Donjon Mystère - La porte du devenir

Chapitre 3 : Prise de conscience

4270 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 04/12/2021 23:04

      Je dormais, et c’était agréable. Les vacances m’avaient permis de retrouver un rythme de vie confortable, j’allais beaucoup mieux. Dommage que ce soit déjà la rentrée, mais je ne compte pas me laisser morfondre à nouveau par ce fichu cercle vicieux !

Nous sommes en 233, nouvelle année, nouvelles résolutions ! Cela fait plus de quatre mois que Nido a rejoint l’orphelinat, et il apprend de plus en plus vite. Je maintiens le fait que son amitié avec Sabelette soit une très bonne chose, malgré les circonstances de leur rencontre. Il s’épanouit, apprend plus vite grâce à elle, la rend heureuse et moi… me permet de souffler un peu plus.

Je veux que ça continue, je veux que les choses restent comme elles sont jusqu’à ce que tout le monde ici grandisse un peu, que ce soit littéralement… ou psychologiquement. En tout cas, je ne vois pas comment ça pourrait dérailler… !

*Toc* *Toc*

… Bon, bah je ne dormirai plus pour ce soir.

Je me redressai de mon lit avant de me tourner vers la fenêtre, parce que oui, c’est à la fenêtre que l’on toqua. Nido aussi, se tourna vers elle. Il ne devait pas dormir du tout, ce petit est inépuisable. Il me le fit bien comprendre quand il bondit de joie en écriant :

- (Nidoran) Sabelette !!

- (Bulbizarre) Moins fort, tu vas réveiller les autres… !

Effectivement, c’était bien elle. Elle avait grimpé un étage entier. Je savais que j’avais oublié un truc : couper les plantes collées à nos murs et qui ne cessaient de prendre de la hauteur. Elle tremblait, certainement à cause du froid hivernal et nocturne qui dominait Bourg-Lavaley. Enfin… je crois. Je veux dire, elle était couverte de gros vêtements comme toujours, mais peut-être était-elle très frileuse ? Ses griffes étaient plantées sur le rebord extérieur de la fenêtre, ce fut assez paradoxal avec son expression qui ne trompait personne : elle était navrée mais ne voulait partir. Nido s’empressa alors d’ouvrir la fenêtre, le sourire aux lèvres.

- (Nidoran) Yo yo yo, Sabelette, comment ça va ?

Tu n’as pas l’impression que quelque chose cloche, Nido ? Je n’avais pas regardé le réveil, je n’en avais pas besoin pour savoir qu’il était trop tard. En fait, il était trop tôt… quatre heure du matin !!

- (Sabelette) Salut, Nidoran. Je… *gémissements* est-ce que je peux entrer ?

- (Nidoran) Ouais, carrément !

Je n’ai pas eu mon mot à dire, qu’il ouvrit complètement la fenêtre pour la laisser passer. Le froid s’introduisait rapidement aussi, alors je bondis du lit pour presque la claquer avec mes lianes. Tout de même, les autres ont peut-être encore une chance d’être endormis.

- (Nidoran) Attends, ma maman met toujours des draps en plus dans notre placard, au cas où on aurait froid !

- (Sabelette) Ce n’est pas grave, sinon, je… peux dormir à même le sol.

Elle finissait à peine sa phrase, que Nido sortait déjà le drap. Alors soupirant de gêne, elle se tourna vers moi.

- (Sabelette) Bon… bonsoir, Bulbizarre.

- (Bulbizarre) Ouais… bonjour, Sabelette. Qu’est-ce qui te prends, de venir à une heure pareille ?

- (Sabelette) C’est… compliqué.

- (Bulbizarre) Oh t’inquiète, j’ai tout mon temps. Au moins jusqu’à ce qu’il faille se préparer pour aller en cours, quoi.

Ok, j’étais peut-être un peu énervé. Mais ça me paraissait si improbable, si irrespectueux. J’veux dire, jamais je n’aurai osé faire ça à son âge ! Encore une fois, elle s’excusa en baissant le regard.

- (Sabelette) Je… n’arrive plus à dormir. Je n’ai plus envie, plus dans ma chambre…

- (Bulbizarre) Pourquoi ?

C’est vrai, ça, pourquoi ? Elle ne vit qu’avec sa mère dans une grande maison. C’est l’avantage de ce genre de village, chaque habitant à son espace à lui. Hélas, elle n’était pas capable de m’en dire plus. Elle tremblait encore, alors même que le froid s’était dissipé. Mais ça, je ne l’ai remarqué qu’après.

- (Bulbizarre) Sabelette, j’espère que tu te rends compte de ta bêtise ? Je serai obligé d’en informer ta mère, demain…

- (Sabelette) N… non, pitié… ! *snif*

Ouais, je… je suis désolé. Je m’en suis rendu compte maintenant, il aura fallu qu’elle lâche une larme pour. Sérieusement, qu’est-ce qui s’passe ? Pourquoi un enfant pleure pour ça, parce qu’il ne veut pas rentrer chez lui ?

La réponse, je me la suis confectionnée avec ce qui est arrivé ensuite.

Alors que Nido venait d’installer le drap, alors que Sabelette allait enfin pouvoir se reposer, quelqu’un toqua à la porte de l’orphelinat. Toqua… ? Je voulais dire frappa. Je me suis demandé si elle n’allait pas la défoncer, tellement elle se déchaînait dessus. Cette fois, j’en étais sûr, tout le monde se réveilla. Maman sortit la première, en robe de chambre et d’un air paniqué. Elle descendit lui ouvrir et se fit presque bousculer par sa rage. Impunément, elle s’introduisit les poings fermés, fouillant du regard les escaliers du bâtiment. Qui ? Celle dont Sabelette redoutait.

- (Sablaireau) SABELETTE !!! DESCENDS IMMÉDIATEMENT OU JE VIENS TE CHERCHER !!!

Sa voix raisonnait à travers tout l’orphelinat.

- (Leuphorie) Ça suffit ! Pour qui vous prenez-vous, sortez d’ici !!

- (Sablaireau) Pas tant que ma foutue fille soit à sa place !!

- (Leuphorie) Et qu’est-ce qui vous fait croire qu’elle est ici !?

- (Sabelette) Je… je suis là… !

Marmonna-t-elle d’une voix tout aussi tremblotante que son corps recroquevillé. Elle se tenait au sommet des escaliers, alors que Nido, moi et les autres gardions effrayamment nos distances. Je n’ai pas honte de l’avouer, à cet instant précis, je craignais pour ma vie.

Elle descendit lentement rejoindre sa mère. Plus elle s’éloignait, plus Nido se décomposait du regard. Mais il n’osait dire quoique ce soit. Pour la première fois, il était paralysé par l’angoisse.

Une fois à son niveau, elle se fit violemment agripper par le cou. Maman en écarquilla les yeux, elle n’en revenait pas et tenta d’intervenir. Mais l’autre mère lui jeta un regard assassin, avant de faire demi-tour, claquer la porte et rentrer chez elle avec, apparemment, sa fille.

Oui, à la suite de cela… tout devint terriblement silencieux. C’est vrai qu’il était quatre heure du matin, mais… ce n’était pas un cauchemar.

 

La porte du devenir – Chapitre 3 : Prise de conscience

 

Inutile de dire que nous n’avons pas dormi de la nuit. En fait, nous étions même pressés de retourner à l’école. Enfin, nous… je veux dire Nido et moi. Les autres avaient eu peur comme nous, mais pas pour les mêmes raisons. Maintenant, ils nous reprochent d’avoir laissé entrer Sabelette, à croire que le monde est à l’envers ! N’ont-ils aucune compassion ? Peu importe, maman m’a promis d’aller rapporter tout ce qui est arrivé au maire du village, au lever du soleil.

Un soleil qui se leva bien vite, en réalité. Cette fois, hors de question d’arriver en retard ! Nous attendions, patiemment installés sur nos chaises, l’arrivée de Sabelette pour savoir comment elle allait.

Lorsqu’elle arriva… je remarquai tout de suite sa couche de vêtement supplémentaire. Ce n’était pas parce qu’elle était frileuse, non. Bon sang, comment ai-je pu ne pas y penser ? Ce genre de choses… arrive donc vraiment ?

- (Nidoran) Sabelette !! Ça va !?

Elle détourna immédiatement le regard, s’installant à sa place sans faire le moindre bruit. Son expression… ? Vide, perdue. Comme à son habitude, Nido força en s’allongeant presque sur son bureau.

- (Nidoran) Hé, dis-nous c’qui va pas !!

Mais rien n’y fit. Malgré tous ces accoutrements, je la voyais trembloter… encore. Je suis jeune, mais pas stupide non plus.

- (Bulbizarre) Arrête, Nido.

Je l’attrapai avec mes lianes et le déposa à sa place. Lui ne voulait rien entendre si ce n’est sa voix, mais la prof arriva et l’empêcha de quitter son siège à nouveau.

La journée fut longue, affreusement longue.

Quand ils le purent, les autres quittèrent l’école pour aller rattraper le temps de sommeil perdu par l’incident d’hier soir. Nous, nous attendions que Sabelette sorte. J’étais contre, mais Nido avait lourdement insisté. Dès qu’elle passa la sortie de l’école, il bondit et lui bloqua la route.

- (Nidoran) Attends !!

Oh là là… qu’est-ce qu’on est en train de faire… ?

- (Nidoran) Sabelette, s’il te plaît… !

- (Sabelette) … Je dois rentrer chez moi, Nidoran.

- (Nidoran) Je sais, je veux pas aller jouer ! Juste… dis-moi si quelque chose va pas !

Elle garda le silence quelques instants. Baissant un regard pensif, je vis toute l’indécision sur son visage. J’étais persuadé qu’elle ne l’ouvrirait pas jusqu’à ce que Nido cède, c’est-à-dire jusqu’à ce que je l’emmène de force à la maison.

Mais finalement…

- (Sabelette) Je…

- (Nidoran) Oui… !?

- (Sabelette) Je crois qu’il vaut mieux que l’on ne soit plus amis.

Clama-t-elle difficilement. Ce fut intense, trop pour avoir du répondant. Nido était bouche bée. Alors qu’elle se fraya un chemin jusqu’à chez elle, lui resta immobile, incapable de recevoir l’information correctement. Il est trop jeune pour comprendre ce genre de chose, je… ne peux pas lui expliquer.

La nuit tomba rapidement, mais jamais il ne retrouva le sourire. Même avant de dormir, alors que je m’amusais souvent à lui raconter des histoires ; cette fois, il n’en demanda aucune. Concernant ce que maman a fait, le maire semble avoir « reçu » sa plainte. Elle est persuadée que rien ne se passera et que de toute évidence, on ne peut rien y faire.

Nous sommes des enfants, après tout. Comment pouvons-nous faire changer les choses ?

Le lendemain, alors qu’on se préparait pour une nouvelle journée, quelqu’un sonna à la porte. Maman ouvrit : il s’agissait une nouvelle fois de Sablaireau, la mère de Sabelette. Je l’ai compris en entendant sa rude voix depuis la salle de bain, j’en sursauta et avala de travers mon dentifrice. Mais maman n’était plus intimidée.

- (Leuphorie) Que voulez-vous ? Je vous préviens, si vous entrez, j’appelle les explorateurs !

- (Sablaireau) Ouais, j’sais, c’est bon ! J’ai cru comprendre que mon comportement n’était pas adapté ?

- (Leuphorie) Oh, vous pensez ?

Donc… le maire a réellement fait quelque chose ?

- (Sablaireau) C’est bon, j’rentrerai plus sans votre permission chez vous.

- (Leuphorie) C’est mieux pour vous, oui.

Un léger silence régna.

- (Leuphorie) Bon, alors aurevoir !

- (Sablaireau) Quoi, vous pensez que j’suis v’nu pour ça ?

- (Leuphorie) Hein ?

- (Sablaireau) Ma fille. Je veux ma fille.

Un autre silence perdura, mais celui-ci était un peu plus gênant.

- (Leuphorie) De quoi parlez-vous, votre fille n’est pas…

Sablaireau cogna alors brutalement une patte au sol. Le jardin entier trembla.

- (Sablaireau) Je ne répèterai pas.

- (Leuphorie) Moi non plus. Partez.

Elle lui ferma la porte au nez. Maman… t’es sacrément courageuse, quand même ! Elle m’a tout de même demandé si Sabelette ne s’était pas à nouveau introduite cette nuit, mais je lui assurai que non. Nido me le confirma, lui non plus n’avait pas fugué.

Alors où était-elle ?

- (Sablaireau) SABELETTE, VIENS ICI IMMÉDIATEMENT OU TU SAIS CE QUI VA T’ARRIVER !!!

Hurla de toutes ses forces sa mère, depuis notre jardin. Même de là, nous tremblions à son entente. Elle récidiva, mais même après plusieurs minutes, personne ne se montra. Alors elle s’en alla, enfin… !

Arrivé à l’école, nous la vîmes discuter avec notre professeure. Elle nous jeta un regard noir, alors nous nous dépêchâmes de nous installer en classe. Mais lorsque le cours commença, Sabelette n’était toujours pas là.

Cela perturba Nido plus que quiconque. Il pensait à autre chose pendant tout le cours, quitte à se faire enguirlander par la prof à plusieurs reprises.

Au milieu de la journée, le maire interrompit le cours en entrant en classe. Il demanda à tout le monde de se réunir sur la place du village, l’air bien plus sérieux que d’habitude. Et effectivement, tout le monde y était. Il monta sur un piédestal avant de prendre la parole pour aller droit au but :

- (Le maire) Sabelette, la petite de Sablaireau a disparu.

Les villageois s’en horrifièrent. Immédiatement, la mère nous pointa d’un doigt à la griffe aiguisée.

- (Sablaireau) Ce sont eux, les responsables !! Ils l’ont corrompu, avec leurs coutumes étrangères !!

- (Leuphorie) Ce sont des diffamations, nous n’y sommes pour rien !

Hélas, malgré tout ce que maman avait à dire, je ne pouvais qu’entendre les murmures d’autrui. Tous nos voisins nous jugeaient, tous nous fusillaient d’un regard de jugement atroce à supporter.

- (Le maire) Calmez-vous, s’il vous plaît. Nous avons la chance, depuis cinq mois maintenant, d’avoir à nos côtés une véritable équipe d’exploration pour nous protéger ! Mes chers amis, approchez, si vous le souhaitez !

C’est alors qu’ils apparurent. Quatre explorateurs, quatre Pokémon que je ne connaissais pas si bien que ça. Ils étaient à la guilde d’exploration, l’année de la destruction de Bourg-Trésor. Parfois, l’un d’entre eux passaient à l’orphelinat pour s’occuper de nous, mais je crois que c’était uniquement parce que la guilde leur obligeait. Leur nom… ? Le chef, paradoxalement le plus petit et chétif, se nomme Argouste. Le dinosaure, c’est Ptyranidur. Il ne venait pas souvent mais était tout le temps très gentil. La grande balèze, c’est… Galifeu ? Elle a évolué pendant la guilde, difficile de tout suivre. Et le dernier, celui qui dans mes souvenirs rigolait tout le temps pour un rien, c’est Rocabot. Il était drôle, mais on préférait le voir lancer des cailloux. Bref, ce sont des gens de confiance.

- (Le maire) Voici l’équipe Renaissance, anciennement membres d’une guilde qui affronta une menace aux dires inébranlables.

Ils reçurent quelques applaudissements, mais clairement, beaucoup ne les aimaient pas.

- (Argouste) Voyons, nous n’avons fait que notre devoir !

- (Le maire) Dans ce cas, aidez-nous à retrouver l’une des nôtres !

- (Sablaireau) Ouais, et commencez par fouiller leur foutu orphelinat !

- (Leuphorie) Pardon !?

- (Le maire) C’est nécessaire, madame Leuphorie. De toute évidence, si vous n’avez rien à cacher, vous n’avez rien à craindre…

Quoi… ? Qu’est-ce que c’est que cette mentalité ? Dans ce cas, pourquoi ne pas fouillez dans vos tiroirs à caleçons aussi, monsieur le maire ?

- (Galifeu) Bien sûr, nous le ferons mais… le plus important est d’entendre le plus de témoignage possible.

- (Sablaireau) Ouais ouais, c’est ça…

La mère de Sabelette se retourna, les mains dans les poches, commençant déjà à rentrer chez elle.

- (Sablaireau) Rapportez-moi ma fille et disparaissez…

Elle s’en alla sur ces mots. Quelle ordure…

Bref, le maire demanda aux villageois de faire attention et d’aider les explorateurs à retrouver Sabelette dès qu’ils le pouvaient, puis le regroupement se sépara et l’équipe Renaissance nous suivit jusqu’à chez nous.

Le reste de la journée, nous l’avons passé à attendre qu’ils finissent de fouiller. Nous venions de témoigner, ils devaient maintenant explorer. Nido était intimidé, il ne les avait jamais rencontrés auparavant. Mais ils n’étaient pas méchants, bien au contraire.

- (Ptyranidur) Bon, je pense que ça ne sert à rien d’aller plus loin.

Clama le plus cool d’entre eux, après avoir rapidement examiné toutes les pièces.

- (Ptyranidur) Entre nous, vous ne la cachez pas ?

- (Leuphorie) Je vous assure que non.

- (Ptyranidur) Je vous crois, madame Leuphorie.

- (Rocabot) C’est vrai que j’ai un peu la flemme de jouer le détective avec vous. J’veux dire, on sait que vous ne feriez pas une chose pareille !

- (Galifeu) Oui, mais les villageois restent méfiants, Roca, c’est normal.

- (Argouste) Envers nous aussi, d’ailleurs. Combien de bandits avons-nous dû arrêter, avant d’être enfin reconnu à notre juste valeur ?

- (Galifeu) Bourg-Lavaley est un village très renfermé sur lui-même, très conservateur de leurs propres coutumes et peu friant de celles des autres.

- (Leuphorie) Certes, mais ce n’est pas comme si nous tentions d’imposer la nôtre. C’est plus que de la méfiance, à ce stade.

- (Galifeu) Je suis désolée que vous ayez à endurer cela, madame.

- (Ptyranidur) Et vous, les petits, tout va bien ?

Demanda-t-il en s’abaissant vers nous, nous laissant enfin la parole.

- (Tarsal) Maintenant un peu mieux.

- (Vivaldaim) Personnellement, j’aimerai juste que tout s’arrête. Retrouvez la fugueuse et faites oublier cette fichue histoire à tout le monde !

- (Gruikui) Ouais, j’en ai ras l’cul de tous ces regards méprisants. Tout ça parce que messieurs n’ont pas été capable d’agir normalement…

Marmonna-t-il en jetant un bref regard hautin à Nido et moi. Je soupirai d’ennui, en faisant mine de ne rien avoir entendu, mais mon petit frère, en revanche…

- (Nidoran) Tu veux dire… la laisser pourrir dehors ? C’est ça, pour toi, agir normalement ?

- (Gruikui) Hein… ?

- (Nidoran) T’es vraiment une ordure ! J’m’en fiche que tu m’aimes pas, mais arrête de vouloir du mal à Sabelette !!

- (Gruikui) Qu’est-ce qui m’veut, lui ? J’m’en fous de Sabelette, pourquoi j’lui voudrais du mal !?

- (Nidoran) Parce que tu t’en fiche de ce qu’il lui arrive !!

Cria-t-il, fou de rage. Ce fut la première fois que je le vis dans cet état, qu’il fut dans cet état. Maman et moi étions bouche bée, Gruikui, lui, s’énerva encore plus.

- (Gruikui) Parle-moi mieux, l’analphabète !

Il tenta de le frapper, mais Ptyranidur le bloqua juste avant que j’attrape Nido pour l’écarter. Maman s’interposa alors.

- (Leuphorie) Ça suffit, vous deux !!

- (Gruikui) Lâche-moi !!

Exclama-t-il, en se dégageant de l’explorateur.

- (Ptyranidur) Hé, du calme. Ne mêlez pas vos querelles à cette histoire, personne n’y est pour rien, d’accord ?

- (Gruikui) T’en sais rien, laisse-moi tranquille !

Il monta en vitesse dans sa chambre. Nido lui tira la langue, moi, je rajoutai à ma liste de tâches avant de dormir : « penser à fermer la porte à clé ». Je n’ai pas peur de Grui, mais je ne serai pas toujours là pour l’empêcher de se défouler sur Nido. Sérieux, quel égoïste…

- (Leuphorie) Je suis désolée pour ça…

- (Ptyranidur) Pas de problème, ne vous en faites pas.

- (Argouste) Bon, nous devrions partir interroger le reste des villageois.

- (Rocabot) Oui, et merci pour votre témoignage !

- (Galifeu) Auriez-vous des recommandations ?

- (Bulbizarre) La mère de Sabelette.

Exprimai-je sans réfléchir. Ça ne m’arrive pas souvent, surtout depuis que j’ai un petit frère à gérer, de parler avant de penser. Mais là, c’était beaucoup plus fort que moi.

- (Argouste) Ouais, forcément.

… En fait, j’ai bien fait.

- (Bulbizarre) Non mais sérieux, gardez-là bien en vue. Elle plus que les autres.

- (Galifeu) Et… pourquoi ?

- (Bulbizarre) … Juste une intuition.

Je n’osais pas en parler. Il était peut-être encore possible que… je me trompe, pas vrai ? La vérité, c’est que j’aurai préféré me tromper.

Bref, l’équipe d’exploration s’en alla poursuivre son enquête pendant que nous terminions cette journée sans grande motivation. Nous sommes mal vu de tous, Nidoran est perdu et la famille se tort.

Qu’est-ce qui pourrait arriver de pire ?

Question rhétorique, bien sûr. Le pire arriva le lendemain.

Tout le monde nous avait à l’œil, et ça affectait beaucoup les autres. Ils marchaient vite de la maison à l’école et inversement. Moi, je suivais Nido. Ouais, la tendance s’est soudainement inversée. Le bougre ne souhaite plus reposer sur mon bulbe. Comme je sais de quoi il est capable quand personne ne le surveille, je le suivais tout le temps, qu’importe où il allait à partir du moment où il s’écartait du chemin vers la maison.

Et j’ai très bien fait.

- (Bulbizarre) Nido, le soleil est quasi couché, là ! Il faut qu’on rentre !

- (Nidoran) Non, pas tant que je ne l’aurai pas retrouvé !

Exclama-t-il, en contournant toutes les maisons du village.

- (Bulbizarre) Et tu crois vraiment qu’elle est ici !? Écoute, je… je pense qu’elle s’est échappée. Loin, le plus loin possible de sa mère. C’est dur à dire, mais…

Dis-lui, Bulbizarre, il a le droit de savoir.

- (Bulbizarre) Tu sais, on a de la chance. Nous sommes orphelins, mais nous avons eu la chance d’être recueilli par une dame qui ne nous considère pas comme des résidents de son orphelinat, mais bien comme ses propres enfants !

Il s’en moquait, et poursuivait sa chasse. Nous arrivions derrière la maison du maire.

- (Bulbizarre) Nido… ! *souffle* Les familles, parfois, ça ne fonctionne juste pas. Les parents peuvent dépasser les bornes, ils peuvent infliger à leurs enfants des choses horribles… !

- (Nidoran) Oui, je sais. Sabelette est battue par sa mère.

À cet instant précis, mon souffle se coupa. Il m’avait dit ça sans pression, sans bégayer, sans même me regarder. Il continuait sa fouille et approchait une trappe métallique tout en me parlant de ça, comme si de rien n’était.

Nidoran qui me parle d’une fille battue par sa mère… à quel point je ne l’avais pas vu ? À quel point les récents événements… l’ont fait grandir ?

Je repris mes esprits lorsque j’entendis la chaîne métallique, qui fermait à clé la trappe, se briser sous la puissance de la corne de mon frère.

- (Bulbizarre) Qu’est-ce que… ? Nido, arrête !!

Il ouvrit la trappe avant que je ne puisse l’en empêcher.

C’est alors que l’atmosphère s’intensifia. Alors que je l’attrapai avec mes lianes, mon regard et le sien furent attirés par la noirceur du tréfond que cachait la trappe. Une très légère buée noire s’en échappa, l’air était glacé. Instinctivement, je bondissais en arrière en écartant le plus possible Nido de là, mais il se débattu et se libéra de mon emprise.

- (Nidoran) C’est quoi !?

- (Bulbizarre) NIDO !!!

J’étais complètement paniqué. Lui s’approcha jusqu’à y enfoncer sa tête, quel inconscient !

- (Nidoran) On dirait que y a carrément autre chose, là-dessous !

- (Bulbizarre) On rentre à la maison, Nido !!

- (Nidoran) Attends, peut-être que Sabelette est là-dedans !

- (Bulbizarre) NIDO, ON SE BARRE !!!

Je ne lui avais jamais hurlé dessus comme ça. Et ça le marqua, il me regarda une dernière fois avec déception. Et alors que je m’approchai lentement pour l’attraper… il recula et se laissa tomber dans ce gouffre noir sans fond…

- (Bulbizarre) NON !!!

Je fonçai le rattraper, mais mes lianes ne s’enfonçaient pas assez profondément. J’étais à la fois inquiet, gêné et fou de rage ; c’est-à-dire certainement pas en position de raisonner correctement.

Alors au lieu de retourner chercher de l’aide, je me suis à mon tour laissé tomber dans le gouffre pour le rattraper.

Je sais, ce n’est pas très malin ! Mais… je ne sais pas, malgré la tête du truc, j’avais quand même l’infime espoir que derrière cette buée se cachait un simple sous-sol.

Quel idiot je fus.

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