Foutue malédiction

Chapitre 5 : Mauvais jour

1288 mots, Catégorie: K+

Dernière mise à jour 12/05/2018 18:41

Le calme qui régnait était toujours étonnant lorsque l’on avait l’habitude, comme elle, de le connaitre vivant et remplis de ses habitués. C’était d’autant plus vrai maintenant que tout le monde avait retrouvé la mémoire. Le Ronnie's bar était devenu le point de rencontre, exactement comme le café de Grand-mère à Storybrook. Mais pour l’heure, il n’y avait ni clients ni animation, juste Robin assise au bar, les bras croisés sur le comptoir, la tête posée dessus. L’odeur du bois se mélangeait à celle du whisky qu’elle s’était servie mais auquel elle n’avait pas encore touché. Elle était venue ici sans trop savoir pourquoi, peut-être parce que Tilly dormait dans son lit, qu’elle l’appelait Margot sans savoir réellement qui elle était. Certains jours étaient plus difficile que d’autre et celui-ci, celui-ci l’était. Robin enfouit davantage son visage dans ses bras croisés, une larme timide roula sur sa joue. Elle avait juste voulu s’accorder un moment sympa, une escapade au milieu des mois et des mois de recherches infructueuses. Une journée, une simple journée en compagnie de Tilly. Même si elle n’était pas Alice, même si elle ne l’appelait pas Robin ou Nobin, un peu de temps, tout simplement, avec la femme dont elle était amoureuse. « Un rencard ? » lui avait dit Tilly. Oui c’était ça, comme elle lui avait déjà dit avant, un rencard. Elles avaient passé du temps à flâner dans les rues, le nez pressés contre les devantures des magasins à imaginer des histoires autour des tenues et des objets qui ornaient les vitrines. Elles avaient pique-niqué dans le parc, pieds nus dans l’herbe tendre en mangeant des sandwiches à la marmelade. Tilly avait cherché des trolls dans les nuages et elle avait ri, tellement, jusqu’aux larmes. Comme elle avait eu envie de l’embrasser et de lui glisser un « je t’aime » au creux de l’oreille pour le plaisir de la voir sourire et rougir en même temps. De là où elle se trouvait, Robin ne voyait pas pire malédiction que celle dont Alice et elle étaient victime. Elles étaient ensemble sans jamais l’être vraiment, elles se trouvaient sans se retrouver et chaque baiser les plongeait dans un éternel recommencement. Exactement comme ce jour-là lorsque Tilly avait porté sa main à ses lèvres pour l’embrasser innocemment et tout avait disparu. La journée, Pouf, envolée comme si elle n’avait jamais existé. Elle était redevenue Margot, nageant en pleine confusion parce qu’elle marchait dans la rue en tenant la main d’une presque inconnue.


Et maintenant elle se souvenait, elle se souvenait parce qu’un nouveau baiser lui avait rendu la mémoire et son identité. Elle avait lâché la main d’Alice, la repoussant avec agressivité pour mieux se mettre sur la défensive. La confusion transformait son inquiétude en panique, elle avait regardé autour d’elle, hagarde. Ni les mots de sa compagne, ni ses gestes apaisants n’avaient réussi à la calmer.


« Ne vous approchez pas de moi ! Espèce de malade ! De psychopathe !

-Ok... Margot, calme-toi.

-Vous m’avez drogué ? C’est ça ? »


C’était la seule explication logique que son cerveau avait pu trouver. Sinon comment expliquer qu’elle était en train de lui tenir la main, de se promener dans la rue, alors que dans son dernier souvenir elle s’endormait dans son lit, chez elle, et surtout, toute seule. Voilà ce qu’elle avait hurlé, les mots avaient blessé Alice, elle le savait. Mais ce n’était même pas le pire. Elle avait crié à l’aide à plein poumons, attirant l’attention des passants qui n’étaient pas tous des anciens de StoryBrook, loin de là. Et lorsqu’Alice avait voulu l’approcher pour essayer de la tranquilliser, elle l’avait frappé, directement au visage. Des années à barouder dans le monde lui avait pris à gérer les agresseurs de tous types et à se méfier de ceux qui pouvaient glisser des choses étranges dans votre boisson. Tout du moins le croyait-elle. Elle avait vu les larmes et le choc dans les yeux de sa compagne qui avait pourtant tout fait pour essayer de ne rien laisser paraitre. Mais comme elle la connaissait bien, chacune de ses mimiques, de ses expressions et Margot n’en reconnaissait aucune. Robin en revanche les voyait toutes maintenant.


Elle lui avait pourtant bien écrit de ne pas s’en vouloir mais comment faire lorsque les souvenirs affluaient de manière si vivace. Robin tourna la tête pour observer le liquide ambré dans le verre qu’elle n’avait pas touché. Elle décroisa les bras pour l’attraper et faire tourner l’alcool dans un geste hypnotique. Flirter était dangereux, voilà la leçon qu’elle avait retenue de cette journée, parce que cela pouvait vous pousser à voir des gestes tendres dans un environnement non contrôlé. Et derrière, il fallait ramasser les pots cassés.


« Te voilà enfin. »


Zeléna traversa la pièce pour venir faire un câlin à sa fille.


« Alice t’a tout racontée ?

-Elle m’a surtout dit que tu t’en voudrais surement et qu’il ne fallait pas.

-C’est dur maman…

-Je sais… »


Robin fondit en larmes dans les bras de sa mère et pendant un moment il ne fut pas question d’autre chose que de laisser la peine s’écouler et la culpabilité de faire son œuvre.


« Comment j’ai pu être aussi stupide.

-Oh ma chérie… Personne n’aurait pu prévoir ça, tu le sais.

-Je savais qu’il y avait un risque… Un simple contact…

-Pas comme ça, c’est un concours de circonstance.

-Mais ce sont toujours nos circonstances, Alice et moi, c’est notre vie maintenant… Tout ça, tout ce qui s’est passé et tout ce qui se passera encore, j’en suis sûre. C’est ce que nous sommes. »


Elle essuya ses larmes d’un geste de la main, les bras autour de la taille de sa mère qui continuait de la bercer pour tenter de la consoler.


« Nous trouverons une solution ma chérie, je te le promets.

-Alice a cherché un remède pour le cœur de son père pendant des années… Sans succès. Et s’il n’y a pas de remède maman ? Si on ne le trouve que dans 10 ans ?

-Et si on le trouve demain ? A quoi bon t’infliger ce genre de réflexion ? S’il y a bien quelque chose que j’ai appris c’est qu’il y a toujours de l’espoir. Ta tante et moi en sommes la preuve vivante, après tout ce que nous avons vécu et regarde nous aujourd’hui. »


Zéléna fit un sourire encourageant à sa fille.


« Qui aurait cru que nous allions rejoindre le club des héros ? Tu peux imaginer ça ?

-Non… Je sais mais…

-Ne perds pas espoir, Robin, ne perds jamais espoir. Vous n’êtes pas seule et jusqu’à maintenant, aucune malédiction, aucun méchant n’a réussi à nous résister. Nous y arriverons, j’en suis sûre. »


Robin hocha doucement la tête.


« D’accord. J’ai confiance en toi maman. »


Zéléna sourit tendrement, elle déposa un baiser sur les cheveux de son enfant.

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