Les Dragons et les Veilleurs

Chapitre 4

9528 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 08/02/2017 23:54

(Commentaire de l'auteur: Une autre conséquence d’une histoire plus ambitieuse : des chapitres plus longs. N’hésitez pas à me dire si vous trouvez que ce chapitre aurait dû être coupé en deux, pour maintenir une taille à peu près similaire aux précédents.)


*Il y a seize ans*

 

Angela regardait les feuilles de papier avec un certain désespoir. Il s'agissait de documents administratifs abordant une foule de détails sur la mission qu'elle préparait. Ils disaient tous la même chose : Morrison avait raison. Même avec toutes les ressources du secteur médical, Angela n'avait les moyens de faire distribuer ses vaccins que dans un quart de la zone ravagée par l'épidémie. En y consacrant l’intégralité du fonds spécial, elle pouvait aller jusqu'à un tiers. Et tout cela, sans prendre en compte l'aspect sécuritaire.

 

- Le pire ennemi d'un chef de mission, c'est la paperasse, dit une voix malicieuse derrière elle.

 

Angela se retourna. Elle aperçut alors une femme d'un âge avancé, à la peau hâlée, ayant de beaux et longs cheveux noirs comptant une poignée de mèches grises et portant l'uniforme bleu des agents d'Overwatch, même si on voyait l'aigle égyptien sur son béret. Sous un de ses yeux se trouvait un tatouage qui représentait l’œil d'Horus.

 

- Oh, bonjour capitaine Amari, dit la suisse d’une petite voix.

 

- Bonjour docteur, dit Ana joyeusement.

 

Elle s'approcha un peu plus de la table.

 

- Le secret, c'est de déléguer, ajouta la capitaine en regardant les papiers. Se concentrer sur l'essentiel et laisser toute la paperasse à un autre. C'est lâche, mais cela soulage beaucoup.

 

Amari ramena son regard sur la docteure :

 

- Ceci dit, je suis contente de voir que vous préparez notre réunion avec autant de sérieux.

 

- C'est vous que le commandant Morrison a nommée chef de la sécurité ? questionna Angela, étonnée.

 

- A la vérité, je le lui ai demandé et Jack a eu l’amabilité d'accepter.

 

- C'est gentil, commença la suisse, sincère. Mais je ne pense pas qu'il soit vraiment nécessaire de nommer quelqu'un d'aussi compétent que vous. C'est une mission humanitaire.

 

- Ne vous inquiétez pas, docteur. Si je m'ennuie, je me dépêcherai de démissionner et de nommer quelqu'un d'autre pour occuper cette place. Même politique que pour la paperasse !

 

La bonne humeur du capitaine réussit à faire sourire à Angela.

 

- Comment se présente la mission ? demanda Ana en s'asseyant.

 

- Pas très bien, avoua la suisse dans un soupir.

 

- Vous savez, il n'est pas trop tard pour tout arrêter.

 

Cette remarque braqua aussitôt la docteure :

 

- Morrison vous a-t-il demandé de me dire cela ? dit-t-elle, agressive.

 

- Non, bien sûr, répondit Ana, toujours joyeuse. Il ne revient jamais sur sa parole. Mais il l'a pensé très fort.

 

- Je dois au moins essayer d'aider ces gens, reprit Angela, plus calmement.

 

- Et vous les avez aidés en créant ce vaccin, dit gentiment Ana. Maintenant ce n'est pas votre faute s’il est mal distribué. C'est celle des bandits locaux. Ainsi que des états européens qui se refusent à stabiliser la région bien que l’ONU le leur demande. Personne n'est tenu à l'impossible.

 

- Vous ne me ferez pas changer d'avis, capitaine.

 

Cela fit rire Amari.

 

- Vous êtes une vraie tête de mule. Pire que moi. Très bien, faisons de notre mieux, alors.

 

Un bruit de porte en train de s'ouvrir se fit alors entendre.

 

- Ah, je crois que les hommes arrivent, dit la capitaine.

 

Elle avait raison. Les deux autres responsables de la mission entrèrent dans la salle de réunion. Le premier était Lutz Wendelin, un ancien quartier-maître de l'armée allemande, appartenant à la même génération qu'Ana et membre d'Overwatch des premières heures. Angela l'avait déjà croisé : c'était un petit homme grassouillet, individu affable et discret, très concentré sur son travail. Il était responsable de la logistique et de la partie administrative.

Le second était en revanche une toute nouvelle recrue, entrée dans Overwatch cette année, comme Angela. Il s'agissait d'un français nommé Gérard Lacroix, jeune homme élégant, à la mine confiante et amicale, chargé des renseignements sur la mission. C'était la première fois qu'Angela le rencontrait.

 

Lutz salua poliment les deux femmes avant d'aller s’asseoir discrètement et de déballer ses dossiers.

 

- Bonjour docteur Ziegler, dit pour sa part Gérard. C'est un honneur de vous rencontrer. Votre dévotion à la médecine est un exemple pour nous tous.

 

- Bonjour monsieur Lacroix, répondit poliment Angela. Et merci.

 

- Vous comptez suivre son exemple et devenir médecin ? demanda malicieusement Ana au français.

 

- Ne soyez pas jalouse, capitaine, lui répondit-il d'un ton égal. Vous aussi, vous étiez un modèle. Il y a dix ans. Bonjour, sinon.

 

Il s'assit à son tour tandis qu'Amari riait de sa réplique. Puis le silence se fit. Angela commença alors à parler d'un ton très sérieux :

 

- Le but de notre mission est d'éradiquer la maladie communément appelée « peste de l'hiver » et qui ravage actuellement l'Europe centrale. Je vous ai envoyé un dossier contenant un historique de l’épidémie, une description de ses symptômes et d'autres informations pertinentes. Avez-vous des questions ou des remarques dessus ?

 

Personne n'en avait, Angela poursuivit donc :

 

- Il y a trois mois de cela, j''ai mis au point un vaccin pour cette maladie. Cela a permis son éradication dans le reste du monde. Mais l'absence d'autorités compétentes en Europe centrale empêche la distribution du vaccin sur place, faisant durer l’épidémie. Overwatch se chargera donc de cette tâche là où c'est nécessaire, acheva Angela. Nous sommes ici pour déterminer un plan d'action.

 

- Capitaine Amari, combien de villes vos agents pourront-ils sécuriser ? demanda de suite Lutz.

 

- Cinq villes comptant entre mille et dix mille habitants, répondit Ana d'un ton très sérieux.

 

- Pa...pardon ? bégaya Angela, de surprise.

 

- Cinq villes comptant entre mille et dix mille habitants, répéta l'égyptienne, toujours très sérieuse. Au-delà de ça, je ne pourrai garantir la sécurité du personnel médical.

 

- L'armée française est présente sur le littoral, commença Lutz. Pensez-vous qu'il serait possible de les convaincre de nous aider ? acheva-t-il vers Gérard.

 

- Hum, je pourrais faire jouer quelques contacts. En y ajoutant une dose de chantage, il devrait être possible d'obtenir une protection là où ils sont déjà installés. Ça ne leur coûte rien, après tout.

 

- Du chantage ? demanda Angela, choquée.

 

- Oui, du style « si vous ne nous aidez pas on dira au monde à quel point la France est égoïste », précisa Gérard, toujours très détendu. Ça ne fait pas une bonne presse de refuser d'aider une mission humanitaire.

 

- Mais pourront-ils nous protéger dans d'autres villes ? Des villes où ils ne sont pas déjà installés ? questionna Lutz.

 

- Ah là, par contre, aucune chance. Mon gouvernement ne s’intéresse qu'aux ressources naturelles sous-marines et à la protection des compagnies qui les exploitent. Ils n'enverront jamais des soldats à l’intérieur des terres juste pour distribuer des vaccins. Ce n'est pas rentable, acheva-t-il, d'un ton ironique.

 

- Mais ça ne fait pas une bonne presse de refuser d'aider une mission humanitaire, non ? Répéta Ana.

 

Elle posait la question sérieusement mais n'avait pu résister à mettre dans sa voix une légère intonation de plaisanterie.

 

- Oh, mon gouvernement ne dira pas qu’ils ne veulent pas nous aider, il dira que c'est impossible. Des excuses seront inventées. Fausses, bien sûr, mais nous ne pourrons pas le prouver. Bref, ils ne feront que le strict minimum.

 

Cette piste devant être abandonnée, Angela devait réfléchir à d'autres solutions :

 

- Pensez-vous qu'il soit possible de négocier avec les chefs des bandes armées locales pour qu'ils protègent notre personnel médical ? proposa-t-elle.

 

- J'y mettrai mon veto, répondit Ana d'une voix ferme. Désolée, docteure, mais voulez-vous vraiment que nous mettions la vie de votre personnel à la merci de seigneurs de guerre et autres bandits ?

 

- Non, dut admettre la suisse.

 

- Si nous procédons à une campagne de vaccination en Europe centrale, cinq villes à la fois, et qu'il n'y a pas de nouvelle contamination derrière, alors il nous faudra pour achever la mission, attendez, je calcule…débuta Wendelin.

 

Il prit un stylo et une feuille de papier et y griffonna rapidement.

 

- Sept ans. Je ne pense pas que le commandant Morrison autorise un déploiement aussi long, acheva-t-il d'une petite voix triste.

 

- Ne...ne serait-il pas possible d'éliminer préventivement les bandes armées qui pourraient menacer le personnel médical ? demanda Angela. Oh mon dieu, je n'arrive pas à croire que je suis en train de demander cela.

 

- Nous pourrions le faire, répondit Ana d'une voix apaisante, quoique légèrement triste. Mais ça ne servirait pas à grand-chose. Si le terrain est laissé libre après avoir été nettoyé, il sera occupé plus tard par une autre bande. Et le personnel médical sera toujours en danger.

 

Un lourd silence s’abattit après cette déclaration. Il dura une bonne minute.

 

- Quelqu'un a-t-il une idée à proposer ? demanda finalement Angela, un début de désespoir perçant dans sa voix.

 

- Hum. La solution me paraît évidente, dit Gérard d'un ton aimable. Puisque nous manquons de personnel pour mener cette mission, il nous faut en engager davantage.

 

- Et avec quel argent ? demanda Lutz.

 

- Nous pouvons en lever via une campagne de récolte de fonds, dit Gérard. L'humanitaire, ça n’intéresse pas les gouvernements mais ça peut intéresser des individus. De riches individus. La famille de ma femme connaît nombre d'autres riches familles françaises qui connaissent elles-mêmes d'autres riches familles américaines, canadiennes, chinoises, japonaises, indiennes et j'en passe. Ajoutez à cela la réputation du docteur Ziegler, plus quelques reportages bien ajustés et nous pourrions réunir pas mal d'argent. Ça ne se fera pas en une fois, bien sûr. Il faudra procéder petit à petit, montrer que nous faisons des avancées. Mais nous devrions pouvoir faire en sorte que la mission dure moins de sept ans, finit-t-il, souriant.

 

- Et où espérez-vous trouvez des militaires fiables ? dit calmement Ana. Car c'est de cela dont nous manquons le plus.

 

- La région était l'épicentre de la Crise des Omniums en Europe, non ? Il doit y avoir quantité de vétérans de guerre. Bien sûr, nous nous assurerons qu'ils sont restés honnêtes. Sinon je peux faire jouer mes contacts pour trouver d'anciens soldats français ayant fini leur engagement ou démobilisés. Toujours en vérifiant qu'ils sont respectables, bien sûr. Après tout, le renseignement est ma partie du travail.

 

Pendant une seconde, la capitaine Amari regarda Gérard avec intensité. Angela avait l'impression de voir de la méfiance dans les yeux de la femme, comme si elle essayait de deviner si le français mentait. Puis elle reprit une expression plus professionnelle et dit simplement :

 

- Cela m'a l'air jouable.

 

- Vous pourriez vraiment faire tout ça ? demanda Angela. Organiser une collecte de fond et nous trouver suffisamment d’agents de sécurité ?

 

- Bien sûr. C'est entièrement dans mes capacités. Ne vous inquiétez pas, docteur Ziegler, cette mission va réussir. Je vais tout faire faire pour.

 

*Aujourd’hui*

 

Du haut de la tour d’un clocher, Angela pouvait voir au loin la ville d’Olomouc. C’était une cité de belle taille. La docteure savait qu’avant la Crise Omnium, elle accueillait un demi-million d’habitants. L’opération passée d’Overwatch en Europe Centrale lui avait permis de ré-atteindre ce nombre puis de le dépasser. Au loin, les majestueuses tours de la cathédrale étaient clairement visibles.

 

Tout comme les milliers de soldats qui encerclaient la ville.

 

- Tant d’efforts pour redonner paix et prospérité à cette région, murmura la docteure pour elle-même. Tant de temps passé. Et en six ans à peine, tout disparaît, tandis que la guerre ravage de nouveau les lieux.

 

Angela soupira doucement. Son regard descendit plus bas, vers la place centrale de la communauté où elle se trouvait. C’était un village fantôme : les combats de la Crise Omnium avaient fait fuir la population, qui n’y était jamais revenue. Avant qu’elle et son convoi n’y arrivent, il n’y avait sur place que les carcasses brisées des omnics vaincus et les restes des soldats morts en les affrontant.

 

Désormais s'y trouvait une vingtaine de camions, arborant sur eux le bâton caducée, symbole de la médecine. Tout autour, circulait plusieurs hommes et femmes, une grande partie en blouse de médecin ou d’infirmier. Des humanitaires, comme elle, venus ici dans l’espoir d’aider les victimes de la guerre.

 

Et non loin d’eux, formant un périmètre de sécurité, se trouvaient une dizaine d’agents portant l’uniforme bleu d’Overwatch. Les deux transports aériens qu’ils avaient utilisés pour venir se trouvaient à côté des camions.

 

La docteure descendit du clocher et avança dans les rues désertes. Angela cherchait plusieurs personnes. Elle entendit des bruits de chocs métalliques et se dirigea dans cette direction.

 

La première chose qu’elle vit fut l’ancienne unité bastion, presque intacte. C’était un omnic humanoïde, mais avec une tête et des jambes carrées. Ce n’était toutefois que la plus petite différence qu’il avait avec les humains. Les unités bastions étaient plus grandes et massives que les hommes. Leur avant-bras droit consistait en un fusil d’assaut directement attaché à leur corps tandis qu’une impressionnante mitrailleuse était accrochée dans leurs dos.

 

Et juste à côté, en train de démonter méticuleusement l’omnic, ce tenait Torbjörn Lindholm, le mythique ingénieur de la première escouade d’Overwatch, celle qui avait mis fin à la Crise Omnium.

 

C’était un individu petit et trapus. Il arborait une imposante barbe blonde coiffé en deux tresses. Son bras gauche avait été remplacé par une prothèse de métal, changeant sa main en une gigantesque pince.

Torbjörn portait un plastron et était outillé d’un marteau, qu’il tenait actuellement, ainsi que d’une riveteuse. Sur son dos, se trouvait une mini-forge, imposant dispositif mécanique dont la partie la plus visible étaient les deux tubes pointés vers le haut, dégageant une légère fumée noire. Enfin, l’ingénieur disposait d’un casque de soudage, qu’il avait revêtu.

 

- Bonjour Torbjörn, dit Angela. Toujours à travailler à ce que je vois, ajouta-t-elle avec un sourire.

 

L’ingénieur s’interrompit pour se tourner vers la suisse. Ce faisant il releva son casque, révélant ses yeux. L’un d’eux avait été remplacé par un losange rouge métallique, percé de deux points jaunes. Sans doute un implant optique. Dans l’autre œil, il était possible de voir une pupille marronne.

 

- Salut doc. Oui, ceux qui ont abattu ce tas de ferraille ont fait le travail à moitié. Il suffirait qu’un autre omnic se ramène et il pourrait instantanément réactiver celui-ci. C’est dangereux.

 

- Ce n’est pas juste que tu détestes rester rien à faire ? déclara gentiment Angela.

 

- Oui, admit Torbjörn en grommelant un peu. Tracer et Winston prennent leur temps pour cette reconnaissance.

 

- Sinon, il paraît que tu aurais dû m’écouter plus souvent par le passé ? lui dit-elle, du ton de la gentille taquinerie.

 

Les grognements de l’ingénieur redoublèrent.

 

- Je savais que je n’aurais pas dû parler de ça devant les autres. Ils ne savent pas tenir leur langue

 

Il secoua la tête en ajoutant :

 

- Qu’est-ce que tu veux que je te dise, doc ? J’ai passé ma vie à faire tout le travail qu’on me demandait. Sans discuter, sans poser de question. Toi, dès que Jack voulait te commander un projet, ça partait en engueulade. Je pensais que t’étais juste une naïve idéaliste à ne pas vouloir que tes inventions soient mal utilisées. Mais c’était moi le naïf.

 

- Ce n’est pas vrai, protesta Angela.

 

- Bien sûr que si c’est vrai. J’aurais dû savoir pourtant.

 

De son marteau, il montra l’omnic militaire à côté de lui.

 

- C’est ma guilde qui a conçu les plans des unités bastions. Elles devaient servir au maintien de la paix. Et les boîtes de conserves en ont fait une arme pour détruire l’humanité.

 

Puis, l’ingénieur désigna la ville assiégée :

 

- Les canons là-bas ? Mon œuvre. Jack m’avait demandé de créer quelque chose capable d’apporter des tirs d’appui précis lors de nos opérations. Et après la dissolution d’Overwatch, le général Pranciškus a juste eut à se servir dans nos stocks.

 

Il eut un soupir triste.

 

- Nos détracteurs nous accusaient de proliférations d’armement. Force est d’admettre qu’ils avaient raisons.

 

Angela commença à ouvrir la bouche pour répondre, hésita un instant, puis la referma.

 

- Crache le morceau, doc, dit l’ingénieur. C’est le bon moment pour me faire la morale.

 

- Je sais que c’est hypocrite de ma part de dire ça, alors que je vous demande de l’aide mais… Si tu es si conscient des erreurs d’Overwatch, pourquoi tenter de le recréer ?

 

Torbjörn parut amusé.

 

- Allons doc, ne va pas me faire regretter mes compliments. Winston appelle notre petit groupe Overwatch parce que ça lui rappelle de bon souvenir. Mais ça n’a rien à voir. Dans le temps on était une armée, avec un mandat officiel de l’ONU. Maintenant on est juste une bande de hors-la-loi qui joue aux bons samaritains.

 

- C’est un point de vue qui se défend, admit Angela. A propos comment se comporte Winston en tant que chef ?

 

- Ah ! C’est marrant que tu me demandes ça. Quand moi et Reinhardt l’avons rejoint, il nous a proposé de prendre la tête de son nouvel Overwatch. J’ai rigolé. Moi je suis ingénieur, commander ce n’est pas mon truc. Quant à l’autre grand dadais…

 

Il partit d'un léger rire mais s’interrompit devant le regard sévère que lui lança Angela.

 

- Bon d’accord. C’est vrai que c’est un bon tacticien, admit Torbjörn. Ainsi qu’un ami fidèle, un parangon de vertu et un sacré bon combattant. Mais pour tout le reste : stratégie, organisation, management…il ne vaut pas un clou. Donc il ne nous reste que Winston. Je vais être honnête : il est moins bon que Jack. De beaucoup. Mais on n’a pas mieux.

 

Ils restèrent quelques secondes silencieux après ces paroles.

 

- Tu saurais où se trouvent Reinhardt et Mei ? demanda finalement Angela.

 

- Deux ruelles par là pour le premier, dit l’ingénieur en montrant une direction. La deuxième se trouve en haut de cette colline, finit-il en désignant un autre endroit.

 

- Merci.

 

Ils échangèrent des salutations et se séparèrent. Tandis que Torbjörn se remettait au travail, Angela se dirigea vers l’endroit où se trouvait Reinhardt.

 

Elle arriva dans une grande et large rue, qui avait été le théâtre d’un violent affrontement. Plusieurs débris d’unités bastions et d’omnics plus grands étaient visibles. Côté humain, on pouvait voir un char éventré, les vieilles peintures du drapeau français encore visibles dessus. Juste à côté se trouvait le squelette d’un soldat tchèque, l’insigne de son uniforme n’ayant pas été trop abîmé par le passage du temps.

 

En continuant d’avancer, Angela aperçut enfin Reinhardt. Ce dernier avait revêtu son équipement de combat, excepté le casque qu’il tenait dans une de ses mains.

L’armure qu’il arborait redéfinissait le terme « lourd ». C’était massif, gigantesque. Elle donnait au vieux vétéran, qui était déjà lui-même très grand, deux mètres cinquante de hauteur.

Son style s’inspirait clairement des anciens harnois des chevaliers européens. Mais modernisé. Ainsi, un numéro de série sur l’épaule côtoyait une décoration métallique en forme de tête de lion sur le gantelet gauche tandis que de discrets tuyaux pouvaient être aperçus au niveau du torse et du ventre. Quelques bandes de lumière jaune étaient visibles çà et là, émanation probable de la source d’énergie.

Mais la partie moderne la plus visible était le réacteur dans le dos, qui indiquait clairement le caractère motorisé de l’armure.

A côté du gigantesque croisé, était posé un marteau à deux mains, au moins aussi grand que lui. Cette arme disposait aussi d’un moteur dont le réacteur était visible à son arrière.

 

Le vieux vétéran se tenait agenouillé, tête baissée, main droite sur le torse. Juste en face de lui se trouvait les reste d’une armure similaire à la sienne mais presque totalement détruite par les combats passés. Le squelette de sa propriétaire était encore visible à l’intérieur.

 

- Bonjour Reinhardt, dit poliment Angela.

 

Le croisé tourna la tête, révélant cette dernière. Ces cheveux blancs étaient coiffés à la limite du mi-long, tout comme sa barbe, sa moustache et ses favoris. Une cicatrice barrait son œil gauche, ce dernier n’ayant plus de pupille. L’autre était d’un joli bleu.

En voyant la docteure, le visage de Reinhardt, jusque-là triste et solennel, prit une expression plus joyeuse.

 

- Angela ! Cela fait si longtemps ! Comment vas-tu ?

 

- Bien, et toi ?

 

- Cet endroit me rappel de tristes souvenirs. Mais sinon, je vais bien !

 

La docteure désigna la croisée morte du menton :

 

- Tu la connaissais ?

 

- Oui. Nous avions reçu nos armures en même temps, il y a plus de quarante ans de cela. C’était une femme bien.

 

- Quarante ans…est-ce que tu ne penses-pas qu’il serait temps pour toi d’arrêter de te battre et de profiter de ta retraite ?

 

Reinhardt était le doyen de la première escouade d’Overwatch et avait pendant longtemps été celui des escouades de frappe. Jusqu'à ce qu’on le force à quitter l’organisation et à prendre sa retraite.

 

- Jamais ! Je combattrai jusqu'à mon dernier souffle !

 

Angela ne put retenir un soupir.

 

- Les justes auront toujours à lutter contre le mal, reprit le croisé. Nous aurons beau remporter des victoires, il y aura toujours de nouvelles causes à défendre !

 

- Je vois ce que tu veux dire, dit la docteure en affichant un regard triste.

 

Ses yeux se portèrent dans la direction d’Olomouc. Même à cette distance il était possible d’entendre les bruits de l’artillerie faisant feu.

 

- Ne laisse pas le désespoir t’abattre. Ton succès passé a donné à cette région plus de dix ans de paix. C’est ce qu’on peut appeler une réussite ! Et maintenant que la guerre est revenue, c’est pour nous l’occasion de gagner encore plus de gloire !

 

La joyeuse exubérance de Reinhardt arracha un sourire à Angela.

 

- Je vais te laisser. J’aimerais discuter avec Mei avant que notre opération commence.

 

- Bien sûr. Porte-toi bien, Angela.

 

La docteure se dirigea vers la colline que Torbjörn lui avait indiqué. Elle ne tarda pas à trouver Mei.

 

Arborant un corps un peu plus enrobé que celui d’Angela, la climatologue portait un épais anorak bleu et blanc accompagné de solides bottes de randonnée ainsi que d’une ceinture comportant de nombreuses poches. Ses cheveux bruns étaient coiffés en un chignon plutôt lâche, maintenu par une jolie épingle à cheveux, métallique, sur lequel pendait un colifichet représentant une fleur. Les yeux de Mei étaient grands, avec de larges pupilles marrons. Elle avait d’épaisses lunettes par-dessus. L’ensemble donnant à son visage des traits mignons.

 

Son équipement était étrange : elle portait dans le dos une bonbonne semblait contenir de l’eau et la maintenir à basse température. A cette bonbonne était relié par un tuyau ce qui ressemblait à un massif pistolet à spray. Ce dernier ayant un petit réservoir à liquide sur ses arrières. Enfin, sur le haut de la bonbonne, se trouvait un tout petit robot. Il prenait la forme d’une sphère flottante, comportant un écran pixélisé affichant deux points bleus, semblant donner des yeux à la machine. Cela le rendait aussi très mignon.

 

Mei avait rangé son arme à la ceinture et tenait en main un espèce de scanner qu’elle consultait d’un air très concentré. Mais la climatologue s’interrompit en voyant Angela s’approcher.

 

- Docteur Ziegler ! s’exclama-t-elle, ravie. Je suis heureuse de vous revoir.

 

- Bonjour Mei. Comment vas-tu ?

 

- Très bien. C’est un plaisir d’avoir de la compagnie et de voyager. Je n’étais jamais venue en République Tchèque avant. C’est très joli.

 

- Permets-moi de t’exprimer mes condoléances pour la mort de tes collègues.

 

Le regard de Mei devint triste pendant un bref instant.

 

- Merci, docteur. Venant de vous, ça me touche.

 

- Tu peux me tutoyer tu sais, dit Angela avec un sourire.

 

- Oh, merci…c’est que je ne suis pas encore habituée à côtoyer des personnes aussi célèbres.

 

- Winston t’aide pour ton travail sur le climat, c’est bien ça ?

 

- Oui. Et de mon côté, je l’aide sur certaines missions que lui et les autres effectuent. C’est très exaltant !

 

Angela eut une mine étonnée :

 

- Tu participes aux combats ?

 

- Je sais que ça peut surprendre. Mais tu verras que j’ai développé une batterie d’inventions qui, même si pensées pour d’autres buts, y sont très utile. Je dirais même qu’elles y sont mei-veilleusement adaptées.

 

La docteure observa Mei avec un air surpris.

 

- Tu as compris ? Mei-veilleusement. Parce que je m’appelle Mei. Ha, ha !

 

Le regard d’Angela se fit profondément navré.

 

- Eh…je devrais reprendre mes analyses, dit Mei, gênée.

 

- A plus tard, lui dit gentiment la docteure.

 

Alors qu’Angela retournait près du convoi, elle aperçut, proche des camions, la massive silhouette de Winston, vers laquelle elle se dirigea aussitôt.

 

- Bonjour Mercy, dit la scientifique d’une voix enthousiaste. C’est un plaisir de retravailler avec toi.

 

- Salut doc, lança Tracer, qui se trouvait juste à côté.

 

- Bonjour tous les deux. Comment te portes-tu, Winston ? Aucun problème avec ta thérapie génétique ?

 

- A part une terrible addiction au beurre de cacahuète ? Non, rien de notable.

 

Angela dirigea son regard vers Tracer mais cette dernière prit les devant :

 

- Moi je vais très mal, doc ! Je tousse à n’en plus finir depuis des jours et des jours.

 

Elle se mit à mimer cela d’une manière exagérée et en aucun cas crédible, avant de partir sur un grand éclat de rire.

 

- Non, je plaisante ! Enchaîna-t-elle. Tout va bien !

 

- Et cette reconnaissance ? demanda poliment Angela.

 

- Nous avons effectué un repérage complet, annonça Winston. Les troupes de Pranciškus ne sont pas assez nombreuses pour cerner totalement la ville. Mais elles le sont assez pour surveiller tous les accès. Si notre convoi approche, il sera intercepté avant d’arriver à Olomouc.

 

- C’est ce que je craignais, dit tristement Angela.

 

Elle soupira.

 

- J’aurais aimé ne pas exposer les humanitaires à une attaque.

 

- Il y a une solution assez facile pour éviter cela, dit Winston, rassurant. Il nous suffira de lancer une attaque de diversion avec l’escouade de frappe pour attirer l’attention des soldats sur nous. Pendant ce temps, le convoi pourra rallier la ville.

 

- Très bien. S’il faut en arriver là, je vous accompagnerai au combat.

 

- Oh, tu as amené ton armure walkyrie ?

 

-Oui. Mais j’aimerais que nous tentions de négocier avant de devoir la revêtir.

 

- Bien sûr. Faisons cela de suite.

 

Ils prirent le temps de rassembler les trois autres agents puis ils se retrouvèrent tous dans un transport d’Overwatch.

 

- Athéna, établis une communication avec le commandement de l’armée assiégeante, demanda Winston, parlant devant un écran.

 

- C’est en cours, répondit une voix calme, féminine, quelque peu métallique qui venait de l’écran lui-même.

 

Il n’était pas difficile de comprendre qu’Athéna devait être une intelligence artificielle.

 

- Est-ce que Pranciškus est lui-même aux commandes ? demanda Mei.

 

- Non, répondit Winston. Il a délégué à un de ses seconds. Un individu anonyme qui est surnommé « Masque de Fer ». Il ne respecte aucune éthique au combat mais on ne l’a jamais vu non plus faire preuve de cruauté gratuite.

 

- Se cacher le visage semble être une sale habitude prise par les méchants, commenta Tracer.

 

- Oui, dit sombrement Winston.

 

- Communication établie, annonça Athéna.

 

Un visage apparut sur l’écran. Comme son nom l’indiquait, le second de Pranciškus portait un masque métallique. L’objet était lisse et sans fioriture, laissant juste apparaître des minces fentes à l’emplacement des yeux et de la bouche. Le tout donnait une impression de sérieux et de froideur. Il était difficile de savoir si l’objet était un appareil de haute technologie ou un simple bout de ferraille.

 

- Tient, les glorieuses anciennes stars d’Overwatch daignent venir dans ce coin perdu du monde, commença Masque de Fer.

 

Sa voix était plate et remplie de grésillement. Elle sonnait artificielle. C’était clairement le fruit d’un modulateur vocal.

 

- Est-ce que vous ne devriez pas être en train de combattre des soldats d’Hélix ? enchaîna-t-il.

 

- Et vous, ne devriez-vous pas être en train de tirer sur des bandits plutôt que sur des hôpitaux ? répondit Winston du tac-au-tac.

 

Masque de Fer eut un reniflement méprisant.

 

- Vous êtes resté absent des années durant lesquelles cette région a été ravagée par le crime, dit-il. Mais maintenant que les médias bien-pensants montrent une ville bombardée, vous vous précipitez ici.

 

Il fit une courte pause avant d’ajouter :

 

- Bande d’hypocrites.

 

- Je ne me laisserais pas calomnier ! s’exclama Reinhardt. Cela fait des années que je parcours l’Europe pour défendre la justice !

 

- Un homme seul accompagné d’une gamine. Qu'avez-vous donc apporté ? Rien. Alors que le général Pranciškus a ramené l’ordre dans tout un pays. Et il le fera dans d’autres.

 

- Tuer des innocents pour imposer sa domination, ce n’est pas rétablir l’ordre, déclara le vieux croisé. C’est imposer une tyrannie.

 

- Je n’ai pas à justifier les méthodes de mon supérieur. Ses résultats le font pour lui.

 

- S’il vous plaît, intervint Angela. Tout ce que nous voulons, c’est pouvoir apporter une aide humanitaire aux habitants d’Olomouc. Des gens là-bas sont en train de mourir, privés des soins qui pourraient les sauver. Laissez-nous les leur apporter. Laissez- nous sauver des vies.

 

- Nous sommes en guerre, docteur. Ce que vous appelez « aide humanitaire », je l’appelle « ravitaillement à l’ennemi ». Vous laissez passer ferait durer le siège de la ville, entraînant plus de combats et de morts. En voulant sauvez des vies, vous en condamneriez davantage.

 

Quelques secondes passèrent, puis il compléta :

 

- Si vous voulez vraiment aider les habitants d’Olomouc, convainquez-les de se rendre. Je laisserai alors passer votre convoi humanitaire.

 

Et de finir :

 

- Sinon, mes soldats auront ordre de tirer à vue.

 

La communication se coupa là. Il y eu un petit silence dans la salle, qui fut brisé quand Winston prit la parole :

 

- Mercy, si nous appelons la maire d’Olomouc et lui expliquons la situation, elle pourrait accepter de se rendre pour que sa population bénéficie de soins immédiats. Cela permettra à tes humanitaires de travailler sans risque. Je te laisse ce choix.

 

- Aider un tyran à conquérir une ville, même pour soigner les habitants de cette dernière, serait commettre une grande injustice, déclara Reinhardt. Nous ne pouvons pas laisser faire cela alors qu’il existe d’autres options. Ce serait sacrifier nos idéaux et notre honneur.

 

- La docteure Ziegler a demandé notre aide pour protéger une opération humanitaire, répliqua le scientifique. Je ne lui imposerai pas un combat.

 

- Merci Winston, commença Angela. Il est bon d’avoir le choix. Morrison ne me l’aurait pas laissé.

 

- Je ne suis pas Morrison, répondit l’intéressé, d’un ton légèrement amer.

 

- Mais je pense que Reinhardt a raison, poursuivit la docteure. Si nous laissons Masque de Fer gagner ici, il assiégera une autre ville dans un mois et nous ferons alors face à la même situation.

 

Son expression se fit plus déterminée tandis qu’elle concluait :

 

- Il va nous falloir combattre.

 

- Merci Angela, dit Reinhardt. Je sais ce qu’il t’en coûte de faire ce choix. Mais c’est la voix la plus noble à suivre.

 

- Nous devons maintenant choisir ce que nous allons cibler pour notre attaque de diversion, déclara Winston.

 

- Les canons, dit aussitôt Torbjörn. Sans eux, il sera impossible à l’armée de Pranciškus de continuer le siège. Ils mobiliseront toutes leurs réserves pour les défendre. Et si nous les détruisons, nous les forcerons aussi à battre en retraite.

 

Winston, Tracer et Reinhardt se rangèrent à son avis.

 

- Mais…euh, commença Mei. Est-ce qu’il n’y a pas plusieurs milliers de soldats dans l’armée en face ? Je sais que vous êtes tous très forts et très expérimentés, et moi aussi, enfin je ne suis pas expérimentée mais…bref, est-ce qu’on ne va pas se retrouver submergés ?

 

- Nous ne sommes pas les seuls adversaires de l’armée de Pranciškus, expliqua patiemment Winston. Ils doivent aussi compter sur les forces qui défendent Olomouc. Si Masque de Fer envoie toutes ses troupes contre nous, il perdra des positions vitales pour maintenir le siège.

 

- Il ne pourra mobiliser que ses réserves, enchaîna Reinhardt. Probablement ses meilleures forces. Ce sera un glorieux combat, acheva-t-il en cognant son poing contre le torse, produisant un bruit de choc métallique.

 

Il y eut encore d’autres détails à régler : le chemin que le convoi humanitaire devrait prendre pour rejoindre la ville et quand il devrait se mettre en route. Une fois cela fait, Angela revêtit son armure walkyrie.

 

C’était un équipement destiné aux médecins de combat qu’elle avait conçu dès son entrée à Overwatch. L’armure en elle-même, composée de pièces blanches, était d’un modèle plutôt léger. Mais elle comportait une partie inhabituelle, qui frappait l’œil immédiatement : une paire d’ailes dorsales métalliques.

A cela s’ajoutait un appareil doré qui formait une espèce de diadème, mais qui se trouvait légèrement au-dessus de la tête d’Angela, avec deux branches qui le reliaient à ses oreilles. L’ensemble ressemblait à une auréole ce qui, associé aux ailes, donnait à Mercy l’apparence d’une ange guérisseuse. Un choix de design calculé qui avait bien servi la propagande d’Overwatch.

 

La docteure s’était armée d’un long bâton métallique, dont l’apparence trahissait un dispositif technologique avancé, qu’elle complétait avec une arme de poing à sa ceinture. Le règlement d’Overwatch lui avait imposé cette dernière et Angela avait depuis pris l’habitude de la garder.

 

Les autres membres de l’escouade n’avaient ajouté que peu d’équipements. Reinhardt avait revêtu son casque, un heaume à trois pointes recouvrant totalement sa tête et dont la visière était composée d’un écran jaune, tandis que Torbjörn avait stocké dans sa forge miniature les pièces détachées d’une tourelle de combat automatisée.

 

- Rappelez-vous, commença Winston, avant qu’ils entrent dans le transport, que ceux qui nous font face ont fait le choix de rejoindre l’armée de Pranciškus et de bombarder des civils innocents. Ne retenez pas vos coups.

 

Ceci dit, ils embarquèrent. L’appareil aérien s’envola immédiatement vers la position d’une des batteries d’artillerie ennemie. L’escouade débarqua par la rampe centrale du transport avant de se précipiter sur sa cible.

L’assaut fut rapide et bien mené. Les soldats de Pranciškus étaient compétents et correctement entraînés, mais ils étaient attaqués par un ennemi rapide, qui les avait pris par surprise. Le temps qu’ils organisent une riposte, les canons avaient été détruits par le puissant marteau de Reinhardt et les sabotages de Torbjörn.

 

L’escouade réembarqua rapidement pour attaquer une seconde batterie. L’affaire fut cette fois plus délicate car les soldats ennemis étaient préparés à leur arrivée. Des tirs d’armes légère et de mortier assaillirent les agents d’Overwatch dès leur sortie du transport.

 

Reinhardt activa un appareil sur son brassard gauche et un champ de force rectangulaire se dégagea de la décoration en tête de lion, bloquant les projectiles qui menaçaient l’escouade.

 

- Ne craignez rien, compagnons ! Je suis votre bouclier !

 

Profitant de ce répit, Winston et Tracer partirent à l’assaut de leurs ennemis. Il n’y avait qu’une vingtaine de soldats ordinaires et ils ne purent pas faire grand-chose pour arrêter les deux agents surentraînés et suréquipés. Les doyens de l’escouade mirent cette diversion à profit pour détruire une fois encore les canons. Puis, ils se replièrent tous en bonne ordre.

 

- Ils vont sans doute mobiliser leurs réserves pour protéger leurs dernières batteries, déclara Winston, une fois qu’ils furent réembarqués dans le transport. C’est le bon moment pour faire partir le convoi.

 

- Espérons que leur trajet se déroulera sans problème, dit Angela.

 

Même si des agents de sécurités d’Overwatch protégeaient les humanitaires, elle ne donnait pas très cher de leur sort s’ils étaient intercepté par des soldats de Pranciškus. Mais malgré tout, la docteure les fit partir vers Olomouc. Eux aussi connaissaient les risques.

 

Ils arrivèrent à la position de la troisième batterie et débarquèrent. Cette fois, le comité d’accueil était bien plus consistant. Une trentaine de soldats étaient venus renforcer les défenses autours des canons. C’étaient des vétérans couturés de cicatrices, équipés d’armes très diversifiées, toutes de pointes. Et à leur tête se trouvait Masque de Fer.

 

Le commandant ennemi était revêtu d’une armure pare-balle lourde de couleur métallique, qui recouvrait entièrement son corps, et était armé d’un lance-grenade. A cela s’ajoutait plusieurs sacoches et poches accrochées à son armure.

 

- Je vous ai laissé une chance d’obtenir ce que vous vouliez pacifiquement, dit-il aux membres d’Overwatch de sa voix artificielle. Mais vous avez choisi de combattre. Souvenez-vous que ce fut votre décision.

 

- Ce n’est pas nous qui avons pris la décision de tirer sur des civils désarmés et des hôpitaux ! répliqua Winston.

 

Puis il se tourna vers son escouade et leur dit :

 

- Essayez de détruire ses canons. Et souvenez-vous que nous devons tenir le plus longtemps possible pour permettre au convoi de passer.

 

Puis le scientifique activa ses propulseurs pour atterrir en plein milieu de la ligne de soldats, les attaquant de son imposante arme électrique. Tracer ne tarda pas à le suivre, tirant de ses pistolets avant de se téléporter à grande vitesse.

 

- Couvre-moi pendant que j’installe ma tourelle ! cria Torbjörn à Reinhardt.

 

Le vieux croisé activa son bouclier tandis que l’ingénieur posait sur le sol ses pièces détachées et les assemblait à grande vitesse. Un canon automatique ne tarda pas à émerger et à se mettre à faire feu sur les soldats de Pranciškus.


Angela et Mei s’abritèrent également derrière le champ de force. La climatologue se mit à tirer de son étrange pistolet. L’arme transformait l’eau de son réservoir en pic de glace qu’elle projetait ensuite à grande vitesse. Voyant cela, la docteure pointa son bâton vers Mei et un filament bleuté en sortit, enrobant la climatologue. Le tir d'après de cette dernière transperça une armure-pare-balle.

 

- Houa ! s’exclama Mei. Ça n’est pas aussi puissant, normalement !

 

- Mon caducée améliore les performances de ton arme, expliqua Mercy. Profites-en tant que nous sommes tous indemne !

 

Elle faisait bien de prononcer ces paroles, car leurs ennemis ne tardèrent pas à organiser une contre-attaque. Masque de fer fit concentrer les tirs sur Winston et Tracer. Un déluge de feu ne tarda pas à s'abattre sur les deux agents. La jeune femme fut touchée et dut remonter dans le temps pour annuler les effets de sa blessure. Winston dut déployer son propre champ de force, sphérique.

 

Mais les soldats étaient tout simplement trop nombreux et trop bien armés. La barrière céda et le scientifique subit plusieurs impacts directs, dont certains d’armes lourdes.

 

- J’arrive ! cria Angela.

 

Mercy sauta en avant et tandis qu’elle agissait ainsi, ses ailes se déployèrent. Leur taille augmenta brusquement tandis que des plumes d’énergie jaune apparaissaient derrière celles métalliques. Ce mécanisme donna à la docteure une grande vitesse et en moins d’une seconde, elle se trouva à mi-distance de Winston.

 

Ce fut à ce moment-là qu’une grenade tirée par Masque de Fer explosa à côté d’elle.

 

La docteure s’effondra en plein vol, tombant au sol avec un petit cri de douleur. Toutefois l’armure avait absorbé le gros du choc et elle semblait encore bien vivante.

 

Mei s’élança alors, tout activant une fonction de son arme. Un mur de glace, de plusieurs mètres de haut et de large, s’érigea alors entre Angela et les soldats. Plusieurs tirs s’abattirent dessus mais sans le briser. Il semblait que cette glace-là était d’une résistance extraordinaire.

 

- Ha ha ! Je fais le mur ! s’exclama Mei.

 

Au loin l’éclat de rire de Tracer répondit à cette blague tandis que Torbjörn criait :

 

- Mais faites-la donc taire !

 

Profitant de l’accalmie offerte par son action, Mei s’approcha d’Angela.

 

- Ça va, docteur Ziegler ? demanda-t-elle.

 

- Oui, dit l’intéressée en se relevant. Mon armure contient un système qui m’injecte des nanites médicales si je subis une blessure. Mais je dois rapidement atteindre Winston. Ces signes vitaux faiblissent !

 

- Abaissez ce mur, je vais activer la surcharge de ma tourelle ! cria l’ingénieur.

 

Mei appuya sur un bouton de son arme et le mur de glace tomba en morceaux. Au même moment, Torbjörn fixa de nouvelles pièces dans sa construction et activa un mécanisme de celle-ci.

 

De nouvelles armes se déployèrent tandis que le métal rougeoyait sous la pression de l’énergie déployée. La tourelle disposait maintenant d’un lance-roquette associé à quatre canons, ces derniers ayant une cadence de tir bien plus soutenue que précédemment.

 

- A couvert ! cria Masque de Fer en apercevant la tourelle.

 

Les soldats s’exécutèrent, fuyant la pluie de projectiles tirée par l’engin automatisé. Mercy en profita pour s’élancer de nouveau vers Winston. Une lueur dorée sortie de son bâton en direction du scientifique. Winston soupira de soulagement tandis que ses blessures disparaissaient à vue d’œil.

 

Angela ne fut pas la seule à profiter de l’opportunité crée par Torbjörn. Tracer s’élança vers les canons, parcourant la distance en quelques secondes dans une série d’éclairs bleutés. Puis elle saisit sa bombe à impulsion, avant de la lancer sur un des canons. L’explosion provoqua une réaction en chaîne qui anéantit totalement la batterie. Pour finir, la jeune femme remonta le temps pour revenir près de ses compagnons.

 

- Yahou ! Cria-t-elle en voyant l’explosion. Ça, c’était du bon boulot !

 

- Nous devrions…commença à dire Winston.

 

- En avant, soldats ! l’interrompit une voix venue de non loin. Pour Pranciškus !

 

Une trentaine de soldats d’élites venaient d’arriver. Ils étaient menés par un individu portant le même équipement que Reinhardt, à deux différences près : le gantelet gauche représentait une tête de dragon tandis que le numéro de série était un 12. Sa voix était masculine, jeune et forte.

 

L’arrivé de ces renforts ennemis coïncida avec le moment où le mode surcharge de la tourelle de Torbjörn prit fin. Masque de fer et ses troupes en profitèrent pour sortir de leur couvert.

 

- Traître ! cria Reinhardt avec colère vers l’autre croisé. Ces armures ont été conçues pour protéger l’humanité et non pour servir un tyran !

 

- Stupide vieux fou ! Les armes servent à faire la guerre et se moquent de qui les emploie !

 

En prononçant ces paroles, il activa les propulseurs de son armure, se projetant à grande vitesse vers Reinhardt. Ce dernier fit immédiatement de même.

 

- Justice et honneur ! cria le vieux vétéran.

 

Les deux géants de métal se rapprochaient rapidement. Le choc paraissait inévitable.

 

Puis Masque de Fer tira une grenade sur Reinhardt. L’explosion fut absorbée par l’armure mais le choc ainsi causé fit dévier le trajet du vétéran. Il s’écrasa contre une barricade, faisant exploser celle-ci au passage, tandis que sa course était stoppée.

 

L’autre croisé continua sa charge. En plein vers Torbjörn. Surpris, l’ingénieur ne put que contempler la masse métallique qui rentra en contact avec lui avant de l’écraser contre le mur d’une ruine située non loin.

 

Le plastron de Torbjörn permit à son corps de rester en un seul morceau. Mais un sinistre craquement se fit entendre au niveau de la nuque, qui ne laissait guère de doute sur le sort du vétéran.

 

- Torbjörn ! cria Reinhardt en voyant son ami tombé.

 

Il s’élança vers l’autre croisé en criant : « Vengeance ! »

 

La situation se dégradait aussi pour les autres agents d’Overwatch. L’escouade se trouvait sous le feu des soldats d’élite de Pranciškus. Mercy s’était promptement cachée tandis que Mei s’entourait d’un bloc de glace, cette dernière résistant même aux armes lourdes. Quant à Winston, son corps robuste et son armure lui permirent d’encaisser cette première salve.

Tracer, elle, comptait sur son agilité et ses téléportations pour esquiver les attaques. Mais la jeune femme était la cible de plusieurs dizaines de tireurs très bien entraînés. Une première balle ne tarda pas à la toucher à la jambe. La douleur la déconcentra et deux autres projectiles l’atteignirent successivement, au ventre. Puis une roquette la heurta de plein fouet et Tracer s’effondra au sol, tuée sur le coup.

 

La vue de ce qui était arrivé à sa co-équipière, conjuguée à la douleur provoquée par les tirs qu’il encaissait, fit entrer Winston en rage. Il se dressa sur ses pattes arrière tandis que sa peau rougeoyait et que des éclairs parcouraient son corps. Sa nouvelle force et sa vitesse lui permirent d’envoyer valser de ses poings une demi-douzaine de soldats.

 

Il se dirigea ensuite vers Masque de Fer. Ce dernier lâcha alors un objet métallique droit devant Winston. Lorsque le scientifique marcha dessus, des filaments d’énergie bleutée s’en échappèrent et s’enroulèrent autours de ses jambes. Winston eut beau se débattre, il était immobilisé.

 

Cela fit de lui une cible facile pour les soldats de Pranciškus. Le gorille ploya sous le déluge de tirs. Puis il s’effondra à son tour.

 

- Voilà ce qui arrive à ceux qui veulent jouer les héros, déclara Masque de Fer. La mort.

 

- Les héros ne meurent jamais, lui répondit la voix d’Angela.

 

Tout en parlant Mercy était sortie de son couvert. Pendant un instant, elle fut entourée d’un aura d’une puissante lumière dorée. Puis les particules s’élancèrent vers Torbjörn, Winston et Tracer. Les corps morts des trois agents furent brièvement illuminés. Puis ils se relevèrent, bien vivants.

 

- Je ne pourrai pas accomplir cela une deuxième fois ! cria Angela. Il faut partir. Maintenant !

 

Pendant ces événements, Reinhard combattait l’autre croisé. Le vétéran frappa de son arme mais son adversaire esquiva facilement le coup.

 

- Tu n’es qu’une relique du passé, vieux débris ! cria l’officier de Pranciškus en répliquant.

 

Reinhardt bloqua l’attaque du manche de son arme. Puis il envoya un violent coup de pied au ventre de son adversaire, faisant chanceler ce dernier.

 

- Le vieux chien connaît encore quelques tours !

 

Profitant que son ennemi soit déséquilibré, Reinhardt attaqua de nouveau.

 

- A la mémoire de mon maître Balderich ! dit-il en frappant de son imposant marteau.

 

L’autre croisé fut propulsé sur quelques mètres, avant de chuter brutalement.

 

A ce moment, Reinhardt entendit l’appel à la retraite de Mercy. L’escouade s’enfuyait vers le transport. Mais des dizaines de soldats pointaient toujours leurs armes vers eux, menaçant de les faucher dans leur course.

Le vétéran leva alors bien haut son marteau, avant de l’abattre brutalement sur le sol. Le choc sismique ainsi créé envoya à terre une bonne moitié des troupes de Masque de Fer. Reinhardt déploya ensuite son écran protecteur, absorbant les tirs de l’autre moitié.

 

Grâce à cette action, les membres de l’escouade purent battre en retraite en toute sécurité. Le transport décolla aussitôt que toute l’escouade fut à bord.

 

- Ouah, merci doc, dit Tracer à Angela. Tu nous as sauvé la mise là-bas. Toi aussi, Reinhard !

 

- C’est incroyable ! s’exclama Mei. Vous avez ressuscité les morts ! Je ne savais pas que vous pouviez faire cela, docteur Ziegler…euh…Angela.

 

Cette dernière afficha un sourire modeste :

 

- Tu sais, Mei, le corps humain n’est rien de plus qu’une machine organique. Et la mort, c’est le moment où la machine cesse de fonctionner. Avec les soins adaptés, il est possible de réparer le corps s’il s’arrête trop tôt. Mais je n’ai développé cette technologie que durant la dernière année de l’existence d’Overwatch. L’appareil n’a jamais dépassé le stade de prototype. Je suis la seule à en disposer. C’est pour ça que tu n’as jamais vu cela avant.

 

- En six ans vous n’avez jamais pu convaincre qui que ce soit de financer une reprise des recherches ? demanda Winston, étonné.

 

- Non. Je suis également surprise que cela n’ait intéressé personne, ne serait-ce que de riches individus soucieux de leur survie. Mais j’imagine que cela doit être trop coûteux, même pour eux.

 

- C’est bien beau tout ça, mais il faut savoir si ce qu’on a fait a servi à quelque chose, dit Torbjörn. Athéna, quel est le statut du convoi ?

 

- Le convoi est arrivé à Olomouc sans être attaqué, déclara l’intelligence artificielle.

 

L’annonce rendit le sourire à toute l’escouade. Tracer poussa même un vivat.

 

- Mission accomplie, énonça Winston d’un ton ravi.


(Commentaire de l’auteur : Ceux qui sont aussi pointilleux que moi avec l’univers officiel remarqueront que Gérard est décrit comme marié avec Amélie Lacroix (futur Widowmaker/Fatale) seize ans avant le temps « présent », ce qui est normalement impossible.


En effet, la biographie de Widowmaker indique qu’elle a 33 ans à l’année 0 (période « aujourd’hui » dans ma fan-fiction). 33-16=17, elle n’avait donc pas l’âge légale du mariage 16 ans avant. Donc, dans « ma version » de l’univers, Amélie Lacroix est un peu plus vieille qu’officiellement, de trois/quatre ans environ. C’est la seule modification que je me suis permis de faire.)

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