5A. Elle était un peu trop vieille comparée au descriptif de la cible, mais personne d’autre n’a été transféré cette année. Puis il y a toujours une chance pour que le descriptif soit légèrement erroné.
Bref. Son nom est Emily. Je décide de garder un œil sur elle, tout en m’assurant d'intégrer Sabrina comme il se doit. Tel était le plan. Et tel fut mon premier échec.
Le fait d’être transférés en duo fait que les autres élèves se voient offrir le privilège du choix. Ainsi, tout le monde s’est rapidement tourné vers Emily en voyant que Sabrina était beaucoup plus froide et discrète que cette dernière.
D’un côté, ce n’est pas plus mal. Cela me permet d'opérer plus furtivement… Sauf que je voulais être une fille populaire ! J’avais enfin une occasion de revivre les années de collège que l'on m’avait volées à l’époque !!
“Sabrina ?”
Merde ! Quelqu’un me parle. Qui est-ce ? Emily ?
“Quoi ?” Répondis-je d’un ton distant et supérieur. Inutile de changer de personnalité maintenant qu’on a commencé…
Emily me sourit gentiment en tendant sa main, se balançant de droite à gauche comme si elle ne tenait pas en place. C’est quoi son problème à cette gamine…? Elle est putain d’adorable !
“Tu veux être mon amie ?”
…
Qu’est-ce que je fais ?! Sabrina est censée être une fille froide et digne. Trop digne pour accepter aussi facilement ! Mais si ça continue, je vais juste me retrouver seule toute l’année…
“Tu ne réponds pas ? Tu es timide ?”
Il faut que je réponde vite ! Ce n’est pas un jeu vidéo, je ne peux pas mettre sur pause pour réfléchir !!
“Euh… Je…”
“T’en fais pas ! J’te comprends. Tout le monde veut être mon ami, mais c’est super dur de traîner avec eux alors qu’ils se connaissent tous. Du coup, j’ai du mal à parler franchement, et c’est super nul !!”
Oh. Je comprends mieux maintenant. Elle veut devenir l’amie de Sabrina, car tout comme elle, elle ne connaît personne dans la classe. C’est malin de sa part. De plus, elle vient de me donner l’excuse parfaite pour accepter. Cette mission est déjà une masterclass.
“Je vois. Je pensais justement la même chose. Tu es libre de te joindre à mo—”
“Merci !!!”
Avant que je n’aie le temps de finir ma phrase, cette idiote s’était déjà jetée sur ma poupée !! A-t-elle la moindre idée de combien elle m’a coûté ?!!! Ah, oui, je suis conne, elle pense qu’elle est humaine.
Alors que les semaines passaient, la situation se normalisait enfin dans la classe 5A. Emily et Sabrina étaient un nouveau groupe à ajouter à la longue liste de groupes composant cette classe dont l’unité n’a jamais été une option.
Et malgré le fait que j’aie besoin de faire de la maintenance sur ma poupée tous les soirs à cause du comportement brutal de ma nouvelle amie, ces quelques mois passés avec elle dans la capitale kantonienne furent comme une oasis dans ce désert qu’est devenue ma vie depuis quelques années.
Comme je le pensais, les rapports sur la cible étaient erronés depuis le début. Le comportement d’Emily et ses nombreuses maladresses l’indiquent. Elle est celle que je devais retenir à Céladopole à tout prix.
Sauf qu’un jour…
Un idiot nommé Azul Leeves n’a pas trouvé mieux à faire que combattre la Team Rocket au coeur de la capitale, aux yeux de tous. Détruisant au passage le Grand Casino de Céladopole, qui leur servait de QG.
Il a tout ruiné à lui seul. Lance était prêt à fermer les yeux sur ses agissements à partir du moment où il faisait profil bas. La sécurité d’Emily a donc si peu de valeur à ses yeux ?!!
Je suis la seule au courant pour la véritable mission que le Maître m’a confiée. Ce qui veut dire que si la Ligue attrape Emily… Je serais réprimandée pour avoir échoué !!!
Il fallait que j’agisse avant mes collègues. Que j’intercepte le groupe de Leeves. Mais cette idiote n’a même pas cherché à me contacter !! J’ai attendu son message toute la nuit… Tout ça pour la voir prendre la fuite à bord d’une moto à l’aube.
Que faire ? Je pourrais prendre le contrôle d’un Soldat stationné dans le coin, mais je ne me suis jamais battue. Si Azul Leeves fait appel à sa machine cracheuse de feu, alors je n’aurais aucune chance.
Je ne pouvais pas prendre le risque de les affaiblir au point de les rendre vulnérables à mes collègues. J’ai donc pris la décision de bloquer l’accès à toutes les machines de la Ligue postées à Céladopole, avant de prendre le contrôle d’un Skar, une unité aérienne, idéale pour les poursuivre sur l’autoroute 17.
Au départ, tout se passait plutôt bien. Mes tirs, combinés à l’instabilité de leurs véhicules, faisaient qu’Azul Leeves ne pouvait faire appel à son Soldat. Cependant, pour une raison que j’ignore encore aujourd’hui, Emily s’est soudainement levée du siège de leur side-car.
Pensant qu’il s’agissait juste de sa stupidité à l’action, je tentais de raisonner leur chauffeur, le suppliant de s’arrêter.
Jusqu’à ce qu’un Soldat inconnu fasse son apparition, tranchant l’aile de mon Skar, le faisant tomber dans l’eau avec mes espoirs d’une seconde chance dans la vie…
Lors de la réunion d’urgence, qui suivit les événements de Céladopole, je fus de nouveau sujette aux moqueries et aux réprimandes de mes collègues. Sauf que cette fois-ci, Lance n’était pas présent pour me défendre.
J’avais la haine. Non seulement, j’étais de retour à la case départ, mais en plus, je devais subir les remarques de tous ces ignorants !! Tout ça, car Emily n’est pas venue me prévenir de son départ…
Une fois de plus, à la fin de la réunion, je fus retenue par quelqu’un. Cette fois-ci, il s’agissait de la Dame. Et elle avait l’air particulièrement énervée.
“Tu vas me suivre à Safrania,” dit-elle d’un ton autoritaire, me regardant de haut avec son œil de verre… Où plutôt avec son autre oeil à bien y penser.
“E.. Euh… Excusez-moi m.. mais… o.. on n’a pas élevé les gruikui ensemble—”
“Tu as dit quelque chose ? Je pense avoir mal entendu.”
E.. Elle va me tuer !!! C.. C’est quoi son problème ?!! C’est parce que j’ai hacké nos machines afin de laisser Emily fuir ?! Maintenant que j’y pense, je m’en sors quand même super bien pour avoir saboté mes propres coéquipiers…
Safrania. Ma ville natale. Bien que ce soit ma safe zone dans ce pays de fous, je suis toujours aussi nerveuse d’y revenir. Peut-être, car je ne suis franchement pas fière de mon boulot actuel ?
Normalement, Olga, la Dame, m’a demandé de la rejoindre dans le dojo des Leeves, au nord de la ville. Et j’ai beau être originaire d’ici je ne savais pas du tout qu’il y avait un dojo portant le nom du criminel le plus recherché du pays.
Bref. Pour ma sécurité, je décide d’utiliser Sabrina afin de rejoindre Olga au point de rendez-vous. Je préfère perdre une poupée m'ayant coûté plusieurs centaines de milliers de pokédollars plutôt que d’y perdre la vie…
“Qu’est-ce que…? Tu as vraiment eu le cran de te pointer avec cette abomination ?”
Abo—?! Un instant, elle a l’air hyper énervée !! Elle a un problème avec Sabrina aussi ?!!
“Tu es encore plus pitoyable que ce que je pensais, Morgane. Le titre de « Sorcière » n'effleure même pas de près la laideur de ton existence.”
L.. Les mots sont des armes… Est-ce que c’est pour ça qu’elle semble me mépriser deux fois plus qu’avant ? À cause de mon utilisation de Sabrina ?
J’aurais aimé me défendre en expliquant le pourquoi que j’utilise une poupée à distance, mais quelque chose me dis que cette femme ne m’écoutera pas. Elle ne fera qu’enregistrer le fait que j’ose lui tenir tête, puis utiliserai sa force surhumaine pour détruire Sabrina avant de me traquer dans toute la ville…
Je décide donc de changer habilement de sujet.
“Qu’est-ce que nous sommes censées faire ici, du coup ?”
“Tiens donc… Tu ne bégayes pas lorsque tu es à l’abri derrière ton écran ?”
“J.. Je peux bégayer si c’est ce que vous voulez !!”
Au diable mon ego ! Cette femme me fait beaucoup trop peur !!!
“Ça ira… Et tutoie-moi. Ce sera plus simple.”
H.. Hah…? Est-ce que la Dame est une tsundere depuis le début…? Je crois que ça me fait encore plus peur que si elle me détestait réellement…
“Pour répondre à ta question, nous sommes là pour observer. Un idiot au sein du Conseil est sur le point de commettre une grosse erreur.”
“Oh… Oh non ! On est censées l’arrêter ?! C’est le Maître qui nous envoie ?!!”
Olga soupire longuement après avoir inspiré une grande quantité de fumée de cigarette. Comment cette femme fait pour être aussi forte en ayant des poumons aussi pourris…?
“Je t’ai dit que nous étions là pour observer. Justement, car le Maître ne s’est pas prononcé.”
Effectivement. Observer. Une mission simple de base, mais qui s’est révélée bien plus éprouvante que ce que j’imaginais.
Un des membres du Conseil s'était visiblement allié à la Team Rocket, et, quelques jours après notre arrivée en ville, ces derniers ont pris la Sylphe SARL en otage, ainsi que tout Safrania par la même occasion.
Personne ne s’est attaqué à nous précisément, mais il est difficile de voir sa ville natale être prise d’assaut sans agir…
Puis un jour…
“S.. Sabrina…!”
“Emily…”
Que fait-elle ici ? Où est Azul Leeves ? Et qui sont ces gens qui l’accompagnent ?! J’ai tant de questions, mais aucune ne peut être posée… Sans parler du fait qu’au fond de moi, je lui en veux encore pour être partie sans rien dire. Je sais que c’est stupide d’en vouloir à une enfant, mais… Elle était censée être la meilleure amie de Sabrina !
…elle était censée être ma meilleure amie…
Olga semble obsédée par elle, pour une raison que j’ignore. C’en est presque malaisant… Et après, c’est moi qu’on ose juger pour avoir utilisé une poupée afin d’approcher une classe de collégiens ?!
B.. Bref. Je pense que la Dame nous cache quelque chose. Elle en sait plus sur cette gamine que ce qu’on pourrait penser.
Ainsi, après un accord passé par la force, Olga devient la coach d’Emily, avec la femme taciturne qui l’accompagne. Farida, je crois ?
La direction que prend ce séjour ne me plaît pas du tout… Si elle s’entraîne, c’est pour devenir plus forte. Or, qui sont les ennemies qu’elle pourrait vouloir vaincre ? Exactement. La Ligue.
Lance a demandé à la tenir à l’écart, car cette fille ne doit absolument pas se confronter à nous, peu importe sa force. De plus, je ne veux pas la voir se mettre en danger…
Mais il m’est impossible de faire quoi que ce soit. Olga me tient à l’écart. Et pour rappel, cette femme est terrifiante. À chaque fois que je tente de contacter Emily, elle me lance un regard à travers les caméras installées dans les yeux de Sabrina. Un regard traduisant une putain d’envie de meurtre !
Je décide donc finalement de poursuivre mon job d’observation, laissant Sabrina en stand by la plupart du temps. Mais un problème fait rapidement son apparition…
“Sabrina a vraiment besoin de maintenance… Son corps devient de plus en plus rigide et l’image qu’elle renvoie lag un peu. Mais le problème, c’est cette fichue stalkeuse !”
Anzu. La jeune fille accompagnant Emily. Je ne sais pas c’est quoi son problème, mais elle ne lâche jamais Sabrina du regard. Même lorsqu’elle dort, elle se repose dans le grenier, juste au-dessus de ma chambre afin de savoir quand ma poupée se lève !!
Sauf que plus les jours passent, et plus le problème empire. Et je doute très fortement qu’Olga accepte de m’aider là-dessus. Même après qu’elle lui ait demandé de se joindre à leur stupide entraînement, elle lui laissait une pause à chaque fois que je sortais Sabrina de la maison des Leeves.
C’est pourquoi, aujourd’hui, une semaine après le retour d’Emily dans ma vie, j’ai pris la décision d’y aller par la force. Anzu intercepte Sabrina, comme prévu, à la sortie de la maison. J’utilise alors l’excuse des courses, insistant sur le fait que je souhaite être seule.
Normalement, 90% des gens abandonneraient. On a tous besoin d’un ou deux moments de solitude dans une journée. Surtout lorsqu’on travaille avec une femme comme Olga…
Mais Anzu fait partie des 10% de chieurs qui habitent notre belle planète.
“Je vais porter les courses ! Tu risquerais de te casser un ongle vu comment tu es toute frêle.”
Oh la ferme… Un instant. Pourquoi les caméras prennent un angle bizarre ?! S.. Sabrina est en train de tomber ?!! Cette énorme conne l’a bousculée dans des escaliers !!!
Heureusement, cette idiote rattrape rapidement la main de ma poupée, m'épargnant une perte s’élevant à plusieurs centaines de milliers de pokédollars, ainsi qu’un reveal qui ne serait franchement pas le bienvenu.
“Qu’est-ce que…?”
Hm ?
“Tu n’es pas Sabrina… Qui es-tu…?”
Ma gorge se noue soudainement. Comment…? Comment a-t-elle compris ?! N.. Non… Ne panique pas… C’est probablement un malentendu…
“De quoi tu parles ? Lâche-moi. À moins que tu ne souhaites vraiment me pousser dans ces escaliers finalement ?”
“C.. C’était un accident !! Attends, non… Plus important que ça : qui es-tu ?!!”
Elle ne lâche pas le morceau. C’est quoi son problème à la fin ?! Pourquoi est-ce qu’elle continue de dire ça ?!!
“Je sais reconnaître une marionnette lorsque j’en vois une. Si tu n’avoues pas, alors je te ferai avouer moi-même !” Cri-t-elle, alors que des premières gouttes de pluie commencent à tomber du ciel.
Il faut que je fasse quelque chose. Cette fille est complètement folle. D’abord elle me stalk, puis elle tente de me tuer, et maintenant elle me menace tout en profanant des accusations sans fondement ! Même si la cible directe est Sabrina et que ses accusations sont on point, ça ne change en rien qu’elle est tarée !!
Cherchant un moyen afin de la distraire dans les environs, mon regard se pose rapidement sur le signal d’une unité mécanique stationnée non loin de leur position. Il s’agit d’un Mechamon Worker. Un mecha développé par la Sylphe.
Contrairement aux Soldats, ces derniers ne sont pas désignés pour le combat. Ils servent normalement à aider lors des travaux de grande envergure.
Vu l’heure, aucun pilote n’est à l'intérieur. Je décide donc d’en prendre le contrôle à distance afin de créer une diversion.
“Hm ? Tu entends ce bruit…?” J’utilise Sabrina afin d’alerter Anzu, me lavant ainsi de tout soupçon.
“Hein ? Quel brui—”
Soudain, le Elex (c’est le nom du robot, visiblement.) se propulse de son chantier jusqu’aux escaliers où se trouvent les deux jeunes filles, explosant certaines marches à l'atterrissage.
“Q.. Qu’est-ce que c’est que ça encore ?!!!”
Parfait ! Elle y croit. Maintenant plus qu’à se débarrasser d’elle…
“Va te mettre à l’abri. Vite,” utilisant un ton à la fois monotone et inquiet, je continue de jouer le jeu avec Sabrina.
Mais Anzu ne bouge pas. Elle fixe ma poupée, un mélange de pluie et de sueur s’écoulant le long de son visage alors que ses yeux se plissent de manière dubitative.
“... C’est encore toi. N’est-ce pas ?”
… Sérieux ?
“De quoi tu parles ?! Tu ne vois pas qu’on est en danger là—”
“Je te l’ai déjà dit. Je sais reconnaître une marionnette lorsque j’en vois une,” dit-elle, tournant son regard calme sur la machine géante.
Elle ne me laisse vraiment pas le choix. S’il lui faut quelque chose de concret… J’ordonne au Worker de frapper les escaliers à côté de Sabrina. Ma poupée perd alors de nouveau son équilibre, chutant dans les escaliers, jusqu’aux pieds du Elex.
Tant pis si elle est endommagée… Je commanderais les parties à remplacer plus tard. Mais cette gamine… Anzu… Je jure qu’elle me le paiera !
“SABRINA !!!”
Non… Emily ?! Que fait-elle ici ?!! Est-ce à cause des bruits causés par le Worker ? Merde… MERDE !!! Pourquoi jamais rien ne se passe comme prévu PUTAIN !!!
Anzu se tourne vers elle. Que va-t'elle lui dire ? Est-ce qu’elle me soupçonne toujours après que j’aie attaquée Sabrina ? Je ne peux pas prendre le risque de le découvrir en même temps qu’Emily !!!
Par réflexe, j’utilise les puissantes souffleuses du Elex en direction d’Anzu. Le but… Je ne sais pas exactement quel était le but. Mais une chose est sûre, je ne voulais pas lui faire de mal… Je ne suis pas une meurtrière. Ni une combattante. Oui… Je suis une victime dans cette histoire !
Il faut que je fuie. Il faut que j’attrape Sabrina et que je parte loin d’ici !!
“N’Y PENSE MÊME PAS !!!”
Emily ?!! E.. Elle a fait appel à ce Soldat bizarre ! Le même que sur l’autoroute 17 !! Merde… Non… Je ne peux pas gagner contre ce truc ! Il répond de la même manière que ce stupide drone que nous avions trouvé dans l’École Marguerite lorsque je tente de le hacker !!! Son programme ne fait aucun putain de sens !!!!
…
Tout ce que je tente sur cette stupide machine échoue. Et finalement, même ma tentative d’évacuation de Sabrina échoue.
Je constate mon impuissance en regardant, à travers mes écrans, Emily récupérer ma poupée. Il n’y a plus rien que je puisse faire. Elle est trop forte pour moi. J’ai perdu. J’ai tout perdu…
Mes parents ont pris mon enfance. Lance a pris ma liberté. Anzu a pris ma meilleure amie. Et Emily a pris ma précieuse poupée. Que me reste-t-il maintenant…?
Ma vision se floute peu à peu alors que mes yeux se remplissent de larmes. Je vois à travers le cockpit ouvert du Soldat d’Emily que la tête de Sabrina s’est décrochée du reste du corps.
Finalement, mes larmes coulent enfin le long de mes joues, s’écrasant ensuite sur l’écran que je gardais entre mes genoux depuis le début, indiquant désormais le message suivant :
Connection Lost.