Foutue malédiction

Chapitre 6 : Le bûcheron

2375 mots, Catégorie: K+

Dernière mise à jour 12/05/2018 18:44

Alice n’était pas souvent en colère, ce n’était pas dans son tempérament. La vie lui avait appris à se satisfaire de ce qu’on lui donnait. Et la plupart du temps, elle se trouvait finalement plutôt chanceuse. Mais aujourd’hui, sa patience était à bout. Gothel persistait à lui pourrir la vie, même lorsqu’elle pensait avoir réussi à se débarrasser d’elle. Peut-être qu’il était vraiment temps d’en finir une fois pour toute et la hache qu’elle portait sur l’épaule lui donnait définitivement un air kamikaze. Alice trainait dans son sillage une Margot beaucoup moins sûre d’elle. Et pour cause, lorsque vous pensiez revenir d’un tour du monde et que vous vous retrouviez projetée dans un univers où les sorcières existent, il y avait définitivement de quoi manquer d’assurance. Elle avait eu la journée pour se faire à cette idée, et autant de preuves pour lui faire admettre qu’elle n’était pas complètement folle. Mais tout de même, suivre une blonde furieuse armée d’une hache lui semblait être la plus mauvaise idée du siècle.


« On ne devrait pas en parler à ma mère ? Ou à ma tante ? »


Alice haussa les épaules, elle entra dans le parc d’un pas déterminé.


« Pourquoi faire ? Boire une autre potion ? Je ne veux plus de potions, je ne veux plus de sortilèges foireux. Je te veux toi, complètement, dans ma vie. »


La déclaration était touchante et Margot aurait pu en rougir si la vue de la hache n’avait pas une grosse tendance à refroidir ses ardeurs. Alice tourna la tête pour lui sourire.


« Et puis si quelque chose tourne mal, tu sais quoi faire, pas vrai ?

-Oui, j’ai compris. »


La blonde acquiesça d’un franc signe de tête. Le tronc étrange se dressait toujours là, au beau milieu du jardin, défiant la beauté des lieux de sa rugosité. Ses racines profondément enfoncées dans le sol et couverte de fleurs. Alice lui fit face avec colère.


« Il y a de la magie en moi. »


Et elle en imprima sa hache avant de lancer un grand coup dans le tronc, de toutes ses forces. Elle fut projetée dans les airs avec la même violence avant de heurter durement le sol. Pendant une fraction de seconde, il sembla à Margot qu’elle avait déjà vécu cette scène. Elle se précipita aux côtés de son amie, inconsciente.


« Tilly ? Oh mon dieu, Tilly !! »


Elle savait quoi faire, oui, elle savait, parce que parait-il un baiser magique pouvait tout changer. Elle se trouvait bien stupide d’avoir pu y croire maintenant qu’elle se retrouvait dans cette situation. D’un autre côté, elle devait aussi reconnaitre que les gens se mettaient rarement à voler dans les airs pour avoir donné un coup de hache dans un arbre. Après un moment d’hésitation, elle embrassa donc la blonde inconsciente et l’instant d’après, elle était Robin, attendant patiemment que Tilly se réveille, parce qu’elle allait le faire, sans l’ombre d’un doute. Son regard se porta sur la hache qui gisait brisée un peu plus loin, et sur l’arbre vierge de toutes marques. Elle ne comprenait que trop bien la colère de sa compagne. Dans ses bras, la blonde s’agita légèrement.


« Oy…

-Hé.

-Qu’est ce que…

-Du calme, tu as fait un malaise et tu t’es évanouie.

-Mais depuis combien de temps ?

-Pas assez pour que j’appelle les secours, comment tu sens ?

-Un peu… bizarre mais pas plus que d’habitude. »


La remarque fit légèrement sourire Robin.


« Tu peux te mettre debout ?

-Ouais. »


Elles se relevèrent, l’archère aidant Tilly à se remettre sur pieds.


« Ca va ? La Terre ne tourne pas ?

-Est-ce qu’elle ne doit pas tourner normalement ?

-Si. Mais je parlais de toi, si tu avais le tournis.

-Oh ! Alors non, ça va. »


La blonde épousseta la poussière de ses vêtements.


« Comme neuf ! »


Rumple entra dans le parc, vêtu de sa veste en cuir, il s’assura d’un regard que les feux femmes allaient bien.


« Weaver ?

-Oui Tilly ?

-Vous êtes venus me voir ?

-En quelque sorte. »


Il ramassa la hache et d’un sort la répara. La blonde écarquilla les yeux et s’accrocha résolument à Robin en laissant échapper un cri craintif.


« Weaver ? Qu’est-ce que vous faites ? Tilly vient tout juste de se réveiller, elle était inconsciente.»


D’un regard elle lui indiqua la blonde, lui intimant de se montrer plus discret.


« Oh je sais, j’étais là, j’ai tout vu. Mais tout va bien maintenant, tu vas bien Tilly, n’est-ce pas ? »


L’absence de réponse n’était pas très encourageante mais ça n’arrêta pas Rumple pour autant.


« Le plan est bon, je crois, c’est le sortilège en revanche qui ne fonctionnait pas.

-Weaver ! »


Le ton de Robin était monté d’un cran, elle refusait catégoriquement de traumatiser davantage sa compagne. L’homme n’étant pas plus impressionné que ça, il lui fit un léger sourire et sortit une petite fiole de sa poche. La couleur d’un rouge violacé rappelait vaguement une potion à l’odeur écœurante que l’archère avait dû avaler à grand renfort de grimace. Il en déversa le contenu sur la lame et après une brève incantation, il parut satisfait du résultat.


« Vous devriez peut être vous écartez un peu, au cas où. »


Robin haussa les sourcils mais elle fit ce qu’on lui disait. La curiosité d’une possible solution l’emportant sur la raison. Elle se posta devant Tilly, bien décidé à faire rempart de son corps s’il se passait quoique ce soit.


« Bon, ce n’est pas la hache de Gepetto, mais ça devrait faire l’affaire. »


Il leva l’arme et l’abattit avec force contre le bois qui craqua férocement. Rumple resta bien campé sur ses deux pieds. Tilly en revanche venait de hurler de douleur. Il échangea un regard inquiet avec Robin qui serrait déjà sa compagne contre elle.


« Je crois que c’est moi, ma chère, qui suis responsable de ça. »


Et comme pour le prouver, il donna un second coup de hache dans l’arbre qui provoqua un nouveau hurlement de douleur chez Tilly.


« Stop ! Arrêtez ça ! Vous lui faites mal !

-Désolé, je ne peux pas. Toute magie a un prix. »


Il soupesa la hache dans sa main et repartit à l’assaut du tronc. La blonde s’effondra dans les bras de l’archère, le corps secoué de tremblement. Les larmes inondaient ses joues.


« Arrêtez ça ! Espèce de malade ! »


Robin se leva et fonça sur Rumple, bien décidé à l’empêcher de porter un nouveau coup de hache. Il la renvoya d’une pichenette.


« Je déteste ça autant que toi, mais c’est la seule solution !

-Vous allez la tuer !

-Non, je ne pense pas.

-Vous ne pensez pas ?! Et si vous avez tort ?

-Si j’ai tort alors c’est qu’il n’y a pas de solution. »


Rumple n’avait pas le temps de faire la conversation, Tilly souffrait déjà bien trop, il fallait en finir au plus vite.


« STOP !! »


Mais il n’écoutait pas, il ne pouvait pas s’arrêter, maintenant qu’il avait commencé, il fallait terminer. La blonde se tordait de douleur, hurlait et pleurait tout ce qu’elle pouvait sous le regard affolé de Robin.


« Vous allez la tuer… »


Les larmes de l’archère se mêlèrent à celle de sa compagne.


« Crocodile ! »


Rumple eut un geste d’agacement à l’arrivée de Hook, mais il n’en frappa l’arbre qu’avec plus de force encore. Régina aux côtés du Capitaine, une boule de feu se formait déjà dans sa main. Il ne manquait que Zéléna au tableau mais un coup d’œil par-dessus son épaule lui révéla qu’elle était avec les filles. Ainsi donc ils étaient tous là, à le juger comme d’habitude, et comme ils avaient raison. Nombre de fois il s’était retrouvé du mauvais côté de la barrière. Mais pas cette fois ci, il en était certain. Il écarta la première boule de feu mais la seconde l’atteignit à la jambe. Il porta un nouveau coup de hache, envers et contre tout. Il n’avait pas le temps de s’expliquer, pas le temps de se battre non plus. Il y avait Alice et Robin à sauver. Il repoussa Hook qui le chargeait et planta une fois de plus sa hache dans le tronc qui craqua de manière sinistre. En revanche, il n’avait aucune chance de résister à une attaque combinée entre Zéléna et Régina. Il lança la hache contre le bois, de toutes ses forces avant de s’écrouler en hurlant de douleur à son tour. La seconde d’après, Hook posait une dague sur sa gorge.


« Cette fois ci ton heure est venue, Crocodile ! »


La colère déformait les traits de Kilian.


« Tu n’aurais jamais dû t’en prendre à ma fille !

-L’arbre… »


La douleur l’empêchait de parler correctement, à moins que ce ne soit le genou du pirate qui lui écrasait la poitrine.


« Dans… l’ar..bre… »


Régina fut la plus prompte à réagir. Au cœur de l’arbre maintenant abattu se trouvait une toute petite bille bien étrange d’un bleu turquoise. Au sol, Alice avait perdu connaissance et ne réagissait pas plus aux appels désespérés de Robin qu’à ses baisers.


« Vi…ite… 

-Attends Hook, laisse le parler.

-La fiole, dans ma poche… »


Rumple sortit une bouteille remplie d’un liquide aussi transparent que l’eau.


« La bille… dedans… les filles doi…doivent boire… Les 2. »


La bille dilué, le liquide prit la même teinte turquoise, incandescente. Robin hoqueta de désespoir.


« Alice d’abord… »


Régina acquiesça d’un signe de tête et versa le breuvage sur les lèvres de la blonde. Ni réaction, ni miracle ne vint perturber l’immobilité glaciale de la jeune femme.


« A toi maintenant.

-Il faut lui en donner plus, elle n’en a pas eu assez, c’est pour ça qu’elle ne se réveille pas. »


Zéléna prit la potion des mains de Régina. Elle força sa fille à la regarder.


« Non, Robin, à toi maintenant. »


Le ton était ferme, sans appel alors l’archère ne discuta pas et but le contenu restant d’une traite. C’était comme si elle pouvait ressentir le cheminement dans son corps, comme un milliard de petites bulles qui se frayaient un chemin dans ses veines, dans son sang jusqu’à rejoindre son cœur pour s’y cristalliser. La chair de poule hérissa les poils de ses bras puis les bulles quittèrent son corps, un mince filament bleu marine qui s’envolait maintenant vers le ciel, en tout point identique à celui qui quittait le corps d’Alice. Les joues de la blonde reprirent un peu de couleur et quittèrent le teint blafard.


« Robin ? »


Les iris bleus trouvèrent les prunelles vertes sans faillir.


« Alice ? »


Le même sourire incrédule. Le baiser qui suivit scella des retrouvailles depuis trop longtemps refusées. Il n’y eut ni magie, ni miracle pour venir le perturber. Hormis sans doute les expressions tour à tour émerveillées puis gênées des personnes présentes qui finirent par se détourner. Les larmes de soulagement donnèrent un goût salé à leurs échanges. Si les deux femmes se détachèrent un instant, ce ne fut que pour mieux se retrouver ensuite, affamées d’avoir été si longtemps séparées. Lorsque l’oxygène vint à manquer, elles s’arrêtèrent enfin pour mieux s’enlacer.


« Je t’aime, Alice.

-Je t’aime aussi, Nobin. »


Elles rirent aux éclats parce que ces moment-là aussi avait cruellement manqué.


Hook aida Rumple à se remettre sur pieds tandis que Régina effaçait de son mieux les traces de brûlures sur les vêtements.


« Désolée pour ça.

-Ouais, désolé pour tout, Crocodile. Comment tu savais ?

-Simple déduction. Puisque de tout ce que nous avions essayé, rien n’avait fonctionné, je me suis dit que la réponse ne pouvait être que Gothel elle-même. C’était une nymphe des bois et la nature est toujours celles qui nous apportent des solutions, sous forme de fleurs, de minéraux, ou ici, au cœur des arbres morts.

-Pourquoi ne pas nous l’avoir dit ? »


Rumple ricana légèrement.


« Parce que vous m’auriez laissé faire ? Lequel d’entre vous aurait eu le courage de porter les coups qui allaient blesser Alice ? Gothel et elle sont du même sang, elle savait comment se protéger. »


Le silence pensant qui répondit provoqua des regards gênés des trois autres interlocuteurs. Il acquiesça d’un signe de tête.


« C’est bien ce que je pensais. »


Il quitta le parc sans en attendre davantage, Kilian l’arrêta quand même.


« Crocodile, merci. »

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