Donjon Mystère - Dream Team

Chapitre 63 : Poudre de Rafflesia

11274 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 16/04/2022 12:29

      Au recoin d’une plaine, proche de Loliloville, se trouvait une petite maisonnette. Faite d’un bois craquelant, les Pokémon qui vivaient à l’intérieur ne devaient pas baigner dans l’or. Une Dimoret ouvrit la porte, un sac de baies entre les pattes.

- (Dimoret) J’ai ramené la bouffe, les bouffons !

Clama ce Pokémon, isolé de la civilité pour avoir torturé et mis en danger de mort deux fugitifs qu’elle devait capturer vivants.

- (Ratentif) Oh, super !!

Répondit en souriant ce jeune timide, isolé pour avoir utilisé à son aise une arme illégale et construite par la DDR.

- (Darumacho) Comment ça, super ? Plutôt ENFIN, oui !!

Rétorqua ce grand gaillard rouge, isolé pour avoir attenté à la vie des habitants de Bourg-Palissade.

- (Soporifik) Allez, files-les moi que j’vous prépare le meilleur des gratins d’baies !

Termina le type psy du groupe, isolé pour avoir manipulé des Pokémon sauvages avec ses pouvoirs, sur le Continent Sud.

Tous venaient d’une contrée différente, et tous étaient sortis de la même prison en même temps. N’arrivant pas à reprendre leur vie en main, ils décidèrent d’habiter ensemble en territoire sauvage. Cela faisait un an, et ils semblaient avoir retrouvé le sourire.

Tout du moins jusqu’à cette nuit-là…

*BOUM*

Leur porte explosa brutalement. Tous sursautèrent, alors que la figure d’un petit Pokémon s’imposa dans la pièce.

- (Carapuce) Bien le bonsoir, mes chers victimes.

Ce fut la grande sœur, couverte d’une grande veste lui permettant de porter tout un tas de petits équipements comme des bombes, les mêmes qu’Escroco utilisa quelques semaines auparavant, des sachets ou encore un seringue. Bref, les autres étaient à la fois terrorisés, et désagréablement surpris de se rendre compte qu’une petite tortue bleue avait détruit leur entrée.

- (Darumacho) T’es qui, putain !?

Demanda agressivement le gaillard en s’enflammant.

- (Carapuce) Oh, personne de bien intéressant à vos yeux, j’imagine. Je viens juste rendre des comptes.

- (Dimoret) Dégage !!

L’ancienne secouriste lui sauta dessus, les griffes en avant. Enfin elle essaya : Carapuce se décala, et laissa la plus imposante figure de son petit frère entrer sur le champ de bataille. Il paraissait différent, moins expressif. Ses yeux étaient rouges. Il frappa la type glace en pleine figure, l’envoyant s’encastrer dans un mur tout en choquant le reste de ses adversaires.

- (Ratentif) AAAH !!! Pitié, on ne vous veut rien de mal !!

- (Soporifik) Agenouillez-vous, crétins… !

Ils s’exécutèrent, mais la criminelle en rigola.

- (Carapuce) Oh, ça ne servira à rien.

Elle se tourna vers son petit frère.

- (Carapuce) Ces quatre-là ont tous un lien avec nos parents.

Elle pointa du doigt Ratentif.

- (Carapuce) Les siens bossaient avec l’escouade chargée de les arrêter.

Puis Darumacho.

- (Carapuce) Lui a échangé des infos contre du fric.

Puis Soporifik.

- (Carapuce) Lui a manipulé la mémoire de beaucoup d’agents pour leur faire oublier cette histoire.

Puis Dimoret.

- (Carapuce) Et elle… n’a juste rien fait. En même temps, elle était secouriste. En bref, ils méritent tous un châtiment.

- (Carabaffe) … Je m’en charge.

Et il s’en chargea sans hésiter.

 

L’histoire de la Dream Team – Chapitre 63 : Poudre de Rafflesia

 

Mysdibule posa une patte dans la maisonnette le lendemain, alors que le soleil réchauffait difficilement Arkéapti et Mustéflott, venus enquêter en manteau et écharpe. Ils furent informés par l’intermédiaire d’un marchand, qui tous les soirs en quittant la ville passait proche de la maisonnette. L’exploratrice constata avec indifférence les quatre cadavres qui régnaient au centre de la pièce. Quand le type vol les aperçu, il sortit vomir de dégoût.

- (Arkéapti) Quelle… quelle horreur… !

- (Mysdibule) Ce fut un carnage, à priori organisé par les mêmes Pokémon qui s’amusent à assassiner d’anciens taulards.

Disait-elle, tout en prenant des photographies qu’elle envoya tout de suite à Dedenne.

- (Mustéflott) Ouais, aucun sauvage du territoire n’est assez agressif ou puissant pour commettre un tel massacre…

Il s’abaissa, constatant que le plancher était encore humide.

- (Mustéflott) Il pleuvait, hier soir ?

- (Arkéapti) Non, et il ne neigeait pas non plus.

- (Mustéflott) Est-ce qu’ils préparaient à manger, genre un truc à la casserole ou… ?

Arkéapti récupéra le sac de baies, par terre et encore fermé.

- (Arkéapti) Ils allaient le faire, en tout cas.

- (Mustéflott) Ok, donc en sachant que l’affrontement a eu lieu ici, je pense pouvoir assurer qu’un type eau était là.

Il observa rapidement les victimes.

- (Mustéflott) … Un type eau dans le camp des agresseurs.

- (Mysdibule) Le gamin me dit quelque chose. Dedenne ?

- (Dedenne) C’est bon, j’ai !

Clama l’ingénieure dans l’oreillette. De son côté, dans le laboratoire de la fondation RS, des tas d’informations s’affichaient sur tous les écrans que l’exploratrice semblait pouvoir analyser en un rien de temps. Des informations juridiques sur chacun des concernés.

- (Dedenne) Le Ratentif, tu dis ? Deux ans de taule pour utilisation d’équipement associé à la DDR.

- (Mysdibule) Hum, c’est bon, je me souviens. Il n’était qu’un naïf garnement pensant faire joujou avec l’engin des grands, certainement hérité de ses parents qui devaient bosser pour l’organisation.

- (Dedenne) Tout juste ! C’est la guilde qui l’a arrêté, il y a plus de trois ans.

- (Arkéapti) Mais il a purgé sa peine, n’est-ce pas ? Pourquoi s’en prendre à lui ?

- (Dedenne) Ça a forcément un rapport avec la DDR, tous ont de près ou de loin été en contact avec eux.

- (Mustéflott) Peut être que le chef voulait se débarrasser d’eux avant qu’ils ne dévoilent quoique ce soit ?

- (Mysdibule) Mustéflott, tu as parlé d’un type eau ?

- (Mustéflott) Hein ? Euh… ouais, c’est quasi sûr, y a des résidus d’eau partout.

- (Mysdibule) Analysons-en le plus possible. Si la composition est la même, alors cela voudra dire qu’ils proviennent du même Pokémon, et donc qu’il était seul. Et si il fut seul et de type eau, face à quatre anciens hors-la-loi qui savaient se défendre… alors nous détermineront nos premiers suspects.

- (Mustéflott) Ok, je m’en charge !

Il s’exécuta, pendant que les deux autres explorateurs observèrent les dégâts infligés aux victimes.

- (Arkéapti) Celui qui a fait ça n’avait aucune conscience morale, c’est atroce… ! Peut-être était-il sous influence ?

- (Mysdibule) Je préfère ne pas chercher d’excuses aux meurtriers.

- (Arkéapti) Bien sûr, mais… *soupir* bref ; qu’est-ce que tu as en tête, Mysdibule… ?

- (Mysdibule) Si un criminel de type eau était capable de faire ça avec ses pouvoirs, je pense que je le saurai. Généralement, les plus redoutés agissent dans les territoires adéquats, comme des rivières, lacs ou océans pour noyer leur victime, parce que leurs pouvoirs ne sont originellement pas adaptés à la confrontation. Mais lui… il a un sacré culot. Et puisqu’il a réussi… une sacrée force et ingéniosité au combat, c’est indéniable.

- (Arkéapti) Et donc… ?

Elle soupira, puis avança vers la victime suivante en s’éloignant d’Arkéapti.

- (Mysdibule) Navrée par avance, mais plus j’observe, plus mes soupçons se cernent…

Marmonna-t-elle, en faisant comprendre au gentillet de l’équipe que la réponse qu’elle finira par donner ne lui plaira pas.

Au même moment et à une dizaine de kilomètres se trouvait une tente. Discrète entre quatre arbres, elle cachait les trois Pokémon à l’origine de ce massacre. Carapuce alimentait le feu de camp à l’entrée, se préparant à déguster de multiples brochettes de Magicarpe. Elle souriait, satisfaite face à des tas de plans qu’elle avait sous les yeux, pour la suite de son plan. Hélas, on ne pouvait en dire autant des deux garçons qui l’accompagnaient.

À l’intérieur, les vêtements et la carapace de Carabaffe étaient éparpillées partout par terre. Il était allongé mais se mouvementait les yeux fermés. Un léger drap recouvrait ses parties, et Crabagarre devait régulièrement le remettre à sa place. Le reste de son corps était à l’air libre, transpirant comme jamais auparavant face à ce qu’il subissait. Le crabe lui déposa un torchon mouillé sur le front, constatant avec effroi l’état pitoyable du petit frère de sa partenaire. Il était comme cela depuis des heures, constamment essoufflé, tremblant comme une feuille et pourtant mourant de chaud.

- (Crabagarre) Tiens bon, mon pote… !

- (Carabaffe) Je… *souffle* j’en peux plus… ! *souffle*

- (Crabagarre) Je sais, je…

Il fixa du regard une petite boite rouge ouverte dans laquelle deux sachets se trouvaient. Il paraissait hésitant.

- (Carabaffe) Qu’est-ce que… *souffle* qu’est-ce qui m’arrive… ? *souffle*

- (Crabagarre) Merde…

- (Carabaffe) C… *souffle* Crabagarre… ! *souffle*

- (Crabagarre) Ouais, c’est bon c’est bon, j’suis là !

Finalement, il sortit un sachet de la boite et glissa la poudre dans un verre d’eau. Il redressa Carabaffe d’une pince pour lui faire boire de l’autre. Et ce dernier avala tout sans se poser de question, épuisé qu’il fut. Quelques minutes plus tard, il s’endormit. Le crabe attendit cet instant pour rapidement essuyer sa transpiration, relever la couverture et sortir de la tente.

- (Crabagarre) Parfois, j’me demande de quoi ce môme est fait, putain… !

Il s’installa aux côtés de sa partenaire, qui lui tendit une brochette.

- (Carapuce) J’ai trouvé notre prochaine et dernière cible.

Il agrippa la nourriture d’un air perplexe.

- (Crabagarre) Attends, il faut d’abord qu’on s’ressource. Il ne reste plus qu’un sachet.

- (Carapuce) Déjà ?

- (Crabagarre) On l’drogue trois fois par jour, sans compter la surdose qu’on injecte aux victimes, depuis qu’on a quitté la ville. À quoi tu t’attendais ?

- (Carapuce) Je vais appeler Roitiflam, il nous en redonnera en temps voulu. Mais si il ne reste qu’un sachet… alors on devra le garder pour tuer.

- (Crabagarre) Quoi, pour la prochaine mission ? Ok alors deux choses : premièrement, le petit devra subir la descente, et crois-moi, il ne la supporte VRAIMENT pas ! Sérieux, j’ai cru qu’il allait y passer…

- (Carapuce) Et alors, tu t’inquiètes pour lui ?

- (Crabagarre) Nan, enfin… c’est notre seule arme, quoi.

- (Carapuce) Il survivra.

- (Crabagarre) Hum, je suppose. Ah et deuxièmement, je commence à craindre la réaction de Roitiflam.

- (Carapuce) Pourquoi ? C’est lui qui nous donne le feu vert.

- (Crabagarre) Avec avertissement. Il n’apprécie pas que l’on tue d’anciens partisans de la DDR.

- (Carapuce) Connerie. Pour lui, on ne fait qu’éliminer les plus faibles pour renforcer notre nouvelle recrue.

Disait-elle, en pointant du pouce la tente.

- (Carapuce) Et puis ce n’est pas mon problème, ils n’avaient qu’à pas avoir un lien avec le meurtre de mes parents.

- (Crabagarre) Je sais, c’est juste que… tu ne penses pas t’être assez vengée ?

- (Carapuce) Crabagarre… qu’est-ce qui te prends ? Je croyais qu’on s’était mis d’accord, on devait se venger de TOUS les responsables, tu te souviens ? Les explorateurs ont beau être sur nos pattes, même eux n’arrivent pas à nous en empêcher ! Les concernés commencent à comprendre ce qu’il se passe, et j’adore penser qu’ils se chient dessus en nous sentant approcher ! On est sur la dernière ligne droite, allez, un peu de courage… !

Elle posa délicatement une main sur sa pince.

- (Carapuce) Fais-le pour moi, s’il te plaît…

- (Crabagarre) *soupir* Ouais… évidemment que je t’accompagnerai jusqu’au bout. Je… je souhaite juste qu’on ne prenne pas trop de risques. On a enfin une chance de quitter les quartiers pauvres… !

- (Carapuce) Et on le fera, Crabagarre, je te le promets !

Ils s’embrassèrent sur ces mots, l’un déterminé à faire changer les choses, l’autre à se venger avant tout. Une vengeance qui fut bien entamée, une vengeance qui bientôt toucherait à sa fin.

En effet, le mois de Février en arrivait à son vingt-huitième jour. Cela faisait deux semaines que le trio avait quitté Loliloville pour retrouver et assassiner tous ceux qui, selon ce qu’apprit Carapuce durant toutes ses recherches, avaient un lien avec l’assassinat de ses parents. Avec les quatre meurtres du soir dernier, ils en étaient à douze. Voilà pourquoi les explorateurs étaient à leur recherche, voilà pourquoi l’équipe RS commença à les traquer.

Et en reliant les analyses des précédentes scènes de crimes avec celle qu’ils examinèrent en personne, Mysdibule fut sûre d’elle. Elle convia Arkéapti et Mustéflott dans le laboratoire de Dedenne.

- (Mysdibule) Ma théorie s’est avérée juste. Tous les résidus d’eau proviennent du même Pokémon.

- (Arkéapti) Donc il se battait bien seul ? Wow, qui pourrait en être capable ?

- (Mysdibule) Un type eau surentraîné. Quelqu’un qui fuit depuis plusieurs semaines minimum, quelqu’un qui, au vu de tous les dégâts causés, semble agir par frustration et seulement face à des hors-la-loi.

- (Arkéapti) Attends, ne me dis pas que…

- (Mysdibule) Si, Arkéapti, Carabaffe est forcément un suspect potentiel.

Le type vol écarquilla lentement les yeux, l’autre garçon baissa honteusement la tête.

- (Arkéapti) C’est… c’est une blague… ? Tu le soupçonnes d’avoir commis des crimes !?

- (Mysdibule) En fait, il est même notre suspect numéro un.

- (Arkéapti) N’IMPORTE QUOI !!!

Hurla-t-il soudainement, en levant les ailes.

- (Arkéapti) Alors c’est comme ça, hein ? Le faire fuir n’est pas assez pour toi, tu veux en plus de ça le mettre derrière les barreaux !? Tu ne sais RIEN de Carabaffe, puisque tu n’as JAMAIS fait l’effort de lui adresser la parole autrement que pour lui faire des reproches ! Bon sang, mais laisse ce môme tranquille !

- (Mustéflott) Je… je crois qu’elle a raison, Arkéapti…

- (Arkéapti) Hein !?

Les regards se tournèrent vers celui qui s’était le plus occupé de Carabaffe. Il avait les larmes aux yeux.

- (Mustéflott) Je… j’ai quand même jeté un coup d’œil aux victimes, après vous. Leurs blessures, la manière dont ils se sont fait mettre K.O. avant de se faire tuer… c’étaient mes techniques.

Dedenne baissa la tête, Mysdibule croisa les bras. Arkéapti, de son côté, fronça les sourcils de peine.

- (Arkéapti) Non…

- (Mustéflott) Je… *snif* je n’arrivai pas à y croire non plus. Mais ça ne peut être que lui, à ce stade… !

- (Arkéapti) Non ! Non, je refuse de me résoudre à cette conclusion ! De toute façon, on ne peut pas l’arrêter sans preuve concrète !

- (Mysdibule) Peut-être, mais on doit le retrouver.

Le type vol crispa les dents.

- (Mysdibule) Quoi, ça ne te va pas ?

- (Arkéapti) … J’aurai aimé t’entendre dire ça le jour où il a disparu, Mysdibule. Mais comme toujours, tout ce qui t’intéresse… c’est le malheur des autres.

Il quitta la pièce sur le champ, en larme.

- (Mustéflott) Mec… !

- (Mysdibule) C’est bon, laisse. On n’a pas besoin de lui.

- (Mustéflott) Comment ça… ? Déjà, ça ne me plaît pas non plus de faire cette mission sans Sapereau et Pharamp !

- (Dedenne) Sapereau essaie de comprendre ce que Pharamp cache, tout en lui remontant le moral… enfin en essayant aussi.

- (Mysdibule) Ce ne sont pas des muscles, dont nous avons besoin. Ni d’empathie, visiblement…

Marmonna-t-elle, en faisant allusion à Arkéapti.

- (Mysdibule) On y arrivera sans eux, Mustéflott.

- (Mustéflott) *soupir* Bon… ok, par quoi on commence ?

- (Mysdibule) Séparons-nous pour aller plus vite. Je vais inspecter son appartement. Dedenne, regroupe le plus d’infos possible sur tout ce qui concernerait un Carabaffe depuis le début de l’année. Mustéflott, je vais te demander d’aller rendre visite à ses proches. Dégote-nous tout ce que tu peux.

- (Mustéflott) J’ai des noms, mais il va m’falloir des adresses.

- (Dedenne) J’peux t’aider à en trouver certaines.

- (Mysdibule) Ouais, moi aussi.

Leur enquête avançait.

Le lendemain midi, soit le 1er Mars, alors que le soleil n’était toujours que source de lumière. Carabaffe fixait le lac le plus proche de leur tente, assis contre un arbre en se maintenant contre la pauvre couverture qui le recouvrait de moitié. À nouveau, il transpirait et tremblait de douleur. Crabagarre vint lui apporter une assiette de baies.

- (Crabagarre) Ça va, mon pote, tu tiens l’coup ?

- (Carabaffe) … Nan…

Il s’installa à ses côtés et s’assura qu’il engloutit son repas.

- (Crabagarre) Mange, ça t’fera du bien.

- (Carabaffe) *soupir* Qu’est-ce qui s’est passé, bordel ? Pourquoi je douille comme ça ?

- (Crabagarre) T’as dû t’faire piquer par un insecte, c’est rien.

- (Carabaffe) C’est rien… ? J’te refilerai bien ma migraine, trou d’balle.

- (Crabagarre) Ah ah ah, nan t’inquiète, ça ira ! *soupir* C’est qu’ça caille, ici ! Tu veux que je t’rapporte ta carapace ?

- (Carabaffe) Nan, je déteste transpirer dedans, après l’odeur met du temps à partir…

- (Crabagarre) Hum, j’comprends.

- (Carabaffe) Sérieux, je… j’pense que c’est autre chose. Mon corps n’a jamais été en si mauvais état et pourtant, les dieux savent que j’me suis déjà fait casser la gueule ! Quand j’essaie de m’souvenir de ces derniers jours, la migraine s’accentue.

- (Crabagarre) Alors arrête, non ?

- (Carabaffe) Facile à dire. On s’est tous les trois mis d’accord pour quitter Loliloville à la recherche des types qui avaient butés nos parents, et puis plus rien. Ça fait combien de temps qu’on s’est barré, au juste ?

- (Crabagarre) Deux jours.

Cela faisait deux semaines.

- (Carabaffe) Et on arrive bientôt à destination ?

- (Crabagarre) Très bientôt, même. Ta sœur s’assure qu’on n’prenne aucun risque.

- (Carabaffe) Est-ce qu’elle prend en compte mon état… ? Si je peux pas m’battre, ça sert à rien d’y aller.

- (Crabagarre) T’inquiète, elle le prend en compte.

- (Carabaffe) Hum, ok…

- (Crabagarre) Au pire, tu lui en parles si ça n’va vraiment pas.

- (Carabaffe) Nan… nan nan, j’veux pas la décevoir.

- (Crabagarre) Ah ah, ok, j’vois !

Le silence régna quelques instants, et Carabaffe arrêta de penser à ce qu’il aurait pu faire durant son temps d’inconscience. En d’autres termes, Crabagarre parvint à le distraire, le temps que la mission s’achève. Ils ne pouvaient plus le droguer, leur solution de facilité ne leur état plus accessible. Il aurait pu s’arrêter là, mais curieux du personnage qu’était le petit frère de celle qu’il aimait, il resta à ses côtés encore un peu.

À ce sujet, Carapuce revint vers la tente. Elle venait de s’entretenir avec Roitiflam, qui en plus de lui envoyer une nouvelle boite rouge chez elle, à Loliloville, lui donna le feu vert pour s’en prendre à leur dernière cible. Entendant les garçons discuter, elle s’approcha discrètement.

- (Carabaffe) Je… j’le dis pas souvent, mais… merci. D’être comme tu es, j’pense que… ma sœur est plutôt bien tombée.

- (Crabagarre) Oh, j’dirais plutôt que c’est moi qui suis bien tombé !

- (Carabaffe) En plus t’es pas un connard avec ta belle famille.

- (Crabagarre) Pourquoi j’le serais ?

- (Carabaffe) J’sais pas, c’est l’image que j’ai des mecs avec leur belle famille. Je crois que ça vient… des bandes-dessinées que m’achetaient mon… enfin Mégapagos, quand j’étais petit.

- (Crabagarre) Ah ah, c’est trop mignon !

Cachée derrière un arbre, la grande sœur crispa les dents.

- (Carabaffe) Il m’apprenait à lire avec ça, alors c’est un peu ancré dans ma mémoire, j’imagine.

- (Crabagarre) Hé, j’avoue que c’est une bonne idée ! Il mêlait apprentissage et amusement, ça devait rentrer vite ?

- (Carabaffe) Carrément, ah ah… ! Aïe… merde, faut pas que j’rigole…

- (Crabagarre) En tout cas, t’es quelqu’un d’sacrément impressionnant, pour un jeune de ton âge. En même temps, t’es un sauveur du monde…

- (Carabaffe) … Arrêtez de dire ça. Seuls, nous ne valions rien. C’est parce qu’on a agi ensemble, que…

Il baissa la tête.

- (Carabaffe) Que…

- (Crabagarre) Ça va aller ?

- (Carabaffe) Ouais, je… je repensais à la guilde. J’avais tant de chance d’être aussi bien entouré, et je n’en profitais pas. Quelle ordure j’étais, même envers mon équipe. Et pourtant, c’est après… bien après, que je les ai déçus…

- (Crabagarre) Les gens changent, mon pote, surtout des jeunots comme vous.

- (Carabaffe) Je sais, mais… c’est moi, qui ai rompu avec Macronium.

- (Crabagarre) Attends, t’étais en couple !?

- (Carabaffe) Ouais, avec la meilleure. La plus courageuse, la plus ambitieuse… un peu trop, justement.

Il ferma les yeux de honte.

- (Carabaffe) C’est moi qui ai mis fin au couple parce que j’avais peur, trop peur de la perdre. Elle n’était pas exploratrice et pourtant, elle continuait de s’battre pour sauver le monde. Elle a mis derrière les barreaux des dizaines de types que personne ne suspectait, notamment grâce à son rang social, depuis que c’est une star mondiale. En gros, j’aurai dû être fier. Mais au lieu d’ça, je… *snif* je l’ai engueulé parce qu’elle prenait trop de risques !

Il se cacha les yeux de honte.

- (Carabaffe) Quel putain d’idiot, j’ai tout gâché ! Elle a supporté mon caractère de merde pendant des années, et moi je la rembarre dès qu’elle fait quelque chose qu’elle considère juste mais que je n’accepte pas ! *snif* Je… je voudrais tellement lui présenter mes excuses !

Crabagarre lui tapota le dos. Il était triste, et le pire, c’est que cela paraissait sincère. Là, Carapuce ferma les poings.

- (Crabagarre) Je suis désolé pour toi, mais… dis-toi qu’tu peux toujours essayer de t’racheter !

- (Carabaffe) *snif* Comment… ?

- (Crabagarre) J’sais pas, moi, recontacte-la, encourage-la dans c’qu’elle fait et laisse le temps reconstruire les ch…

Il s’auto coupa la parole, se rendant soudainement compte qu’il lui prodiguait de vrais conseils d’ami. Autrement dit, de vrais conseils CONTRADICTOIRES vis-à-vis de sa MISSION qui consistait à le MANIPULER. Les trois mots en majuscule furent ceux que la grande sœur se répétait en boucle en voyant la scène, ça et « PUTAIN FERME TA GUEULE ».

- (Carapuce) Hé, les garçons !

Clama-t-elle, en sortant de sa cachette.

- (Crabagarre) Oh, euh… salut, chérie, ah ah…

Rougissait-il de honte.

- (Carapuce) Je vous ai cherché partout ! Carabaffe, tu ne peux pas être dehors en sous-vêtements, pas avec cette température !

- (Carabaffe) J’crève de chaud…

- (Carapuce) Et alors ? On ne vainc pas la maladie en s’enrhumant ! Allez, au lit !

Elle le força à s’y rendre, tout en agrippant strictement son partenaire.

- (Carapuce) Nan, toi… tu restes là.

Marmonna-t-elle sèchement. Carabaffe les salua, puis rentra se coucher malgré la douleur. Dès qu’il ferma la tente, la grande sœur gifla son amant qui, de son côté, se laissa faire d’un air honteux.

- (Carapuce) Qu’est-ce que tu fous, bordel !?

- (Crabagarre) Désolé, désolé, désolé… ! Pendant un instant, j’ai vraiment perdu la mission de vue, quel imbécile… !

- (Carapuce) Tu n’t’es pas seulement contenté d’lui rappeler Mégapagos ou la Dream Team, tu l’as carrément ENCOURAGÉ à reprendre contact avec son passé ! T’as oublié que lui faire oublier, C’ÉTAIT LE BUT !?

- (Crabagarre) J’voulais juste qu’il arrête d’essayer d’chercher une explication à pourquoi il ne s’souvient de rien !

- (Carapuce) En lui rappelant des trucs !?

- (Crabagarre) Je sais, j’suis vraiment désolé ! C’est difficile de sympathiser avec quelqu’un que tu n’connais pas sans parler de ce que tu connais déjà, j’aurai dû y penser avant, je sais… !

- (Carapuce) Sympathiser… ? Pourquoi tu veux sympathiser avec lui !?

- (Crabagarre) Parce que… euh…

Il parut perplexe.

- (Crabagarre) Et toi, alors ? Peu importe qu’on s’en serve ou non pour nos propres intérêts, il reste ton petit frère ! Tu n’pourras pas juste l’enlever d’ta vie quand il ne t’serviras plus à rien !

- (Carapuce) Bah bien sûr que si ! Dès que la mission est terminée, on l’refile à Roitiflam !

- (Crabagarre) Tu ne l’portes vraiment pas dans ton cœur… ? Toi qui tiens tant à venger ta famille biologique ?

- (Carapuce) Qu’on s’mette d’accord, il a été élevé par un salopard, dans un village de salopards ! Ses valeurs n’ont rien à voir avec les miennes, alors je ne le veux PAS dans ma vie !!

- (Crabagarre) Mais… !

- (Carapuce) QUOI !?

Le silence régna brusquement. Le crabe recula d’un pas, hésita… puis baissa la tête.

- (Crabagarre) Ok, j’ai compris.

- (Carapuce) Tu aurais dû comprendre il y a des mois, Crabagarre !

- (Crabagarre) Oui, je… j’ai été naïf, excuse-moi.

- (Carapuce) *soupir* Bon, on oublie et on repart de zéro. De toute façon, on est bientôt au bout du chemin…

- (Crabagarre) Je l’espère…

Marmonnèrent-ils, en approchant la tente. Le reste de la journée fut un peu plus calme, le crabe semblait avoir compris et accepté son rôle. La lune se leva et, du côté de Loliloville, Mustéflott entra dans les quartiers pauvres. Il avait bien mis dix minutes à franchir la ruelle du bar Limaspeed. Il n’était pas à l’aise.

Pour cette rencontre-ci, la dernière de prévue, Mysdibule lui avait donné une adresse bien précise. Il se rendit en face du garage Granbull, entra dans l’immeuble, monta l’étage aux escaliers grinçants puis toqua timidement à la porte d’entrée. Mais il n’eut aucune réponse, même après avoir récidivé.

- (Mustéflott) Bon… tant pis.

Se marmonna-t-il, avant de ressortir bredouille. Il s’apprêtait à quitter la ruelle, lorsqu’il entendit une traînée enflammée passer au-dessus de lui. Il leva la tête trop tard et resta immobile quelques instants, avant d’approcher la façade Est de l’immeuble, là où il entendait un petit grabuge.

C’est alors qu’il aperçut Reptincel, ouvrant la fenêtre de son appartement en crispant les dents de gêne.

- (Mustéflott) C’est toi, qui habite ici !?

- (Reptincel) Hein… ? Oh, bonsoir !

- (Mustéflott) Euh… bonsoir. Je peux te parler ?

- (Reptincel) Faut vraiment que j’aille aux toilettes, mais je vous ouvre la porte !

- (Mustéflott) Hein… ? Euh… non, ça ne presse p… !

Il s’enfonça chez lui avant qu’il ne finisse, et le membre de l’équipe RS resta bouche bée quelques instants. Mysdibule ne lui avait pas dit de qui il s’agissait, et de tête, il se souvenait avoir vu Reptincel pour la dernière fois au Test RS. Peu importe, il monta de nouveau et attendit timidement à l’entrée qu’il finisse ses affaires. Le type feu accourut dans sa cuisine pour s’y laver les mains, lui faisant tout de suite face.

- (Reptincel) Désolé de l’attente, je ne pensais pas recevoir de la visite… !

- (Mustéflott) Pas de problème. Tu… euh… tu es bien le gamin qui a participé au Test RS ?

Il hocha la tête.

- (Mustéflott) L’ami de Carabaffe ?

- (Reptincel) On peut dire ça, oui.

- (Mustéflott) Hum, c’est ce que m’ont dit tous les autres.

- (Reptincel) Vous venez m’apporter des nouvelles de lui ?

- (Mustéflott) Non, en fait, je viens en chercher. Il… euh…

Il fixa la fenêtre du regard.

- (Mustéflott) On… on peut la fermer ?

- (Reptincel) Oh, euh… bien sûr !

Il s’essuya les mains puis fonça exécuter la demande du type eau.

- (Mustéflott) Merci. Est-ce que… est-ce que tu es pressé ?

- (Reptincel) Un peu. En fait j’aidais un marchand à rénover sa boutique, mais ses toilettes dysfonctionnaient alors je suis rentré en vitesse. Mais j’ai cru comprendre que ça concernait Carabaffe, alors je suis à vous.

- (Mustéflott) Oui, euh… je vais essayer de faire vite, alors.

Le type feu le regarda d’un air perplexe. Il voyait bien que cet homme, d’habitude confiant et impudique, se sentait mal, si ce n’est pas à sa place. Pensant que ce fut à cause de Carabaffe, il l’écouta très sérieusement.

- (Mustéflott) Depuis Novembre dernier, Carabaffe a commencé à s’absenter. Lui qui avait ses propres compartiments à la fondation RS, il prétendait vouloir se reposer dans son appartement. Plus les jours passaient, et moins il participait aux entraînements, aux missions, aux réunions, aux… activités. Et depuis le début de l’année… il a disparu. Nous l’avons appelé plusieurs fois, je suis allé jusqu’à chez lui mais… rien.

- (Reptincel) Attendez, ça va faire trois mois qu’il ne donne plus signe de vie ? Pourquoi vous inquiétez-vous maintenant ?

- (Mustéflott) Parce que… *soupir* nous pensions qu’il avait fui l’entraînement que lui offrait la victoire du test RS.

- (Reptincel) Était-ce si horrible que ça ?

- (Mustéflott) C’est du privé, mais disons que celui qu’il aurait aimé voir à ses côtés… n’était pas là pour lui.

Reptincel ferma les yeux. Pharamp n’avait pas respecté le pacte, mais à vrai dire, ils étaient deux.

- (Mustéflott) Et aujourd’hui, nous sommes sur une enquête. Une enquête qui concerne un meurtrier que nous savons de type eau. Un meurtrier agile, robuste et ingénieux. Un meurtrier qui utilise mes techniques…

- (Reptincel) … Je vois.

- (Mustéflott) J’aimerai savoir… si tu es courant de quelque chose. Est-ce que tu aurais ne serait-ce qu’une idée de… d’où Carabaffe pourrait se trouver, s’il te plaît ?

- (Reptincel) Navré, mais je ne suis plus en contact avec lui depuis plus longtemps que vous. Ceci-dit, Carabaffe meurtrier…

Il nia d’un mouvement de tête.

- (Reptincel) Je refuse d’y croire, même avec ses pulsions.

- (Mustéflott) Tu es au courant, pour ses pulsions… ?

- (Reptincel) C’est pour ça que je me suis éloigné. Il m’avait déçu et, même si je savais qu’il ne fallait pas le laisser seul, je me disais qu’au moins vous seriez là pour l’aider à régler ses problèmes.

Son interlocuteur baissa honteusement la tête.

- (Mustéflott) Nous avons essayé, vraiment…

- (Reptincel) C’est raté, visiblement. Mais je ne pense pas que ce soit lui le coupable.

- (Mustéflott) C’est notre suspect numéro un, il y a trop de concordances.

- (Reptincel) Alors on cherche à vous tromper. Si ce sont vos techniques qu’il a utilisées, comment ses victimes sont-elles décédées ?

Mustéflott tenta de répondre, mais se trouva bloqué dans son argumentation. Maintenant qu’il y pensait, les victimes ne baignaient pas dans un bain rouge. Carabaffe avait frappé jusqu’au sang, mais trop peu en avait coulé pour clairement affirmer qu’ils étaient morts par agression physique.

- (Mustéflott) Je… ok, je prends note, mais ça ne change rien à son implication. Il est au moins complice.

- (Reptincel) Ça change beaucoup de choses.

- (Mustéflott) Ouais bon, du coup, euh… est-ce que tu sais s’il a rencontré quelqu’un d’louche, depuis qu’il vit à Loliloville ?

- (Reptincel) Il a fait partie de nombreuses équipes, il y aurait trop de gens à lister.

- (Mustéflott) Au moins un nom, je n’sais pas… !

- (Reptincel) Euh…

Il se rappela la dernière fois qu’il entendit parler de Carabaffe. Pharamp lui apportait souvent des nouvelles, du jour où ils étaient encore en contact. Mais la dernière fois qu’il le fit, ce n’était pas positivement.

 

- (Pharamp) Si tu aperçois Carabaffe, je veux que tu l’arrêtes sur le champ.

- (Reptincel) Pardon… ? Pourquoi ferais-je une chose pareille ? Qu’a-t-il fait ?

- (Pharamp) Il est suspect, et pourrait potentiellement devenir un problème pour notre mission.

 

Mais jamais il ne le rencontra. En revanche, il aida un soir une Carapuce en pensant qu’il s’agissait de son ami, la révélation l’avait marqué.

- (Reptincel) Vous savez qu’il y a une Carapuce, qui vit dans le coin ?

- (Mustéflott) Et alors ?

- (Reptincel) Ils pourraient ne rien à voir en commun, mais l’inverse est moins rare.

- (Mustéflott) Hum, très bien, je prends note. Quel âge ?

- (Reptincel) Je dirais la vingtaine.

- (Mustéflott) Tu serais où elle habite ?

- (Reptincel) Non, mais elle doit se trouver dans des quartiers plus renfoncés, vers la boîte de nuit de Crocorible.

- (Mustéflott) Ok…

Marmonna-t-il sèchement.

- (Reptincel) Vous savez où c’est ?

- (Mustéflott) Hum…

- (Reptincel) Euh… j’ai travaillé là-bas un temps, je peux vous y mener en un quart d’heure si on passe par les toits.

- (Mustéflott) Attends, tu as travaillé avec Crocorible ?

Le type feu hocha la tête et, lentement, le visage de l’adulte se décomposa. Il écarquilla les yeux et la bouche, fronçant de peine les sourcils en perdant son regard dans le reste de la pièce. Puis, il s’avança brusquement.

- (Mustéflott) Comment va-t-il… ?

Reptincel recula, mais son interlocuteur lui agrippa les épaules avant qu’il ne s’écarte trop.

- (Mustéflott) Est-ce qu’il va bien !?

Lui demanda-t-il en criant presque. Le silence régna puissamment après ça, avant qu’il ne se rende compte de son geste. Il le lâcha et reprit sa place, toussant de gêne en détournant le regard. Hélas pour lui…

- (Reptincel) Non, il ne va pas bien, non.

Le jeune adulte n’était pas intimidé.

- (Mustéflott) Merde… ! J’ai entendu dire que sa boîte fut massacrée, je pense que c’est la DDR.

- (Reptincel) Non, c’était moi.

À nouveau, il écarquilla les yeux.

- (Mustéflott) Je te demande pardon… ?

- (Reptincel) Je l’ai attaqué, fou de rage, parce que je pensais qu’il travaillait avec eux.

- (Mustéflott) Hein !? T’es culoté, espèce de… !

- (Reptincel) En fin de compte, Roitiflam lui tournait juste autour.

- (Mustéflott) Quoi… ?

- (Reptincel) Il le veut dans son équipe parce qu’il est un…

- (Mustéflott) … Un symbole… ? Celui des quartiers pauvres, hein… ?

Cette fois, c’est l’éclair rouge qui se montra bouche bée.

- (Reptincel) Vous vous intéressez à la vie du Prédateur Carnassier, vous, membre de l’équipe RS ? Pourquoi ?

- (Mustéflott) Ça n’a rien à voir avec qui je suis aujourd’hui ! Crocorible, autrefois Mascaïman, était mon meilleur ami.

- (Reptincel) Vraiment… ?

Rapidement, il fit le lien avec ce que son ancien collègue et patron lui avaient dit.

 

- (Bétochef) J’sais pas, lui a une autre relation avec les explorateurs. Je crois qu’il les déteste pour une autre raison.

- (Crocorible) Vas-y… *souffle* tues-moi ! Vous… *gémissements* les explorateurs… ! Vous êtes tous les mêmes… !! TOUS DES LÂCHES, JE VOUS DÉTESTE !!!

 

Il comprenait mieux, désormais.

- (Reptincel) C’est pour ça que vous êtes stressé, hein ? Ce n’est pas Carabaffe qui vous met dans cet état, mais bien Crocorible.

- (Mustéflott) Ferme-là, je… je pourrais t’arrêter pour avoir vandalisé sa boîte de nuit !

- (Reptincel) Vous pourriez, mais je pense que vous avez déjà pas mal de problèmes à régler.

Il se retourna et rouvrit sa fenêtre, se préparant à la traverser.

- (Reptincel) Retrouvez Carabaffe et arrêtez-le si cela vous chante, mais par pitié, sauvez-le de ses foutues pulsions.

Mustéflott baissa la tête, le laissant partir en serrant les poings. Le témoignage de Reptincel lui apporta de nouvelles informations, et cela pourrait bien le mener à celui que l’équipe RS cherche depuis des mois.

Il rentra donc coupler le résultat de ses recherches avec celui de Mysdibule et Dedenne, toujours dans le laboratoire de cette dernière. Bien entendu, il n’aborda pas la partie Crocorible de sa conversation avec l’éclair rouge.

- (Mysdibule) Hum, bien joué. Dedenne, tu sais quoi faire ?

Demanda-t-elle à l’ingénieure qui tapait déjà à toute vitesse sur son clavier.

- (Dedenne) Yep ! Des Carapuce, y en a pas des milliards sur cette planète, encore moins à Loliloville… !

- (Mustéflott) Et vous, qu’est-ce que ça a donné ?

- (Dedenne) Moi pas grand-chose, mais c’était prévisible. Si Carabaffe s’est enfoncé dans les quartiers pauvres pour rejoindre cette Carapuce, alors c’est normal de ne trouver aucune archive sur lui. Nos yeux ne sont pas là-bas.

- (Mysdibule) De même pour moi. J’ai tout de même relevé ses empruntes et des résidus de tout ce qu’on son corps peut produire, au cas-où nous aurions besoin d’une comparaison.

- (Mustéflott) Ça me répugne de demander, mais tu as tout ce que tu voulais ?

- (Mysdibule) Urine et excrément dans les toilettes, dans son lit pour…

- (Mustéflott) Ok c’est bon, ne finit pas cette phrase ! C’est bon, je suis répugné, j’espère que tu ne fais pas la même chose pour nous…

- (Mysdibule) C’est encore plus facile pour vous.

- (Dedenne) Oh, j’ai trouvé un truc pas mal ! Quatre espèces liées à Carapuce ont été identifié à Loliloville, depuis ces cinquante dernières années ! Deux Tortank, un Carabaffe et une Carapuce. Voyons voir son dossier… suspectée d’avoir poignardé son père adoptif… hum, une vie normale, quoi.

- (Mustéflott) Wow, c’est chaud. Même si elle est de sa famille, Carabaffe ne suivrait pas une meurtrière.

- (Mysdibule) Elle est seulement suspectée et au mieux, il n’est pas au courant.

- (Dedenne) Hé, regardez-ça ! Elle est visible dans le coin d’une photo prise par Quoti’Ville, pour parler des réformes du maire de la ville sur la rénovation… enfin la non-rénovation des ruelles liant les deux parties de la ville. Hum… elle est visible avec un Crabagarre et…

- (Mysdibule) Elle lui tient la pince ?

- (Mustéflott) Selon Reptincel, elle aurait au moins la vingtaine. Si elle est liée à Carabaffe, alors elle serait sa grande sœur.

- (Mysdibule) Et ce type serait son partenaire, donc. Cherche des infos sur Crabagarre.

- (Dedenne) Entendue !

Elle commença à chercher, et le silence régna. Le type eau commença à se gratter l’arrière du crâne.

- (Mustéflott) Dis, Mysdibule, euh… t’as pensé à réexaminer les victimes ?

- (Mysdibule) Pas encore. Pourquoi ?

- (Mustéflott) Pour un carnage, il n’y avait pas tant de sang que ça. Enfin ils saignaient, mais ils ne peuvent théoriquement pas être morts des techniques de… enfin de mes techniques.

- (Mysdibule) J’ai examiné leur crâne, Mustéflott, tous en avaient une déformation. Carabaffe a dû les achever comme ça.

- (Dedenne) Ouais, ou alors ils s’étaient défoncés à la poudre de Rafflesia juste avant…

Marmonna dans le vent l’ingénieure. Ceci-dit, Mysdibule lui adressa un regard perplexe.

- (Mysdibule) C’est un effet secondaire ?

- (Dedenne) Si on se l’injecte dans l’crâne, oui, mais faut être un peu dérangé pour vouloir se faire titiller l’cerveau à ce niveau.

- (Mysdibule) J’ai vérifié, il n’y avait pas de seringue là-bas.

- (Mustéflott) Et si Carabaffe… ou plutôt quelqu’un qui l’accompagnait, en avait une ?

- (Mysdibule) … Dedenne, est-ce que le risque de surdose augmente, si on l’injecte à un Pokémon blessé ou inconscient ?

- (Dedenne) Très certainement, comme beaucoup de substances qui font surréagir le corps.

- (Mysdibule) … Merde ! Je vais à la morgue tout de suite !

Elle quitta la pièce en vitesse sur ces mots. Mustéflott était bouche bée.

- (Mustéflott) Ça voudrait dire que… Carabaffe ne serait qu’un complice ?

- (Dedenne) Du calme, ça se trouve on s’plante totalement.

Le type eau sourit malgré tout. Reptincel avait peut-être raison, finalement.

- (Dedenne) Ah, les recherches sont terminées ! Alors, voyons ça… Crabagarre, un seul membre de l’espèce identifié à Loliloville, a purgé une peine de cinq ans pour… vente de produits illicites et consommation dissimulée à plusieurs victimes qu’il aurait ensuite dépouillé… ?

Les deux explorateurs s’échangèrent un regard différent. Mustéflott était aux anges.

- (Mustéflott) C’est génial, ça confirme nos théories !

Mais Dedenne était horrifiée.

- (Dedenne) Mec, si Carabaffe a été drogué à son insu…

- (Mustéflott) Alors il n’a pas fait ça volon… !

Elle le frappa avec son clavier.

- (Dedenne) Mais arrête avec ça ! Notre ami est potentiellement drogué malgré lui tous les jours depuis DES MOIS !! C’est un exploit qu’il soit toujours en vie, il faut ABSOLUMENT le retrouver !!

De son côté, Mysdibule arriva à la morgue et examina de nouveau les différentes victimes du dernier massacre. Elle demanda de tous leur ouvrir le crâne pour récupérer de quoi prouver qu’ils furent bien drogués de cette manière. Elle obtint ce qu’elle voulut, et ce jusqu’à sa théorie, lorsqu’elle rentra la faire vérifier à la fondation.

- (Mysdibule) … Ils sont bien morts de surdose. Tous. N’ayant pas trouvé de seringue chez eux, la poudre de Rafflesia leur fut injectée après l’arrivée de Carabaffe, Carapuce et Crabagarre, certainement après leur massacre par l’explorateur. Une poudre qui venait certainement de Crabagarre, si l’on en croit ses dossiers. Ce qui voudrait dire que Carabaffe n’est pas le meurtrier.

- (Dedenne) Peut-être même qu’il est la victime. La poudre de Rafflesia est une drogue qui agit très violemment sur le cerveau. Elle détend, mais peut rendre fou ou obsédé. Crabagarre doit savoir manipuler n’importe qui, sous cette influence. Ils peuvent avoir forcé Carabaffe à agir comme bon leur semble.

- (Mustéflott) Alors c’est vraiment possible ?

- (Dedenne) Si la dose est grande, oui. Mais c’est dangereux, très dangereux pour le consommateur.

- (Mysdibule) Il faut qu’on les retrouve au plus vite !

- (Dedenne) Malheureusement, on ne sait pas où chercher. J’ai bien compris que ce qui liait toutes les victimes était la DDR, mais pourquoi eux et pas des dizaines d’autres partisans plus accessible ?

Il leur manquait un élément crucial : la mort des parents de Carapuce et Carabaffe. Malheureusement, aucune archive ne décrivait la raison de cette mort, alors ils furent bloqués à la traque. Bien sûr, ils théorisèrent. Mais ce ne fut pas suffisant…

3 Mars 236, au centre des usines de dessalement se trouvaient des compartiments dont un bureau central. Une grande pièce avec une grande table et des dizaines de chaises. Un seul Pokémon s’y trouvait, assis en bout de table en costard, seul et travaillant sur un dossier à son aise. Bleu de peau, son imposant corps était couvert de gigantesques pustules qui effrayaient tous ses employés. Il était musclé, et son regard ne trompait pas : il ne fallait pas le faire chier.

Il était dix-huit heure, l’heure habituelle de la fin de journée. Pourtant, il restait travailler et encore une fois… seul. Alors qu’ils auraient dû trouver cela bizarre, Carapuce et Crabagarre décidèrent de l’attaquer de front sans se poser la moindre question. Dès qu’elle défonça la porte, la femme lança un couteau qui se planta sur la chaise de droite de sa cible. Il releva lentement la tête, constatant à l’autre bout de la pièce la présence de ses trois agresseurs.

- (Carapuce) Comme on se retrouve, Crapustule ! Tu te souviens de moi !?

- (Crapustule) … La gamine de Tortank. Tu n’as pas tant grandi que ça, dis-moi.

- (Carapuce) Ne joue pas les insensibles, tu sais très bien pourquoi je suis là.

- (Crapustule) Oui, tu veux certainement me tuer pour venger tes parents.

Disait-il en terminant de signer quelques papiers, l’air désintéressé.

- (Crabagarre) … Il se fout de nous… ?

- (Carapuce) Ça a l’air de t’aller. Carabaffe ?

L’explorateur approcha, tête baissée, obsédé par son mal de crâne au point d’être complètement détaché de la situation. Sa sœur lui cogna l’épaule et il se ressaisit, échangeant un long regard avec son adversaire qui écarquilla les yeux.

- (Crapustule) Le gamin a survécu… ?

- (Crabagarre) Et il est devenu bien plus fort que tu n’puisses l’imaginer !

- (Carapuce) Ouais, assez pour te faire effacer ce putain de sourire…

- (Carabaffe) Et lui… ? Qu’a-t-il fait… ?

- (Carapuce) Peu importe, massacre-le !

- (Crapustule) J’avoue que je suis intéressé !

L’homme en costard posa ses immenses mains sur son bureau, se relevant et atteignant les deux mètres de hauteur.

- (Crapustule) On ne s’était pas privé pour t’adopter et faire de toi l’esclave parfait, Carapuce. Alors je me suis dit que je pouvais en faire de même avec ton frère. Encore aujourd’hui, il travaillerait d’arrachepied dans l’usine, je m’en serais assuré ! Hélas, quelqu’un d’autre le récupéra avant moi, quel dommage…

Il ferma le poing gauche et leva le droit.

- (Crapustule) Montre-moi que ton éducation ne fut pas gâchée par un incompétent. Montre-moi ce qu’il aura su faire de toi !

Puis, il claqua des doigts de sa main droite et, soudainement, la porte derrière s’ouvrit sauvagement. Des dizaines de Pokémon accoururent au centre de la pièce, tous armés d’armes blanches et de casques de chantiers. Les trois agresseurs se retrouvèrent encerclés, comprenant que d’autres employés leur bloquaient la sortie.

- (Crabagarre) C’était un piège… ? Comment !?

Crapustule décrocha le couteau qu’avait lancé Carapuce par arrogance.

- (Crapustule) Vous me preniez pour un con à ce point ? J’ai accès aux informations, vous savez, je sais que tous ceux qui participèrent de près ou de loin à l’assassinat de vos parents ont eu des problèmes, et je savais exactement qui il restait sur la liste. Je suis honoré d’être le dernier, mais sans vouloir vous offenser… ce n’était pas très malin.

Il pointa de la lame du couteau les trois inconscients.

- (Crapustule) Tuez-les tous.

Et sur ces mots, tous ses employés foncèrent les embrocher. Tout du moins ils essayèrent. Carabaffe avait beau ne pas être en parfait état, il garda ses réflexes de combattants, attrapa sa sœur de la main gauche et Crabagarre de la droite, puis se propulsa en crachant un puissant jet d’eau vers l’autre bout de la pièce. Ils passèrent au-dessus de Crapustule, qui les suivit du regard et observa l’explorateur déposer ses acolytes vers l’autre sortie. Lui resta lui faire face.

- (Crapustule) Oh, alors on veut se battre, hein ?

- (Crabagarre) Nan, ils sont trop nombreux, faut s’replier !

- (Carapuce) Fuir face à cette ordure ? Jamais ! Carabaffe, t’as intérêt à gagner !!

Le crabe lui adressa un regard colérique et lui marmonna :

- (Crabagarre) Tu lui demandes l’impossible après l’avoir affaibli… !?

- (Carapuce) Il va le faire !

- (Carabaffe) Je vais le faire.

Clama-t-il sèchement. Crabagarre fronça les sourcils.

- (Crabagarre) Mon pote…

- (Carabaffe) Allez vous mettre en sécurité. Maintenant !

Souriante, la grande sœur agrippa la pince alliée.

- (Carapuce) Tu vois qu’il le peut !

Et le tira hors de la pièce avant qu’il ne rétorque. L’explorateur se trouva seul face à un groupe entier d’adversaires armés et prêts à le planter à la moindre occasion. Sa vue était encore un peu trouble et, plus il réfléchissait, plus son corps tremblait. Pourtant, cela ne l’arrêta pas. Il savait de quoi il était capable, et ferma les poings en crispant les dents de détermination.

Crapustule rigola.

- (Crapustule) Allez, je n’ai pas de temps à perdre !

Et tous ses employés foncèrent. Le type eau les laissa approcher, puis fonça à son tour dans le tas.

Et le massacre commença. De son impressionnante vitesse, il en frappa trois d’un coup. De son impressionnante force, les trois valdinguèrent sur trois autres. Il bloqua le poignet de l’un, le brisa en resserrant son poing puis attrapa son couteau et bloqua une autre lame avec, pendant qu’il tira celui qu’il tenait sur celui qui l’avait attaqué. Une personne l’attrapa par le dos, l’autre par les jambes. Ils tentèrent de le maintenir pendant qu’un troisième élançait sa lame. Mais grâce aux jets d’eau qu’il tira et fit durer depuis les paumes de ses mains, il se dégagea et tourna aussi vite qu’une toupie. Il aspergea tout le monde de cette eau soudainement brûlante, pendant qu’il s’envola jusqu’au plafond grâce à l’impulsion de ses jets. Une fois là-haut, il bondit à toute vitesse en s’aidant du mur vers le sol, s’élança dans un salto avant et enroula toute sa jambe droite, qu’il étendit, d’une eau brûlante et agressive. Dès qu’il frappa le sol, toute l’eau se dispersa brutalement, emportant dans un petit tsunami tous ses adversaires qui, en plus d’hurler à la mort du fait des brûlures qu’ils s’infligèrent sans ne pouvoir y échapper, furent emmenés à l’autre bout de la pièce.

La moitié d’entre eux furent K.O., l’autre peinait à se relever ou mimait l’inconscience pour ne plus avoir à faire face à ce jeune adulte qui terrorisa tout le monde. Même Crapustule, arrêta de rire. Étant également de type eau, il encaissa l’attaque et bondit frapper de plein fouet sa cible dès que l’eau le transperça. Carabaffe rentra dans sa carapace et cogna le mur en toute sécurité. En fait, il se servit de sa vitesse de propulsion pour rebondir et charger sa cible. Ce dernier le bloqua mais commença tout de même à reculer. La pression était trop forte.

- (Crapustule) Espèce de… !

L’explorateur sortit alors de sa carapace et le cogna d’un coup de boule qui le déstabilisa suffisamment pour se libérer. Il s’écarta, reprit un souffle puis le chargea à nouveau. Coup de pied en pleine mâchoire, il esquiva une mandale en se baissant puis plaqua ses paumes au sol et se propulsa violemment pour le recogner d’un coup de boule et de nouveau dans la mâchoire. Crapustule cracha du sang en tombant sur le dos, et Carabaffe en profita pour sauter et le cogner de ses deux genoux repliés droit dans le ventre.

L’homme en costard hurla de douleur. Il tenta de se relever, mais son adversaire le maintenait fermement. Alors il tenta de le dégager, mais ses coups furent bloqués et ses poignets brisés sous la pression de la force adverse. Là, il ne pouvait plus rien faire.

- (Crapustule) Aaah… ! *gémissements* Sale petit con, tu… !

Carabaffe l’agrippa alors par la cravate, le forçant à le regarder droit dans les yeux.

- (Carabaffe) J’peux encore te briser les couilles, alors fais gaffe à c’que tu vas dire !

- (Crapustule) Ah… ah ah ah… ! Pas mal, je dois l’avouer… ! *gémissements* Toi, t’es vraiment devenu quelqu’un. Celui qui t’a adopté a bien compris l’essence de l’éducation, p’tit soldat… !

- (Carabaffe) Mais putain, fermez-là ! J’ai l’impression d’entendre ce discours tous les jours ! Vos parents vous battaient et parce que vous êtes devenus des connards aux gros muscles, vous leur donnez raison !? JE SUIS PLUS FORT QUE TOI PARCE QU’IL ME SOUTENAIT DANS MES EFFORTS ET MON RÊVE, TROU DU CUL !!!

Hurla-t-il férocement, sans même contrôler le ton de sa voix. Il cligna ensuite plusieurs fois des yeux, lâchant prise pour regarder avec choc ses mains tremblantes. Ses pulsions l’avaient dominé mais, pour une fois, cela l’aida. Comme si il avait lâché tout ce qu’il contenait depuis ces deux dernières semaines d’un coup, comme si… pour l’espace d’un instant, il était redevenu lui-même.

Sa victime se redressa difficilement.

- (Crapustule) Qu’est-ce que c’était que ça… ? Des problèmes en internes ? Ta sœur te rabâche peut-être à longueur de temps ses problèmes familiaux, enfin… *rires* les problèmes qu’elle eut avec celui qui lui servit autant de père adoptif que de chair à canon.

- (Carabaffe) Ferme-là, tu ne sais pas ce qu’elle a vécu !

- (Crapustule) Un désastre, certainement. Mais ça m’amuse de voir qu’elle te manipule pour ses intérêts uniques.

- (Carabaffe) Quoi… ?

- (Crapustule) Pourquoi tu l’aides ?

- (Carabaffe) … Parce que c’est ma sœur !

- (Crapustule) Et… ? Tu cautionnes ses actes parce que vous partagez le même sang ? Es-tu au courant de ce que sont devenus tes précédents adversaires ? Pour quelqu’un qui me reproche d’être une ordure, sache que je n’ai pas eu mon mot à dire, quand il a tué ta mère.

- (Carabaffe) Attends, qu’est-ce que… ?

Cherchant à se rappeler, la migraine revint brusquement. Il s’en tint douloureusement la tête.

- (Carabaffe) Putain… ! *gémissements* De quoi tu parles !?

- (Crapustule) La poudre de Rafflesia, hein… ? Tu dois ne jamais avoir consommé, pour ne pas être capable de t’en rendre compte.

- (Carabaffe) MAIS DE QUOI TU PARLES !?

Soudainement, il sentit l’agressive figure de sa sœur arriver vers eux et, en se retournant, l’aperçut élever une seringue vers Crapustule. Elle allait la lui planter dans le crâne. Il ne comprenait pas et n’avait, de toute façon, pas le temps de réfléchir. Alors par réflexe et parce qu’il avait besoin de réponses, il bloqua l’aiguille avec sa main, qui fut transpercée par cette dernière.

- (Carapuce) Qu’est-ce que… !?

- (Crabagarre) Carabaffe, non !!

Le crabe le bouscula tout en lui enlevant l’arme qui était supposée abattre Crapustule. L’explorateur s’écroula, le produit se dispersant à une vitesse pharamineuse dans son corps. En un rien de temps, il comprit. Il comprit qu’il fut drogué depuis le début et, malheureusement, comprit qu’il allait tout oublier. La seconde d’après, il tomba inconscient.

- (Crabagarre) Je… j’hallucine… !

- (Crapustule) Ah… ah ah ah ! Ouais, moi aussi ! Vous êtes de si mauvais coéquipiers, c’est dingue comme tu ne fais pas même l’effort de le manipuler correctement ! Carapuce, ma grande… tu me déçois encore plus que prévu !

Elle ferma les poings.

- (Crapustule) Tu te venges à quel prix, au juste ?

Crispa les dents.

- (Crapustule) J’imagine que tu as demandé à tonton Roitiflam si tu avais le droit de venir me tuer, pas vrai ? J’imagine que la contrepartie, c’est celui que tu viens de droguer à son insu, hum ? Comment crois-tu que le chef réagira, quand il comprendra que ton frère est trop pur pour rejoindre leur rang ?

Et s’enragea furieusement.

- (Crapustule) Comment crois-tu qu’il réagira, quand il fera les comptes du nombres de ses hommes que tu auras tué pour te satisfaire, en contrepartie du cadeau empoisonné que tu lui auras fait, HEIN !?

- (Carapuce) FERME TA GUEULE !!!

Elle lui sauta violemment dessus, profitant des blessures que Carabaffe lui avait infligé pour, comme toutes les autres victimes, l’abattre pour de bon. Mais comme elle n’avait plus de poudre, elle le fit à la main. Et Crabagarre en fut choqué. Il récupéra le petit frère et s’éloigna avec terreur, esquivant du regard les giclées de sang qui sortaient de l’homme en costard, esquivant la psychopathie de celle qu’il aimait… ou pensait aimer.

Une bonne minute s’écoula, le temps qu’elle s’essouffle de son carnage. Pas seulement ses mains, mais son corps entier était recouvert du sang de sa victime qui, désormais, ne respirait plus. Elle se releva lentement, récupérant son souffle en observant le plafond. Puis, elle se tourna. Crabagarre la fixait, à une dizaine de mètre d’elle.

- (Carapuce) Je vais avoir besoin d’une bonne douche…

Commença-t-elle, en tentant de s’approcher. Mais dès qu’elle fit un pas, son acolyte en fit un dans la même direction.

- (Carapuce) Quoi… ?

- (Crabagarre) … Rien. Faut qu’on s’barre et trouve une solution pour ton frère.

- (Carapuce) La drogue lui fera oublier cette journée.

- (Crabagarre) Jusqu’à ce que la migraine passe.

- (Carapuce) J’ai une boîte pleine chez moi, on lui en administrera en rentrant. De toute façon…

Elle avança et prit les devants.

- (Carapuce) Il est à Roitiflam, désormais.

Crabagarre jeta un dernier regard à la pièce, puis soupira et porta la pire de leur victime sur son dos et vers leur base.

Les employés survivants s’enfuirent en vitesse dès qu’ils eurent le champ libre et, le lendemain, le monde entier prit connaissance du désastre qui survint à l’usine de dessalement de Crapustule. L’homme en question fut retrouvé mort, tous ses employés présents au moment des faits, en revanche, furent au pire gravement blessés. Mais tous survécurent et témoignèrent. Le monde entier apprit donc l’existence du trio d’assassins, une Carapuce, un Carabaffe et un Crabagarre.

L’équipe RS, qui s’occupa d’inspecter la scène de crime, analysa avec le plus de soin possible le corps du défunt.

- (Mustéflott) La mort est causée par un acharnement physique, et ce ne sont pas mes techniques.

- (Dedenne) Ce n’est pas Carabaffe, pas vrai ?

- (Mysdibule) On ne peut pas en être sûr, mais je pense que Carapuce et Crabagarre étaient à court de sachets…

Ils virent tout juste.

Le 5 Mars, les deux hors-la-loi et la criminelle rentrèrent enfin chez eux. Ils mirent du temps par précaution, passant par le plus de petites ruelles possibles pour ne pas être repérés. De toute façon, aucun explorateur ne viendrait les chercher dans les quartiers pauvres, encore moins chez le couple dont personne ne connaissait l’adresse.

Carabaffe fut forcé de les suivre. Lui qui souffrait d’une atroce migraine, il fut incapable de se rappeler sa dernière confrontation et cru facilement sa sœur qui lui assura que la suivre était la meilleure chose à faire. Bien sûr, dès qu’elle posa une main sur la boîte rouge que Roitiflam lui avait envoyé, elle ordonna à Crabagarre de droguer son frère.

Un maximum, il devait être incapable de penser.

Et c’est honteusement… que le crabe s’exécuta. Il se persuada que ce fut la seule solution, pour parvenir à leurs fins. Pendant ce temps, Carapuce appela le chef de la DDR. Elle pensait enfin pouvoir se débarrasser de l’explorateur, hélas…

- (Roitiflam) Tu vas devoir le garder encore un moment.

- (Carapuce) Quoi… ? Attendez, je ne comprends pas, nous avions un marché !

- (Roitiflam) A-t-il découvert votre petit jeu ?

- (Carapuce) Non, enfin presque, mais la poudre le force à oublier.

- (Roitiflam) Alors quel est le problème ? N’est-il plus le petit lèche-cul que tu me décrivais autrefois ?

- (Carapuce) Si, mais… je ne le veux pas dans ma vie !

- (Roitiflam) Et pourtant, tu travailles encore pour moi. Et pour le bien de notre prochain assaut, il vaut mieux que Carabaffe ignore notre lien encore un moment. Depuis que l’on vous a identifié à l’usine, l’équipe RS doit penser qu’il est votre jouet, drogué à son insu pour satisfaire vos besoins. Ça tombe bien, c’est le cas. Non seulement ça leur fout un coup au moral mais en plus, ils pensent que leur ancien élève a besoin d’aide.

- (Carapuce) Où voulez-vous en venir ?

- (Roitiflam) Imagine si ils le retrouvent, imagine si Carabaffe lui-même leur reproche d’avoir été éloigné de toi ? Ils chercheront à l’aider coûte que coûte, quitte à le réintégrer dans l’équipe pour s’occuper de lui. Mais contrairement à avant, Carabaffe sera des nôtres, parce qu’il t’écoutera quoique tu lui demandes.

- (Carapuce) Ce n’était pas déjà le cas ?

- (Roitiflam) Tu penses qu’il aurait accepté de rejoindre la DDR, si tu lui avais demandé lors de votre première rencontre ?

La sœur écarquilla lentement les yeux.

- (Carapuce) Ne… ne me dites pas que…

- (Roitiflam) Tu viens avec nous. Bienvenue dans l’escouade Anti-RS.

Il ne lui laissa pas le choix, et elle le savait avant même de le supplier de ne pas l’intégrer. Elle qui souhaitait seulement se venger, elle pensait se séparer de la DDR aussi facilement que cela. Malheureusement, Roitiflam n’était pas aussi dupe. Depuis que Carapuce lui exposa son plan, il y a des mois, il fit de nombreuses recherches sur l’ancien membre de la Dream Team. Rien que ça le convainquit de prendre de nombreuses mesures qu’il jugea nécessaires, comme enchaîner Carapuce avec de nombreux contrats sans qu’elle ne s’en rende compte.

Et maintenant, elle était bloquée.

Carabaffe resta donc chez le couple longtemps, bien plus longtemps que prévu. Roitiflam leur envoya autant de boites qu’ils le demandèrent, alors la grande sœur n’hésita pas à demander à son partenaire d’augmenter les doses. Elle voulait qu’il souffre, elle le tenait responsable de ce que la DDR lui infligeait.

Alors désormais, le pauvre jeune adulte fut drogué jusqu’à cinq fois par jour. Il en vomissait de la mousse, convulsant nu sur un matelas crade, sans couverture dans une pièce couverte de moisissure, mal isolée et duquel il ne sortait presque jamais. Autant dire qu’il ne mit plus un pied en-dehors de l’appartement du tout, depuis ce jour. Oui, c’était de la torture. Mais son cerveau fut tant chamboulé par la poudre, qu’il ne fit jamais le rapprochement avec ce que Crabagarre lui fit boire tous les jours. En fait, il ne pensait plus du tout.

Tout ce à qu’il voyait, c’était sa sœur. Il se persuadait qu’elle avait encore besoin de lui, voilà la seule chose qui le maintenait en vie. La désillusion.

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