Donjon Mystère - Dream Team

Chapitre 43 : "Je vous protègerai."

8431 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 15/09/2021 01:32

      Reptincel termina d’enrouler son dernier bandage autour du bras. Il soupira à nouveau, tournant un regard certes épuisé, mais sincèrement rassuré vers Carabaffe, Massko, Brutalibré et Ténéfix. Ils se reposaient tous dans cette même maisonnette, colorée d’une roche d’un rouge volcanique éblouissant.

Chart entra, une nouvelle caisse de soin sur sa carapace fumante.

- (Chartor) Besoin d’aide ?

Demanda-t-elle en chuchotant d’une douce voix, pour ne pas réveiller les autres. L’autre type feu nia d’un mouvement de tête.

- (Reptincel) Ça ira. Merci encore pour tout ce que vous avez fait.

- (Chartor) Vous n’êtes pas n’importe qui.

Elle posa la caisse à côtés des équipements du groupe, à côté de la roche qu’elle avait confié à Ptyranidur.

- (Chartor) Hélas… je ne sais pas si nous pourrons vous garder longtemps. Le climat s’intensifie, ces derniers temps.

- (Reptincel) C’est-à-dire ?

- (Chartor) C’est… une longue histoire.

L’adolescent descendit de son lit, s’étirant après un léger repos.

- (Reptincel) J’ai tout mon temps.

- (Chartor) … Allons marcher, dans ce cas.

 

L’histoire de la Dream Team – Chapitre 43 : Je vous protègerai

 

Le ciel était d’un bleu scintillant, le soleil aveuglait d’une lueur étincelante. Pieds nus, il suivait Chartor en grimpant des parois rocheuses en sous-vêtements, se confrontant aux roches chaudes du territoire.

- (Reptincel) La sensation est agréable.

- (Chartor) Ce n’est pas rassurant, venant d’un Pokémon qui a une résistance naturelle à la chaleur. C’est dire à quel point la température n’a fait que s’intensifier, durant ces derniers mois. Mon père, le sage du village, commence à rencontrer des difficultés respiratoires à cause de cela.

- (Reptincel) Vous pensez que le Volcan Géant va entrer en éruption ?

Elle s’arrêta, baissant un instant un regard impuissant et comblé de doutes.

- (Chartor) Je n’espère pas. Mais… ce n’est que très peu probable, pas vrai ?

Désespérée, elle se força à lui sourire.

- (Chartor) La dernière catastrophe remonte à l’âge 0, ce serait dingue de vivre dans une époque où… le cycle recommencerait déjà ?

Hélas, Reptincel ne pouvait plus se forcer à lui sourire en retour. Avec tout ce qui était arrivé, et surtout avec tout ce qui allait arriver… il savait qu’une éruption volcanique ne serait pas le dernier de leurs problèmes.

- (Reptincel) Vous devriez déserter maintenant.

- (Chartor) Le débat fait rage, au sein de la communauté.

Ils reprirent la marche sur ces mots.

- (Chartor) Mais qui peut en vouloir à ceux qui se bercent dans le dénis ? Après tout, nous ne vivons pas ici depuis plus d’un siècle pour rien. Ce volcan est bien plus qu’un foyer pour nous.

- (Reptincel) Oui, je comprends que ce soit un choix extrêmement difficile à prendre. En ce qui me concerne, je suis prêt à vous escorter jusqu’à la guilde, qui trouva forcément le moyen de tous vous héberger.

- (Chartor) C’est gentil… tu es bien un ami de Ptyranidur.

- (Reptincel) Si vous saviez… *rires* j’ai si hâte de le revoir.

- (Chartor) Combien de temps avez-vous été séparé ?

- (Reptincel) À vous de me le dire. Quel jour sommes-nous ?

- (Chartor) Le 18 Mai 232.

- (Reptincel) Quoi… ? Mince, je ne pensais pas avoir passé plus de deux mois dans l’autre monde…

- (Chartor) L’autre monde… ?

- (Reptincel) C’est… une longue histoire.

- (Chartor) Oh, mais j’ai tout mon temps !

Rétorqua-t-elle d’un ton ironique, tous deux en rires sincèrement.

- (Chartor) Bref, nous voilà au sommet du territoire.

Les deux types feux s’installèrent au rebord d’une vue sublime, au sommet de la plus grande montagne du continent. Ils pouvaient presque distinguer Bourg-Trésor, pourtant à l’autre bout de ce dernier.

- (Chartor) C’est magnifique, n’est-ce pas ?

- (Reptincel) … Nous avons tant de chance. Ce monde a encore beaucoup à donner, il faut le protéger coûte que coûte.

- (Chartor) C’est pour ça que vous êtes là, explorateurs.

Un léger silence régna, avant que l’adolescent ne le rompe d’un rire nerveux.

- (Chartor) Quoi ?

- (Reptincel) *soupir* Heureusement que je n’en suis pas encore un, dans ce cas. Si j’avais vraiment le pouvoir de le protéger, notre monde ne serait pas menacé d’une destruction soudaine. Tout ne se joue qu’à un fil… et c’est uniquement ma faute.

Il se revoyait ce soir-là, au bar Spinda. Le soir où Noctunoir découvrit son rappelle-tout. Sans cela, jamais il n’aurait vaincu Massko et Carabaffe aussi facilement. Alors bien évidemment, il s’inquiétait pour la guilde.

- (Reptincel) En fait, je suis bien plus responsable de sa potentielle destruction, que de son miraculeux sauvetage, s’il venait à arriver.

- (Chartor) … Je ne sais pas ce qu’il se passe, mais il est certain que tu ne gagneras pas en restant accroché à tes échecs.

- (Reptincel) Moi… accroché à mes échecs ?

- (Chartor) Ça crève les yeux, t’es incapable de faire un pas en avant ! Rester apprentis ne te mènera nulle part, alors tant pis si ça te fait du mal, mais il faut que tu avances, il faut que tu trouves la force de devenir un véritable explorateur !

- (Reptincel) … !

- (Chartor) Je pense que c’est ce qu’ils voudraient que tu fasses. Ceux qui t’ont vu traverser ces échecs, ceux qui pourtant restent à tes côtés. Alors… arrête d’hésiter.

Un autre silence suivit avant qu’il ne soit, cette fois-ci, coupé par un soudain fou-rire de la jeune femme tortue.

- (Chartor) Navrée, ah ah, c’était plus fort que moi !

Son interlocuteur la regarda avec de grands yeux.

- (Chartor) Notre communauté a de sacrées traditions, dont celle de motiver ceux qui radotent l’abandon. C’est un discours paradoxalement assez froid, mais l’objectif est de faire comprendre au concerné… que rien n’est fatal. Comme nous sommes tous de type feu, notre métaphore est : « L’intrépide qui brûle son précédent, naquit délivré d’un tertre sondé par la force de sa dépréciation. ». En d’autres termes, tes flammes ne te servent pas qu’à éloigner tes adversaires.

L’adolescent resta silencieux, l’air de plus en plus pensif, vis-à-vis de cette façon de penser. Chartor lui tapota l’épaule, se releva et rentra au village.

Ce jour-là, en voyant pour la première et dernière fois le continent Sud dans son entièreté, il comprit deux choses importantes. Premièrement, qu’il devait y rester. Deuxièmement, il remarqua enfin, dans ce brouillard si épais, une clé assurément solide, pour ouvrir la porte de la victoire.

Plus tard, le reste du groupe se réveilla. Chacun prit le temps de s’adapter à cette atmosphère si légère, avant que la communauté n’invite tout le monde à déjeuner. Ils en avaient besoin, se retrouvant à surréagir comme Noctunoir à la première bouchée d’une pomme. Le goût était revenu, la couleur était revenue ; l’espoir avait enfin un visage. Hélas, l’inévitable débat sur les problèmes du Volcan Géant ressurgit en même temps que l’angoisse des concernés.

- Non, nous ne pouvons pas partir !

- (Chartor) Vous n’avez aucune idée du nombre de murs de laves qui commencent déjà à nous entourer ! Bientôt, nous n’aurons plus aucune porte de sortie, il faut agir maintenant !

- Mon grand-père fut enterré par mon père, que j’eusse enterré à ses côtés ici, au sein de ce territoire qui est MA maison !

- De même, ces roches volcaniques représentent tant pour notre culture ! Il est hors de question que je me sépare d’elle sous prétexte d’une augmentation de la température !

- (Chartor) Et si ce n’était pas que ça !?

- Alors je disparaitrais avec elle !!

- Pensez aux autres, bon sang ! Ma fille vient de naître, elle a un avenir, elle !

- Dans ce cas partez, personne ne vous retient !

Exclama, enragé, un membre se battant contre le départ de la communauté. Tout le monde le regarda sous le choc.

- Comment… peux-tu dire une horreur pareille ? Toi qui es pour le respect de nos coutumes, tu oses mentionner une dissolution de la communauté !? As-tu oublié la raison pour laquelle nous encaissons avec horreur, encore aujourd’hui, les heures les plus sombres de notre histoire !?

- Je n’ai pas oublié, non ! Le fait est que vous êtes déjà hérétiques, à mes yeux ! Je me fiche de savoir ce qui vous arrivera hors des barrières que représente cette montagne et qui nous ont assurément protégé depuis plus de quatre-vingts ans, car le quitter n’est pas envisageable, pas même sous la menace d’une éruption volcanique !!

- (Chartor) Espèce d’enfoiré !

Cria-t-elle en se levant de sa chaise.

- Ça suffit…

Mais son père, le sage du village, intervint juste avant que les choses ne dégénèrent. Il paraissait affreusement affaibli, constamment essoufflé et devant même s’aider de bâtons pour correctement se redresser.

- Notre peuple a effectivement trouvé refuge au Volcan Géant… *souffle* Il s’est battu de nombreuses décennies pour cela, alors même que la civilité ne cherchait qu’une chose : planter la tête de ses membres… *souffle* nos parents, sur des fourches pour en faire des trophées de chasse.

- Voilà pourquoi je suis contre leur présence !

Clama un membre, en pointant d’une patte les trois adolescents, Brutalibré et Ténéfix. Mais le sage le reprit immédiatement.

- Ils sont de la guilde.

- Et alors !?

- (Chartor) Et alors leur maître nous protège de toute menace extérieure depuis des années, ducon !

- Chart, du calme. *souffle* Ce que je veux dire est que notre histoire est comblée de confrontations, de trahisons, d’une confiance qui, chaque jour, devenait de plus en plus compliquée avec le reste du monde. Notre ennemi est la civilité, pas la nature.

- Donc… vous voulez qu’on parte, vous aussi… ?

Il hocha douloureusement la tête.

- C’est ce qu’ils auraient voulu.

- N… non, c’est faux !

Exclama tout de suite un adversaire. Un autre, en revanche, resta pensif quelques instants, avant de marmonner dans le doute.

- L’est-ce réellement… ? Je veux dire… migrer vers un autre territoire, c’est ce qui aura conçu l’essence même de notre survie. Nous sommes installés depuis des décennies, mais tant que nous sommes munit de cette carapace fumante…

- … Le paradis n’existera pas.

Termina quelqu’un d’autre, récitant un dicton transmit de génération en génération.

- Ils l’avaient compris. *souffle* Jamais nous n’aurons le refuge parfait, le destin nous confrontera toujours à ce problème. À l’époque, nous menacions notre espèce à chaque expédition. Aujourd’hui… *souffle*

Sur ces mots, le sage se tourna vers les membres de la guilde, le sourire aux lèvres.

- Nous ne sommes plus seuls.

Le débat se termina ainsi. Pas tout le monde fut convaincu, tandis que d’autres avaient simplement besoin d’un peu de temps. Les adolescents avaient su rester silencieux, ne voulant pas intervenir dans un débat qui ne les concernaient inévitablement pas.

L’heure d’après, Massko regarda seul l’horizon, un objet futuriste en main. Ses quatre autres coéquipiers le rejoignirent tranquillement, lui laissant le temps de ranger tendrement l’artefact dans la poche.

- (Brutalibré) Tu voulais nous voir, Massko ?

- (Massko) Parce que vous non ? Je pense que nous nous sommes assez reposés.

- (Carabaffe) Ah ouais, carrément ? Tu t’es vu, ou t’es juste très pressé ?

Effectivement, le type plante aussi était couvert de bandages. Bref, tout le monde s’installa à ses côtés, prêts à débriefer les récents événements. Ténéfix resta plutôt silencieuse, se faisant discrète au milieu de tous ces garçons devenus amis par la force des choses.

- (Brutalibré) Honnêtement, je pensais être mort, en rouvrant les yeux. Je vous ai abandonné sitôt, je suis vraiment désolé.

- (Carabaffe) Je n’ai pas été plus utile, mais il n’y a rien à regretter. Nous n’aurions jamais pu être mieux préparés, face à lui.

- (Brutalibré) Oui, je suppose que tu as raison. Avec les rouages, il paraissait invincible.

- (Massko) Il… n’utilisait pas les rouages. Pas encore.

- (Brutalibré) Quoi… ?

- (Reptincel) Voilà pourquoi notre survie est un miracle. Je pense qu’il aurait pu nous vaincre sans, il a juste voulu nous montrer un aperçu de ses véritables pouvoirs… pour nous décourager, je suppose ?

- (Massko) C’est discutable, tu lui as quand même bien cassé la gueule.

- (Carabaffe) Hum… pas faux.

- (Brutalibré) C’est vrai !?

- (Massko) Il a usé de tout ce que tu lui as appris, ce fut épatant.

- (Brutalibré) Wow ! Félicitation, p’tit gars !

- (Reptincel) Ah ah, ce n’était pas grand-chose…

Marmonna-t-il timidement, en se grattant l’arrière du crâne.

- (Massko) … Et… du coup ? Comment avons-nous survécu ?

- (Reptincel) Je… euh… je n’ai pas la mémoire fraiche sur ce qui est exactement arrivé…

- (Ténéfix) Celebi.

Commenta sèchement la type spectre. Massko écarquilla les yeux.

- (Massko) P… pardon… ?

- (Ténéfix) Son nom est Celebi, elle nous sauva tous d’une défaite pourtant assurée.

- (Brutalibré) Attends, tu veux dire qu’un autre Pokémon était là depuis le début ? Surprendre Noctunoir n’est pas donné ; comment a-t-elle rusé ?

- (Ténéfix) Elle n’a pas rusé. Sa puissance seule suffisait à le confronter, même en possession des rouages du temps.

- (Carabaffe) Hein… ? Mais putain, d’où elle sort, cette Celebi !?

- (Reptincel) Massko… ?

Les regards se tournèrent vers le concerné, qui peinait à cacher son angoisse.

- (Reptincel) Ça va aller ?

- (Massko) Oui…

Le silence domina quelques instants.

- (Carabaffe) Euh… t’es gênant, mec.

- (Reptincel) Est-ce que c’est ce nom, qui te perturbes ? Celui de Celebi ?

- (Massko) Arrête de le prononcer… !

- (Reptincel) Oh… d’accord, désolé. C’est juste que… j’ai l’impression de l’avoir appris de toi.

- (Massko) Non, et mieux vaut pour vous d’arrêter d’en parler !

Sur ces mots, il se releva et quitta le groupe. Les autres s’échangèrent un regard perplexe, avant de simplement hausser les épaules.

- (Brutalibré) Euh… d’accord ? C’est lui qui voulait en parler, à la base…

- (Carabaffe) Laissons-le tranquille. Si elle importait dans la balance, il nous le dirait.

- (Brutalibré) Nous sommes en vie grâce à elle, évidemment qu’elle importe ! Mais bon, supposons qu’elle ne rentre plus dans l’équation de notre victoire. Qu’est-ce qu’on fait, maintenant ?

- (Carabaffe) On rentre à Bourg-Trésor. Ensuite, on vous enferme.

Clama-t-il en fusillant du regard Ténéfix et Brutalibré.

- (Brutalibré) Ah, oui… c’est vrai.

- (Reptincel) Vous serez exportez rapidement, suffisamment pour ne pas que vous ayez à confronter Noctunoir une nouvelle fois.

- (Ténéfix) Attendez… ! Moi, je veux vous aider à l’arrêter.

- (Brutalibré) Ouais, moi aussi ! Vous ne diriez pas non à quelques bras de plus ?

- (Carabaffe) Personne ne voudra travailler avec des ordures comme vous.

Reptincel tourna un regard ennuyé vers son rival, avant de recentrer le tire.

- (Reptincel) Disons que… ce n’est pas à nous d’en décider. On vous livrera à la guilde qui, elle, fera son choix.

- (Brutalibré) Hum…

- (Ténéfix) D’accord, je comprends.

- (Brutalibré) Bon… quand partirons-nous ?

- (Reptincel) Dès que ta cheville sera en état.

- (Brutalibré) Elle l’est.

- (Carabaffe) Tu titubes, espèce de con.

- (Brutalibré) … Elle le sera demain.

- (Reptincel) Dans ce cas, nous partirons demain. Prenez le temps de vous reposer, d’accord ?

Tout le monde lui hocha la tête, puis le groupe se dispersa. Ténéfix resta seule au bord du sommet de la montagne, silencieuse, pensive, démunit face à l’adversité. La voyant rester, Reptincel fit demi-tour et vint l’aborder.

- (Reptincel) Vous n’allez pas sauter, j’espère… ?

- (Ténéfix) Quoi… ?

- (Reptincel) Euh… pardon. C’est juste que je m’inquiète un peu, depuis la demande que vous nous avez fait au palais.

- (Ténéfix) C’est vrai ? Ah ah… tu n’es pas totalement à côté de la plaque. Qu’ai-je fait de bien, depuis que vous aviez l’occasion de m’achever ? À part observer impuissante votre affrontement vain, je…

- (Reptincel) Vous ne nous avez pas trahis.

Perplexe, elle lui afficha une expression incertaine.

- (Reptincel) Vous avez essayé de retourner vos enfants contre Noctunoir.

- (Ténéfix) …

- (Reptincel) Vous m’avez aidé à transporter les autres dans le portail.

- (Ténéfix) Pourquoi cherches-tu à me sauver ?

- (Reptincel) Parce que c’est ce qu’il aurait fait. Celui que j’admire, le plus grand de tous les explorateurs.

- (Ténéfix) Un modèle d’inspiration ? Je vois… j’en avais un également.

L’adolescent s’avança jusqu’à son niveau, admirant l’horizon à ses côtés.

- (Ténéfix) Mais même eux peuvent être affectés par la folie.

- (Reptincel) Êtes-vous certaine qu’il fut réellement… un autre homme ?

- (Ténéfix) Absolument. À mes yeux, tout brillait chez lui. C’est ironique, il effrayait la veuve et l’orphelin. Pourtant, son cœur en or finissait toujours par surpasser son physique aux couleurs ternes. D’aussi grands pouvoirs servis au nom d’une cause si juste, il rendait le monde parfait. C’est pour ça que le gouvernement nous a contacté, c’est pour ça qu’il fut corrompu…

- (Reptincel) Ils lui ont fait quelque chose ?

- (Ténéfix) Simplement ouverts les yeux. Son seul défaut fut sa légère grosse tête, même si cela nous permettait de prendre l’avantage psychologique sur les hors-la-loi que nous arrêtions. Après, c’était normal. Il était vraiment le plus fort, tout le monde dans le domaine avait fini par le respecter et plus personne n’osait remettre en question son titre. Il était seul au sommet, si heureux de l’être qu’il se mit à croire au destin.

Lentement, son ton passa de l’admiration au dégoût.

- (Ténéfix) Alors quand il apprit l’existence du Multivers, pire, des rouages du temps… ce fut le début de la fin. J’ai longtemps vécu dans le dénis, me persuadant qu’il fut manipulé, torturé ou qu’au contraire, qu’il faisait semblant de radicalement changer pour confronter le gouvernement. Le fait est qu’il fut simplement… lui-même. Son objectif de régner seul au sommet, sa soif de pouvoir, son type surpuissant et capable de puiser la force des rouages, son privilège d’explorer en premier le Multivers ; tout le menait vers cette voie, vers ce… foutu destin ! Et je n’ai rien fait, encore une fois, je n’étais que spectatrice de ce désastre !

- (Reptincel) Je suis désolé, la désillusion a dû être atroce.

- (Ténéfix) C’est du passé. Peu importe, désormais, tout comme ce qui va suivre, en réalité. Peu importe, si votre maître ne me laisse pas le confronter. Laissez-moi au moins vous faire promettre quelque-chose. Faites-lui bouffer ses putains d’ambitions, faites-lui payer toutes ses horreurs !

- (Reptincel) Ça me motivera assurément. Je ferai de mon mieux.

- (Ténéfix) Merci, petit.

Elle se retourna et commença à partir, avant de s’arrêter en mi-chemin.

- (Ténéfix) Ah, et… merci aussi pour tout le reste. Passer le reste de mes jours derrière des barreaux ne me dérange pas, plus après tout ce que j’ai vécu dans l’autre monde.

- (Reptincel) Je ne pense pas que vous serez condamnée à vie.

- (Ténéfix) … Vraiment ?

- (Reptincel) On verra bien, mais la guilde apportera forcément son témoignage sur l’affaire. Dans tous les cas, je suis certain que ne pas vous achever était le bon choix.

Elle en rigola, se souvenant encore de son intonation désespérée, alors qu’elle était enchaînée dans les cachots du palais. Puis, elle partit rejoindre les autres, et le type feu soupira. Il avait su trouver les bons mots, mais ce n’était pas encore terminé. Une partie du groupe restait encore à ressouder.

Alors que le soleil se couchait, la communauté Chartor profitait une dernière fois de leurs bains chauffés naturellement. Pour Carabaffe et Brutalibré, c’était brûlant. Ténéfix aida à la récolte, voulant se rendre utile aux yeux de ceux qui l’avaient accueilli malgré leurs problèmes. Ensuite, le diner survint, et personne ne mentionna le débat de midi. Ceux qui ne voulaient pas partir grognaient dans leur coin, les hésitants semblaient avoir choisis leur camp.

La lune se leva, tandis que le reste du territoire se coucha. Reptincel partageait la même chambre que Massko, et ne l’ayant pas vu au diner, il lui apporta de quoi se remplir la panse. De son côté, le type plante était sur son lit, allongé en caleçon sur une couverture définitivement contreproductive, au vu de la température moyenne qui ne chutait pas. Il continuait de fixer du regard le même objet futuriste, et ne trouva pas même la force de le cacher à l’arrivée du type feu.

- (Reptincel) Salut.

- (Massko) … Salut…

- (Reptincel) Est-ce que ça va mieux… ? Je t’ai apporté deux trois trucs.

Il déposa le plateau sur sa table de chevet, et sentant son ventre gargouiller, Massko se redressa par sensation de faim.

- (Massko) … Merci.

- (Reptincel) Pourquoi tu n’es pas venu manger ?

Il ne répondit pas, déposant son objet pour prendre le plateau avec lui. Reptincel posa son regard dessus, ce fut une sorte de téléphone fixe, mais portable. Il était entièrement métallique, avait une grande antenne en son bout et ne possédait qu’une ampoule éteinte, avec en son centre une boussole.

- (Reptincel) Tu as encore volé quelque chose à Noctunoir ?

- (Massko) Non… *mange* je l’avais déjà.

Il l’arracha presque des mains, le rangeant dans son sac avant de fermement tirer la fermeture éclair.

- (Massko) Ça n’a aucune importance… *mange*

- (Reptincel) …

- (Massko) … Quoi ?

- (Reptincel) Ça n’a vraiment pas l’air d’aller.

- (Massko) Bien vu. Ça ne va pas du tout, Reptincel, ça ne peut pas bien aller !

L’engueula-t-il brusquement.

- (Reptincel) C’est quoi, ton problème ? Toi qui faisais tant d’efforts pour te racheter, qu’est-ce qui te prends… ?

- (Massko) Je ne veux pas en parler !

- (Reptincel) … Qu’est-ce que Celebi t’a fait ?

- (Massko) Arrête !!

- (Reptincel) Pourquoi !?

- (Massko) Parce qu’elle n’est pas notre amie !!

- (Reptincel) Elle nous a sauvé la vie ! Tu ne l’as pas vu à l’action, elle est capable de maîtriser un Noctunoir usant du pouvoir de quatre rouages du temps ! Si elle était à nos côtés, la victoire nous serait assurée !

- (Massko) N’espère même pas compter sur elle ! Elle n’est pas digne de confiance !!

- (Reptincel) Sans elle, nous serions tous morts !

- (Massko) SANS ELLE, CE PUTAIN DE CAUCHEMAR N’AURAIT JAMAIS EXISTÉ !!!

Hurla-t-il de toutes ses forces, avant de s’écrouler de fatigue. Il se rattrapa en tremblotant, essoufflé par l’adrénaline l’ayant pour la première fois depuis très longtemps entièrement possédée. Il céda presque à une nouvelle pulsion, et ayant vu ce visage crispé de rage, Reptincel resta bouche bée quelques instants.

Seuls les respirations entrecoupées du type plante animèrent la scène, avant que le type feu ne se décide à faire le premier pas. Il s’avança, s’abaissa et posa une main sur son dos.

- (Reptincel) Massko…

- (Massko) *souffle* Je… *snif* je suis désolé… *souffle*

Il posa son museau à terre, se mettant à pleurer à chaudes larmes.

- (Reptincel) Tu sais quoi ? Ce n’est pas grave. Je n’ai pas besoin de savoir ce qui est arrivé, je te fais confiance.

- (Massko) … *snif*

- (Reptincel) Nous n’avons pas besoin d’elle, pour arrêter Noctunoir. On y parviendra ensemble, d’accord ?

Il le porta, le déposa dans son lit puis lui redonna son plateau de nourriture, avant de se tourner vers le sien et de se préparer à y entrer. Les minutes passèrent, Massko termina de manger et le déposa à terre, essuyant ses dernières larmes tout en remettant en question son comportement.

- (Massko) … Reptincel ?

Marmonna-t-il, avant de se redresser pour se rendre compte qu’il dormait déjà. Tant pis, il se recoucha et fixa longuement son sac. Il finit par l’ouvrir une dernière fois, ressortant l’artefact métallique qu’il aimait tant fixer. Mais l’ampoule ne s’allumant toujours pas, il rangea définitivement l’objet au fin fond du reste, se retourna et s’assoupit du mieux qu’il put.

Les lueurs du soleil le réveillèrent, cela n’était pas arrivé depuis des mois. Massko rouvrit les yeux en premier, il laissa donc son ami se reposer, se rhabilla et quitta la maisonnette sans faire de bruits.

Sur le chemin vers le centre du village, il croisa celui de Chart, visiblement pressée et inquiète.

- (Massko) Un problème ?

- (Chartor) Hein ? Oh, salut, et ouais… *souffle* Nos murs commencent à faiblir !

- (Massko) Quoi… ?

Il la vit foncer vers le sud, loin du village mais tout de même dans le territoire. En se tournant vers les autres maisonnettes, il comprit que les habitants couraient dans tous les sens, se préparant du mieux qu’ils le purent à un soudain problème. Alors dans un brin de préoccupation pour autrui, il resserra son équipement et partit rejoindre Chartor.

Cette dernière arriva, essoufflée, vers son père et deux autres membres. Tous tremblaient face au mur de moins en moins solide qui leur faisait face, alors qu’elle écria :

- (Chartor) Nous n’avons plus rien !!

- Bon sang… ! La lave s’est tant répandue jusqu’à nous, que nos roches si protectrices se sont affaiblies au point de perdre en solidité ! Nous n’avons plus le choix, il faut déserter le territoire maintenant !

- Non, certainement pas ! Tant pis, on détruit et reconstruit cette partie-là !

- Enfin, vous voyez bien que le Volcan Géant ne peut plus nous protéger !!

- Bordel, mais arrêtez de toujours tourner la situation à votre avantage !

- Ça… *souffle* suffit !!

Cria avec difficulté le sage, interrompant les deux opposés à l’éternel débat de la communauté.

- Notre priorité est… *souffle* de protéger le reste des habitants de celui qui cherche à nous atteindre !

*BOUM*

Le mur se fit cogner une nouvelle fois depuis l’autre côté, Massko en sentit les tremblements à une dizaines de mètres.

- (Massko) Quel genre de menace peut cacher la zone ?

- (Chartor) Massko ? Pourquoi es-tu venu, vas aider les autres à fuir !

- (Massko) Réponds-moi !!

- (Chartor) Euh… tout un tas de Pokémon feu ou sol, mais là…

*BOUM*

- (Chartor) Il parait immense… !

Finalement, les premières roches cédèrent.

- (Massko) RECULEZ-TOUS !!!

Hurla-t-il beaucoup trop tard. Les roches en cognèrent d’autres, qui engendrèrent elles-mêmes un éboulement de plus en plus important. Chartor et Massko parvinrent à sauver les deux villageois car ils étaient les plus proches, mais le sage du village…

- (Chartor) Papa !!

Se fit brutalement ensevelir sous tous ces débris.

- (Chartor) NON !!!

Un violent nuage de fumée se déversa sur le groupe, alors que le tremblement de terre provoqué par le puissant choc rocheux averti tout le village du danger imminent auxquels ils furent désormais confrontés.

Reptincel se réveilla en sursaut, tout d’abord perturbé sans le savoir par le boucan. Puis, c’est un petit son strident qui lui titilla l’audition. En se levant, il comprit qu’il venait du sac de Massko.

- (Reptincel) Massko… ?

Le silence régna, avant qu’il ne fouille rapidement dans ses affaires. L’objet était au fond, étouffé par tout un tas d’autres engins et vêtements. Alors en le sortant, le bruit s’accentua à en devenir insupportable. Il s’agissait de la plaque métallique avec en son centre une ampoule et une boussole, le même objet que le type plante avait décrit d’inutile, le soir dernier. Pourtant, cette fois-ci, l’ampoule ne cessait de briller.

Au même moment, la fumée se dissipa. Tous les regards se tournèrent vers l’auteur de tout ce désastre, un gigantesque Pokémon sauvage à la fourrure rouge. Ses narines laissaient échapper de la fumée, son regard froncé le montrait enragé. Quadrupède, il possédait quatre pattes très musclées, tandis que son dos était comblé de deux petits volcans rocheux.

Tout le monde devait lever la tête pour le regarder droit dans les yeux, il devait peser plus d’une tonne.

- (Massko) Bordel… !

- C’est… c’est un Camérupt !

- Nous sommes tous fichus !! Il va écraser notre village, il va nous faire fondre, il va TOUT réduire en cendre en un rien de temps !!

- (Chartor) … Barrez-vous.

- Quoi… ?

- (Chartor) HORS D’ICI !!!

Perdu dans l’angoisse, ils l’écoutèrent aveuglément et fuirent le plus vite possible au village. Le terrain était grand, avant qu’ils n’y parviennent, mais cela voulait également dire que le sauvage n’y était pas encore.

- (Chartor) Tu devrais partir aussi, Massko. Ton type n’est pas adapté à la situation.

- (Massko) Je m’en moque.

Ce dernier créa une lame feuille et se mit en garde.

- (Massko) Je ne fuirai plus !

- (Chartor) … Très bien !

La protectrice de la communauté contracta férocement, lorsqu’une redoutable aura de flammes l’entoura. Elle attira l’attention du sauvage, le regard froncé, l’air déterminé.

- (Chartor) Tu vas me l’payer, fils de pute !

Son adversaire s’énerva et tenta de la réduire en cendre, d’un soudain et surpuissant cracha enflammer. Une grande partie du terrain explosa, Massko s’écarta en bondissant le plus loin possible, recevant tout de même quelques brûlures aux jambes.

Tout brûlait, tout fondait lamentablement, immédiatement dominé par l’envahisseur fou de rage. Tout sauf une carapace rouge, qui se propulsa à une vitesse pharamineuse droit sur lui. Elle s’éjecta des flammes tout en s’en entourant, puis le cogna brutalement dans la mâchoire avant ratterrir à ses pieds. Chartor se déploya, la bouche prête à recracher une attaque Lance-Flamme qu’elle n’hésita pas un seul instant à jeter droit sur ses gigantesques pattes. Ces dernières s’égratignèrent malgré leur résistance naturelle. Camérupt sentit la douleur passer et tenta de la gober d’un coup. Il commença à baisser la tête et ouvrir la gueule, lorsque Massko arriva depuis les airs, atterrissant à son tour tout en infligeant une puissante droite en pleine joue pour dévier les crocs.

Le sauvage s’écria de rage, tentant de les dégager d’un coup de patte qu’il déplaça douloureusement. Mais le type plante brandit sa lame et coupa une partie de sa fourrure pour l’apeurer, ce qui fonctionna jusqu’au point de l’éloigner de quelques pas.

- (Chartor) Il recule, on continue !!

Ils essayèrent à nouveau de l’effrayer, mais n’ayant jamais travaillés en équipe ensemble, les deux se bousculèrent malencontreusement en voulant esquiver l’une de ses charges. Cela fit que tous deux se firent envoyer valser sur les décombres sous lesquels le sage du village était encore enfermé, et Camérupt en profita : il se concentra pour charger une puissante attaque.

- (Massko) C’est… pas grave, vite, debout !

Il bondit rapidement hors de son champ de tir, avant de remarquer que Chartor préférait écarter les débris qui l’entourait.

- (Massko) Qu’est-ce que tu fais !?

- (Chartor) Mon père ! Il est encore en-dessous !!

- (Massko) Quoi !? Peu importe, TU LE SAUVERAS APRÈS !!

Trop tard, Camérupt élança sa capacité. Ce n’était pas une attaque de type feu, comme ils pouvaient s’y attendre. Non, le sauvage partageait également le type sol. Et le sol… était super efficace sur le feu.

Le sol se mit à trembler, craquela puis explosa violemment sous la puissance de l’attaque Séisme, qui ravagea tout le terrain jusqu’à atteindre le village. Ténéfix, Brutalibré, Reptincel et Carabaffe sauvèrent les enfants, mais ne purent empêcher quelques adultes de se prendre la capacité de plein fouet. D’autres l’esquivèrent par chance, d’autres encore car ils étaient suffisamment éloignés. Mais tous constatèrent l’horreur des dégâts : le village se faisait ravager.

Chartor se fit à nouveau envoyer valser. Ses pattes étaient empalées par pleins de petits débris rocheux et, alors que son sang se déversait lentement sur le sol, elle regarda d’un air horrifié le corps enfin visible, mais en terrible état de son père.

Essoufflé, le Camérupt se mit à sourire. Il se sentait défoulé, prêt à faire cramer son nouveau tas de nourritures. C’était sans compter sur Massko, qui l’avait contourné pour atterrir rapidement sur son dos. D’un geste excessif, il tourna sur lui-même en tranchant tout ce que sa lame toucha, c’est-à-dire les deux minuscules volcans qu’il avait sur le dos. Le sauvage hurla de rage, et le type plante lui agrippa la crinière.

- (Massko) Maintenant, tu vas t’casser d’ici ! Sinon, c’est ta putain de tête que je tranche !!

Auparavant, il l’aurait achevé sans ne donner aucun coup de semonce. Aujourd’hui, il était hors de question qu’il le fasse sans prévenir. Hélas, son adversaire ne se laissa pas faire, et soudainement, des deux trous que Massko avait créé s’en éjecta de la lave. Surpris, il fut forcé à descendre de son corps pour l’esquiver, lui laissant à nouveau un avantage certain. Et il en profita. Tout d’abord, Camérupt l’éloigna d’un coup de boule esquivé en bondissant en arrière. Puis, il frappa violemment le sol pour créer une onde de choc qui se propulsa droit sur Massko, que ce dernier esquiva également, mais beaucoup plus difficilement. Enfin, alors qu’il peinait à se redresser rapidement, le type feu lui cracha sa meilleure boule de feu. Elle allait le frapper de plein fouet, il en ferma les yeux de peur, ne sachant pas si il allait y survivre… avant qu’elle n’explose brutalement avant impact.

L’attaqué comme l’attaquant se prirent tous deux la brouillardeuse fumée de l’explosion. Personne ne savait ce qui était arrivé, mais Massko pensait avoir vu quelque chose tomber du ciel pour intercepter l’attaque.

- Hey, espèce d’ordure !

Exclama une voie qu’il ne connaissait que trop bien. Le sauvage leva son regard, ébloui par un soleil ne montrant que la figure, couverte de différents vêtements déchirés, qui lui faisait face. Son écharpe rouge volait au vent, une partie de ses vêtements étaient parfaitement à sa taille, les autres légèrement trop grands. Tous étaient égratignés, sales, usés. Mais le Pokémon qui les portait, lui, était plus déterminé que jamais.

- Qui crois-tu impressionner ?

Clama-t-il froidement, en le dévisageant de haut. Son adversaire s’en énerva une nouvelle fois, se préparant à provoquer un éboulement grâce à une nouvelle attaque Séisme. Mais soudainement, Carabaffe se propulsa à toute vitesse à côté de lui, aspergeant tout son corps d’une redoutable attaque Ébullition. Le type eau lui était fatal, et la douleur ressentit par Camérupt fut indescriptible. Alors que Reptincel commença à stopper l’hémorragie de Chartor, son rival se contenta simplement de tendre un pied.

- (Carabaffe) Mais putain… !

Il s’élança et se propulsa une dernière fois avec ses jets d’eaux, frappant extrêmement violemment, comme à son habitude, en plein ventre adverse. Il s’envola et l’envola presque, valsant sur plusieurs mètres avant de s’écraser puissamment à terre, l’explosant à l’impact tout en assommant la victime de cet enchaînement.

- (Carabaffe) … DÉGAGE !!!

Le silence régna suite à cela. La victoire revenait aux apprentis, mais à quel prix ?

- (Chartor) Papa… !!

- (Reptincel) A… attends, tu n’es pas… !

Elle le bouscula et fonça rejoindre le tas de débris, là où son père ne bougeait plus depuis bien trop de temps maintenant.

- (Chartor) Papa ! PAPA, JE T’EN SUPPLIE, RÉPONDS-MOI !!!

Carabaffe releva Massko silencieusement, Reptincel s’avança bouche bée. Tous les regards étaient fixés sur le corps du sage… du défunt sage du village. La vieillesse l’empêchait déjà de vivre correctement dans ce territoire, alors l’essoufflement causé par les débris ainsi que la brutale et superbe efficace attaque Séisme… l’acheva définitivement. Chartor pleura, elle pleura de toutes ses forces, reposant une dernière fois le museau sur la carapace brisée et ne dégageant désormais plus de fumée de son père.

Le silence régna longuement, un silence animé uniquement par les gémissements de la nouvelle cheffe du village.

Massko peinait à relever le regard, ses poings tremblaient de rage.

- (Massko) … (Qui suis-je, exactement… ? L’adversaire de Noctunoir, ou celui d’un pauvre sauvage affamé ? Je n’ai même pas été capable de le protéger, tout cela parce que…)

 

- (Massko) Qu’est-ce que tu fais !?

- (Chartor) Mon père ! Il est encore en-dessous !!

- (Massko) Quoi !? Peu importe, TU LE SAUVERAS APRÈS !!

 

- (Massko) … (Tout ça parce que je ne pense qu’à ma putain de personne !)

Finalement, Chartor se redressa difficilement.

- (Chartor) Je dois… *snif* aller informer la communauté. Rejoignez-moi dès que vous en aurez terminé.

- (Reptincel) Terminé ? De quoi parles-tu ?

Elle quitta la scène sans prononcer le moindre mot de plus, séchant de plus en plus rudement ses larmes avec ses flammes. Le chef de la Dream Team la regarda s’éloigner, inquiet et navré pour elle. Puis, il entendit quelqu’un descendre le mur rocheux derrière lui, se rendant compte qu’un autre Pokémon était là.

- Je suis désolé, j’aurai dû intervenir plutôt.

- (Massko) Non… c’est ma faute. Toi, tu m’as sauvé la vie… encore une fois.

- (Carabaffe) Hein… ?

- (Reptincel) … (Cette voix ?)

Les deux rivaux se tournèrent lentement vers le concerné, vers ce Pokémon si calme, à l’aura si différente de la dernière fois. Cela remontait à plus de trois mois, à une période où le pauvre personnage était tiraillé entre son devoir de futur explorateur, et son ambition personnelle, celle de retrouver coûte que coûte celui que tout le monde croyait mort, celui qui s’est avéré être Massko. Oui, il s’agissait bel et bien de Riolu.

Carabaffe et Reptincel écarquillèrent lentement les yeux, décrochant à chaque seconde toujours un peu plus la mâchoire. Il était là, crade mais droit, à l’accoutrement malpropre, mais plus grand, plus musclé, plus serein… bref, grandi.

- (Reptincel) R… Riolu… !

- (Riolu) Bonjour… Salamèche. Enfin… tu es scientifiquement devenu un Reptincel, mais je…

Le type feu lui bondit dessus, et avant même qu’il ne finisse une longue tirade d’un air gênée, il se retrouva câliné chaleureusement par son chef d’équipe en larme. Carabaffe s’approcha, attendit quelques instants, puis bouscula son rival trop encombrant… avant d’en faire de même, d’enlacer pour la première fois un ami.

Riolu ne pleurait pas, mais il commençait à avoir du mal à cacher sa peine. Il l’avait bien constaté, tous avaient énormément changés ; et, en aussi peu de temps, ça n’était pas bon signe.

- (Riolu) Que vous est-il arrivé, bon sang… ?

- (Reptincel) Et toi, alors !? Où étais-tu, pendant tout ce temps ?

- (Riolu) Aux côtés de Massko.

- (Reptincel) Quoi… ? Je croyais que tu l’avais libéré !

- (Massko) Je l’ai fait.

- (Riolu) Ce fut ma décision, Salamèche. Mon unique décision.

- (Massko) Oui, en fait… j’étais relativement contre.

- (Carabaffe) Riolu, je…

Tremblant de honte, le type eau s’inclina en déviant le regard.

- (Carabaffe) Je suis désolé, bordel de merde ! Je ne suis pas le plus fort, je l’ai bien compris, mais… j’aurai dû l’être suffisamment pour te sauver il y a bien longtemps !!

- (Riolu) Carabaffe…

- (Reptincel) Navré pour ma misérable performance de chef. Je n’ai pas été capable de te comprendre assez vite, j’aurai dû m’intéresser à tes problèmes bien plus vite, je suis vraiment, vraiment désolé… !

- (Riolu) Non, tu n’as pas à l’être, tout comme aucun d’entre vous n’a à présenter une quelconque excuse à qui que ce soit. En revanche, je ne pense pas prendre trop de risques en disant que je fus une sacrée merde, depuis ta disparition.

Mentionna-t-il calmement, en visant finalement Massko.

- (Riolu) J’ai eu un comportement inapproprié, et j’en suis désolé.

Il commença à s’avancer vers le corps du sage de la communauté Chartor.

- (Riolu) Si le diable m’avait tendu une main pour m’aider à te retrouver, je l’aurais attrapé sans hésitation. Ma morale n’avait plus aucune limite, j’étais devenu dangereux.

- (Reptincel) Tu avais tes raisons de nous en vouloir…

- (Massko) Riolu n’est pas supposé être rancunier.

- (Carabaffe) Quand t’en es-tu rendu compte ?

- (Riolu) … Quand ce que je voulais plus que tout m’a kidnappé. Enfin… quand je me suis rendu compte que c’était lui.

Arrivant à ses côtés, il s’abaissa et vérifia ses points vitaux. Mais il n’y avait plus rien à faire, le sage s’en était bien allé. L’adolescent soupira, après tout, ce fut la première fois qu’il fut confronté à un cadavre.

- (Riolu) *soupire* Rapportons-le aux côtés des siens.

- (Reptincel) A… attends, j’ai encore tellement de questions… !

- (Riolu) Tu as tout ton temps, Salamèche, je ne disparaîtrai plus.

Le type feu essuya ses larmes, avant de simplement lui hocher la tête.

- (Reptincel) Bien… et appelle-moi Reptincel !

- (Riolu) Entendu, Reptincel.

Ils repartirent donc vers le village de la communauté, sans oublier d’emporter avec eux le corps de celui qui les guida pendant longtemps. En arrivant, Massko constata l’horreur des dégâts : tout n’était que débris et désolation. Cependant, tous les autres habitants étaient en vie, plus ou moins blessés, mais en vie. Tous étaient regroupés face à la fille du défunt, se tenant droite malgré tout, et s’exclamant d’une vive voix rude, mais nécessaire.

- (Chartor) Voilà la décision que je prends, en tant que nouvelle cheffe du village !

- Je comprends.

- Je te suis !

- Nous sommes avec toi, Chart !

- C’est… rude, tout de même. Jamais ton père ne nous forçait la main.

- (Chartor) Je sais. Malheureusement, je ne suis pas mon père, jamais je n’aurais sa sagesse. Hélas, il n’avait pas ma force. Il pouvait vous convaincre de partir, je vous protégerai des menaces extérieures. Alors nous allons quitter le Volcan Géant, trouver un nouveau refuge et… PRÉSERVER NOTRE COMMUNAUTÉ !! QUOI QU’IL EN COÛTE ET QU’IMPORTE QUI S’OPPOSERA À CETTE VOLONTÉ, NOUS SURVIVRONS !!!

- OUAIS !!!

Malgré tout, la communauté semblait retrouver un brin d’espoir.

- (Chartor) Très bien… notre voyage débutera aux côtés des apprentis de la guilde. Ils nous guideront jusqu’à leur maître qui, je vous le promets, ne nous laissera pas tomber !

Elle se tourna vers ceux qui portaient le défunt.

- (Chartor) Bon… *souffle* signons le départ d’une nouvelle phase, pour la communauté Chartor.

Ainsi, l’ancien sage du village fut enterré avec respect. Pour la toute dernière fois, un Chartor fut relié aux roches rouges du territoire. Ils plantèrent un drapeau à côté de sa tombe, puis se préparèrent à quitter définitivement les lieux.

Massko récupéra son artéfact métallique, celui qu’il regardait constamment et qui, enfin, brillait d’une lumière stridente à ne plus s’arrêter. Riolu sortit le même outil de son sac, et les autres comprirent qu’il s’agissait d’un appareil de traçage. La boussole indiquait la direction de l’autre engin, et la lumière s’allumait lorsque moins de cent mètres les séparaient.

Le groupe fut immense, à la sortie du donjon. Pour la première fois, beaucoup découvraient le reste du monde. Ils étaient nombreux, mais ensemble, rien ne pouvait leur arriver. Reptincel guidait le reste de l’équipe. Carabaffe, Massko, Brutalibré et Ténéfix les protégeaient chacun d’un côté. Riolu couvrait leurs arrières, et Chartor se tenait plus proche. La communication n’était pas sa spécialité, mais elle se devait de rassurer les plus craintifs, les plus démunis. Les enfants pleuraient, mais en voyant le sourire de cette combattante, ils l’imitèrent sans réellement s’en rendre compte, car elle inspirait. Alors elle se forçait à sourire. Il fallait surmonter le plus rapidement possible les malheurs vécus, pour espérer faire prospérer la raison d’être de cette communauté.

« L’intrépide qui brûle son précédent, naquit délivré d’un tertre sondé par la force de sa dépréciation. »

..

.

 

.

..

- (Reptincel) Nous arrivons !

Exclama-t-il d’une voie monstrueusement rassurée. Le soleil se couchait déjà, alors que tous les parents portaient leurs enfants sur leur dos fumant. Chartor soupira, le voyage fut bien moins compliqué qu’elle ne l’imagina. En fait, tout fut très calme, surtout depuis qu’ils passèrent les Bois aux Pommes. Carabaffe trouva même cela trop calme, mais il n’osa pas le mentionner, par peur d’effrayer la communauté.

Le groupe arriva sur la plage du continent, et les habitants s’arrêtèrent quelques instants pour admirer la vue. Ils découvrirent la mer de plus près, l’agréable sensation du sable chaud de fin de journée, l’atmosphère si paisible qui les entourait… et encore une fois trop calme. Ça en devenait angoissant, même Riolu le remarqua.

Plus ils s’approchaient de Bourg-Trésor, plus l’atmosphère pesante de l’autre monde se faisait sentir, lui et son indescriptible silence. Enfin, ils y parvinrent. Tous mirent les pieds sur la terre rouge du village, mais tous s’arrêtèrent froidement à l’entrée. Personne n’osait faire un pas de plus, personne n’osait briser ce calme terrifiant.

Reptincel, Carabaffe, Massko, Riolu, Brutalibré, Ténéfix, Chartor et le reste de sa communauté furent tous, absolument tous bouche bée, face à la manière dont avait évolué Bourg-Trésor, depuis la dernière fois.

Tout… n’était que cendres.

Tout… n’était que ruines.

Se préparer au prochain assaut de Noctunoir ? Prévenir la guilde… ? Inutile, il était déjà trop tard.

Bien trop tard.

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