Amalya

Chapitre 7 : Chapitre 7 : la pierre blanche

2454 mots, Catégorie: G

Dernière mise à jour 10/11/2016 04:16

Shanks rejoignit Amalya près du bassin et engagea la conversation.

- Je suis content que tu ailles bien. Qu’est ce qui s’est passé ?

Elle fixa l’eau scintillante et sourit. Elle dégrafa son corset, enleva ses bottes puis le reste de ses habits pour finir en sous-vêtements.

- Qu’est-ce que tu fais ?! S’exclama-t-il surpris mais ravie de voir la jeune femme à moitié nue.

Elle plongea au fond de l’eau et remonta à la surface avec un ver marin fluorescent aussi gros qu’un concombre.

- Je me demandais ce qui donnait cette couleur à l’eau !

De son autre main, elle balança un poulpe dorée au visage de Shanks qui s’y accrocha avant de se laisser tomber par terre. Dégouté, il s’essuya le visage puis enleva ses vêtements et se jeta à son tour dans le bassin. Il arracha le ver de ses mains et lui écrasa sur la tête avant de rigoler comme une baleine. Déjà pas très propres après toutes leurs péripéties, ils finirent par ne plus ressembler à rien suite à une intense bataille de ver.

- On devrait peut-être retourner voir les autres, fit Shanks en s’enlevant le dernier morceau de boyau accroché dans les cheveux.

- Peut être bien, répondit-elle en flottant sur le dos. Mais j’ai une dernière question à poser au vieux.

- Quel vieux ?

Il jeta un coup d’œil aux alentours et vit le sage sur son rocher qui les observait depuis le début.

- Eh ! Je l'avais même pas remarqué !

- Ouaip, il est discret mais ne lui pose pas de question, il ne sait pas y répondre.

Le vieil homme fronça les sourcils et fit la moue, légèrement vexé par cette remarque.

- Papy, j’aurai aimé connaitre votre nom.

- Aendrys. Mais l’on me surnomme l’ermite.

- Peut-être nous reverrons nous un jour, dit-elle en s’éloignant vers la sortie.

Le sage espérait que ce jour n’arriverait jamais. Il regarda Shanks un moment avant de lui dire ses derniers mots.

- Votre frère est en vie.

Stupéfait, le pirate prit quelque secondes avant de réagir.

- Comment savez-vous que j’ai un frère ? Il est en vie ! C’est impossible…Mais qui êtes-vous ?

L’ermite ferma les yeux, se mit dans la position du lotus et se coupa du monde en entrant dans une profonde méditation. Quand Shanks comprit qu’il ne pouvait plus rien en tirer, il fit demi-tour et rejoignit Amalya.

- Le vieux est doué pour retourner le cerveau, pas vrai ? Dit-elle durant leur ascension vers Babel. Ta mine sombre en dit long. Une mauvaise nouvelle ?

- Plutôt bonne en fait. C’est seulement que je ne m’y attendais pas. Une partie du passé que j’avais mis de côté a refait surface si soudainement que je ne sais pas comment réagir. Et toi, qu’est ce qu’il t’a dit ?

- Un charabia d’ermite pas net ;)

Ils sourirent. Aucun des deux n’avait envie d’en parler. Perdu chacun dans leurs pensées, ils finirent par atteindre la Cité Bleue. La tension accumulée durant ces dernières heures s’était totalement dissipée et tous les hommes – Poilus, pirates, cheveux blancs – avaient préparé un festin pour sceller leur nouvelle amitié. Toute la ville était en effervescence et la luminescence qui émanait de partout brillait plus que la normale.

- Capitaine !

Le doc partit à leur rencontre, plus heureux que jamais et particulièrement éméché. Il prit la main d’Amalya et l’embrassa du bout des lèvres.

- Je suis si content que tu ailles bien, princesse.

Il débita alors toute une panoplie d’excuses puis continua avec une intense déclaration d’amour lorsque Shanks le coupa net en lui arrachant le verre qu’il tenait dans ses mains.

- Calme ta joie ! Ça a l’air drôlement sympa ce que tu bois là ! Fais goûter pour voir ! Je ne serai pas responsable si mes mots dépassent mes pensées ! Insinua –t-il en jetant un clin d’œil à la jeune femme.

Cette étrange liqueur bleutée se révéla être la meilleur boisson qu’il n’avait jamais bu. Son goût frais, sucré et sa texture moelleuse en faisait un alcool divin. Il l’a bu d’un trait et en redemanda encore lorsque Ben intervint.

- Doucement Capitaine, ça monte vite à la tête. Ils appellent cet alcool l’Euphoria. Ca provoque une légère euphorie doublé d’une tendance à dire la vérité. Je ne te raconte pas l’état de tes hommes en ce moment même.

En effet, tout l’équipage était submergé par la joie de vivre et les accolades entre Poilus et pirates n’en finissaient pas.

- Dis-moi Amalya, tu m’as l’air plutôt en forme pour quelqu’un que j’ai porté sur mon dos il y a seulement quelques heures.

Effectivement, elle ne s’en était pas rendu compte mais son corps ne la faisait plus souffrir et toutes ces blessures avaient disparu.

- L’eau de la cascade dans laquelle vous vous êtes baigné est régénérante, expliqua Aerus qui venait de les rejoindre.

- Woaw ! C’est en quelque sorte la fontaine de jouvence ! Je me sens aussi en pleine forme. Cette île est vraiment incroyable avec cette eau, son alcool et ses paysages ! Et moi qui croyais que le paradis était dans le ciel !

Le chef de Babel dévisageait Amalya et son visage impassible était trahi par la haine de son regard.

- Aerus mon ami ! Allons manger un morceau et se jeter quelques verres dans le gosier avec les autres ! S’écria Shanks en passant son bras autour des épaules de cet homme si froid et austère.

Une fois tout le monde réuni, le festin commença enfin. Babel la scintillante n’avait jamais connu pareille fête. Les chants, la musique et les rires résonnaient à travers l’immense grotte. Une fois le ventre plein, Ben tenta d’en savoir plus sur l’histoire de ce peuple en questionnant Aerus qui semblait plus enclin à répondre grâce à l’Euphoria.

- Ou sont les vôtres ? Je vois très peu de gens comme vous parmi les poilus.

- C’est parce que nous sommes très peu. Mon peuple vivait autrefois à la surface mais nous avons été décimés par un cataclysme il y a plusieurs centaines d’années. Nous avons alors trouvé refuge ici et avons décidé de vivre parmi ces petits hommes. Nous leur sommes éternellement redevables.

- Quand vous dites « nous », vous parlez de vos ancêtres ?

- ….

- Mais quel âge avez-vous ?

- Je ne compte plus depuis bien longtemps… L’eau de la forêt nous maintient en vie mais pour combien de temps encore ? Les seuls rescapés de mon peuple sont ma sœur Aeva, que vos amis ont déjà rencontrés, mes trois frères et mon grand-père. Nous ne pouvons avoir de descendance. Notre race est vouée à disparaitre.

- Mais qui vous empêche de retourner à la surface et de rencontrer d’autres Hommes ? Votre famille n’a-t-elle jamais exprimé le désir de fonder une famille ?

- Nous sommes génétiquement incompatibles avec vous autres. Nous nous sommes fait à l’idée de vivre sans avenir. Les poilus, comme vous les appelez, et leur île sont une bénédiction. Ils nous maintiennent en vie et nous épargne de la solitude.

- Cette île vous maintient peut être en vie mais dans quel but ? Et à quel prix ?

- Ca suffit, je suis las de cette conversation.

Ben se retrouva seul et réfléchi à toute cette histoire qui lui semblait insensée. Pourquoi chercher à vivre quand il n’y avait plus d’avenir ? Cet homme cachait forcément quelque chose Et pourquoi vouait il tant de haine à l’égard d’Amalya alors que celle-ci ne le connaissait même pas ? Quel peuple avait pu construire cette cité puisque les cheveux blancs n’en était pas originaire et les Poilus pas suffisamment intelligent. Et enfin quel rôle jouait l’Hedera, ce lierre mythique ? Shanks vint s’asseoir à côté de lui et sourit béatement.

- Alors mon ami, où te mène ta petite enquête ?

- Pas bien loin malheureusement et je n’en saurai pas plus. Allez ! Donne-moi un verre ! Parfois, il ne faut pas chercher à en savoir plus.

Quelque jour plus tard, l’équipage se prépara à reprendre la mer. Les poilus leur offrirent des vivres et Aerus de l’alcool et des plantes médicinales à la place de l’eau régénérante qui perdait ses vertus en dehors de l’île.

- Merci pour tout. Ce séjour a été très agréable et divertissant. Votre île est extraordinaire et sachez que nous en parlerons à personne. Mais si jamais il vous arrivait quoique ce soit, n’hésitez pas à nous contacter.

Shanks lui laissa un escargophone et franchi l’Hedera en sens inverse, retrouvant ainsi la chaleur du soleil qui lui avait tant manqué.

- Capitaine Shanks, soyez prudent.

Le chef de Babel regarda une dernière fois Amalya et retourna dans les profondeurs de l’île tandis que le Red Force s’en éloignait.

**********

Aendrys ouvrit les yeux et sentit la présence de son petit-fils au pied de la cascade.

- Grand père, vous avez failli à votre mission. Vous venez de bafouer la seule et unique raison pour laquelle nous continuons désespérément de vivre. Comment dois-je annoncer à mes frères et sœur que notre existence n’a plus de sens ?

L’ermite sortit de sa vieille tunique une pierre ovale translucide d’où jaillissait une pâle lumière blanche et la lança à Aerus.

- A sa place peux-tu la remettre. De l’utiliser le moment n’est pas encore venu.

- Vous auriez dû en finir aujourd’hui. Elle n’a pas sa place parmi Nous.

- Une seconde chance chaque être a le droit d’avoir.

Aerus contourna le bassin et s’enfonça dans la forêt. Il se mit à genoux au pied d’un arbre millénaire, creusa un trou dans la terre et y enfoui la pierre. Les grosses racines laissaient entrevoir une stèle gravé de vieux symboles sur lesquelles Aerus posa sa main.

- J’espère que vous savez ce que vous faites grand père.

Aerus remonta vers Babel, grimpa au sommet de la ville et s’assit sur le plus haut des toits. Il admira la Cité Bleue. Sa Cité Bleue. Il avait menti à Ben. Babel était sa ville natale et le dernier vestige de sa civilisation. D’autres familles avaient survécu au cataclysme mais seule la sienne avait décidé de rester ici pour protéger leur secret. Il resta assis là durant plusieurs heures à repenser aux histoires racontées par les pirates du Roux. Un bref sourire étira ses lèvres. Peut-être irai-t-il à nouveau à la surface pour voir du pays.

***************

Allongés dans les hamacs de leur jardin exotique à la poupe du bateau, Shanks et Ben discutaient de leurs aventures sur l’île.

- D’après le vieil ermite de la forêt, mon frère est vivant.

- Ca pour une nouvelle ! Je croyais qu’il avait été tué par des pirates. Ce vieux a l’air de savoir beaucoup de choses. C’est lui que j’aurai dû questionner.

- Laisse tomber, chaque phrase de ce vieux apporte plus de questions que de réponses. Mon frère était trop jeune quand on s’est fait attaquer, il ne doit pas se rappeler de moi. Qu’il soit mort ou vivant ne change rien, je ne le retrouverai jamais. La page est à nouveau tournée…

Le bateau se mit soudainement à tanguer. Des millions de racines jaillirent de l’île, plongèrent dans l’eau et commença alors son nouveau déplacement.

- Ouais… En tout cas, cette île restera une énigme non résolue.

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