Cœur d'Émeraude

Chapitre 25 : Trouble de stress post-traumatique

4010 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour il y a 3 mois

Navré pour le retard, avec Noël j'étais pas mal occupé d'une part, et j'ai du faire des heures et des heures de recherche sur le sujet pour rester cohérent et exact.


D'ailleurs, si vous avez aimé le chapitre précédent, vous allez adorer celui-ci. À contrario, si vous n'avez pas aimé, vous allez détester...


Bref. Encore beaucoup de détails techniques, d'explications, etc... le chapitre sera particulièrement dense et long, plus que la moyenne, mais vous aurez du temps pour bien le lire et le relire si nécessaire. Car oui, je ne pense pas beaucoup écrire en ces jours de fête. Et si voulez me faire un beau cadeau de Noël, laissez des reviews, des commentaires, des évaluations, ce sera vraiment le plus beau des cadeaux pour moi 🙂


Sur ce, je vous souhaite à toutes et à tous des joyeuses fêtes de fin d'année, et une bonne lecture. Merci à vous de me suivre et me lire. Plein de Serious kiss 😙


"Je n'ose pas imaginer ce qu'elle a vécu là-bas... dit Hinata alors qu'un frisson lui parcours l'échine.

-J'ai essayé de savoir. Mais il était inutile de chercher bien loin, son comportement parlait de lui-même, explique Edgar.

-C'est-à-dire ? Demande Hinata.

-Elle avait des réactions très... évocatrices pour une enfant de son âge. Je me souviens très clairement de la première fois où elle c'est retrouvée devant une télévision. Je me souviens de son regard, elle la regardait comme si c'était le diable en personne. Je m'en souviens parce-que ce jour-là on a eu une panne de télé, et elle grésillait, émettait des parasites. Un éducateur a voulu aller la voir, et là...elle c'est mise à hurler et à déchaîner ses pouvoirs pour empêcher quiconque de l'approcher. Elle était terrorisée, c'est là que j'ai compris les sévices qu'on lui a infligé dans ce labo, explique tristement Edgar, se remémorant son sentiment d'impuissance face à une fillette si jeune et déjà brisée par la vie. Hinata tente de rationaliser l'information. Mais imaginer une petite fille, terrorisée, désespérée et forcée de regarder un écran se lequel doit défiler des horreurs est au-dessus de ses forces.

-Elle a été... torturé ? Demande Hinata, les traits déformés par l'horreur.

-J'en suis persuadé. Et étant donné qu'elle avait le même type de réaction lorsqu'elle entendait un robinet coulé, et qu'elle se montrait extrêmement possessive, avec un comportement accumulateur, quand il s'agissait de nourriture, pour ma part, j'ai rapidement déduit le reste, finit Edgar.

-Mais qu'est-ce qu'ils espéraient à torturer une petite fille de la sorte ? S'indigne Hinata pour qui de telles choses sont tout simplement aussi inhumaines qu'inconcevables.

Edgar hausse nonchalamment des épaules.

-J'aimerais vous apporter une réponse pertinente, quelque chose de rationnel, logique. Mais il n'y en a pas. Malheureusement la nature humaine ne recèle pas que du bien, il y a aussi de la cruauté, de l'égoïsme, de la violence. N'essayez pas de chercher plus loin que ça Docteur Müller, j'ai essayé, et à part me faire des nœuds au cerveau pour tenter de comprendre quelque chose d'irrationnel, je n'y ai rien gagné, explique Bouvier, d'un ton étonnement calme et détaché. Peut-être trop détaché pour Hinata, mais elle est suffisamment expérimentée et intelligente pour savoir et comprendre que dans leur corps de métier, le détachement et cette faculté de "déconnecter" le cœur du travail est essentiel pour ne pas perdre la raison. Mais tout de même... cependant un détail attire son attention. Une zone qui, selon elle, mérite d'être mise en lumière.

-Et elle a réussi à garder tout ça pour elle ? Toute cette souffrance ? Ces souvenirs ? Pendant vingt ans ? Demande Hinata incrédule.

Edgar semble soudainement réfléchir, comme pris dans un dilemme. Puis il ouvre le tiroir de son bureau et en sort un vieux dossier usé par le temps qu'il tend à son consœur. 

-Plus ou moins, oui, prévient-il. La jeune femme s'en saisit et voit que c'est celui de Tatsumaki. Elle consulte Bouvier du regard qui lui enjoint de la main à consulter le fichier. Les mains tremblantes, redoutant ce qu'elle va y trouver, Müller ouvre le document avec la prudence de quelqu'un ouvrant le musée des horreurs. Derrière de nombreuses pages de notes, sans doute des compte-rendus de séances, elle trouve des dessins. Des dessins d'enfants, mais particulièrement glauques et morbides, symboles d'un enfer indicible. Les dessins mettent en scène une petite fille aux cheveux verts dans diverses situations qui font la lumière sur ce qu'elle a vécu, sur la nature extrêmement cruelle des expérimentations. Un premier dessin montre une petite fille sanglée sur une table, un genre de casque de musique ou de cache-oreille grossier sur la tête, et plein de petits éclairs bleus qui dansent autour, comme si elle subissait un traitement par électrochocs à l'ancienne. Hinata déglutit une première fois, mal à l'aise devant une telle horreur. Un autre dessin montre cette même petite fille aux cheveux verts, assise et vraisemblablement attachée à une chaise, forcée de regarder un écran sur lequel semble défiler des images violentes et horribles. Hinata découvre ces dessins d'enfants, la main portée à la bouche, les yeux écarquillés et le visage figé dans une expression profondément choquée. Elle est soudainement prise d'un malaise et elle réprime un haut-le-cœur, provoquée par le caractère insoutenable des images qu'elle a sous les yeux.

-C'est... je ne peux pas continuer à regarder ça... lance-t-elle en détournant le regard et en rendant le dossier à Bouvier qui s'empresse de ranger le dossier comme s'il lui brûlait les doigts. Hinata déglutit à nouveau, péniblement, ne parvenant pas à effacer ces images qui lui brûlent l'esprit comme de l'acide.

-Je pense avoir eu la même réaction que vous lorsque j'ai découvert ça. Je ne savais pas ce que je pouvais dire, faire ou même penser. Cette gamine avait déjà endurer plus d'horreurs que certains militaires que j'ai reçu en consultation.

-Mais... comment a-t-elle pu grandir avec ça ?... ces souvenirs ?... ces traumatismes ? Demande Hinata, intriguée, horrifiée et impressionnée, des larmes de colère et d'indignation lui montant aux yeux.

-Et bien... Tatsumaki est d'une force mentale et d'une résilience étonnante pour commencer, ensuite, malgré son âge, elle était très mûre, très intelligente. Cela lui a permis d'établir des stratégie de défense pour se préserver. Parmis ces stratégies j'ai noté une hypervigilance, un besoin de contrôle obsessionnel et un isolement émotionnel et social, une méfiance généralisée d'autrui et une rationalisation de son passé par une quête du perfectionnisme en tâchant de devenir la plus puissante héroïne de l'association, explique Edgar.

-Vous êtes en train de dire que c'est grâce à tout ça qu'elle parvient à ne pas... péter un plomb ? Demande Hinata pour qui ça semble impossible. Edgar semble hésiter sur la façon d'expérience ce qui suit. Il ouvre plusieurs fois la bouche en dodelinant de la tête.

-Je vous ai dit que Tatsumaki souffrait dès l'enfance d'un SSPT, mais j'ai un peu simplifié pour évité de vous inonder de jargon technique, mais puisque l'on parle de ça... se résigne-t-il 

-Tatsumaki ne souffre pas exactement d'un syndrome de stress post-traumatique au sens ou vous l'entendez, c'est bien plus profond que ça. Pour être précis, c'est un trouble de stress post-traumatique complexe, explique Edgar.

-En quoi c'est différent d'un syndrome de stress post-traumatique classique ? Et en quoi ça justifie qu'elle soit... elle ? Enfin elle n'a pas l'air folle à lier ou complètement dérangée !

-Je vais y venir. Un SSPT résulte d'un événement traumatique ponctuel. Une agression par exemple peut occasionner un syndrome de stress post-traumatique. L'évènement a une durée très limitée dans le temps, et surtout l'événement est une anomalie pour le cerveau et le mode de fonctionnement de l'individu, qui comprend que ce qu'il a vécu est un traumatisme, même s'il en subit les conséquences, ainsi le SSPT peut-être traité, car il est conscientisé. De plus, c'est comme une alarme qui retentit à des moments où des environnements précis rappelant le traumatisme en question. Un trouble de stress post-traumatique complexe est beaucoup plus ancré et pernicieux car il est le résultat d'un traumatisme, ou d'une série de traumatisme, étalé dans le temps, constant ou quasi-constant et répété. Ça occasionne des stratégies de survie, destiné à préserver la psyché du sujet, mais comme le traumatisme s'ancre dans le quotidien de la victime, ses stratégies deviennent des modes de fonctionnement. C'est comme si l'alarme sonnait en permanence, le sujet se construit avec cette alarme. Par exemple, dans le cas de Tatsumaki, son isolement social et émotionnel, qui était au départ une stratégie de préservation et son hypervigilance, sont devenues des traits de caractère, ces traits de personnalité ancrés sont aussi appelés des distorsions cognitives, car Tatsumaki ne voit le monde qu'à travers ce prisme qu'est son traumatisme, explique Bouvier.

-Alors... elle s'isole du reste du monde parce-que pendant longtemps, son entourage était les scientifiques qui la torturait, donc maintenant elle se méfie de tout le monde, résume Hinata.

-Oui, d'une part, précise Bouvier en levant un doigt.

-Et si elle n'est pas devenu folle, c'est parce-qu'elle a... intégrée les symptômes ? Comprend doucement Hinata, mais avec une note d'incompréhension.

-Exactement. Et il y a plein d'autres symptômes qui deviennent des traits de personnalité, comme son incapacité à réguler ses émotions qui devient une impulsivité poussée à l'extrême, complète le psychiatre, avant de reprendre.

-Et sa carrière de Classe S n'arrange pas du tout les choses. Bien au contraire, ça ne fait qu'exacerber, renforcer ses comportements, puisqu'ils permettent à Tatsumaki d'être une excellente super-héroïne, tout en implantant plus profondément ses comportements en traits de caractères définitifs.

-Si j'ai bien compris, le traumatisme engendre des comportements, comme une vigilance et une méfiance constante et généralisée, qui deviennent des... sortes d'habitudes ? C'est vraiment possible ? Essaie de comprendre la jeune femme.

-Vous n'imaginez pas à quel point l'esprit humain est adaptable, c'est ce qui en fait toute sa résilience, sa complexité, mais c'est comme un bras cassé qui guérit dans une mauvaise posture. Après il est très compliqué de lui redonner sa forme normale une fois le travail de guérison terminé, compare Edgar en espérant être plus clair. Et en effet la comparaison permet à Hinata de mieux comprendre ce qui lui échappait jusqu'à présent.

-Mais avec cette façon de penser, d'agir, de vivre, ce qu'elle vit au quotidien... ce... stress constant qui doit peser sur elle... ce doit être usant, déclare Hinata effarée.

-Pour nous, c'est une charge mentale énorme, pour elle, c'est son quotidien depuis ses sept ans, dit Edgar.

-Et oui, ça doit certainement créer un épuisement émotionnel et psychologique intense, d'être tout le temps sur ses gardes, envers tout et tout le monde. Et si c'est vrai qu'à l'époque, lorsque l'on a récupéré Tatsumaki, elle était presque constamment épuisée et à bout de nerf, encore une fois son corps et son esprit ce sont habitués, mais tout gardant quelques séquelles, comme de l'irascibilité, un grand besoin de sommeil, répond Edgar.

-Il n'existe pas de thérapie ?

-Si, bien-sûr que si, mais elle doit être basée sur le volontariat, la volonté de guérir. Le traumatisme de Tatsumaki est littéralement son credo de vie, toute sa carrière, tous ses objectifs de vie sont issus de ce traumatisme. Pour Tatsumaki, ce sera comme changer toute sa personnalité, ses certitudes, sa philosophie de vie. Ce serait un travail titanesque et qui implique de devoir décortiquer des souvenirs et un passé qu'elle doit s'efforcer d'enterrer le plus profondément possible, de manière consciente ou non, explique Edgar. Hinata hoche pensivement la tête. Les explications d'Edgar lui permettent de mieux comprendre bien des choses sur sa patiente, notamment sa réputation d'héroïne inaccessible et de très mauvais caractère. Mais avec tout ça, elle n'a pas vraiment eu de réponses à LA raison pour laquelle elle est venue.

-Mais... comment savoir si elle a développé un syndrome de stress post-traumatique à cause de sa défaite ? Demande Hinata. Edgar hausse les épaules.

-Le SSPT et le TSPT-C partagent beaucoup de similitudes, entre les symptômes et les stratégies de défense. Seules les causes divergent vraiment et permettent une identification claire. Mais pour ce qui est de Tatsumaki, étant donné qu'elle souffre déjà d'un TSPT-C, il est très difficile de déterminer si sa crise de panique est lié à ce trouble qui aurait été exacerbé par le traumatisme récent, ou bien à un SSPT qu'elle aurait développé. Et tant qu'elle est inconsciente et ne peut pas s'exprimer, ça va être très compliqué de discerner les deux troubles, répond Edgar, tâchant d'exprimer la complexité de la situation.

-Je vous avoue que ça ne m'arrange pas de juste... attendre, admet Hinata qui a la nette impression de tourner en rond.

-C'est ce qui fait toute la complexité de la psychiatrie, et ce qui la différencie des autres disciplines. En psychiatrie vous êtes spectatrice, pas actrice, et vous devez accepter l'idée que vous êtes impuissante à aider votre patient tant que lui n'a pas évolué, d'une façon ou d'une autre, explique Bouvier. Hinata hoche pensivement la tête, tâchant de ravaler sa frustration.

-Vous vous imaginiez que j'avais toutes les réponses et les clés à vos problèmes hein ? Demande Edgar en souriant, amusé.

-Je l'admets oui, du moins je l'espérais, avoue-t-elle en même temps que sa naïveté. Edgar ne retient pas un souffle amusé bien malgré lui. Il est habitué à ce que les gens, du simple citoyen curieux ou en détresse au médecin spécialiste, à l'instar d'Hinata, viennent vers lui en quête d'une solution miracle face à la complexité tortueuse de l'esprit

-Vous savez, ces crises ne sont pas nécessairement une mauvaise chose, en particulier en ce qui concerne Tatsumaki, commence Edgar, au grand étonnement d'Hinata qui ne s'attendait certainement pas à ce genre de déclaration de la part du psychiatre.

-Mais chaque crise lui fait revivre son traumatisme, c'est comme un cauchemar sans fin, un cercle vicieux, il y aurait de quoi devenir fou à laisser ces crises se produire ! Rétorque-t-elle, incrédule.

-Pas nécessairement justement. Si l'esprit fait revivre, comme vous dîtes, l'événement traumatique, c'est parce-qu'il ne parvient pas à le ranger, c'est comme lorsque l'on remarque quelque chose qui n'est à sa place chez soit en passant devant. Hors, notre tête a besoin d'ordre, rien ne doit traîner, c'est pour ça que l'on fait des syndromes de stress post-traumatique, pour conscientiser et ranger l'événement. En ce qui concerne Tatsumaki, elle a occulté cet événement en développant des stratégies de défense, ce qui lui a permis de se construire malgré tout et devenir une adulte et une héroïne fonctionnelle malgré son traumatisme non résolu qui est ?... Explique et demande Edgar en invitant Hinata à répondre.

-Le trouble de stress post-traumatique, complète-t-elle, signifiant ainsi qu'elle suit.

-Exactement. Maintenant, elle a été très méchamment battue par je-ne-sais-quoi. Vous avancez avec une quasi-certitude que c'est un SSPT, mais ça pourrait aussi avoir raviver son TSPT-C, et fait remonter toutes ces émotions et ces souvenirs qu'elle tâche de garder sous clé. Et c'est exactement là, que j'avance que ces crises ou certaines choses qui remontent, ne sont pas une mauvaise chose, pas nécessairement du moins. Pourquoi ? Continue Edgar, agissant soudainement comme un professeur cherchant à provoquer LE déclic chez son élève. Mais Hinata a du mal à comprendre le raisonnement de son collègue, elle demeure donc silencieuse, alors Edgar continue dans son raisonnement.

-Tatsumaki c'est construite sur son traumatisme. Traumatisme qui soit remonte actuellement, soit un nouveau a émergé. Quoi qu'il en soit, elle en a pour quelques mois de convalescence, d'immobilisation. Elle aura du temps pour penser, hors, une personne souffrant d'un traumatisme non résolu à la fâcheuse tendance à tout faire pour s'occuper l'esprit, mais là...

-Mais là, elle sera immobilisée, et dès qu'elle aura pleinement repris conscience, elle ne pourra que réfléchir, penser, ressasser, comprend Hinata. Edgar tape dans ses mains, heureux d'avoir amené la jeune femme ou il voulait.

-Tatsumaki ne va peut-être pas avoir le choix, elle devra faire face à ses souvenirs traumatiques, quel qu'ils soient. Et à votre avis, limiter ses confrontations avec au maximum, puis la laisser brusquement les affronter, sans accompagnement, sans repères, est-il plus judicieux que l'accompagner lorsqu'elle y fera face, et l'aider à admettre leur existence, leur réalité, ses réactions par rapport à ses souvenirs, et ainsi doucement entamer un travail thérapeutique ? Demande-t-il. Hinata comprend alors à quel point il est complexe d'accompagner une personne souffrant d'un tel trouble, et qu'elle n'a sans doute jamais eu le bon réflexe en empêchant ses patients de "souffrir".

-Mais... il y a quelques minutes, elle aurait pu en mourrir, son corps n'est pas assez fort pour endurer un tel stress ! Précise-t-elle.

-En psychiatrie, aucun chemin, aucune thérapie n'est idéale. S'il fallait prendre nos décisions qu'en regardant les risques, on ne ferait rien. Parfois il faut accepter qu'il puisse y avoir de la casse, et essayer de voir les bénéfices à long terme, réplique Edgar, bien conscient du dilemme.

-Après, rien ne vous oblige à confronter Tatsumaki à son, ou ses traumas, immédiatement. Vous pouvez très bien attendre qu'elle soit plus à même d'endurer le stress que ça occasionne pour commencer. Mais quoi qu'il en soit, de ce que vous me dites, elle y sera confrontée, d'une façon ou d'une autre. Sinon, elle risque d'imploser. Si son esprit lui fait revivre certaines choses, c'est qu'il en a besoin, et parfois, empêcher ce processus, qui est naturel, n'apporte pas que de bonnes choses, pas à long terme, croyez en mon expérience, explique Edgar. Hinata hoche la tête.

-Et vous êtes sûr que la laisser subir ces crises peut l'aider ? Demande Hinata. Edgar decide alors de changer son approche en imageant ses réponses.

-Voyez le SSPT comme une forêt, en pleine nuit, très sombre, dans laquelle vous n'avez pas de repères, avec un loup à l'intérieur. Le SSPT c'est quand vous entendez le loup, vous l'entendez rôder, mais sans le voir, ca occasionne une tension, un stress accumulé, ça épuise, ça mine. Là, la victime à le choix soit d'avancer, ou se cacher, en espérant qu'en évitant de progresser, elle évitera sa confrontation avec le loup. C'est un peu ce qu'a fait Tatsumaki ces vingt dernières années. Ne pas chercher à sortir de cette forêt, tout faire pour ignorer la présence du loup, l'occulter, mais en sachant malgré tout qu'il est là quelque part, explique Edgar. Hinata est attentive à la métaphore, et fait comprendre à Bouvier qu'elle le suit jusque-là.

-Dans la situation actuelle, Tatsumaki n'a plus d'abri, de cachette, car il a été détruit soit par ce même loup, soit par un autre loup. Et donc, elle se retrouve à nouveau confronté à lui. Votre solution, c'est de lui construire un abri temporaire pour empêcher toute confrontation, en sachant qu'elles devra le quitter à un moment où à un autre, et brusquement de la laisser se confronter à ce loup, toute seule. Ce que je vous propose moi, c'est de l'accompagner durant ces confrontations. Lui montrer que oui, il existe ce loup, quelque soit son ancienneté, mais en l'accompagnant, déjà vous lui permettrez de passer ces confrontations avec un minimum de dégâts, et ensuite vous lui donnerez l'opportunité d'apprendre à évacuer toute cette tension accumulée, un peu comme une soupape de décompression, de reprendre le contrôle, même brièvement et de l'affronter plus tard, quand elle sera armée pour le faire, dans un cadre bien défini et sécurisé. Alors oui, ce n'est pas l'idéal, mais ce n'est pas non plus la pire des solutions. Qu'en pensez-vous ?

-Vu comme ça... c'est sur que votre solution semble la plus... évidente, avoue Hinata, pas tranquillisée pour autant. Edgar hoche la tête, ravi.

-Bien-sûr ce n'est pas une promesse de solution miracle, attention. Mais je pense vraiment que c'est la meilleure chose à faire étant donné les circonstances, renchérit Edgar.

-Vous comparez son traumatisme à un loup. Mais que se passe-t-il s'il... la mord ? L'attaque ? Vous voyez où je veux en venir ?

-Comme je vous l'ai dit, aucune solution est sans risques. Il y a toujours un risque de casse. Donc oui, c'est un risque à courir, et qu'elle doit aussi affronter. Le traumatisme peut en effet prendre le dessus, être trop puissant pour sa psyché. D'où l'intérêt de l'accompagner durant les prochaines crises. Ainsi, vous lui montrerez qu'elle peut traverser tout ça, qu'elle est plus forte que eux, plus forte que le loup, argumente Bouvier. Hinata se passe un main lasse sur le visage. Ça fait énormément de données à intégrer. Elle boit la moitié de sa tasse pour se donner le temps de la réflexion.

-Mais comment je peux l'accompagner ? Je ne suis pas psychiatre, ni psychologue ? Je suis anesthésiste ! S'écrie Hinata, se sentant dépassée par les évènements.

-Je comprends, mais vous avez des qualités qui sont essentielles à ce travail et qui peuvent remplacer tous les diplômes du monde : l'instinct et l'empathie, souligne Edgar. La réponse prend Hinata de court. Elle a vraiment du mal à y croire.

-Mais si vous souhaitez des conseils, quand elle fera une crise, minimiser au maximum les stimulus environnementaux, comme les sons, les lumières. Faites en sorte qu'elle se concentre sur des repères qu'elle connaît et en qui elle peut avoir confiance, comme vous ou sa sœur, et surtout, laissez-la s'exprimer, mais dans un cadre sécurisé. Si elle hurle, laissez-la hurler, si elle panique, laissez-la paniquer. Mais pas seule, restez à ses côtés, faites-lui comprendre qu'elle est en sécurité, et amenez-la doucement à calmer la crise, par des exercices de respiration ou un stimulus sensoriel mais que vous aurez décidé d'incorporer et qui l'aide elle. Ne vous agitez surtout pas, parlez doucement, sans la toucher sauf si vous êtes forcée. Puis après laissez-lui le temps de redescendre, et une fois qu'elle sera apaisée et de nouveau lucide, debriefez, mais en douceur et à son rythme. Et là, vous aiderez vraiment Tatsumaki, explique Bouvier avec un sourire confiant. Hinata hoche de la tête, pensive, mais rassurée maintenant qu'elle a un "protocole" à tenir.

-Merci Docteur Bouvier. Je ne pense pas avoir d'autres questions, mais si jamais je...

-Ma porte vous reste ouverte, et j'attends de vos nouvelles en ce qui concerne la progression de Tatsumaki avec son trouble, quoi qu'il soit, la coupe gentiment Edgar, l'invitant ainsi à revenir lui parler. Hinata hoche de la tête, et sert chaleureusement la main de son confrère, pleine de gratitude pour le temps qu'il lui a accordé. Hinata quitte ensuite le bureau et l'aide psychiatrique pour retourner au quartier VIP.

Laisser un commentaire ?