Overwatch : Recall
Chapitre 4 ; Gardienne
Précédemment : Jack et Ana ont décidé d’attaquer de nuit le Riad dans lequel se terre Hakim et ses hommes. Ils ont vu un camion rentrer dans le jardin et compte bien savoir ce qui se cache à l’intérieur. Alors que Jack s’infiltre à l’intérieur, Ana le couvre de l’extérieur. Cette dernière se retrouvera cependant bien acculée et tombera nez à nez avec Faucheur... ! Quant à Jack, après un affrontement tendu avec Hakim, il est rejoint en fin de bataille par un ancien ami...
Dans un geste théâtral, il leva l’une de ses armes, alors que les voix des soldats derrière Ana étaient de plus en plus audibles, et tira. Sauf qu’elle dégaina en même temps que lui et appuya sur la détente d’une petite arme de poing avant lui. Un projectile sombre partit dans un petit bruit aigu et se logea dans le gros canon de Faucheur. Au moment où il appuyait sur la détente, son fusil à pompe gonfla et lui explosa dans les mains. A l’aide de sa cape, Ana s’était protégé le visage, mais la puissance de la détonation la rendit sourde quelques secondes, alors qu’elle se sentait tombée en arrière. Une douleur aiguë naquit dans son abdomen, et elle comprit que l’une des balles du fusil à pompe de Faucheur l’avait touchée.
— Sale insecte... !
Il leva la jambe et écrasa son ventre de ses bottes ferrés, lui arrachant un cri de douleur. Désormais, les soldats de la Griffe étaient sur le toit avec elle.
— Heureusement que j’en ai un deuxième, fit-il de sa voix grave en sortant une arme identique de sa cape.
Elle pouvait sentir le sourire sadique à travers sa voix.
— Tu es tellement cliché, Gabe, toi-même tu ne dois même pas croire à ce que tu dis, grimaça-t-elle dans un souffle. “Sale insecte”, franchement ?
Elle lâcha un sourire empreint de souffrance, mais qui traduisait aussi un véritable amusement.
— Tu ne veux pas m’enlever mon masque pour me regarder dans les yeux quand tu me tueras, comme tous les grands méchants que tu dois idolâtrer ? Ou bien me dire qu’elle est ton plan machiavélique pour me laisser réfléchir à... ?
Faucheur libéra miraculeusement son estomac, mais ce ne fut que pour mieux lui exploser le nez avec ses bottes renforcés. A priori, elle avait touché du doigt un sujet sensible. Mais elle était quand même arrivée à son objectif : retarder le prochain coup de pompe et analyser ce qui se passait autour d’elle. Lorsqu’il leva de nouveau son pied, elle vit son masque blanc, et celui de trois autres soldats qui la regardaient de haut, leurs armes rangées, comme s'ils la sous-estimaient. Grossière erreur, jeunes gens... ! Alors qu’elle tâtait son nez délicatement, elle ne pouvait s’empêcher d’éprouver une profonde haine pour ce qu’avait fait de lui la Griffe. En son for intérieur, elle était convaincue qu’il avait subi un lavage de cerveau, lui et Amélie.
— Toi et Jack êtes foutus ! répliqua-t-il.
— Sauf qu’il n’y pas que Jack et moi... nasilla-t-elle en se rappelant les noms des drones qui arpentaient toujours le ciel sombre en tenant occupé le système de défense aérien du Riad.
Le sifflement dans ses oreilles était désormais bien parti, mais l’impression que sa boîte crânienne avait subi des dommages irréversibles dû à son coup ne voulait pas la lâcher.
— Qu’est-ce-que... ?
Il ne put arriver au bout de sa phrase. Ana avait éclaté une grenade qui lâcha un gaz violet et qui se répandit rapidement dans leur groupe. Dans la foulée, elle dégaina son pistolet à seringues et en planta une dans la cuisse de Faucheur, avant de pivoter sur le côté, ignorant du mieux qu’elle put sa douleur au ventre et à la tête. A sa grande surprise, elle se rendit compte qu’il y avait plus de trois soldats, et elle ne pouvait prendre le risque de rentrer dans le bâtiment par la porte de la cabine que Faucheur avait défoncé : il avait peut-être d’autres soldats cachés là-dedans. Au lieu de ça, elle décida de courir vers le rebord du bâtiment, vers le Riad, et sauta dans le vide sans aucune hésitation. Elle déplia sa cape et plana jusque dans le patio, à côté de la fontaine centrale, et des palmiers et autres plantes exotiques et multicolores du jardin à la française. A l'étage, tout autour, déambulaient des hommes de la Griffe qui regardaient les drones voltiger au-dessus d’eux, fusil sur l’avant-bras.
— Dans le jardin, faites feu ! entendit-elle crier en arabe.
Elle envoya une seringue soporifique dans le cou du bavard et se faufila dans l’ombre des grands arbres sans bruit, si bien que les autres ne surent de quoi il parlait : ils se doutaient cependant que quelque chose n’allait pas lorsque son corps bascula au-dessus de la rambarde et atterrit mollement dans un buisson. Ils entreprirent de se rassembler pour descendre dans le jardin. Elle jeta un coup d’œil en hauteur et vit les soldats redescendre par les mêmes cordes utiliser pour escalader l’immeuble. Il faudrait qu’elle s’occupe dans un premier temps d’une quinzaine de soldat avant que des renforts rappliquent. Comme au bon vieux temps... !
*****
— Torby ? répéta Jack, cette fois avec un sourire incertain.
— Comment vous me connaissez ? grommela Lindhöm Torbjörn en levant son pistolet à rivets vers lui.
Le soldat fut interloqué quelques secondes, avant de répliquer.
— Mais enfin, Lindhölm, c’est moi, Jack !
Le petit homme pivota légèrement la tête sur le côté, ses gros sourcils broussailleux tellement froncés qu’on n’en voyait plus ses yeux noisette, et que ses rides n’en étaient qu’accentué dans une caricature de lui-même comique. Jack comprit alors le problème, et enleva tour à tour le masque de la Griffe, et le sien. L’ingénieur en lâcha son pistolet en même temps que sa mâchoire se décrochait.
— Toi... ? Mais... tu étais censé être mort ?
— Ah... euh, oui, en effet. Je t’expliquerai plus tard ! expédia-t-il d’un revers de la main.
— Mouais, fit Torbjörn qui sortit de sa paralysie aussi brusquement qu’il était rentré en état de choix. En même temps, c’était un peu prévisible. Mais quand même, t’aurais pu prévenir !
— Nous en parlerons plus tard, répliqua Jack, moins enthousiaste qu’il y a une poignée de seconde.
— Et qu’est-ce que tu fais tout seul ici à Gizeh dans le repère d’un dealer d’armes avec l’uniforme de la Griffe ? s'enquit-il alors qu’un incendie se déclarait derrière lui. Tu sais que si je t’avais pas vu te battre avec Hakim, je t’aurai troué la tête alors que j’étais encore sur la tyrolienne !
—En fait, je ne suis pas seul, Ana est avec moi. Et...
— Ana ? Amari, ou bien une autre Ana ? Dis –moi que c’est une autre Ana, parce que là si c’est la vraie Ana, je pense qu’il me faudra une chaise pour...
— Heu, oui la vraie... !
Cette fois, le suédois déconnecta complètement, à l’image de ses yeux devenus vitreux, et Jack ne comprenait que trop bien. Ce n’était pas un, mais deux revenants qu’il était sur le point de rencontrer cette nuit. D’autant plus que cela faisait six ans qu’Ana était censée avoir disparu. Vu la précaution qu’elle mettait à effacer ses traces derrière elle, il se demanda soudain si sa propre fille était au courant de son existence, ou si elle avait vécu comme un fantôme solitaire pendant toute ces années.
— Je sais que c’est un peu dur à.… à...
— Et merde... !
Il se retourna et fouilla prestement dans les papiers éparpillés partout ce que cachait bien cet homme qu’il traquait, alors que devant lui la salle devenait aussi écarlate et chaotique que le centre du soleil : La lave allait détruire tout le pan de ce bâtiment.
— C’était peut-être un peu gros comme attaque, non ? ironisa Jack. En intérieur, en plus.
— Merci, mais non merci pour le serment, commandant. On dirait que tu as déjà repris du service... Ou plutôt que tu ne l’as jamais quitté !
Jack eut un sourire.
— T’es toujours aussi ronchon, mais tu m’as quand même manqué.
— J’t’emmerde, répliqua-t-il en le gratifiant à son tour de l’un de ses rares sourires. Et toi aussi, tu m’as manqué. Ça m’a affecté plus que je ne le pensais quand ils ont annoncé ta mort !
— Euh... merci... ? lâcha le soldat, cette fois au bord de l’éclat de rire, pas sûr de savoir si c’était une info réconfortante ou pas, alors que son ami lui tournait le dos.
Torbjörn ramassa l’ordinateur dont l’écran s’était fissuré, et y inséra l’une de ses clés USB, avant de le reposer par terre.
— Elle va prendre toutes les données disponibles, expliqua-t-il brièvement avant de se pencher sur des liasses de papiers éparpillées.
Jack remit son casque en s’approchant : Il avait l’impression que ses poumons se tapissaient de suie tant la senteur de brûlé emplissaient ses narines. La chaleur donnait une consistance lourde à l’atmosphère, et la fumée noire et épaisse sortait par bouquet de la baie vitrée cassée.
— Tu sais ce que tu cherches ?
— Pas avant que je le trouve, répliqua son ami, les yeux fixés sur une carnet rempli de numéro.
— Pareil, opina-t-il alors qu’il louchait sur une lettre d’Hakim à un correspondant en Arabie Saoudite. Je pense qu’Hakim est une plaque tournante mondiale dans le deal d’armes, mais il me faut des preuves... !
— Mondial ? Il se ferait un peu plus protéger, tu ne penses pas ? J’ai trouvé l’entrée bien trop simple.
Jack le dévisagea un instant, et comprit où il voulait en venir.
— Tu penses à un piège, comprit-il. Ça m’a aussi effleuré l’...
Il entendit alors quelqu’un hurler en arabe derrière lui, e pivota sur ses talons. Hakim s’était levé, et il avait la paume ouverte vers lui, un petit canon au centre grandissant à vue d’œil. Il leva son pistolet et tira, mais c’était trop tard. Alors que le coup partait, il prit une onde de choc qui lui donna l’impression de s’écraser contre un mur pendant un accident de voiture. Ses organes étaient comme écrasés par la pression, tout vola en éclat autour de lui. Il perdit momentanément le sens de l’équilibre alors qu’il poussait un mugissement de douleur, alors qu’il fut jeté en l’air, en plein dans la fournaise qu’avait créé Torbjörn. Bizarrement, dans le même temps, l’attaque d’Hakim avait dû activer le système anti-feu, et une pluie de fines gouttelettes tombèrent sur leur visage lorsqu’ils retombèrent. Le sol était d’une chaleur incandescente, si bien que Jack bondit sur ses jambes de nouveau en enlevant son uniforme, sous lequel il avait un jean noir et un t-shirt blanc.
Hakim n’était plus sur la terrasse, l’ordinateur non plus, et tous les papiers étaient déjà réduits à l’état de cendre. L’absence de crépitement des flammes leur permit d’entendre dans l’obscurité de la nuit bien entamée, les voix rugissantes des soldats dans le patio. Ils échangèrent brièvement un regard entendu :
— Je vais voir si Hakim a sauté, décida l’ingénieur en regardant la terrasse. Va voir le patio, et rassemblons-nous à l’intérieur.
Jack hocha de la tête et courut dans le corridor avant de descendre quatre à quatre les escaliers qui menaient au rez-de-chaussée. Il traversa comme un éclair l’antichambre et poussa les deux grandes portes coulissantes pour arriver dans le jardin central. Alors qu’il s’engageait dans le patio, un soldat glissa de la rambarde du premier étage et tomba à ses pieds dans un gros bruit sourd. Il agrippa son arme, mais il n’y eut plus aucun autre mouvement. Il avança lentement, regarda brièvement tout autour et au-dessus de lui, se demandant qui était la cause de ce soldat volant, avant de continuer son chemin dans le jardin à la française. Il vit, nichée dans des buissons ou face contre gazon, des dizaines de soldats assommés. Un frisson lui parcourut l’échine, et ce n’était pas à cause du froid.
— Qui est le responsable de ce massacre ? murmura-t-il dans son casque.
Soudain, il sentit un canon dans son cou, et une voix grave et modifiée.
— Ne bouge plus, soldat, ou je t’explose le crâne. Mains en l’air !
Jack jura intérieurement, et jeta son pistolet devant ses bottes avant de lever les mains à hauteur d’épaules. Il faillit sursauter lorsqu’il entendit son assaillant éclater de rire. Il ne put s’empêcher de se retourner, et son cœur fit de même en voyant qui le tenait en joue.
— Ana !
— Décidément, tu n’as jamais su couvrir tes arrières seul, Jack ! s'exclama-t-elle avec un rictus moqueur en enlevant le casque qui avait modifié sa voix. Heureusement que j’étais là toutes ces années... !
Jack eut un rire doux, qui ne déclencha pas d’horrible quinte de toux, à son grand bonheur. Il se baissa pour ramasser son arme, se sentant bête : qui d’autre aurait bien pu mettre à mal une petite armée à elle toute seule que la redoutable égyptienne ?
— Tu sais que tu as toujours été notre gardienne pendant tout ce temps ! répondit-il. Tout va bien ? ajouta-t-il alors qu’il remarquait tout juste le filet de sang épais coulant de son nez.
— Jack, j’ai vu Gabriel ! l'avertit-elle, comme s’il elle n’avait pas entendu la question.
— C’est cet enfoiré qui t’a amoché ?
— Oui. Il aurait pu me tuer dix fois, mais il n’en a rien fait ! J'ai vraiment l'impression qu'il porte un masque de méchant, autant métaphoriquement que littéralement. C’est toujours le Gabriel qu’on connaît, mais peut-être est-il sous la menace de quelque cho...
— Ce n’est plus le même, Ana ! l'interrompit-il en levant la voix. Il a une liste de victime plus grande que le Burj Khalifa, et il aime ça !
— Et tu lui as parlé pendant tout ce temps ?
Devant l’absence de réponse de son ancien commandant, elle sourit :
— C’est bien ce que je pensais. Tu comprendras ce que je veux dire le jour où tu le croiseras.
— Le jour où je le croiserai, marmonna-t-il, grognon, je lui collerai une balle dans la tête, lui et toute sa clique de dégénéré.
—أحمق ! Tu es aussi têtue que lui ! s'exclama-t-elle en faisant une moue qui fit de nouveau sourire Jack.
Il avait passé suffisamment de temps avec elle pour savoir qu’elle l’avait traité d’idiot, et une petite voix dans sa tête lui disait qu’elle avait raison. Cependant, il avait cessé de l’écouter il y a plusieurs années, alors qu’il était commandant-en-chef d’Overwatch, avec des papiers à remplir, un gouvernement à écouter, et des troupes à gérer, de peur de devenir fou.
Un bruit d’hélicoptère au loin attira leur attention. Ce pouvait être une floppée de personnes, mais Jack décida que c’était plutôt des renforts de la Griffe appelés après le bordel qu’ils avaient créé. Sans dire un mot, il attrapa Ana par l’avant-bras et continua son chemin vers l’entrée d’un pas rapide. Il dépassa la porte et s’engagea sur le chemin de petits cailloux blancs qui menait au portail. Jack s’approcha des buissons qui délimitaient la voie et y enfonça les mains jusqu’au coudes avant d’en ressortir comme par magie son fameux fusil mitrailleur laser. Il le fit pendre à son épaule par la lanière.
— Il n’y a personne, c’est une chance ! s'exclama Ana. Vite, sortons !
Cette fois, c’est elle qui courut devant, Jack assurant ses arrières et se demandant si Lindhölm allait bien. Il n’y avait aucune trace d’Hakim, et les soldats de la Griffe semblaient avoir été tous mis à mal. Au loin, ils entendirent alors un bruit de moteur, dans le jardin laissé à l'état sauvage à côté du Riad, avant de voir une grosse camionnette dont les lumières avant les éblouirent : C’était celle qu’ils avaient vu entrer un peu plus tôt. Elle arriva trop vite pour qu’ils puissent sauter dessus, et Jack n’eut le temps que d’attraper Ana et de se jeter sur le côté. Le portail vola en éclat tandis que le véhicule déboulait dans la rue désertée depuis les premiers coups de feu, et filait vers la banlieue du Caire.
— Tu ne vas pas le poursuivre ? s'enquit Ana, perplexe.
— J’aurai bien aimé, répondit-il en l’aidant à se lever. Mais, je n’allais pas vous laisser, Torby et toi contre ces hélicoptères qui arrivent.
— Torby ! Lindhölm est donc bel et bien ici !
Il aurait aimé lui répondre, mais un nouveau bruit de moteur glaça leurs cœurs et sella leurs langues au palais. Ils détournèrent le regard vers une nouveau véhicule qui les éblouissait avec ses lumières blanches. Ils voulurent s’écarter, mais c’est elle qui les dévia et freina en dérapant sur le chemin de cailloux. La porte passager s’ouvrit :
— Lindhölm !
— Dépêchez-vous de monter, allez !
Il laissa le volant à Ana et monta à l’arrière de ce qui semblait être une Jeep militaire volante. Elle démarra en trombe, faisant crisser les pneus, et entreprit de suivre la camionnette qui avait essayé de les écraser un peu plus tôt. Au-dessus de leurs têtes, les hélicoptères, gros insectes brillantes et volants scrutaient nerveusement le quartier de leur projecteur. L’un des hélicoptères étaient en vol stationnaire devant le Riad, et des soldats descendaient de la large cabine en glissant le long d’une corde. En plus de leur phare, un lampadaire sur deux illuminait d’une lumière faible et brouillonne le quartier calme barré d’une route à sens unique.
A travers le portail défoncé du Riad, ils virent alors plusieurs Jeep du même acabit que la leur sortirent dans la rue étroite, certaines avec des grosses mitrailleuses sur leur toit. Soudain, la vitre horizontale qui les séparait de Torbjörn éclata par un coup de coude de ce dernier. Il s’activait à enlever sa grosse armure rouge et jaune.
— Les cheveux blancs te vont bien, Ana ! s'écria-t-il, essoufflé.
— Ça fait un bail, hein Lindhölm ?
— D’où sortent toute ces voitures ? s'enquit Jack.
— Il y a un parking plein de ces merdes sous le Riad. Tu y accèdes par derrière en contournant, sur le côté.
— Fallait prendre ceux avec la mitrailleuse ! le taquina-t-il.
— J’ai pris le premier venu, éluda-t-il.
Il avait fini d’enlever son armure, et l’avait déplié avant de le poser au bout du coffre comme les panneaux derrière lesquelles on s’habille. Alors qu’Ana prenait un virage serré, le faisant tomber, les balles commencèrent à tinter contre leur carrosserie, d’abord comme une pluie timide, puis plus régulièrement. Jack aperçut alors ses drones sortir de la nuit noire descendre vers sa position avant d’atterrir devant ses pieds. Sans qu’il eût touché à quoi que ce soit, ces derniers se mirent à s’emboîter entre eux dans des cliquetis de mécanismes qui qui se mettent en place pour devenir une tourelle.
— Et Hakim ?
Torbjörn montra du doigt devant lui et Jack comprit qu’il était dans la camionnette qu’ils suivaient.
— J’aurais fini de la mettre en place dans quelques secondes. On fait quoi ?
— C’était bel et bien un piège, comme tu disais, comprit Jack. On est poursuivis par une quinzaine de Jeep et des hélicos en renfort. Ils nous ont laissés rentrer pour mieux nous capturer. Si tu n’étais pas arrivé pour bouleverser leurs plans... !
— Mais comment ont-ils pu prévoir que vous seriez là ? interrogea le suédois en fronçant les sourcils.
— On en débattra après. S’il faut, il n’y a rien dans ce camion qu’on est en train de suivre... !
— Non, je suis sûr qu’il y a un truc qui cloche là-dedans ! répliqua Torbjörn. Je le suis depuis Cadix, en Espagne.
— Mais on ne peut pas le suivre dans ces conditions, renchérit Ana. Il faut s’enfuir.
— Mais la Jeep est blindée...
— Lindhölm, on ne va pas mettre la ville à sac, ce soir, tu connais la situation politique du pays ? Il faut se séparer, sinon on va y rester.
—Pour se retrouver où ?
Elle sortit maladroitement une carte de sa poche qu’elle plaqua dans la paume ouverte de Jack. L’adresse était en arabe, mais ils pourraient facilement retrouver la localisation. Les deux hommes la copièrent tranquillement alors que les tirs redoublaient d’intensité derrière eux. Un de leur rétroviseurs vola en éclat, et les vitres des voitures garés à côté d’eux éclataient régulièrement comme si une pluie de grêlons particulièrement violente et ciblée s’était abattue sur la capitale.
— Torbjörn, tu reprendras le volant quand tu auras fini de paramétrer ta tourelle, décida Jack. Moi, je prendrai la moto volante. Elle marche ?
— Je vais te dire ça, répondit l’ingénieur en se penchant sur le deux-roues qui oscillait dans le coffre au gré des embardées d’Ana.
— On dirait qu’ils vont rester dans des petites rues ! s'exclama soudainement Ana. Jack, j’ai l’impression qu’ils veulent nous encercler.
C’est au moment où elle le dit que ça lui parut évident. Ils n’arrêtaient pas de faire des virages depuis tout à l’heure, comme s’ils tournaient en ronds.
— Si tout se passe bien, on va contrarier leurs plans, répliqua-t-il calmement.
— Je vais sauter du véhicule lorsque Torbjörn reprendra le contrôle, fit-elle. Je connais ces rues mieux que personne, ils se perdront en essayant de me suivre.
— Ça marche, accepta-t-il sans concession, sûre qu’elle s’en sortirai.
— La moto fonctionne. Ma tourelle est prête. Je vais enlever mon armure d’une seconde à l’autre
Jack hocha de la tête et brandit son fusil mitrailleur laser. Il rangea ensuite son petit pistolet dans son holster.
— Ana, dis-nous quand tu es prête à sauter, lâcha Jack d’une voix rauque alors qu’il remettait lentement son casque sur son visage.
— Au prochain virage, à droite.
Il regarda rapidement devant lui. Ils y seraient dans une vingtaine de secondes. Ils pouvaient voir la camionnette tourner au virage vers la gauche.
— On abandonne notre cible ?
— C’est pas le genre de la maison, répliqua l’égyptienne. J’ai lancé un traceur sur les portes arrière pendant que vous parliez. Vous pourrez voir sa localisation sur votre G.P.S.
— Prépare-toi à enlever ton armure, Torby, fit Jack, surexcité. J’espère que t’es pas trop rouillé... !
Une poignée de secondes plus tard, Ana virait brutalement à droite.