Donjon Mystère - Dream Team

Chapitre 6 : La Grotte Éclair

5358 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 30/12/2020 03:09

— Désolé du retard ! hurla Pikachu après avoir bousculé la porte de la classe.

Salamèche le suivait de près, tout aussi essoufflé que lui. Le professeur Canarticho approcha, le poireau entre les plumes. Arcko, Carapuce et Rattata s’en gaussèrent, Riolu soupira tandis qu’au tableau, Germignon leur jeta un regard noir après avoir terminé d’écrire la date du jour, celle du dix-huit octobre.

— Bon sang, ne crie pas dès le matin ! l’enguirlanda le professeur en leur poirotant le crâne. Que Pikachu arrive en retard, ça ne m’étonne pas vraiment. Mais alors toi…

— Je suis désolé monsieur, marmonna le lézard à la queue enflammée.

— Que ça ne se reproduise plus ! Allez, prenez place !

Et ainsi commença une nouvelle journée.


Chapitre 6 : La Grotte Éclair


Deux jours auparavant, les deux écoliers s’étaient finalement rendus à la poste Bekipan. Bien que la gérante au grand bec tergiversât à l’idée d’inscrire des enfants parmi les quelques secouristes qui protégeaient Bourg-Tranquille, elle n’eut d’autre choix, une fois l’absence de restriction constatée, que de valider la création de cette fine équipe au doux nom de Dream Team. Le lendemain, ce furent deux petits badges en forme d’œuf ailé couleur bronze qui les attendirent dans la boîte aux lettres de chez Pifeuil, l’adresse de référence donnée en cas d’urgence. Assis sur la colline au grand arbre, Pikachu s’amusait à faire refléter les rayons du soleil dans les lueurs de son badge. Dans son autre patte se trouvait une note qui récapitulait leurs objectifs.

— J’arrive pas à croire que ce soit déjà officiel !

— Bon, se motiva Salamèche, par quoi commence-t-on ?

— Alors… se concentra le rongeur en feuilletant ses notes. Pour avoir le droit de postuler à la Guilde d’Exploration, il nous faut récolter cent points de secourisme. Les points s’obtiennent en aidant autrui dans un périmètre entourant le lieu de création de l’équipe, ici Bourg-Tranquille. Généralement, les habitants déposent leurs demandes à la poste. Sinon, il peut y avoir un échange direct. Le plus important est que le demandeur et les secouristes se retrouvent à la poste, une fois la mission accomplie, pour valider le gain de points.

— Vu qu’il faut se faire discret, j’imagine que l’on va privilégier la poste.

— Ouais. En route, avant que les autres équipes ne nous volent toutes les missions !

Fort heureusement, le tableau d’affichage dédié au secourisme était plein à craquer de lettres. Mise à part les quelques Bekipan qui s’envolaient livrer le courrier depuis le toit ouvert de l’infrastructure, personne d’autre n’engageait le paisible chemin qui menait à la poste.

— J’hallucine, murmura Pikachu en fouillant du regard les alentours complètement vides, faut croire que c’est notre jour de chance. On a l’embarra du choix !

— Tiens, tiqua Salamèche, regarde celle-là. C’est madame Kecleon qui l’a écrite.

— Elle a besoin d’aide ? On est passé devant son marché tout à l’heure et ça avait l’air d’aller.

— Voyons voir. Hm… elle souhaiterait qu’on lui récolte des ingrédients dans les Petits Bois.

— Une mission de récolte… ? Elle ne peut pas le faire toute seule ?

— Je peux comprendre, ça lui fait gagner du temps et nous des points. Et puis rappelle-toi ce qui est arrivé à Chenipan et sa mère. Elle pourrait vraiment être en danger si une secousse frappait le territoire pendant sa cueillette.

— Ouais et puis en vrai, plus on éloignera les habitants de ces territoires et mieux se porteront les sauvages. Ok, t’as raison, allons dans les Petits Bois !

Et ainsi commença une série de missions simples mais efficaces. En une petite journée, ils rameutèrent trois habitants à la poste, tous surpris à la vue de ceux qui s’étaient empressés d’agir pour eux.

— Vous me faites une blague ? nia la marchande Kecleon face au gigantesque sac de récolte.

— C’est vraiment vous qui avez fait ça… ? s’intrigua la bibliothécaire Altaria en récupérant des branches pour sa cheminée.

— Ça alors ! s’exclama Lombre en comptant les seaux remplis d’une eau fraichement récoltée dans les rivières des Petits Bois. Les clients vont être contents, merci bien les minots !

— Pas de soucis, répondit Pikachu, mais évitez de trop parler de nous, ok… ?

Il le répétait sans cesse, non sans zieuter les alentours à la recherche de sa mère. Trois riches missions d’accomplies, pour un total de trois pauvres points.

— Vous voulez qu’on réalise cent missions ?! s’inquiéta Salamèche. Les habitants n’en auront jamais autant à nous confier d’ici le prochain été !

— Bien sûr que non, grommela la gérante Bekipan, les missions n’ont pas toutes la même valeur. Mais à votre jeune âge, mieux vaut se contenter des demandes de récolte. Un point, c’est déjà une belle récompense pour deux mioches qui n’ont rien à faire ici. Maintenant hors de ma vue, aujourd’hui on ferme à dix-neuf heures !

Ils rentrèrent encore plus tard que lorsqu’ils se donnaient rendez-vous sur la colline au grand arbre pour nourrir les sauvages. Ça et les courbatures du lendemain, voilà ce qui justifia un retard à l’école. Qui plus est, Salamèche n’avait pas eu le temps de réviser la veille et le contrôle sur la Grande Guerre approchait.

— Hé, le reprit Pifeuil durant le dîner, calmos ! Ne brûlez pas les étapes, l’école reste une priorité !

— Ah bon… ? Vous ne souhaitiez même pas m’y inscrire, au départ.

— Parce que je savais pas encore que tu voulais devenir explorateur !

— Je ne le savais pas non plus…

— Écoute, même si certains arrivent à passer sans, le diplôme scolaire est un grand plus qui peut convaincre la Guilde ! Pense à l’image que tu donnes de toi ! Si t’arrives à obtenir les cent points en plus d’avoir ton diplôme, tu feras forcément bonne impression !

— D’accord… marmonna-t-il en détournant le regard. Je vais demander à Pikachu de diminuer la cadence.

Et ce dernier accepta, tout aussi ennuyé que lui à l’idée d’avoir à utiliser son temps aux révisions plutôt qu’à l’exploration.

Une semaine s’écoula, et leur nombre de point s’éleva à sept. Mais ce jour-là, face à un tableau d’affichage toujours aussi rempli, se trouvait une grande figure d’un gris reluisant. Il flottait à une vingtaine de centimètres du sol et semblait constitué d’acier, d’aimants et d’électricité. Ses trois yeux fixaient une affiche en particulier.

— Pardon m’sieur, s’introduisit Pikachu.

— Oh, mes excuses, je ne vous avais pas vu.

Sa voix résonnait, comme si le métal s’en imprégnait. Alors que le rongeur zieutait les différentes missions, Salamèche dévisageait ce grand personnage à la carrure trop unique pour être ignorée.

— Hm… marmonnait le garçon au pelage jaune, il y a de moins de moins de missions à effectuer dans les Petits Bois. Qu’est-ce qu’on fait ?

— Dites, l’ignora son ami, est-ce que vous êtes explorateur ?

— Euh… hésita-t-il un court instant, effectivement. Vous nous connaissez ?

— Non, justement. Je suis sûr de ne vous avoir jamais vu avant ce jour.

— Ah, tant mieux. Nous craignions de nous faire reconnaître également dans les contrées lointaines.

— Vous êtes connus ? demanda Pikachu.

— On peut dire cela, en effet. Je suis Magnézone, le chef de la Magné-Team !

— Wow… s’étonna Salamèche. Le chef d’une équipe d’exploration, ici ?

— Oui, mon équipe et moi étions venus prendre l’air. Loliloville peut être très étouffant, quand on a la tête plongée dans le travail. Mais vous, alors ? Vous êtes secouristes à votre jeune âge ?

— Et oui ! assura le lézard à la queue enflammée en dégainant son badge. Nous sommes la Dream Team !

— Impressionnant. Les territoires environnants ne sont pas bien dangereux, voilà une belle opportunité pour des jeunes pousses de s’élever le plus tôt possible.

Les deux amis s’échangèrent un regard souriant.

— C’est gentil de nous encourager ! le remercia Pikachu. On va charbonner pour tenter d’être accepté à la Guilde d’Exploration l’année prochaine !

— Vous vous sentez de le faire ? Bien que le maître est généreux et ouvert d’esprit, cet examen n’est pas à la portée de n’importe qui.

— On se sent capable ! assurèrent-ils en même temps.

L’explorateur rigola de bon cœur.

— Bien ! Un défi, ça vous tente ?

Il se tourna vers le tableau d’affichage et décrocha, par la force de ses aimants, une lettre parmi tant d’autres. Salamèche tendit les pattes et la feuille s’y déposa délicatement. Le dessin d’un Pokémon fin, violet de peau et aux grands yeux jaunes marqua de suite l’esprit des jeunes secouristes.

— Il s’agit d’un avis de recherche, reprit Magnézone. Le fugitif Abo, reconnu coupable d’agression, se cacherait dans le donjon de la Grotte Éclair depuis plusieurs jours.

— Vous voulez qu’on arrête un hors-la-loi… ? s’inquiéta Pikachu.

— Comment pouvez-vous connaître sa position ? le questionna Salamèche d’un air plus assuré.

— Tout ce processus n’est que supposition basée sur des témoignages incertains. Mais un hors-la-loi qui se cache en territoire sauvage, qui plus est dans les profondeurs d’un donjon pour fuir la civilité, c’est plutôt commun. S’il n’y était pas, mes deux coéquipiers seraient déjà de retour. Peut-être avez-vous encore une chance de capturer Abo avant eux ?

— Ok, ça me tente !

— Attends, l’interrompit Pikachu, t’es sûr de toi ? Affronter un hors-la-loi, c’est peut-être un peu trop pour nous, non ?

— Il ne doit pas être bien dangereux, lui rétorqua son ami.

— Ça reste un sale type ! Il peut nous faire du mal !

— Tout comme il peut faire du mal aux autres habitants, Pikachu. Si on souhaite devenir explorateurs, tôt ou tard, il faudra s’y confronter. Hé, si la situation dégénère, on décampe. Ok ?

Le rongeur soupira en guise de réponse.

— On se rend tout de suite à la Grotte Éclair, monsieur Magnézone !

— Merci bien, les enfants. De mon côté, je pars pour une autre mission. Si vous n’êtes pas revenus à mon retour, je volerai jusqu’à vous.

— Je suis sûr que tout ira bien !

Ainsi, la Dream Team se prépara pour sa mission du jour. Alors qu’ils vérifièrent le contenu de leur sac sur la colline au grand arbre, s’assurant d’avoir au moins la carte du territoire ainsi qu’un peu de nourriture à disposition, Salamèche sortit du sien un livre épais.

— Mince, c’est ça que j’ai oublié de faire !

— T’as emprunté un bouquin à la bibliothèque ?

— Oui, un livre de cuisine regroupant tout un tas de recettes traditionnelles. Mieux vaut que j’aille le rendre maintenant, la bibliothèque aura sans doute fermé à notre retour.

— Vas-y, je vais en profiter pour estimer un temps de trajet.

Il s’y précipita, déboulant en quelques minutes dans l’allée menant à la bibliothèque Altaria. Connue pour son calme berçant, cette petite infrastructure regroupant des dizaines de bibliothèques chargées avait pour habitude d’accueillir seulement deux Pokémon. En déposant son livre sur le comptoir, le jeune reptile zieuta d’un air curieux son camarade de classe à la fourrure bleue, le museau plongé dans un roman.

— C’est bon, confirma la bibliothécaire en lui rendant le bouquin, tu peux aller le ranger. Couloir deux, étagère quatre.

— Merci… chuchota-t-il en s’y dirigeant.

Il contourna le fauteuil sur lequel était assis Riolu pour atteindre ladite étagère. Mais alors qu’il déposait le livre, il entendit un grand soupir.

— C’est dommage, tu avais l’air d’être quelqu’un de bien.

Le garçon au foulard doré se tourna vers lui.

— Pardon… ?

Riolu lui jeta un regard glaçant.

— Tu devrais prendre au sérieux les remarques du professeur. Pikachu n’est pas une bonne influence pour toi.

Salamèche resta bouche bée. Il s’éloigna peu à peu, puis se retourna et quitta la bibliothèque dans un silence morbide. De retour sur la colline au grand arbre, il enfila son sac d’un air moins assuré.

— Tout va bien mon pote ? lui demanda son ami.

— Ouais, marmonna-t-il en détournant le regard. Alors, ce temps de trajet ?

— Environ une demi-heure, si on fait une ligne droite.

— Alors dépêchons-nous, il ne faut pas que notre absence se fasse remarquer.

Et Pikachu le suivit, le sourire aux lèvres. Cette petite forêt n’avait plus aucun secret pour eux. Ils la traversèrent en ligne droite, saluant même les quelques sauvages qu’ils rencontrèrent sur la route. Puis, le nombre d’arbres diminua peu à peu. Enfin, plus aucune feuille ne les couvrit du rayonnant soleil qui les aveugla.

— Wow… s’extasièrent-ils face à la gigantesque plaine verdoyante qui leur faisait face.

Dans le ciel battaient les ailes de plusieurs familles de grands volatiles. Dans les lacs nageaient différentes espèces aux morphologies opposées. Sur les roches grimpaient de robustes créatures, tandis que d’autres flottaient simplement d’obstacle en obstacle. Le vert chatoyant de la forêt s’était terni au profit d’un mélange d’environnements qui ne demandaient qu’à être explorés. Salamèche se perdait à simplement admirer le paysage. Lorsqu’il se tourna vers son ami, il se rendit compte que ce dernier était encore plus impressionné que lui.

— Tu ne savais pas ce qu’il y avait au-delà des Petits Bois ? lui demanda-t-il.

— Non, j’ai jamais voyagé moi ! C’est si… vaste ! Regarde, on voit le Mont Cristal d’ici !

— Tu parles de la grande montagne tout là-bas ? Ça nous prendrait au moins une heure pour l’atteindre.

— Et pourtant, elle paraît si proche ! La Grotte Éclair… hm… selon la carte, elle devrait être vers l’ouest !

Il pointa du doigt une allée qui s’entourait peu à peu de gravier. Au loin se percevait une montée rocheuse.

— On y sera peut-être plus vite que prévu ! reprit-il. Allons-y !

— Je te suis ! lui sourit le jeune amnésique.

Les deux membres de la jeune équipe suivirent le chemin, traversèrent quelques collines et grimpèrent la voie rocheuse. Plus ils prenaient de la hauteur et plus ils distinguaient une montagne au sommet caché par les nuages. Ils se retournèrent et constatèrent la distance gigantesque qui les séparait des Petits Bois.

— Ça donne la nausée… bégaya Pikachu. Tout est si grand, j’ai l’impression qu’on peut se perdre en un rien de temps !

— Alors restons concentrés. Où se trouve la grotte ?

— Normalement, elle devrait être dans le coin.

Ils fouillèrent du regard les alentours, apercevant plusieurs ouvertures et bouches de cavité entre les rochers.

— Tiens, remarqua Salamèche, regarde ça !

Il avança vers l’une d’entre elles, à côté de laquelle un bout tissu déchiré volait au vent, bloqué sous une petite pierre. Le jeune secouriste le palpa d’un air intrigué.

— Tu penses que c’est à Abo ? lui demanda le garçon au pelage jaune.

— Ce doit être un moyen de repère. Allons voir !

— Ouais…

En s’enfonçant dans la pénombre du donjon, l’atmosphère s’intensifia. Les sauvages environnants étaient différents. La plupart étaient constitués de pierre, tandis que d’autres dormaient accrochés au plafond. Salamèche agrippa sa queue et se servit de la flamme à son embout comme d’une torche pour s’éclairer. Ils scrutaient le sol en avançant et manquèrent à plusieurs reprises de trébucher sur un caillou ou dans une petite crevasse. Puis, une paroi sépara la voie en deux. L’une montait, l’autre descendait.

— Qu’est-ce qu’on fait ? questionna le reptile. On se sépare ?

— Hein… ? Ça va pas la tête ?!

— Je rigole ! s’amusait-il. Bon, je serais d’avis de passer par en bas.

— Je sais pas, ça m’a l’air bien sombre quand même…

— Justement. À la place d’un fugitif, j’irai me cacher dans les endroits les plus effrayants ou inaccessibles.

— Oui mais… bégayait-t-il en se grattant l’arrière du crâne.

— Pikachu… ? se tracassa son ami en le voyant trembler. Si tu as vraiment peur, on peut arrêter.

— Bien sûr que j’ai peur ! Mais… ah, peu importe ! On fait un pierre-papier-ciseaux en une seule manche !

— Si tu veux, mais je t’ai toujours battu.

Pikachu l’emporta.

— Quoi ?!

— Allez, on monte !

Grimper les premiers obstacles était plutôt aisé, jusqu’à ce que de grosses roches de plusieurs mètres leur fassent face. Salamèche s’agenouilla et Pikachu grimpa sur son dos, prenant suffisamment de hauteur pour atteindre le sommet. Puis, il lui tendit la patte et l’aida à escalader. Ainsi, ils atteignirent une grande salle illuminée de toute part. La température avait augmenté d’un cran, tandis que des cristaux d’un bleu vacillant, aussi petits qu’un caillou comme aussi grand qu’un arbuste, étaient éparpillés un peu partout au sol et sur les murs. Le rongeur tapota l’un d’entre eux.

— C’est beau…

— Pikachu, ton pelage !

En effet, les poils du garçon s’hérissaient en direction des cristaux.

— Trop stylé ! rigolait-il. En plus, ces cailloux dégagent une chaleur agréable !

Salamèche s’y essaya en touchant d’une simple griffe le même cristal. Soudain, une petite étincelle le percuta.

— Aïe ! C’est électrifié !

— Ah ouais ? J’sens rien, moi.

— Bon, peu importe. C’est magnifique, mais il n’y a pas d’autre issue. Nous devons rebrousser chemin.

— Ouais, ok…

L’équipe engagea donc la voie descendante et se retrouva à sautiller de plateforme en plateforme. Au fur et à mesure de leur avancée, ils distinguèrent une lumière semblable à celle que provoquait la flammèche du jeune garçon. De la fumée s’échappait de l’intersection par laquelle ils se faufilèrent, jusqu’à arriver dans une autre grande salle. La lumière venait d’un seul et même endroit. Plus de cristaux, seulement un petit feu alimenté par un tas de branches.

— Il y a assez d’oxygène pour allumer un feu ici ? s’affola Pikachu. Toute cette fumée accumulée est dangereuse pour les sauvages ! Ils pourraient suffoquer !

— Attention, Abo est peut-être dans le coin…

Les deux garçons enveloppèrent leur museau dans leurs tissus, peinant à ne pas tousser en s’enfonçant dans la pièce.

— Vous devriez partir, clama une soudaine voix résonnante.

— Hein… ? Qui est là ?!

— Pikachu, regarde là-haut !

Au plafond et malgré la fumée se distinguaient deux figures rondes. Des boules métalliques au grand œil unique et aux aimants dégageant des étincelles.

— Ils ressemblent à Magnézone, constata le rongeur. Tu crois que… ?

— Oh ! s’étonna l’un d’entre eux. C’est Magnézone qui vous envoie ?

— Super, ajouta le second, mieux vaut qu’il ne vienne pas lui-même.

— Vous êtes les deux coéquipiers dont il nous a parlé ?

— Nous nous nommons Magnéti, membres de la Magné-Team elle-même !

— Ouais et euh… nous sommes comme qui dirait bloqués.

— Vous avez été piégés ?

— Non, Abo ne savait même pas que nous arrivions. Nous nous apprêtions à l’attraper par surprise, lorsqu’on s’est envolé jusqu’au plafond !

— Alors cette ordure a regroupé tout le bois qu’il avait à disposition et y a jeté une Explograine, ce qui a déclenché le feu en question !

— Et depuis… bah on attend comme des idiots.

— Heureusement que l’on ne respire pas. On aurait déjà suffoqué.

— Et heureusement qu’on n’a pas besoin de manger…

— Ni de dormir…

— Ni d’uriner…

— Il faut qu’on les sorte d’ici ! les interrompit le garçon à la tunique usée en se tournant vers son ami.

Puis, il écarquilla les yeux.

— Quoi ? le questionna Pikachu.

— Ton… pelage.

Ses poils s’hérissaient à nouveau, cette fois en direction du plafond.

— Encore ?! Y a des cristaux dans l’coin ?

Le jeune amnésique fouilla du regard les alentours, pensif.

— Hm… je crois que j’ai compris. Nous sommes juste en dessous de là où nous étions tout à l’heure. Ce sont leurs aimants, qui les attire jusqu’aux cristaux ! Si on retourne là-haut et qu’on les déplace, ils devraient pouvoir se libérer !

— Ok, mais éteignons d’abord ce fichu feu avant que la fumée n’enveloppe tout le donjon !

À deux, ils portèrent plusieurs roches et les lâchèrent sur les flammes pour les étouffer. Puis ils remontèrent à la surface, retournant dans la salle contenant les cristaux pour les éloigner du sol. Salamèche tenta d’en agripper un, mais une nouvelle décharge le percuta.

— Aïe ! Bon sang !

— T’inquiète, je m’en charge !

Pikachu les décrocha, les allongea et les fit rouler jusqu’en dehors de la pièce. Hors de leur socle, ils semblaient perdre leur lueur scintillante.

— Qu’on soit bien d’accord, déclara-t-il en soulevant un énième cristal, je refuse de partir d’ici tant que tout n’aura pas été remis à sa place !

— Vu le temps que ça risque de nous prendre, on rentrera très probablement après le levé de la lune.

— Je m’en fiche, assura-t-il. Les territoires sauvages ne sont pas des terrains de jeu, il faut les respecter !

— Entendu, lui sourit Salamèche.

Il remarquait que Pikachu ne tremblait plus. Ce dernier déposa délicatement le dernier cristal dans un recoin du couloir.

— Ok, c’est fait ! Retournons voir les Magnéti, en espérant que t’aies raison.

— Hé, Pikachu. Je voulais te dire que…

Soudain, quelque-chose outrepassa la pièce à vive allure. Salamèche n’eut qu’à peine le temps de l’apercevoir, qu’une épine se planta dans son ventre. Pikachu l’observa s’écrouler, impuissant.

— Salamèche… ?

Il approcha lentement, alors qu’au sol, le reptile extirpa l’épine qui l’avait attaqué.

— C’est quoi ?! paniqua-t-il en la jetant le plus loin possible.

— Oh non… grommela le rongeur en comprenant qu’il s’agissait d’un dard empoisonné. Salamèche, ne bouge surtout pas !

— C’est rien, répéta-t-il en crispant les dents, c’est rien du tout… !

Il tenta de se relever mais s’écroula encore plus rapidement.

— Navré ! exclama une voix sordide. J’ai pris l’habitude d’attaquer avant de poser des questions !

À l’entrée de la pièce se distinguait une silhouette fine qui glissait sur le sol. Sa peau était violette et ses grands yeux jaunes intimidaient. Pikachu sursauta en s’éloignant, reconnaissant le dessin sur l’avis de recherche.

— Vous êtes Abo !

— Et vous, des secouristes venus m’arrêter ? Ils envoient des mioches, maintenant ?

— Qui est-là… ? beugla Salamèche en peinant à garder les yeux ouverts.

— À quoi vous attendiez-vous, au juste ? Vous pensiez qu’arrêter un hors-la-loi était tâche aisée ?

Il glissa jusqu’à celui qu’il avait empoisonné, alors que Pikachu le dévisageait dans un coin de la pièce.

— Vous pensiez que je vous épargnerai sous prétexte que vous n’êtes que de pauvres petits enfants inconscients ? Vous êtes chez moi, dans mon territoire ! C’est moi qui décide qui survit et qui disparaît !

Il approcha ses dents pointues de sa victime, alors incapable de bouger.

— Arrête… ! grommela le rongeur.

— Enfoncez-vous ça dans le crâne, les gens comme moi n’auront jamais aucune pitié !

— Arrête ! hurla-t-il soudainement.

Il en imposa le silence. Abo le dévisagea d’un sourire narquois.

— Oh, tu veux encore jouer aux héros ? Tu sais qu’il me suffirait de cracher un autre dard et la partie serait terminée pour toi aussi ? Pars. Fuis maintenant où tu y passeras également.

— Jamais…

— Pardon ?

— Pour qui tu te prends… ?

Petit à petit, Pikachu crispait les dents. Il serra les poings et le regarda droit dans les yeux.

— Tu n’es personne et ce territoire n’est pas à toi !

Il dégaina son badge de secouriste.

— C’est terminé, tu es état d’arrestation ! Tu ne feras plus jamais de mal à un quelconque sauvage !

— Très bien, tu mourras en premier !

— Et encore moins à Salamèche !

Il pointa un doigt en direction du serpent et un éclair s’en extirpa. Il percuta Abo de plein fouet, avant même que celui-ci ne puisse réagir. Le serpent s’écroula et le garçon accourut jusqu’à son ami.

— Salamèche ! Hé, reste avec moi !

Il ne répondait pas.

— Non, je t’en supplie…

Derrière lui se relevait la figure violette. Lorsqu’il s’en rendit compte, le hors-la-loi était sur le point de le mordre.

— Je vais te massacrer !

Mais deux autres éclairs le frappèrent dans le dos. Il tomba pour de bon, paralysé et inconscient. Au loin, les Magnéti se pressèrent d’entrer dans la pièce.

— Ouf ! Juste à temps !

— On a un problème ! cria le jeune secouriste. Salamèche a été empoisonné !

— Sans grande surprise. Écarte-toi.

De leur sacoche d’explorateur, l’un d’entre eux attira avec ses aimants une baie Pêcha. À deux, ils redressèrent le jeune amnésique et l’aidèrent à ingurgiter l’aliment.

— Vous aviez ça sur vous ?! s’exclama le rongeur.

— La vraie question est pourquoi vous n’en aviez pas ? Vous êtes venus pour arrêter Abo, non ? Bien que nous y résistons, nous craignions qu’il prenne en otage un Pokémon susceptible d’être empoisonné. Nous avons préparé le terrain, en somme.

Finalement, Salamèche rouvrit les yeux. À peine eut-il le temps de souffler que Pikachu lui sauta dans les bras.

— J’ai eu tellement peur !

— Pikachu… ?

Il fouilla du regard les alentours et dévisagea le hors-la-loi inconscient.

— C’est Abo qui m’a attaqué ?

— Ouais et heureusement que la Magné-Team était là pour te soigner ! Je suis désolé, Salamèche, tellement désolé !

— Euh… mais pourquoi ? Tu as essayé de me protéger, non ?

— Oui, mais…

Salamèche lui souriait, alors il essuya ses larmes.

— Allez ! clama un Magnéti. Debout vous deux, le soleil va bientôt se coucher !

— Désolé, rétorqua le jeune lézard, mais on ne rentrera pas avant d’avoir remis tous les cristaux à leur place.

— Hein ? Mais pourquoi ? La mission est accomplie !

Les deux amis s’échangèrent un simple regard.

— Parce que c’est la bonne chose à faire ! assurèrent-ils en même temps.

— Soit. Nous devons partir, au risque d’être à nouveau attirés par ces cristaux. Prenez soin de vous, les petits.

— Pas de soucis, merci pour le sauvetage !

Et ainsi se séparèrent les explorateurs des secouristes. Embarquant le hors-la-loi avec eux, les membres de la Magné-Team rentrèrent au village pendant que la Dream Team rangeait le bazar qu’elle avait causé. Elle offrit la nourriture emportée aux sauvages du coin, puis sortit de la grotte et admira la lune se lever. Aujourd’hui fut accompli sa première mission hors des Petits Bois.

De retour au village, elle gagna la poste en espérant y trouver la Magné-Team.

— Non, leur confirma Bekipan, ils sont partis.

— Déjà… ? ronchonna Pikachu.

— Ils nous ont cependant parlé de vous. Tenez, c’est de leur part.

Elle déposa sur le comptoir une petite bourse qui débordait de pièces d’or.

— Contrairement aux secouristes, les explorateurs gagnent de l’argent en accomplissant une mission. Monsieur Magnézone tenait à vous récompenser chaleureusement. Ils ont accepté de partager un tier de la somme avec vous. Entre ça et les trois points de secourisme obtenus, on peut dire que vous avez fait une bonne affaire.

— Trois points ?! s’exclama Salamèche. Ça veut dire qu’on est à dix !

— Incroyable ! On a déjà fait un dixième du total !

— Euh… ce sont les pièces d’or qui sont supposées vous enjouer.

— Hein ? Ah, non, on s’en fiche, gardez-les ! Allez, faut vite que je rentre avant que ma mère pète un câble !

— Pareil, Pifeuil va commencer à s’inquiéter si je ne me dépêche pas. Aurevoir !

Les deux enfants s’éclipsèrent, laissant la gérante de la poste seule face à cette bourse. Devant leur maison respective, ils se saluèrent avant de rentrer pour le dîner.

— Au fait ! se rappela Pikachu. Tu voulais me dire un truc dans la Grotte Éclair, juste avant qu’Abo t’attaque.

— Ah oui, euh… non, ce n’est pas si important, ne t’en fais pas.

— Je n’ai rien fait de mal, au moins… ?

— Non, lui sourit son ami, bien au contraire ! À demain !

Tous deux gagnèrent leur habitation. À peine le rongeur rentra chez lui que la voie enragée de sa mère se fit entendre dans tout le quartier. Salamèche passa la clôture du jardin de chez Pifeuil, se rendant compte du privilège qu’il avait à toquer à la porte sans craindre une quelconque punition. Et ainsi s’acheva une rude journée pour la Dream Team.

Depuis ce jour, Salamèche se rendait régulièrement à la bibliothèque Altaria. Il était curieux d’apprendre à cuisiner auprès de son père et empruntait tous les livres de recettes qui prenaient la poussière dans les étagères publiques. Le fait étant qu’à chaque fois, lui et Riolu se croisaient du regard. Le matin même, les membres de la Dream Team étaient encore arrivés en retard. Alors assis sur son fauteuil, un roman entre les pattes, le garçon à la fourrure bleu ne manqua pas de se faire remarquer avec un grand soupir.

— Un problème ? demanda Salamèche en se tournant vers lui.

— Ta situation m’attriste, c’est tout.

— Attriste-toi silencieusement, tu veux ?

Riolu écarquilla les yeux.

— Pardon… ?

— Je me fiche de savoir ce que tu penses de moi ou de Pikachu, clama-t-il avec fermeté. Je ne sais pas ce qu’il t’a fait, mais va cracher ta haine ailleurs. C’est à cause de gens comme toi qu’il n’a pas confiance en lui.

Il quitta les lieux en laissant son interlocuteur bouche bée.

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