Donjon Mystère - Dream Team

Chapitre 45 : Dernière ligne droite

12438 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 10/10/2021 12:53

      Le soleil se levait doucement, alors que les cornes de brume des plus grands navires de Loliloville se faisaient enfin entendre à l’horizon. Ils étaient quatre, et tous allaient embarquer les habitants du défunt Bourg-Trésor pour un refuge plus sûr. En deux jours, la nouvelle du désastre avait fait le tour du globe. Tout le monde en parlait, la date du 18 Mai 232 s’était hélas inscrite dans tous les livres d’Histoire.

Alors évidemment, les bateaux étaient déjà bondés de journalistes et explorateurs prêts à profiter du b… prêts à rassurer les traumatisés, et surtout à informer le reste de la population des renseignements que daignera apporter la guilde.

- (Grodoudou) Soyez patients…

Marmonna le maître en s’entraînant au monologue.

 

L’histoire de la Dream Team – Chapitre 45 : Dernière ligne droite

 

Tous lui bondirent dessus, le micro en avant. Les photographes, eux, adaptaient leur matériel aux impressionnants décombres de Bourg-Trésor. Certains tentèrent de capturer l’angoisse des habitants toujours horrifiés par le récent carnage, mais les apprentis de la guilde leur en empêchèrent. Puis, ils furent guidés vers les navires. Tous commencèrent à monter un à un, quittant à jamais le sable doux avec lequel ils avaient vieilli, avec lequel ils avaient grandi.

Ce fut au tour de l’orphelinat, mais aucun des quatre enfants ne voulait faire le premier pas. Leuphorie leur tendit une main, et alors que Vivaldaim, Gruikui puis Tarsal la rejoignirent, le petit Bulbizarre recula d’un pas.

- (Bulbizarre) Non…

Reptincel ressentit la détresse dans sa voix, il se tourna silencieusement vers lui.

- (Leuphorie) Viens par-là, mon grand…

- (Bulbizarre) … Non ! Je… !

Se mettant à trembler, il dévisagea les alentours. Tous ces changements soudains qu’il n’avait pas voulu subir, toute cette destruction qu’il n’avait pu empêcher, le fait qu’aucun de ses sauveurs ne l’avaient regardé, le fait que sa plus grande figure d’admiration… était aussi perdu que lui. Tout cela était trop, beaucoup trop. Alors d’un bond aussi inattendu qu’abrupte, il dévia sa trajectoire et fonça dans ce qui était autrefois son village.

- (Leuphorie) Bulbizarre !!

- (Gruikui) Hein… ? Bulbi, reviens-là !!

- (Tarsal) Non… !

- (Vivaldaim) Arrête, c’est dangereux !

Alors que tout le monde s’inquiétait, Reptincel l’observa simplement s’enfuir. Il était d’abord bouche bée, puis simplement compréhensif.

- (Reptincel) Pas de panique, je vais le chercher.

Répondit-il calmement aux peurs de la famille recomposée, avant de partir vers les plus imposants décombres du territoire.

Évidemment qu’il était ici, évidemment que le petit s’était arrêté devant son ancienne maison. En approchant à son tour, l’adolescent observa un peu plus attentivement ce qu’était advenu l’orphelinat : les clôtures entourant le jardin étaient brûlées, tout comme l’herbe et les fleurs qui marquaient le chemin de l’entrée. Les fenêtres avaient explosé, la cheminée s’étalait en morceau tout autour des autres débris. L’étage fut frappé en premier, il s’était écroulé sur le rez-de-chaussée avant tout. Puis, les intenses flammes créées par le contact brusque de la catastrophe avec la télévision et la cuisinière firent le reste. À l’heure actuelle, tout était noirci. Un très léger nuage de cendre continuait de se faufiler vers les cieux, tandis qu’une abominable odeur d’incinération intensifiait la lourdeur de l’atmosphère.

Bulbizarre avait les larmes aux yeux, mais il n’arrivait pas à décrocher le regard de tout cela. Reptincel s’approcha silencieusement, comprenant ses angoisses. En sentant quelqu’un approcher, le petit sursauta tout d’abord. Puis, quand il comprit que c’était lui, il plaça à nouveau son attention sur sa maison, l’air timidement dévasté.

- (Bulbizarre) Comment ils font… ? *snif* Comment ils peuvent partir sans se retourner !?

- (Reptincel) C’est difficile pour tout le monde, Bulbizarre.

Finalement, Reptincel s’installa à ses côtés.

- (Reptincel) La guilde s’en veut de ne pas avoir pu protéger le village, les habitants se perdent dans un sentiment d’insécurité inévitable et moi… je suis coupable. Mais… c’est ridicule, n’est-ce pas ? Se reprocher de ne pas avoir vu ce qu’on nous cachait, se reprocher de perdre face à un tricheur, c’est… *rires* contre-productif, pas vrai ?

- (Bulbizarre) Donc… vous aussi, vous riez ?

- (Reptincel) Et pourquoi pas ? Après tout, je suis aussi perdu que toi.

- (Bulbizarre) Oui…

Il baissa le regard.

- (Bulbizarre) Je l’avais bien compris. Vous ne m’avez pas répondu, hier soir. Quand je vous ai demandé si vous aviez un plan, vous…

- (Reptincel) … Je suis désolé.

Le type feu baisse le sien en retour.

- (Reptincel) Ça ne sert à rien de mentir à ce stade. Nous n’avons jamais cessé de faire de notre mieux, alors pourquoi la situation se tournerait soudainement à notre avantage ? Autant te le dire tout de suite, personnellement, je ne pense pas que l’on puisse gagner face à Noctunoir.

- (Bulbizarre) Alors pourquoi faire tout ça… ? Pourquoi faire venir des bateaux géants, pourquoi nous faire escorter dans un lieux qui de toute façon sera incertain ? Si j’ai bien compris : c’est le monde entier, qui est menacé… !

- (Reptincel) … Parce que… qui sait… ?

Cette fois, il tourna en premier le regard, il le tourna vers lui, le sourire aux lèvres.

- (Reptincel) Je suppose que le miracle existera toujours, qu’importe la puissance de frappe adverse… ?

Ce léger ton héroïque, cet infime brin d’espoir dans cette voix qui avait commencé par rire nerveusement… elle fut si forte, si intense que Bulbizarre en écarquilla les yeux. Il releva lentement le regard vers lui, il dévisagea doucement ce sourire vraiment sincère.

- (Reptincel) Alors peu importe ce qui arrivera. En fait, on s’en moque ! La guilde et ses apprentis ont fait le serment de toujours défendre les habitants de Bourg-Trésor, alors ce n’est pas parce que tout semble terminé…

Il lui tapota alors le museau d’un doigt amusé.

- (Reptincel) … Qu’on peut se permettre de faire n’importe quoi !

Bulbizarre était bouche bée, et son interlocuteur en rigola.

- (Reptincel) Ah ah, tu devrais voir ta tête ! D’où crois-tu que ma prétendue force vienne ?

- (Bulbizarre) De… l’entraînement de la guilde… ?

- (Reptincel) Non, l’entraînement ne sert qu’à maintenir le niveau. Ici, le synonyme de force est motivation. Et ce qui me motive…

Il leva alors la tête vers le ciel, le sourire aux lèvres.

- (Reptincel) C’est votre sécurité à tous.

- (Bulbizarre) … !!

- (Reptincel) C’est pour ça que je veux devenir le meilleur des explorateurs. Ne sachant pas ce que « sauver le monde » signifiait, je prétendais autrefois vouloir atteindre cet objectif pour protéger les prochaines victimes de mes agresseurs, pour les empêcher de vivre le même enfer que moi. Mais aujourd’hui, cette notion a beaucoup plus de sens. Que j’y parvienne ou pas, ce n’est pas la question. Si vous êtes en sécurité au moment fatidique, le simple fait de m’imaginer vous voir apprendre la nouvelle de notre victoire me donnera cette force que tu admires tant. En d’autres termes, ce pouvoir, Bulbizarre… c’est toi et tous tes proches qui l’alimentent !

Sur ces paroles, le petit explosa en sanglots. Qu’importent les circonstances, qu’importe la situation, il restait TOUJOURS un espoir. Il le savait déjà, c’était sa pure philosophie d’idéaliste. Mais le discours de celui qu’il n’avait jamais cessé d’admirer le forçait à revenir dessus, il ne pouvait plus faire semblant de l’oublier pour se morfondre dans un chagrin que Reptincel avait inévitablement soigné. Il le prit dans ses bras, et seuls les pleurs réconfortés du petit Bulbizarre animèrent la scène.

Une bonne minute plus tard, il essuya tendrement ses larmes.

- (Reptincel) Allez, mon grand, un peu de courage ! Tu entames une nouvelle étape de ta vie, et je suis certain qu’elle va être géniale !

- (Bulbizarre) Oui… *snif* j’y crois aussi !

Il tentait de crisper un visage déterminé, mais son adorable bouille ne le faisait prendre au sérieux par personne. Personne sauf Reptincel, qui lui tapota la patte en guise d’un nouveau départ.

- (Reptincel) Bon, retournons auprès de ta mère. N’oublie pas de t’excuser, elle doit être morte d’inquiétude.

- (Bulbizarre) Oui, je…

En commençant sa phrase, il tourna un dernier regard pensif vers son orphelinat. C’est alors qu’il sursauta de surprise.

- (Bulbizarre) Bon sang, mon trésor !!

- (Reptincel) Ton quoi… ?

- (Bulbizarre) Mon trésor, c’est pour ça que j’étais venu à la base !

Il accourut vers les débris, sautant les premières poutres pour arriver vers ce qui restait de sa chambre.

- (Reptincel) A… attends, Bulbi ! C’est dangereux, il pourrait y avoir des décombres pointus !

Le type feu le suivit de près, faisant extrêmement attention à tous les endroits exacts où le petit y déposait une patte. Après un peu de recherche, ce dernier trouva ce qu’il cherchait : son ancienne commode.

- (Bulbizarre) Tant pis si il est cassé, je l’enterrerai tel un symbole de départ s’il le faut, mais… !

Il ouvrit le second tiroir, cramé mais dont l’intérieur était encore intact. Seul s’y trouvait son précieux trésor, tout propre, sans la moindre égratignure. Il l’attrapa avec attention, alors que l’adolescent ne le voyait pas encore.

- (Bulbizarre) Ouf… il semble ne pas avoir souffert. Depuis qu’elle me l’a donné, je me sens tellement mieux. Ce n’est qu’un caillou, mais il dégage quelque chose de spécial. Rester seul à ses côtés me permet de penser à autre chose, de retrouver le sourire quoiqu’il arrive, alors je pensais le reprendre… mais vous êtes arrivé juste avant.

- (Reptincel) Rien ne t’empêche de quand même le garder. Maintenant que tu le dis, c’est vrai que je me souviens de ça. Ton trésor, ton fameux trésor…

Cela remontait à loin ; à leur toute première rencontre, en fait. Alors que le type plante rencontra un Salamèche inconscient et échoué au bord d’une plage, il l’aida à reprendre conscience et lui expliqua la situation : il avait atterri sur le continent Sud. Après avoir rapidement sympathisé, surtout après que le type feu l’ai défendu de deux brutes qui cherchaient à s’emparer de son trésor, il le lui présenta involontairement. Bulbizarre cédait au harcèlement de ses agresseurs, il comptait tout abandonner et sortit son bien le plus précieux pour le jeter définitivement. Mais aussi bon qu’il fut, son nouvel ami le rattrapa avant qu’il ne touche le sol, et le motiva à ne plus jamais refaire un tel geste. L’ayant déjà fait tomber dans la boue plutôt, il en était recouvert. Bulbizarre le nettoya après l’événement et le rangea précieusement dans son tiroir, qu’il retrouva aujourd’hui et malgré tous les débris l’entourant.

Mais ce que Salamèche, maintenant devenu Reptincel ne savait pas est que depuis tout ce temps, depuis le début et alors qu’il en avait connaissance sans pour autant en être conscient ; ce trésor qui, comme cité autrefois, est « un petit caillou en forme de rouage et sur lequel une peinture en or formait un insigne particulier », était en réalité un rouage du temps.

Il mit bien une dizaine de secondes avant de s’en rendre compte. Cela lui paraissait improbable, ce petit avait depuis tout ce temps en sa possession un artefact qui aujourd’hui représentait le dernier brin d’espoir pour la guilde… non, pour le monde entier. Il en sursauta, trembla dans un mélange de sentiments incompatibles puis… il reprit doucement ses esprits. C’est faux, il attrapa le petit dans ses bras et le porta tel un sauveur, les larmes aux yeux. Ce dernier était à nouveau bouche bée, mais cette fois réellement parce qu’il ne comprenait pas ce qui arrivait.

- (Bulbizarre) Monsieur Reptincel… !?

- (Reptincel) Bulbizarre, tu es incroyable !!

- (Bulbizarre) Pourquoi !? Qu’est-ce que j’ai encore fait… !?

- (Reptincel) Tu viens de nous offrir un nouvel espoir ! Tu viens peut-être… de sauver le monde entier !

- (Bulbizarre) Quoi !?

Oui, ce fut beaucoup à encaisser d’un coup. Une fois l’euphorie passée, les deux garçons retournèrent sur la plage du continent, là où le reste des habitants de Bourg-Trésor les attendaient.

- (Leuphorie) *soupir* C’est bon, il est saint et sauf…

Marmonna-t-elle, en observant son fils de loin.

- (Gruikui) Wow, c’est moi ou Reptincel a même réussi à lui rendre le sourire ?

- (Tarsal) Je confirme, hi hi…

Tarsal ressentait l’aura et l’esprit de son grand frère. Elle comprenait son état d’esprit, elle le partageait désormais. Sur le chemin du retour, l’apprenti explorateur lui avait expliqué en détail l’importance de son trésor. Et par gentillesse incarnée, Bulbizarre le lui donna sans hésiter.

- (Bulbizarre) Si il peut vous permettre de sauver le monde, alors prenez-le ! Si je ne peux pas le récupérer, alors… peu importe ! Le simple fait de savoir que j’ai pu vous aider… *rires* c’est trop cool !

Il rigolait sincèrement. En moins de dix minutes, Reptincel l’avait changé du chagrin à l’espoir. Ils s’enlacèrent une dernière fois, puis le petit quitta définitivement le continent en embarquant l’un des navires, aux côtés de ceux qui ne comptaient pas en rester-là non plus.

Le premier des quatre fut complet, il quitta les lieux sous le regard rassuré des apprentis.

- (Reptincel) … (Prenez soin de vous, les mioches…)

Au même moment, Grodoudou terminait de parler aux journalistes et explorateurs.

- (Grodoudou) … Voilà pourquoi il faut interdire l’accès au continent Sud, au moins jusqu’à la fin du mois de Juin. La guilde a la situation bien en main. Une fois le problème réglé, nous migrerons vers un autre territoire et préparerons un tout nouveau programme pour les nouvelles générations, alors qu’ils se tiennent prêts !

- Et concernant la menace, celle qui a ravagé Bourg-Trésor ; même si vous ne voulez rien nous dire sur son identité, pouvez-vous au moins nous assurer qu’il ne s’en tirera pas aussi facilement ! Le reste du monde attend de savoir ce que la justice lui réserve !

- (Grodoudou) Vous avez tout dit, jamais il ne s’en sortira, plus après avoir touché à plus d’un cheveux du village que nous protégions depuis des décennies maintenant ! Nous l’arrêterons et, je me répète, nous n’avons besoin de personne ! Pharamp peut rester où il est ; vous tous, explorateurs que j’ai éduqué, par pitié, poursuivez votre apprentissage sans vous soucier de ce que la guilde subit et devient. Nous triompherons quoiqu’il arrive, car le pacte que chaque apprenti fait lors de l’obtention de son diplôme… fonctionne dans l’autre sens également.

Son discours clôtura à merveille. Les explorateurs semblaient éblouis, tandis que les journalistes avaient obtenu ce qu’ils étaient venus chercher. Grodoudou avait fait passer le message : que personne n’intervienne. Ce fut l’ordre de Noctunoir, ce fut l’accord du maître de la guilde. Il en était certain : il n’avait pas besoin de soutien pour remporter la victoire, pas plus que celle que ses élèves pouvaient lui apporter.

Bref, le deuxième navire se remplissait grâce à la communauté Chartor seulement. Chart s’inclina une dernière fois vers Grodoudou.

- (Chartor) Merci pour tout, maître.

- (Grodoudou) Merci ? Pourquoi, je ne vous ai pas encore aidé à trouver un nouveau foyer.

- (Chartor) Vous ne nous laissez pas mourir, vous nous traitez au même titre que des civilisés. Ce n’est peut-être pas grand-chose pour vous, mais pour les opprimés que nous devenons même auprès de mère-nature… c’est beaucoup.

- (Grodoudou) Dans ce cas… profitez bien du voyage, ah ah ! Si le moindre problème survient, vous ne devriez même pas avoir besoin de bouger le petit doigt. C’est à ça que servent les explorateurs, après tout.

- (Chartor) Vous les avez formés, donc je peux leur faire confiance. À la revoyure, maître des explorateurs.

Elle se tourna vers le groupe d’adolescents qui l’avaient aidé.

- (Chartor) Bonne chance.

Massko, Carabaffe et Reptincel lui hochèrent la tête, puis Chartor rejoignit le reste de sa communauté dans un navire désormais complet, qui engagea un long trajet vers Loliloville. La moitié d’entre eux s’en étaient allés. Le reste des habitants de Bourg-Trésor, les journalistes et explorateurs venus aider commencèrent à remplir le troisième. L’un d’entre eux arriva vers les apprentis, il accompagnait Brutalibré, menotté mais le sourire aux lèvres.

- (Brutalibré) Hé… au cas-où les choses viendraient à tourner au vinaigre… merci. Ce serait bête que j’aille en enfer seul avec ce mot me trottant dans l’crâne, alors merci pour tout.

- (Reptincel) Pas de problème.

- (Carabaffe) Profite bien d’la prison, mec.

- (Massko) Je suppose que l’on se reverra bientôt.

- Allez, on y va !

L’explorateur l’emmena finalement. De son côté, le professeur Chapignon confia ses dernières ressources à son élève.

- (Chapignon) Voilà tout ce que j’ai pu sauver. Ce n’est pas grand-chose, mais je suis au moins certain d’avoir compris comment cette technologie étrangère fonctionnait. Prends-en soin… tout comme toi, mon grand. Tu as tant changé, depuis ta disparition.

- (Riolu) Merci, monsieur Chapignon ! Oui, et je suis désolé pour votre maison…

- (Chapignon) Oh, ce n’est pas si grave, j’ai un bien meilleur laboratoire qui m’attend à Loliloville. Tu as intérêt à survivre, parce que je compte bien reprendre nos travaux sur ce fichu portail dimensionnel ! Nous arriverons à en reconstruire un, j’en suis certain !

- (Riolu) Moi de même. La prochaine fois que l’on se reverra, ce sera soit devant le palier de votre appartement…

- (Chapignon) … Soit au paradis !

Ils se serrèrent la main sur cet aurevoir.

- (Chapignon) Ne te démène pas trop, tu as déjà tant donné cette année…

- (Riolu) C’est justement l’occasion de se surpasser, maître. Faites bon voyage !

Le scientifique grimpa le troisième navire, qui quitta enfin le continent. Il ne restait plus que la guilde, enfin presque.

- (Keunotor) Minute. Elle est où, la Ténéfix ? Je n’ai vu personne lui mettre les menottes !

- (Ténéfix) Je suis là.

- (Keunotor) AAAH !!!

Hurla-t-il en bondissant de peur, surpris par le ton ennuyé de la vieille femme traitée telle une criminelle.

- (Ramboum) Que fais-tu encore là ?

- (Ténéfix) Je me pose la même question.

- (Grodoudou) On a besoin d’elle !

Le maître s’approcha et lui tapota le dos devant tous ses élèves.

- (Grodoudou) Elle est la mère des Ténéfix, elle jouera un rôle majeur au moment opportun !

Un léger silence régna.

- (Cradopaud) Ouais… elle est surtout la collègue de Noctunoir. Qui nous dit qu’elle ne nous trahira pas ?

- (Ténéfix) Que l’on soit clair, plus jamais je ne m’associerai à ce monstre.

- (Héliatronc) Facile à dire.

- (Grodoudou) Faites-moi confiance, les copains ! Je sais qu’elle de notre côté.

- (Ramboum) *soupir* On vous croit, maître.

- (Ptyranidur) Et le dernier navire, du coup ? À qui est-il supposé servir ?

- (Grodoudou) Eh bien… à vous.

Le maître abandonna quelques instants son ton enfantin, il baissa un regard rempli de regrets.

- (Grodoudou) Je n’allais pas vous forcer à combattre Noctunoir, surtout après ce qui est arrivé. Alors ne sachant pas si votre vision du monde fut bouleversée ou non, j’eusse demandé un quatrième navire pour vous escorter loin de ce traumatisme à oublier.

- (Branette) …

- (Carabaffe) C’est une blague ? Vous n’allez pas décamper, quand même ?

Un léger silence régna, les apprentis s’échangèrent un regard indécis. Puis, l’un d’entre eux brisa cette incertitude générale.

- (Keunotor) Nan…

Tous les regards se fixèrent sur Keunotor.

- (Keunotor) Fuir après avoir essuyé une telle défaite ? Ce n’est pas digne de la guilde… ! J’veux dire… ce traumatisme dont vous parlez, il n’est pas à oublier ! Au contraire, il faut le combattre pour comprendre comment progresser ! Ramboum, c’est toi qui me l’as appris, c’est comme ça que tu as évolué !

- (Ramboum) … C’est vrai.

- (Keunotor) Alors tant pis si on n’a pas l’niveau. Pijako s’est fait enlever parce que j’étais incapable de l’protéger, j’veux dire, c’était ma seule fichue mission et c’est lui, de nous tous, à s’être fait capturer ! Non, fuir serait pire que lâche…

- (Héliatronc) Je comprends ton point de vue. En fait, je le partage.

La type plante regarda ses lianes encore en traitement de soin.

- (Héliatronc) Cette ordure ne mérite pas de gagner comme ça !

- (Écrapince) C’est vrai. Si il veut vraiment nous faire peur, il n’a qu’à nous vaincre en utilisant ses propres techniques !

- (Cradopaud) Je ne quitterai pas ce continent tant qu’on ne lui aura pas cassé la gueule ! Ce n’est pas ce qu’Hélédelle voudrait.

- (Galifeu) Moi aussi, j’aimerai rester, mais…

Elle tapota d’un air ennuyé ses plâtres.

- (Galifeu) Je ne peux pas combattre avec ça.

- (Argouste) Hum, pareil. Nos soins sont trop encombrants.

- (Grodoudou) Eoko, a combien de temps estimes-tu le temps restant pour les remettre sur pied ?

- (Eoko) Environ deux semaines, si tout va bien.

- (Grodoudou) Bien… les copains, imaginons que l’on puisse décaler notre affrontement face à Noctunoir de deux semaines, vous sentiriez-vous d’attaque ?

- (Rocabot) Hein… ? Comment ça ?

- (Grodoudou) Imaginez seulement que ce soit possible.

Argouste et Galifeu s’échangèrent un regard assuré.

- (Galifeu) … Si nous le pouvions, nous ferions tout pour vous aider à sauver le monde, maître.

- (Grodoudou) Bien, dans ce cas, c’est comme si c’était fait ! Je saurai convaincre Noctunoir de décaler son génocide mondial jusqu’au mois de Juin, ne vous en faites pas !

Ses élèves le regardèrent avec de gros yeux.

- (Keunotor) Hein… ?

- (Grodoudou) Vous doutez de mes capacités d’orateurs ?

- (Argouste) Demandez-lui directement de nous rendre les rouages, ça ira plus vite.

- (Grodoudou) Ah, là on entre dans un domaine que je ne maîtrise pas, ah ah ! Donc tout le monde reste, c’est ça ? Parfait… *soupir* C’est dingue. Vous tous, vous avez tous tellement grandis, depuis votre première venue en ces lieux. Pijako serait si fier de constater votre détermination commune. En ce qui me concerne…

Sur ces mots, le maître s’inclina soudainement, le front collé au doux sable de la plage, face à tous ceux avec qui il avait évolué cette année.

- (Grodoudou) Merci à tous pour ces regards. Malgré mes erreurs, vous n’avez pas arrêté de me porter à la même auteur, de me considérer sans jamais douter maître de la guilde d’exploration.

- (Ramboum) Qu… quoi… ?

Tout le monde était sous le choc, ce fut la première et dernière fois qu’ils virent un Pokémon aussi grand s’incliner face à eux.

- (Ramboum) M… maître, voyons, redressez-vous ! Ce n’est pas grave, tout le monde commet des erreurs !

- (Grodoudou) Je ne suis plus votre maître…

Il se releva, le sourire aux lèvres.

- (Grodoudou) Je suis votre coéquipier, désormais !

À nouveau, personne n’osait répondre quoique ce soit. Ce fut si bizarre, Pijako se serait évanouirait face à une aussi grande échelle de respect brisée. Mais le maître… enfin Grodoudou s’en fichait, au contraire, il considérait ses anciens élèves comme désormais de véritables amis de confiance. Il leva alors les bras au ciel, et s’écria d’un air certes enfantin, mais assurément déterminé :

- (Grodoudou) Alors arrêtons Noctunoir et récupérons nos rouages du temps !

- (Ramboum) Euh… o… ouais… ?

- (Grodoudou) J’ai dit… ! ON VA LUI DÉMONTER LA FIGURE ET SAUVER LE MONDE !!!

- OUAIS !!!

Ils s’exclamèrent finalement tous, acceptant rapidement cette nouvelle situation. Pour la dernière fois, cette version de la guilde d’exploration, celle de 231 à 232, hurla ensemble pour se motiver. Étaient-ils encore réellement apprentis, à ce stade ? Massko souriait face à ce regain d’espoir, Ténéfix s’écartait volontairement par gêne et Branette n’avait pas prononcé le moindre mot. En fait, il détournait le regard depuis un moment maintenant.

- (Ramboum) Très bien, partons du principe que nous avons jusqu’à Juin pour nous préparer… par quoi devrions-nous commencer ?

- (Grodoudou) L’idéal serait de régler nos derniers problèmes rapidement. Premièrement, il faudrait mettre la main sur le dernier rouage du temps.

- (Reptincel) C’est fait.

Le chef de la Dream Team le sortit de sa poche. Tout le monde s’en exclama.

- (Pikachu) C… comment !?

- (Reptincel) Bulbizarre, l’un des enfants de l’orphelinat l’avait en sa possession.

- (Carabaffe) Quoi, depuis tout ce temps !? Quel merdeux !!

- (Ptyranidur) Tu ne l’avais jamais remarqué ? Ce n’est pas un reproche, mais… tu passais tellement de temps à l’orphelinat.

- (Reptincel) Tout le monde a ses trésors privés, et quand on sait comment il l’a obtenu…

Un silence se créa.

- (Germignon) Et… comment l’a-t-il obtenu ?

- (Reptincel) … Bonne question. Maintenant que j’y pense, il ne me l’a jamais vraiment dit. Je sais juste que c’est une fille… une fille qu’il n’avait jamais rencontrée avant et qu’il ne revit jamais depuis ce jour qui le lui confia.

- (Massko) Oh…

Massko se tourna, l’air ennuyé.

- (Massko) Je vois…

Il s’en alla, sachant pertinemment sur qui le sujet allait tomber.

- (Cradopaud) C’est quoi son problème ?

- (Grodoudou) Hum… *soupir* je crois que je commence à comprendre qui est à l’origine de toute cette histoire.

- (Carabaffe) C’est Celebi, n’est-ce pas ? La gardienne originelle du dernier rouage du temps, celle que Créhelf décrivait d’impertinente.

- (Riolu) Celebi… ?

- (Grodoudou) Elle semble être bien plus que ça. En fait, mieux vaut qu’elle nous rende des comptes tout de suite…

Il ferma les poings et écria au ciel.

- (Grodoudou) JE SAIS QUE TU NOUS REGARDE !!! APPARAIT, CELEBI !!!

- (Rocabot) Qu’est-ce qui vous prend !? Ce n’est pas comme si elle allait juste arriver comme ça, dans un soudain nuage de lu…

L’explosion d’un soudain nuage de lumière lui coupa la parole. Il aveugla tous les mortels, avant que la figure d’un être légendaire fasse son entrée. C’était bien elle, Celebi, le même Pokémon qui avait aidé Reptincel et Ténéfix à s’échapper de l’emprise de Noctunoir. Son visage, comme durant cette bataille, laissait transmettre une émotion cruellement hautaine.

- (Celebi) Tiens donc, on est moins idiot que je ne l’imaginais…

- (Keunotor) … (Hein… ? Mais pour qui elle se prend !?)

- (Héliatronc) … (Impressionnant, elle dégage une aura si particulière. Elle parait incroyablement puissante… !)

- (Riolu) … (Celebi… ? C’est elle, Celebi… ? Bon sang, combien d’autres divinités sont encore inconnues du grand public ?)

- (Reptincel) … (Maintenant que je la vois sous un angle un peu moins… pressé ; effectivement, elle m’évoque bien autre chose qu’une aide de confiance. Si elle observe tout depuis le début, alors…)

- (Grodoudou) Celebi, n’es-tu pas au courant de ce que nous cherchons à faire depuis des mois, avec Créhelf, Créfollet et Créfadet ?

Elle détourna le regard, se grattant les narines d’un air enfantin.

- (Celebi) Nan, vous êtes les points de vue les plus chiants de tous, je l’ai compris tout de suite. Je suis parfaite, mais je n’ai qu’une vision. Et clairement, j’ai préféré la placer sur ceux qui suaient le plus, c’était hilarant !

- (Écrapince) … (Pardon… ?)

- (Grodoudou) Nous te cherchions, Celebi ! Toi et le rouage que tu avais juré de protéger étaient primordiales à notre victoire, alors pourquoi… ? Pourquoi l’avoir confié à un gamin du village !?

- (Celebi) Il avait le cœur pur.

- (Grodoudou) CE N’EST PAS UNE RAISON !!!

Hurla-t-il d’un ton autoritaire. Une veine se marquait clairement sur son front et, à nouveau, les autres découvrirent une nouvelle facette de leur ancien maître. La divinité, de son côté, s’envola en rigolant de manière narquoise.

- (Celebi) Ah ah, évidemment que ce n’est pas la vraie raison ! Ça a le mérite d’être vrai, mais j’avais de toute façon l’attention de me débarrasser de ce caillou si encombrant ! Sérieux, je ne suis même pas capable d’user de son pouvoir, c’était si ennuyeux.

- (Grodoudou) Et où étais-tu, pendant tout ce temps !?

- (Celebi) Entre le temps et l’espace. J’ai commencé à me demander ce qui arriverait si j’ajoutais un peu de piment dans la vie de ces mortels si primitifs… puis c’est devenu marrant.

- (Reptincel) Non… tu ne t’es pas seulement contentée de trahir votre pacte commun, tu… tu as forcé Massko à devenir un hors-la-loi !

- (Germignon) Quoi !?

- (Celebi) Massko ? Le vert ? Ouais, bien vu ! Il te l’a dit ou il avait encore trop peur de parler ?

- (Carabaffe) Espèce de sombre merde !

Exclama le type eau en s’apprêtant à attaquer l’elfe. Mais Grodoudou lui recommanda TRÈS fortement, d’un simple geste, de ne tenter quoique ce soit face à elle. Le reste de la Dream Team était répugnée.

- (Riolu) Comment avez-vous pu faire une chose pareille !? Vous… vous êtes responsable de bien plus de peines que vous ne puissiez l’imaginer !

- (Ramboum) A… attendez une minute, je ne saisis pas ! Comment ça, qu’entendez-vous par « forcer » Massko ? Elle le manipulait ?

- (Celebi) Oh non, crois-moi, il agissait bien de lui-même ! C’est une longue histoire, vous voulez vraiment la version longue ? Disons que je lui ai simplement ouvert un portail vers votre… enfin son monde, parce que c’était le sien aussi, si je me souviens bien. Il était enfermé depuis combien de temps ? Des mois ? C’était un pitoyable gamin apeuré, il avait un corps évolué qu’il ne méritait pas ! Son regard transpirait la crainte, on aurait dit qu’il avait à nouveau tout perdu ! Alors pourquoi ne pas l’utiliser comme moyen de divertissement, je ne risquais pas de détruire grand-chose, si ?

- (Pikachu) Non… c’est ignoble ! Il… il n’était qu’un pauvre enfant kidnappé, il voulait juste rentrer chez lui, à Bourg-Tranquille !

- (Celebi) Et moi je voulais juste que le temps passe, mon chou. Alors je l’ai mis devant un choix : crever dans ce monde éteint, ou tout oublier de son ancienne vie pour devenir quelqu’un d’autre, un criminel stylé, à l’accoutrement stylé et qui fait des trucs stylés ! Il ne connaissait rien, ce bougre, mais le pire fut que je n’eusse pas même à mentir sur ce qu’étaient réellement les rouages du temps. Il était si désespéré que la simple mission de tous les récolter, il l’accepta sans hésiter ! Nous avons pactisé. Je l’ai menacé de me trahir, je l’ai motivé. Et depuis… *rires* j’admire le plus beau spectacle de tous les temps ! Tout ne se passait que sur un continent, mais c’était si beau ! La guilde entière contre lui, votre pauvre mutinerie qui me fit pleurer de rires, l’arrivée de Noctunoir et sa tentative de voler également les rouages, l’assaut à la Caverne Cristal, votre kidnapping et la désespérante survie qui s’en suivit… ! C’était magique !

- (Ptyranidur) Nous ne sommes que des pions, pour vous !?

- (Celebi) Exactement, fossile !

- (Galifeu) C’est quoi cet abus de pouvoir !? Les trois autres elfes ne sont pas capables de faire la même chose ?

- (Grodoudou) Non. Hélas, Celebi est née avec un potentiel infiniment plus grand…

- (Argouste) … (Ça explique ce caractère de merde !)

- (Celebi) Je pourrais vaincre un mortel usant des pouvoirs des cinq rouages du temps, si je le voulais ! Si votre monde venait à être pétrifié… *rires* ça ne m’affecterait même pas ! Il me suffirait de changer de terre et le problème serait régler !

- (Cradopaud) Espèce de monstre… ! Ça veut dire que vous avez vu Hélédelle se faire découper l’aile, et vous n’avez rien fait !!

- (Celebi) Oh, j’aurai abattu Massko sur le champ, si il ne l’avait pas fait. Je lui avais ordonné d’être horrible, après tout.

- (Ténéfix) Dans ce cas, pourquoi nous avoir sauvé ? Noctunoir allait nous vaincre, pourquoi être intervenu ?

- (Celebi) C’est vrai que tu es là, toi. Ça aussi, c’est marrant, ah ah !

- (Keunotor) Réponds !!

- (Celebi) Bah à votre avis, les dégénérés ? La seule question à se poser est : « Dans qu’elle situation serai-je la plus comblée ? ». Soit Noctunoir vous abattais, détruisais la guilde sans aucun problème et gagnait le pouvoir ultime ; soit j’intervenais, lui faisais prendre conscience qu’un pouvoir encore plus grand existait et qu’il devait mieux se préparer, tout en laissant à la guilde une dernière chance de me divertir. Et cette chance, vous pouvez encore la saisir, mes chers sujets !

- (Héliatronc) Comme si notre survie vous importait !

- (Celebi) Non, bien sûr, je m’en moque. Mais après avoir autant nagé dans la soupe, ce serait sacrément stylé de vous voir triompher, non ? Alors démerdez-vous pour ne pas mourir dès le début de la bataille finale, dac ? En ce qui me concerne, je n’interviendrai plus jamais !

- (Grodoudou) … Disparais.

- (Celebi) … Pardon ?

- (Grodoudou) DISPARAIS !!!

Hurla-t-il de toutes ses forces. Sa voix avait, pour l’espace d’un court instant, atteint des gammes effrayantes pour son interlocutrice qui, malgré sa toute-puissance, écarquilla les yeux de surprise. Elle se retourna, rigolant maladroitement tout en reprenant son air hautin.

- (Celebi) Hé hé… bonne chance, les primitifs… !

Et sur ces mots, elle disparut dans un nouvel amas de lumière aveuglante. Le maître était essoufflé, ses poings tremblaient. Mais petit à petit, il se calma. Il soupira, puis se tourna finalement vers ses compagnons ultimes.

- (Grodoudou) Bon, ça, c’est fait également !

- (Ramboum) Ne me dites pas que vous voulez déjà passer à autre chose !?

- (Grodoudou) Bien sûr que si, on ne va pas s’attarder sur une aide qui ne viendra jamais.

- (Germignon) Oui, Celebi n’est certainement pas notre amie, nous l’avons bien compris. Au moins, je sais quoi faire, maintenant.

- (Pikachu) Allons-y ensemble, Germignon.

- (Héliatronc) Qu’allez-donc vous faire ?

- (Germignon) Discuter pour la première fois depuis bientôt un an avec notre ami.

- (Grodoudou) Oui, je pense que c’est nécessaire. La prochaine étape, et je vous le demande sincèrement, s’il vous plaît, est de se reposer. Ce soir, nous ne faisons rien d’autre que de prendre du temps pour réfléchir, se préparer psychologiquement à ce qui va arriver. Servons-nous des ruines du Bar Spinda comme abri, résolvons nos dernières querelles personnelles et… dormons un peu sur nos deux oreilles.

- (Ramboum) Entendu, maî… Grodoudou. Reposons-nous, les amis…

Enfin, une phase de repos débuta. Il y avait beaucoup d’informations à encaisser, les apprentis avaient à se dire les choses.

 

 

Alors que le soleil se couchait lentement, un groupe constitué de Ramboum, Keunotor, Écrapince, Héliatronc et Cradopaud s’approcha de Reptincel. Ce dernier rangeait des décombres, mais s’arrêta à leur arrivée.

- (Ramboum) Dis, tu as une minute… ?

- (Reptincel) Oui, bien sûr.

Répondit-il calmement, en s’essuyant les mains dans un silence pesant. Les adultes avaient le regard baissé.

- (Cradopaud) On… euh… on a repensé à ce qu’il s’est passé hier.

- (Keunotor) Tu sais, on… oublie parfois vos âges, les jeunes. Personne ne s’attendait à passer une année à la guilde entouré d’adolescents.

- (Héliatronc) On a tous appris à s’y habituer, même ceux qui avaient l’égo le plus surdimensionné…

Marmonna-t-elle, en jetant un bref regard à Écrapince.

- (Héliatronc) Vous considérez à notre hauteur, on le faisait désormais pour tout. Compétences, attentes et reproches.

- (Écrapince) Selon moi, c’était une erreur. Certes, tu as une capacité d’analyse hors norme et qui surpasse de loin la nôtre, mais… tu n’as pas la maturité de comprendre ce que cela représentait réellement, de créer ce foutu rappelle-tout.

- (Reptincel) C’est vrai. Je l’ai fait parce que mon ancien maître me l’avait recommandé. J’ai continué de le remplir parce qu’il me permettait de progresser à une vitesse pharamineuse. J’ai dédié des pages entières sur chacun d’entre vous parce que… je vous admire. Vous me paraissiez si forts, honnêtement, je ne pensais pas avoir vu juste à ce point…

- (Cradopaud) As-tu seulement complété ces pages en nous regardant nous battre ?

- (Reptincel) Absolument.

- (Cradopaud) Tu… n’as rien fait d’autre ? Pas de voyeurisme… ?

- (Reptincel) Je t’assure que non.

- (Cradopaud) … Je te crois.

- (Ramboum) On a besoin de savoir, Reptincel. Que feras-tu, quand tu l’auras récupéré ?

- (Reptincel) … Je ferai en sorte que plus jamais personne ne puisse mettre la main dessus.

- (Ramboum) Comment ?

- (Reptincel) …

Il mit plusieurs secondes, avant de répondre.

- (Reptincel) Faites-moi confiance, s’il vous plaît.

- (Ramboum) … Ouais… *soupir* De toute évidence, ce doit être un choix atroce à prendre pour toi. Personne ne s’est tiré satisfait de cette expérience, pas même l’auteur des récits qui nous ont massacré.

- (Reptincel) Nous avons tous été souillés, Ramboum. En ce qui me concerne…

Il s’inclina doucement sur ces mots.

- (Reptincel) Je vous présente une nouvelle fois mes plus sincères excuses. Je vous promets que je me rattraperai un jour, je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour, je… je deviendrai quelqu’un de meilleur !

Les cinq adultes l’observèrent silencieusement. Ils ne souriaient pas, mais n’étaient pas non plus malheureux. Seulement attristés d’en être arrivé là, à ce que le plus prodigieux des apprentis s’inclinent de regrets face à eux. Alors ils en firent de même, ils s’abaissèrent à leur tour jusqu’à ce que le type feu ne relève le regard.

- (Reptincel) Quoi… ?

- (Ramboum) Dans ce cas, nous te présentons nous aussi nos plus amples excuses.

- (Keunotor) Servons-nous de ces problèmes pour nous surpasser !

- (Écrapince) Je suis content de te voir aussi ouvert au dialogue après hier.

- (Héliatronc) Il l’a compris avant nous. Notre seule chance de victoire, désormais, c’est…

- (Cradopaud) … Le travail d’équipe.

Tout le monde se redressa, désormais à l’allure souriante.

- (Keunotor) *soupir* Voilà une bonne chose de faite !

- (Reptincel) Je suppose que vous êtes les seuls à avoir fait ce chemin.

- (Écrapince) Voyons, tu sais très bien que l’équipe Renaissance ne t’en veux pas. J’ai cru entendre Ptyranidur faire la morale à Argouste sur le fait qu’il s’emportait trop rapidement, tout à l’heure. Il devrait venir s’excuser, et ton équipe te soutient évidemment.

- (Cradopaud) Ouais, enfin…

Cradopaud tourna son regard vers l’un des recoins du village détruit. Branette s’y trouvait, seul, observant d’un air perplexe l’horizon.

- (Cradopaud) Y en a un qui n’est pas encore calmé, je crois.

- (Reptincel) … C’est normal. Je vais aller lui parler.

- (Ramboum) Tu es sûr ?

- (Reptincel) … Non, Branette est celui que j’ai le plus fait souffrir. Je comprendrai qu’il ne me pardonne pas, mais je dois en être certain.

Là-dessus, il s’avança vers son ami d’antan.

 

 

Seul le mouvement des vagues animait la scène emplie de décombres. Branette se tenait droit, debout et le corps couvert jusqu’au cou de sa cape noire et désormais sévèrement égratignée. Elle ne l’avait jamais été, pas même lorsqu’il s’était retrouvé dans les pires situations. À vrai dire, il n’avait jamais perdu espoir, perdu ambition à ces instants. Mais depuis peu… il peinait à voir du rouge.

- (Reptincel) Branette…

Marmonna son chef d’équipe une dernière fois. Ce ton navré lui fit crisper les dents.

- (Branette) Dégage…

Le type feu s’avança.

- (Reptincel) S’il te plaît, je…

- (Branette) DÉGAGE !!!

Hurla-t-il soudainement, en se tournant d’un air menaçant. Sa puissante voix raisonna dans tout le territoire. Tout le monde l’entendit, et tout le monde s’en désespéra. Le pardon ne pouvait être aussi accessible, et le type spectre le prouva.

- (Branette) Pour qui… te prends-tu, sérieusement !? Tu crois que je vais tout oublier sous prétexte que l’on doit « absolument » travailler en équipe pour espérer l’emporter sur cette ordure !? La vérité est que tu ne vaux pas mieux que lui, Reptincel !!

Il s’avança d’un pas.

- (Branette) Il y a un an, six mois et presque trois semaines, nous nous rencontrions !

D’un autre pas.

- (Branette) Il y a un an et deux semaines, nous nous retrouvions à Bourg-Palissade ! Tu te souviens de ce celui que j’étais devenu !?

Il en fit un dernier, approchant son visage à quelques centimètres de celui de son interlocuteur.

- (Branette) UN HÉROS !!! Un vrai, un qui aide autrui sans noter noir sur blanc toutes leurs faiblesses dans l’encyclopédie du génocide !!

Soudainement, il s’abaissa et le cogna brutalement d’une droite dans le ventre.

- (Branette) JE N’AI PAS BESOIN DE ÇA, POUR GAGNER !!!

Reptincel s’écrasa sur le dos, il se tenait douloureusement le ventre mais ne gémissait pas, il se sentait terriblement coupable de ce qui lui arrivait. Branette, lui, le regarda de haut. Ses mains tremblaient, son visage était ravagé par une autre douleur.

- (Branette) Traumatiser son adversaire pour le vaincre, quelle sombre merde il faut être pour se prétendre vouloir devenir le meilleur après ça ? Le meilleur des explorateurs, qui plus est… ! TU NE LE SERAS JAMAIS, TU N’ES BON QU’À RENDRE FOU CEUX QUI CROYAIENT EN TOI !!!

Posant une main sur son cœur, ce sont des larmes qui commencèrent à couleur.

- (Branette) TU M’AS TANT INSPIRÉ, J’AI TANT PENSÉ APPRENDRE DE TOI !!! TU ÉTAIS MON MODÈLE ULTIME, INDÉTRÔNABLE ET IRRÉPROCHABLE !!! *snif* Le jour où tu… *snif* où tu m’as assuré me vouloir dans ton équipe… ! Ce sourire que tu avais, alors que tu venais de me sauver du Spectrix…

Il baissa la tête en crispant les dents, ses larmes coulaient à flot.

- (Branette) Comment veux-tu que je ne pense pas à l’idée que tu puisses sourire… *snif* uniquement parce que tu venais de trouver ma faiblesse ultime ? Celle de me rendre fou, celle de me faire déborder à nouveau…

Il resserra sa cape, se retournant d’un air honteux.

- (Branette) Tu n’as aucune idée de l’effet que ça fait… *snif* J’ai eu l’impression de… mon corps, je…

Il tremblait de plus en plus, et lentement, Reptincel comprit ce que signifiait réellement ce traumatisme.

- (Branette) Cette foutu chaleur, sa voix si dominante… !

Le type spectre s’écroula à genoux, explosant en sanglots face à la réalité : il fut bien pire qu’agressé physiquement.

- (Reptincel) Non… ! Pitié, ne me dit pas que… !

- (Branette) Ferme-là… !

- (Reptincel) … (Merde, qu’est-ce que j’ai fait… !?)

- (Branette) Maintenant, par pitié… dégage ! Je reste, je vais combattre parce que c’est ce qu’un héros doit faire. Je mourrai si il le faut, mais je me battrai jusqu’au bout pour empêcher Noctunoir de détruire le monde. Le travail d’équipe, tu sais où tu peux te le foutre ! On va probablement perdre, mais si un miracle venait à arriver… *snif* alors dégage. Dégage de ma vie tout entière, fais-toi oublier, disparais à jamais de ma putain d’existence !

Il serra les poings, avant d’afficher un dernier regard dévastateur à son ancien chef d’équipe.

- (Branette) Si on gagne, je peux t’assurer que je deviendrai l’explorateur impassible ! Celui qui se moque de la forme, celui qui fait ce qui doit être putain de fait ! Autrement dit, une fois ce continent quitté… ne te mets jamais plus en travers de ma route !

Il s’était exprimé d’une voix froide, au ton de plus en plus grave, aux cordes vocales de plus en plus brisées et raclées contre un mur d’acier face à son passé. À ce stade, présenter ses excuses aurait été déplacé. Reptincel se contenta simplement de fermer les yeux, d’hocher doucement la tête, de se retourner et… de ne plus jamais poser son regard sur lui. Il s’éloigna dans un silence pire que pesant, car en cette fin de journée-là, c’est bien plus qu’une amitié qui se brisa.

Personne n’avait besoin de le dire, la Dream Team avait perdu un membre, et tout le monde l’avait compris.

 

 

Riolu emmena Pikachu et Germignon à Massko. Pour la première fois depuis bientôt un an, ces quatre enfants de Bourg-Tranquille, ces quatre camarades de classe rapprochés par une cause commune se retrouvèrent enfin à nouveau ensemble. La figure du type plante intimidait encore un peu ses deux anciens adversaires, ce dernier s’installa alors calmement en tailleur.

- (Massko) Salut, les gars.

- (Germignon) Arcko… pouvons-nous t’appeler comme cela ?

- (Massko) Faites ce que bon vous semble.

- (Pikachu) Non, à ce stade, je pense que la décision te revient.

- (Massko) … Dans ce cas, restons sur Massko. Je ne souhaite pas associer celui que je suis devenu à notre nostalgie commune.

- (Pikachu) Et pourtant, rien de ce qui est arrivé n’est réellement regrettable.

Pikachu s’installa à son tour.

- (Pikachu) Elle nous a tout révélé. Celle qui a fait de toi notre ennemi.

- (Massko) Je suis le seul responsable dans cette histoire, Pikachu. Si je n’avais pas accepté, vous n’auriez jamais eu à me revoir dans… ce pitoyable état. Il faut être sacrément lâche, pour accepter de combattre ses amis pour survivre…

- (Germignon) Ne dis pas ça, personne ne peut se mettre à ta place. Si tu n’avais pas accepté, tu te serais condamné sans avoir eu la moindre chance de revenir. Ce n’est pas… mieux ? Je veux dire, regarde-nous !

Elle s’installa à son tour.

- (Germignon) Nous sommes tous là… !

- (Massko) Oui, en face d’une menace capable de détruire un monde qui n’aurait pas été en danger sans mon intervention.

- (Pikachu) Je croyais que l’on pouvait tout accomplir ?

- (Massko) …

- (Pikachu) Ce n’est pas notre dicton ? Tant que nous sommes ensemble…

- (Germignon, Riolu et Pikachu) Nous sommes invincibles !

Massko rigola timidement, il se revoyait face à Electhor avec le reste de son équipe.

- (Massko) C’est vrai que la Dream Team n’est pas inconsciente vis-à-vis de ce concept. Le miracle… *soupir* c’est dingue.

- (Germignon) Quoi donc ?

- (Massko) Cette flamme commune que vous arrivez si facilement à partager. Cette flamme chaleureuse, chatoyante… bref, si motivante. Nous avons tant accompli ; ce serait idiot de se laisser faire, n’est-ce pas ?

- (Pikachu) T’as tout compris, ah ah ! Tu vois, c’est revenu tout de suite !

- (Germignon) Tu ne t’assoies pas, Riolu ?

- (Riolu) Oh, euh… je comptais vous laisser seuls, en fait…

- (Pikachu) Pourquoi ? Tu sais que tu fais tout autant partie de l’équipe que nous ?

- (Riolu) Je l’ai bien compris, c’est juste que…

Un léger silence régna, avant que le scientifique ne se décide à le faire. Mais avant de s’assoir, il ferma les yeux de honte.

- (Riolu) Je me sens tellement responsable, quand je vois ça…

- (Massko) Comment ça ?

- (Riolu) Tu sais, je t’avais dit que ta disparition m’avait changé.

- (Massko) Oui, elle t’avait renforcé.

- (Riolu) Ça n’a pas toujours été facile. Le calme apprenti que je suis actuellement… est passé par tout un tas d’étapes détestables, autant pour moi avec du recul, que pour les autres au moment des faits. Autrement dit…

Il se tourna vers Germignon et s’inclina droitement.

- (Riolu) Je te présente mes excuses, Germignon. J’ai été horrible avec toi, surtout le jour où l’on demanda à Pijako de se désinscrire de l’excursion au Lac des Brumes.

- (Germignon) Oh, euh…

- (Riolu) Je m’en veux tellement. Les propos que je tenais n’avaient plus de sens, en fait, mon obsession pour mes objectifs personnels avait pris le pas sur celui que j’étais originellement devenu grâce à vous, grâce à la Dream Team ; c’est-à-dire quelqu’un de meilleur.

- (Germignon) Riolu… bien sûr que je te pardonne. Bon sang, je me suis tant inquiétée pendant ces derniers mois… ! Ce serait mentir que de prétendre ne pas avoir pleuré ta disparition.

- (Riolu) … Merci. Je te promets que je deviendrai quelqu’un de meilleur !

- (Germignon) C’est déjà le cas, Riolu.

- (Pikachu) J’suis content d’vous voir vous pardonner. Ça m’faisait mal de t’entendre avec cette voix, tu semblais presque dépressif.

- (Riolu) Je faisais mine de ne rien apprendre à la guilde, mais je suis finalement si heureux d’y être allé, surtout à vos côtés.

- (Germignon) Oui, cette expérience nous a tous tellement changé…

Riolu s’installa enfin à leur côté et c’est ensemble, tous les quatre, que les membres de la Dream Team passèrent le reste de la soirée. Ce fut agréable, réconfortant, motivant.

 

 

Le soleil se levait à peine, qu’il était déjà prêt. Seul au centre du village, c’est en ce début de journée du 20 Mai 232 que Grodoudou se tenait prêt à recevoir Noctunoir.

Ce dernier arriva quelques heures plus tard, traversant un portail seul. L’atmosphère changea drastiquement lorsque sa figure apparut, il possédait assurément les rouages du temps.

- (Noctunoir) Je viens chercher ce qui me revient de droit.

Clama-t-il froidement, avant de lentement dévisager les alentours.

- (Noctunoir) … Je vois que vous savez tenir parole.

- (Grodoudou) Je suis seul, si c’est la question que vous vous posez.

- (Noctunoir) Je ressens de proches présences.

- (Grodoudou) Ils se cachent de votre folie. Une petite balade au bord de la plage, ça vous dit ?

- (Noctunoir) … Non.

- (Grodoudou) Le rouage est par-là, donc vous n’avez pas vraiment le choix.

Se moqua-t-il sèchement, avant de prendre la direction de la plage du continent. Il marchait les mains dans le dos, prouvant à son adversaire qu’il serait, aujourd’hui seulement, son interlocuteur. Alors le monstre le suivit, le rattrapant pour marcher à la même vitesse.

- (Noctunoir) Ne me faites pas tergiverser.

- (Grodoudou) Pourtant, vous vous pliez aux règles des plus faibles. Sans ce rouage, vous ne pouvez pas accomplir votre idéal, hein ?

- (Noctunoir) Sachez maintenir vos paroles, maître d’une guilde d’incompétents. Je pourrai détruire votre monde à n’importe quel moment, qu’importe si le rouage ne devient qu’un tas de cendres !

- (Grodoudou) Oh, vous n’arriveriez pas à le détruire non plus, vous savez. Et en ce qui concerne le reste, non, vous ne pouvez pas vous le permettre. Je sais que le pouvoir des rouages n’est pas compatible avec ceux des autres mondes. En d’autres termes, vous devriez recommencer votre quête à zéro.

- (Noctunoir) … Et alors ? Il me suffirait de trouver une terre qui ne protège pas correctement ses rouages, et la victoire serait mienne !

- (Grodoudou) Dans ce cas, faites-le !

Le vent souffla quelques instants.

- (Grodoudou) Quoi, j’ai dit quelque chose qu’il ne fallait pas ? Le Multivers regorge une infinité de terres, vous avez raison. Il doit en exister des milliers, des centaines de milliers qui n’ont pas les ressources nécessaires pour protéger leurs rouages du temps, je suis même certain que beaucoup ne savent même pas ce que c’est. Pourtant, vous continuez de vous acharner sur notre monde, alors même que des dieux ont pour tâche de dédier leur vie à notre protection commune.

- (Noctunoir) …

- (Grodoudou) Vous n’êtes pas capable de reprogrammer les portails, n’est-ce pas ?

- (Noctunoir) Fermez-là ! Je suis capable de tout, TOUT FAIRE !! Si ces foutus portails ne fonctionnent pas correctement, c’est uniquement parce que les ingénieurs de mon monde furent incapables d’en coder des justes ! Oui, vous avez raison, je suis bloqué entre votre monde et le miens. Depuis que je suis banni, je n’ai plus accès aux machines sophistiquées des plus grands laboratoires de ma terre, eux m’auraient permis de rediriger des portails. C’est pourquoi je « m’acharne » sur vous, c’est pour ça que je cherche à récupérer le dernier rouage coûte que coûte.

Il ferma les poings.

- (Noctunoir) Et c’est pour cela que je ne peux pas simplement vous abattre. Si vous mourrez, seuls détenteurs de l’information qu’il me manque, qui sait combien de temps encore je vais prendre pour achever ma quête. J’ai déjà perdu trop de temps, et… je ne suis pas immortel.

- (Grodoudou) … C’est touchant. Hélas, il est hors de question de sacrifier un monde au profit d’un seul Pokémon.

- (Noctunoir) Je ne vous laisse pas le choix.

- (Grodoudou) Non, mais vous allez nous laisser deux semaines encore.

Les deux personnages s’arrêtèrent. Ils s’étaient suffisamment éloignés des décombres de Bourg-Trésor.

- (Noctunoir) Vous vous croyez en mesure de négocier ?

- (Grodoudou) Je suis déjà en train de le faire.

- (Noctunoir) … Que voulez-vous réellement ?

- (Grodoudou) Dans l’idéal… survivre. Mais je suppose qu’abandonner votre quête est trop demandée, même si l’on vous promet une liberté total dans ce monde aux couleurs si chatoyantes ?

- (Noctunoir) Je ne cherche pas à vivre en paix. Mon monde périra, et j’en détruirai autant qu’il le faudra pour y parvenir.

- (Grodoudou) Au risque de me répéter, faites-le et vous vous retrouverez à nouveau seuls, vous et vos ambitions sans fond.

- (Noctunoir) Vous ne savez pas ce que j’ai vécu.

- (Grodoudou) Je sais ce que vous avez fait vivre à mes amis, ça me suffit.

- (Noctunoir) … Deux semaines, donc ? Vous pensez que ça vous suffira à me vaincre ?

- (Grodoudou) J’en suis persuadé.

- (Noctunoir) Sans aucune aide extérieure ?

- (Grodoudou) Pas besoin, la guilde est amplement suffisante.

- (Noctunoir) Alors même que votre pauvre piaf sera en otage ?

- (Grodoudou) Si il est en vie, alors tout ira bien.

- (Noctunoir) Il aura probablement perdu quelques plumes encore, mais ne vous en faites pas, j’ai promis de lui montrer vos cadavres avant de l’achever. Si je suis de bonne humeur, je le laisserai pourrir en même temps que votre monde, lorsqu’il s’éteindra à petit feu. Mais bien sûr, tout cela ne tient qu’à vous. Si à mon arrivée je ne vois pas le dernier rouage du temps en votre possession, je l’abattrai sur le champ.

- (Grodoudou) Entendu.

- (Noctunoir) On se retrouve donc ici le premier Juin 232, soyez prêts.

- (Grodoudou) Oh, à ce sujet, que diriez-vous de se confronter là-dedans ?

Demanda-t-il poliment, en pointant du doigt la grande trappe métallique entouré de sable et qui menait vers la Zone de Victoire.

- (Noctunoir) Une cave ?

- (Grodoudou) Un terrain privé de la guilde. Vous qui aimez tout détruire, je suis sûr que ça vous fera le plus grand bien.

- (Noctunoir) Où est le piège ?

- (Grodoudou) Il n’y en a pas. C’est juste un moyen pour mes amis de se battre dans de bonnes conditions.

- (Noctunoir) …

- (Grodoudou) Quoi ? Vous n’allez pas refuser par… peur, quand même ?

- (Noctunoir) Moi, peur de vous, insectes ? *rires* Vous êtes sacrément culotés ! Très bien, on se battra où vous le voudrez… si l’on pourra appeler ça une bataille !

Il dégaina un portail et l’ouvrit face à son futur adversaire.

- (Noctunoir) À la revoyure, maître des condamnés !

- (Grodoudou) Ciao !

Sur ces mots, Noctunoir quitta ce monde. Le portail se referma, et Grodoudou soupira. Il relâcha une gigantesque pression, alors que l’agréable son des vagues, illustré par un brillant soleil levant le rassura rapidement. Il avait beaucoup à perdre, il était hors de question d’échouer à nouveau.

L’heure d’après, il avait déjà terminé d’expliquer aux autres la situation.

- (Argouste) Donc vous l’avez fait. Noctunoir a bien accepté de décaler la fin du monde de deux semaines… *tousse* super.

- (Galifeu) Selon Eoko, ta voix et mes jambes seront en parfait état d’ici là. Je suis heureuse de savoir que je vais pouvoir me les dégourdir en le cognant très fort au visage.

- (Ténéfix) Il ne sera pas seul. Vingt-trois Ténéfix seront à ses côtés, et je n’ai plus moyen de les contrôler.

- (Massko) … Monsieur le maître de la guilde d’exploration, puis-je vous poser une question ?

- (Grodoudou) Bien sûr !

- (Massko) Comptez-vous… utiliser Ténéfix comme un moyen de se débarrasser rapidement des sbires de Noctunoir ?

- (Keunotor) Ça marcherait ?

- (Cradopaud) Nan, c’est hors de question qu’on en arrive là ! Maître, je ne sais pas ce que vous prévoyez de faire, mais…

- (Grodoudou) J’ai l’air si méchant que ça ?

Demanda-t-il, en clignotant des yeux.

- (Grodoudou) Non, Ténéfix est essentiel parce qu’elle pourra reprendre le contrôle de ses petits au moment venu, lorsque je débarrasserai Noctunoir de nos rouages du temps.

- (Massko) Hum, je vois.

- (Ténéfix) Vous vous pensez capable de vous mesurer à une telle puissance de frappe ?

- (Carabaffe) C’est vrai que ce salaud est redoutable. Je n’avais jamais vu ça, peut-être que même Pharamp…

- (Grodoudou) Oh, ne dis pas n’importe quoi ! Je connais au moins deux personnes capables de lui flanquer une raclée ! Pharamp et son ancienne élève ! Moi… hum… j’suis pas totalement sûr, mais du coup ça va être marrant de vérifier !

- (Keunotor) M… marrant ?

- (Grodoudou) Ouais, je n’suis sûrement pas à la hauteur, mais… vous êtes-là, vous ! Honnêtement, je n’ai vraiment aucune crainte vis-à-vis de notre victoire. Ayez juste confiance en vos capacités, d’accord ?

- (Héliatronc) Des capacités qu’il connait par cœur ?

- (Grodoudou) Des capacités que vous pouvez tous très facilement améliorer en deux semaines ! Vous avez littéralement un analyste à vos côtés, chercher à comprendre comment le surprendre, et vous surprendrez Noctunoir !

- (Ptyranidur) Quoi !? Vous voulez sa mort !?

- (Reptincel) Je suis prêt quand vous le serez. Je vous entraînerai du mieux que je le pourrai, et promettez-moi de ne pas vous retenir.

- (Ptyranidur) Reptincel…

- (Ramboum) Entendu. Que tout le monde progresse, que tout le monde se surpasse, durant ces quinze prochains jours ! Je ne veux plus de découragements, nous sommes responsables, maintenant ! Ce combat, il ne concerne plus seulement notre égo personnel, celui de la guilde ou de Bourg-Trésor. On parle du monde entier, je veux dire… entier ! Aucun d’entre nous n’a jamais quitté son continent de natalité, si ce n’est pour se rendre à la guilde ! Nous, futurs explorateurs, avons encore beaucoup à découvrir ! Nous sommes jeunes, une grande vie remplie de rêves, d’aventures et de rencontres nous attend ! Alors sa prétendue « fin du monde », on va la lui faire avaler, bordel ! QUI EST AVEC MOI !?

- MOI !!!

- (Ramboum) QUI SE SURPASSERA !?

- MOI !!!

- (Ramboum) QUI SAUVERA PIJAKO !?

- MOI !!!

- (Ramboum) ET QUI SAUVERA LE MONDE !?

- MOI !!!

Presque tous les apprentis hurlèrent en harmonie, tel un orchestre finement entraîné. Là-dessus démarra la dernière ligne droite, les deux dernières semaines avant la confrontation finale. Chaque jour, chacun s’entraîna ardument dans son coin ou en équipe, chaque jour, Reptincel aida quelqu’un à perfectionner ses techniques pour le surprendre. Il l’avait constaté : Noctunoir perdait ses moyens, lorsqu’il improvisait un style qu’il n’avait pu annoter dans son rappelle-tout. Alors il fit en sorte que tous les autres travaillent de cette manière. Ainsi, le groupe gagna une expérience phénoménale en quelques jours, tout cela parce qu’ils se faisaient confiance, tout cela parce qu’ils acceptaient de travailler en équipe malgré leurs différends.

Branette, lui, s’entraîna de son côté seulement. Jamais il n’adressa une quelconque parole au chef de la Dream Team, jamais il ne s’approcha à plus d’une vingtaine de mètres, jamais il ne le regarda à nouveau.

Quelques jours avant la fin, Riolu parvint à reconstruire un téléphone fixe avec des débris d’anciens matériaux. Cela permit à chacun d’appeler un proche, au cas-où un malheur venait à arriver. Lui appela ses parents, Ramboum son père, Héliatronc et Écrapince des amis de Param-les-Vents, Germignon sa famille, Carabaffe Mégapagos, Reptincel Pifeuil, Keunotor sa mère et Cradopaud appela Hélédelle. L’équipe Renaissance resta distante, tout comme Massko qui n’avait pas le courage, malgré tout, de reprendre contact avec ses parents.

Le soir, chacun dormait de son côté. La plupart étaient dans le bar Spinda, les autres profitaient de l’agréable température de cette fin de mois de Mai, pour se reposer au milieu des plus beaux territoires du continent. Carabaffe et Germignon étaient au sommet de la Grotte Littorale, Reptincel et Ptyranidur dans un recoin de la plage du continent, tandis qu’Argouste et Galifeu profitaient du calme des Bois aux Pommes.

Le dernier soir, au coin d’un feux devant la mer, la Dream Team se regroupa une tout dernière fois autour de cette chaleur commune. Reptincel, Pikachu, Germignon, Riolu, Carabaffe et Massko, les six premiers membres de l’équipe, tous se souriant une dernière fois avant l’avènement d’une terrible confrontation. Ils parlèrent de l’avenir, d’un éventuel avenir. Cela permit à Massko de se rendre compte de la nouvelle vision de ses amis sur ce sujet.

- (Germignon) Kaiminus et moi prévoyons de former un groupe. Il s’est installé à Loliloville et démarre un nouveau commerce en m’attendant. J’ai hâte d’y aller, surtout qu’après une telle expérience, ce ne sont pas les grosses têtes de l’école Melœtta qui m’intimideront.

- (Riolu) C’est sûr. En ce qui me concerne, mes parents m’ont affirmé avoir lu dans les journaux que monsieur Chapignon reprenait du service tout en « annonçant l’arrivée d’une future étoile du domaine scientifique ».

- (Pikachu) Sérieux !? Ah ah, trop cool !

- (Massko) Ça y est, tu as déjà réussi ton objectif ultime, ah ah… !

- (Riolu) Mais non, j’veux vraiment changer le domaine, pas juste avoir un nom dedans !

- (Massko) Ça arrivera. Je ne savais pas que Chapignon avait accepté de s’occuper de toi après la guilde, c’est vraiment super. Je me souviens encore de la belle époque, à la bibliothèque de Bourg-Tranquille, quand tu me parlais sans t’arrêter de cet homme qui aujourd’hui tient à toi.

- (Riolu) Merci, ah ah…

- (Pikachu) Hum… moi aussi, j’irai à Loliloville.

- (Massko) Pour devenir explorateur pro, j’imagine.

- (Pikachu) Nan, ça ne m’intéresse pas.

Un léger silence régna.

- (Germignon) Pardon ?

- (Pikachu) Ouais, j’vais plutôt m’orienter vers un métier de soutien et d’aide.

- (Riolu) C’est… une info surprenante ! Quand as-tu changé de mentalité ?

- (Pikachu) Je n’ai pas changé, c’est juste le monde qui est… différent de ce que j’imaginais.

- (Reptincel) C’est vrai, tu m’en avais parlé. La compétition ne t’intéresse pas.

- (Carabaffe) C’est con. Y a que ça, à Loliloville.

- (Pikachu) Surtout dans ce domaine. On va dire que je voyais la vie en rose, je pensais vraiment que… les gens ne cherchaient pas constamment à être les meilleurs tout le temps, partout, dans n’importe quel contexte. Ça m’a éclaté au visage pendant les entraînements, et… ce n’est pas la vision du métier que je partage.

- (Massko) Oh…

- (Pikachu) Mais ce n’est pas grave, ah ah ! J’me vois bien en tant qu’aide-soignant, ou serveur dans un bar. Après tout, c’est l’activité que j’ai préféré faire, cette année.

- (Germignon) On te rendra visite !

- (Pikachu) J’espère ! De toute façon, on reste en contact, pas vrai ?

- (Carabaffe) Bah évidemment ! L’exploration, c’est LE métier du contact ! J’ai besoin d’ça, moi, le seul qui reste droit dans le ch’min !

- (Massko) Ah, donc toi tu restes explorateur !

- (Carabaffe) On devient tous explorateurs. Mais ouais… je serais le seul à m’faire du fric avec mon diplôme. Vivement que j’parte en stage dans les différentes équipes de la ville, je veux voir ce que ça fait d’être entouré de pros.

- (Riolu) Tu ne perdras même pas la cadence, j’en suis sûr.

- (Massko) Ce qui est sûr est que tu vas progresser à une vitesse folle. Je me demande où tu seras, dans dix ans ?

- (Carabaffe) Dans la meilleure équipe du monde.

- (Massko) Voyons.

- (Pikachu) Et toi Reptincel ? Tu t’es décidé ?

- (Reptincel) … Je resterai ici.

- (Massko) Quoi ? Comment ça ?

- (Reptincel) Sur ce continent. J’ai beaucoup de choses à apprendre, beaucoup de problèmes à régler.

- (Germignon) Attends, tu es sérieux, là ? Où vivras-tu ?

- (Reptincel) Dans les bois aux pommes, je pense.

- (Riolu) C’est de la folie ! Seul en territoire sauvage, pendant combien de temps… ?

- (Reptincel) … Au moins trois ans. J’ai… vraiment besoin d’être seul.

- (Massko) …

- (Pikachu) … Trois ans, hein ?

Le type électrique se leva.

- (Pikachu) C’est noté !

Il s’avança et tendit une main à son meilleur ami.

- (Pikachu) Je me doutais que tu prendrais un tel choix. Je comprends et respectes ta décision. Je me chargerai de prévenir m’sieur Pifeuil, vivrai ma vie pendant trois ans puis… je reviendrai te chercher !

- (Reptincel) Vraiment… ?

- (Pikachu) Ouais ! Le jour de tes dix-huit ans, tu quitteras c’continent !

Le type feu lui sourit, se leva à son tour et lui serra la main.

- (Reptincel) Ça me va !

- (Carabaffe) J’hallucine, tu veux vraiment jouer les ermites ? Tu vas avoir du mal à devenir le meilleur comme ça.

- (Reptincel) On verra bien !

- (Carabaffe) Ouais, on verra…

- (Riolu) Et toi, Massko ?

- (Massko) Moi… ?

- (Riolu) Ouais, toi aussi, t’as un avenir !

- (Massko) Oui, la prison…

- (Riolu) Mais non, ça ne durera pas éternellement ! Encore moins si la guilde apporte son témoignage !

- (Germignon) Et puis tu es mineur.

- (Massko) Eh bien… je suppose que je vais pouvoir reprendre une vie normale.

- (Riolu) À Loliloville ?

- (Massko) Non, je ne pense pas.

- (Carabaffe) En tant qu’explorateur ?

- (Massko) Non, encore moins. Déjà… j’irai à Bourg-Tranquille. Ensuite… non, je me vois bien y rester.

- (Reptincel) Vraiment ?

- (Massko) Ouais. Ces aventures m’ont fait beaucoup voyager, et même si c’est ce dont je rêvais à l’époque… je pense que je me sentirai mieux là-bas, à aider tous ceux qui m’ont permis de vivre correctement.

- (Carabaffe) Très bonne idée. Ça leur assurera une sécurité, qui plus est.

- (Germignon) Et puis ça les rassurerait tous grandement, de te revoir en si bon état.

- (Pikachu) C’est vrai. Tu es devenu si grand.

- (Riolu) Si fort.

- (Reptincel) Si mature.

- (Massko) Ça suffit, arrêtez de me flatter !

Tout le monde rigola, tout le monde passa une très bonne dernière soirée.

La nuit fut courte, difficile de s’endormir avec autant de pression. Pourtant, tout le monde se leva en forme le lendemain. Le jour J, le jour de l’ultime confrontation, le 1er Juin 232. Les elfes étaient arrivés plutôt, alors que les mortels terminaient de se préparer. Grodoudou récupéra le dernier rouage, leur dernier brin d’espoir.

Puis, ils engagèrent le chemin vers la Zone de Victoire. Grodoudou, suivit de Créhelf, Créfollet, Créfadet, Eoko, Ténéfix, Ramboum, Keunotor, Héliatronc, Écrapince, Cradopaud, Germignon, Riolu, Massko, Pikachu, Reptincel, Carabaffe, Argouste, Ptyranidur, Rocabot, Galifeu et Branette. Tous étaient là par choix, par conviction. Celle de se venger, de l’empêcher d’atteindre son objectif, de sauver le monde.

À l’instant où le maître de la guilde ferma la trappe, l’événement le plus important de la décennie débuta…

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