Amalya

Chapitre 20 : Chapitre 20 : nouveau départ, nouvelle vie

3994 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 09/11/2016 23:38

17 ans plus tôt sur une île inconnue

De la corniche qui dominait l’île, Amalya observait son grand-père discutait avec Kuzan sur la plage. L’amiral tira la couverture qui recouvrait la nacelle derrière son vélo, moyen de transport qu’il utilisait pour circuler sur les mers. En effet, son pouvoir du fruit du démon lui permettait de givrer la surface de l’eau, fabricant ainsi son propre chemin.

- Qu’est ce que ! S’exclama Amalya soudain contrariée.

William remonta seul vers sa maison avec un petit garçon de cinq ans assoupi dans ses bras qu’il installa dans son lit.

- Grand-père ! Pourquoi tu ramènes ça ici !

- Commence déjà par te calmer et ai un peu de respect pour cet enfant qui allait être vendu comme esclave. Pauvre petit, il sera bien mieux ici avec nous.

- Parce qu’il va vivre avec nous ?!

Furieuse, Amalya partit dans la jungle pour s’isoler. Très proche de son grand-père, elle pensait que cette intrusion dans leurs vies en briserait l’harmonie. William n’avait pas adopté cet enfant par hasard, il souhaitait parfaire l’éducation d’Amalya en lui apprenant à se sociabiliser avec d’autres personnes que lui. Apparement, c’était mal parti.

Plusieurs mois s’écoulèrent depuis l’arrivée de Loan et la jeune fille l’avait finalement très vite accepté. Ce petit garçon aux yeux bleus pâles et aux cheveux blonds adorait Amalya qu’il appelait désormais Yaya. Toujours à ses trousses, il la suivait partout sous la surveillance constante de William qui était le plus heureux des hommes. Amalya avait très vite toleré Loan, mieux encore, elle était à ses petits soins comme une mère le serait avec son enfant.

Une nuit, alors que William dormait paisiblement, la jeune fille réveilla le petit garçon et lui demanda de la suivre.

- On va où Yaya ?

- Chuuuut, parle pas si fort. Je veux te montrer quelquechose.

Loan suivit Amalya à travers la forêt jusqu’au sommet d’une falaise.

- Loan, tu vois la panthère blanche en bas ? C’est très rare d’en apercevoir ! Si tu fais un vœu en la regardant, elle te l’exaucera !

- Où ça Yaya, je la vois pas !

Loan se pencha par-dessus le précipice pour mieux voir lorsqu’Amalya posa sa main sur son dos et le poussa dans le vide.

- Tu ne devrais pas tarder à la voir… Murmura-t-elle, un sourire malveillant étirant ses lèvres.

L’île était son territoire. Et personne d’autre, mis à part son grand-père, n’avait le droit d’y vivre.

Le lendemain matin, constatant que Loan n’était pas là, William s’affola et sonda l’île avec son haki afin de le retrouver. Sa présence était si faible qu’il était difficile de le détecter, mais le vieil homme finit par le sentir au Nord-Est de la jungle où il courut aussitôt. Amalya, quant à elle, s’étira longuement dans son lit en se demandant quelle mouche l’avait piqué.

William revint une demi-heure plus tard, le corps ensanglanté du petit garçon dans les bras, qu’il déposa délicatement sur sa couche. Le visage grave, il le soigna du mieux qu’il pu mais sans grand espoir de guérison. En effet, Loan était grièvement blessé. De multiples hématomes, quelques fractures et une plaie ouverte au crâne le rendaient méconnaissable. William l’avait retrouvé enchevétré dans des lianes. Les branches des arbres avaient ralenti sa chute, l’épargnant ainsi de se fracasser sur le sol. Une fois les soins terminés, il s’assit à table, se servit un verre de rhum et regarda Amalya.

- Il n’aurait jamais su monter là-haut tout seul…

- … Je voulais que l’on reste que tous les deux papy… Je ne veux vivre qu’avec toi, on a besoin de personne d’autre !

William essuya une larme qui coulait sur sa joue, saisit un couteau près de lui et le relâcha immédiatement.

- Ne refais plus jamais ça ou il n’y aura plus de « nous deux ».

La jeune fille retint un hoquet de surprise et partit dans la jungle où elle y resta seule durant trois mois.

Comme chaque midi depuis de nombreuses semaines, Amalya alluma un feu afin d’y cuire son poisson tout juste pêché sans s’imaginer un instant que ce jour ci serait un des plus marquants de sa vie. Tandis qu’elle embrochait sa carpe, une petite main se posa sur son épaule. Loan, complètement rétabli, gardait malgré tout un stigmate de cet accident. La paupière de son œil gauche à moitié fermée sur l’iris blanchâtre était la conséquence du traumatisme crânien. Il prit la jeune fille dans ses bras et la serra très fort contre lui.

- Reviens avec nous Yaya. Ne sois pas triste, je sais que tu n’as pas fait exprès - fit-il en lui caressant le bras avant de murmurer à son oreille -  et si tu souris, c’est que la panthère blanche a exaucé mon vœu car je lui ai demandé que tu sois toujours heureuse !

Amalya, choquée, resta stoïque un instant avant d’éclater en sanglots. Troublée par l’innocence de Loan, elle afficha un grand sourire trempé de larmes et se jura qu’elle ne ferait plus de mal à un enfant.

                                                                                                        ***********

- Toc ! Toc ! Toc !

Amalya ouvrit la porte de sa chambre à Yasopp qui n’eut même pas le temps de parler.

- Je suis prête, fit-elle les yeux cernés et le teint pâle.

Effectivement, elle était prête depuis belle lurette. Elle avait eu le temps de réfléchir pendant ses trois jours sans dormir. Elle acceptait son sort, peu importe lequel. La mort de Kaïdo lui avait mit un sacré coup au moral, se demandant ainsi si la quête de son passé en valait vraiment la peine. Etait-il si important de savoir d’où elle venait ? Trop regarder en arrière l’empêchait d’avancer. A présent, elle désirait plus que tout goûter à la vie sans avoir d’objectif précis. Bien évidemment si Shanks acceptait de l’épargner. C’est ainsi qu’elle marcha jusqu’au dortoir où le capitaine l’attendait, à demi assis dans son lit. Yasopp referma la porte derrière elle, les laissant tous les deux face à face.

- Il est temps que l’on parle sérieusement.

Amalya hocha la tête et s’assit sur un tabouret, Mahakala à ses pieds. Le capitaine regarda le dragon noir, laissant les minutes s’écoulaient silencieusement quand Amalya finit par lever ses poignets.

- Ces cicatrices étaient, jusqu’à il y a seulement quelques mois, les seuls souvenirs de mon enfance. Chaque nuit depuis mes sept ans, je fais des cauchemars. Je percois des sons, des sensations, des bribes d’image et je me réveille en sueur, me rassurant que ce n’était qu’un rêve. Mais mon esprit n’est pas dupe. Puis il y a eu Boratora où j’ai vécu parmi une meute de loups et par la suite dans une famille humaine. Je n’étais pas à ma place. Toujours à l’écart des autres, ces gens avaient peur de moi. Je ne sais pas pourquoi. Je n’ai pas le souvenir d’en avoir souffert. Je crois que j’étais bien, dans mon coin, à les observer, à attendre je ne sais quoi. Je me souviens d’un jour où il y avait beaucoup d’eau et de sang. Un homme, peut-être un enfant, m’a pris dans ses bras. Son visage était doux, si souriant, il n’avait pas peur, lui. Puis il m’a fait quitter l’île.

Boratora avait été détruite par le buster call, une puissante attaque militaire. Shanks fit alors le rapprochement. Ce garcon faisait peut-être parti de la marine et avait certainement eu l’ordre de venir chercher Amalya avant de rayer l’île de la carte. Elle devait avoir beaucoup d’importance aux yeux du gouvernement. Tellement d’importance qu’il avait effacé toute preuve de son existence.

- Shanks, ce que je t’ai fais est impardonnable… Mais j’ai appris quelque chose. Que la vie n’avait pas de prix. Mon obsession m’a aveuglé au point d’en occulter l’essentiel. Kaïdo est mort, emportant avec lui une partie de mon passé. Mais cela n’a plus d’importance car cette douloureuse perte d’identité m’a permis de comprendre que l’avenir était devant moi. Et non loin derrière. Je ne veux plus être seule. Et je veux pouvoir rendre tout ce que l’on m’a offert sans détour. L’amitié, l’indulgence…

Shanks ferma les yeux. La mort de Kaïdo avait profondément changé Amalya, remettant en cause la croisade qu’elle avait mené jusqu’à aujourd’hui. Devait-il alors lui révéler ce qu’il avait vu dans les souvenirs de Kaïdo, au risque de raviver sa haine ?

Kaïdo lui avait promis une réponse qu’il n’aurait pas pu lui donner. Vingt deux ans plus tôt, il avait été incarcéré à la prison sous marine d’Impel Down, où une rumeur circulant entre les prisonniers racontait qu’au niveau le plus bas, une petite fille, créature unique au monde, subissait des expériences. Celle-ci avait la faculté d’annuler les pouvoirs des fruits du démon. C’est alors qu’un jour, l’enfant avait dû être transféré quelques heures au niveau de Kaïdo pour cause de rénovation. Ainsi, Kaïdo avait pu rencontrer cette fillette qui avait temporairement élu domicile dans une cellule en face de la sienne. Cette journée qui permit à Kaïdo de l’observer marqua à jamais son esprit.

Les yeux profondément noirs de la petite fille étaient vides. Vide de toute humanité. Vide de vie elle-même. Comme un trou noir aspirant tout ce qui, par malchance, s’approche trop de lui, Kaïdo se perdit dans le néant de son regard. Lorsqu’il revint à lui, plusieurs heures étaient passées même s’il aurait juré qu’une seule minute s’était écoulée. Après cette expérience, il ne fut plus jamais le même. Le monde lui semblait terne, ennuyeux et vide de sens, comme si sa propre vie avait été à son tour aspiré.

Shanks rouvrit les yeux et se gratta les cheveux. Le souvenir de Kaïdo aurait apporté à Amalya plus de questions que de réponses. Peut-être valait-il mieux qu’elle vive le reste de ses jours dans l’ignorance.

- Depuis ton intégration dans l’équipage, tu as pratiquement enfreins toutes les règles du code d’honneur de la piraterie. Tu nous a volé de l’argent lorsque nous étions à Las Negras. Tu as, à de nombreuses reprises, désobéi à mes ordres. Puis tu as délibérement abandonné l’équipage pour rejoindre celui de Kaïdo. Je veux que tu saches que ton comportement m’a… nous à tous profondément blessé. Désires-tu faire encore partie de notre équipage ?

- Tu me laisserais partir si j’en faisais le choix ?

Ses cernes également étaient profondes. Lui non plus n'avait pas dû beaucoup dormir. La tristesse de son regard toucha Amalya qui, jusqu'à présent, ne s'était jamais intéressée à son bien-être. Elle s'en voulait de lui avoir causé tant de peine. Il ne le méritait pas. Aucun d'entre eux. Amalya sourit. Enfin sereine, le temps était venu pour elle de vivre parmi les autres. Parmi les siens.

- Acceptes-tu de me laisser une dernière chance, Capitaine ?

Shanks sourit à son tour. Inconsciemment, elle avait déjà fait son choix depuis longtemps en remontant Shanks à la surface et non Kaïdo.

- Oui.

- ... Alors c'est tout ?

- Ah non ! J'allais oublier... Tu auras cinq cents coups de fouet pour te punir de ta trahison !

- ....

- ....

- Merci Shanks. Allons-y Mahakala ! Fit-elle en se dirigeant vers la porte.

- Mahakala ? Tu as fini par lui trouver un nom ?

- Comme je te l'ai expliqué, les souvenirs de mon enfance sont très confus. En fait, c'est son nom depuis toujours, je l'avais juste oublié !

- Mais il est né il y a seulement quelques mois ! S'exclama Shanks incrédule tandis que la jeune femme était déjà loin dans le couloir. Alors Chilon avait raison...

                                                                                            **********

Une nouvelle vie commencait pour Amalya qui s'était délesté d'un lourd fardeau. Le coeur léger, elle décida dans un premier temps de s'excuser auprès du Doc qui faisait l'inventaire de ses médicaments à l'infirmerie.

- Doc ? Tu aurais une minute ? Je voudrais discuter de ce qui s'est...

Le docteur laissa brusquement tomber ses cachets, attrapa le poignet de la jeune femme et la serra fort contre lui.

- Je suis content que tu restes parmi nous princesse... Souffla-t-il à son oreille. Excuse moi d'avoir élevé la voix contre toi l'autre jour, excuse moi de ne pas avoir su te soutenir davantage, je ne connaissais rien de ton histoire, j'aurais dû chercher à en savoir plus, alors peut-être n'aurais-tu pas chercher à affronter Kaïdo ! Je suis un imbécile qui ne te mérite pas ! Princesse ! Pourquoi tu ne réponds pas !? Tu m'en veux c'est ça ? Dis moi ce que je peux faire pour obtenir ton pardon...

- ... Peux pas...pas....respirer..... Suffoca-t-elle, ettouffé par son étreinte.

Doc dessera son emprise et Amalya respira un bon bol d'air avant de lui caresser la joue, geste affectif très rare de sa part.

- Si il y a bien quelqu'un à qui je ne dois aucun pardon, c'est bien toi mon ami. Si tu as besoin de quoique se soit, compte sur moi Doc. Dorénavant, je suis là. Vraiment là. Ok ?

Le médecin sourit et lui ébourrifa les cheveux. Amalya partit ensuite rejoindre le coq à la cuisine à qui elle fit à nouveau des excuses puis s'évertua à faire de même avec chaque membre de l'équipage. La plupart d'entre eux comprirent ce qui l'avait poussé à en arriver là et leurs sentiments pour elle ne changèrent aucunement. Mais pour certain, sa nouvelle attitude bienveillante était difficile à croire et n'excusait certainement pas sa trahison, ce que lui fit clairement comprendre Ben.

- Il m'en faudra beaucoup plus pour te faire confiance. Je ne suis pas comme le capitaine qui pense qu'une part d'humanité sommeille en chaque homme. Je doute fort qu'un tel sentiment existe chez toi. J'ai cette étrange intuition depuis que je t'ai rencontré qui me pousse à me méfier de chacun de tes faits et gestes. Tôt ou tard, cette histoire finira mal alors n'essaye pas de m'amadouer avec tes belles paroles car elles ne changeront pas ce que je pense de toi.

Auparavant, le mépris de Ben ne l'aurait guère touché. Mais ce n'était plus le cas car cela la blessa profondément. Elle désirait vraiment devenir une meilleure personne et elle se dit alors qu'elle y parviendrait le jour où Ben croirait enfin en elle. 

                                                                                                             *******

La nuit était tombée depuis quelques heures lorsqu'Amalya sortit sur le pont. Enfin seule, elle s'accouda à la balustrade et regarda les vagues s'écraser contre la coque. L'eau étincelait de milles feux sous la lueur de la lune, lui donnant alors envie d'y plonger pour se laver de son obscure passé. Elle enleva ses bottes puis ses vêtements lorsque Shanks la rejoignit.

- Ce n'est pas la première fois que je te vois te baigner en pleine nuit. J'ai toujours trouvé cela étrange.

- ... Si tu veux comprendre pourquoi je fais ça, alors viens avec moi... Fit-elle en lui tendant la main.

Shanks fut touché par son geste. C'était la première fois qu'elle tentait de partager ses sentiments avec lui. Il désirait la rejoindre et découvrir une infime partie de son jardin secret afin de se rapprocher un peu plus d'elle.

- Non...

- Je vois...

- Amalya, c'est difficile à exprimer mais j'ai une sorte d'aversion pour l'eau... Je la redoute car les possesseurs du fruit du démon perdent toutes leurs force à son contact mais ce n'est pas seulement ça.... L'eau n'est pas mon élément, je n'y suis pas à l'aise. Les océans sont imprévisibles et donc indomptables. Et je n'aime pas avoir aucune emprise... L'eau est sournoise, elle s'insinue partout sans que l'on s'en rende compte et peut détruire des fondations pourtant solides, elle est redoutable et peut anéantir tout sur son passage. Oui je la redoute et pourtant elle me fascine. J'aime être près d'elle et sentir son courant me bercer. Source de toute vie, elle est un miracle incontestable... J'aime l'observer et vivre à ses côtés tout en gardant un pied sur terre... Conclut-il en tapant du pied le sol.

Les deux pirates se regardèrent un moment avant de sourire. Derrière sa propre réflexion qu'il se faisait de l'eau, Shanks exprimait en réalité ce qu'il ressentait vis à vis d'Amalya. Oui, il aurait vraiment aimé se rapprocher d'elle.La jeune femme enleva ses derniers vêtements pour finir complètement nue. Shanks la dévora des yeux sans aucune honte. Elle monta sur la balustrade et plongea dans l'eau. Fascinante et inaccessible.

Il regarda alors l'océan, particulièrement paisible ce soir.Il partit à la bibliothèque, s'assit au bureau et sortit un escargophone du tiroir.

- Biiip biiiip biiiip

- Capitaine Shanks ? Nous attendions votre appel. Je vous passe mon grand-père.

- ...

- Capitaine, votre question j'attends.

- Aendrys ? Excusez moi de vous appeler si tardivement. J'ai besoin de savoir qui elle est. Qui est Amalya ?

- .... Sans son passé personne ne peut vivre. Sur son humanité la noirceur ne doit pas prendre le dessus. Ou votre paradis sera perdu. Biiiip biiiip biiiip

Shanks raccrocha. A travers une des fenêtres de la pièce, il regarda à nouveau l'océan lorsqu'un violent frisson le parcourut.   

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