De l'autre côté du miroir (Partie 1)

Jeudi 11 janvier 2007, maison de Gibbs

     Il était 6h30 du matin, Gibbs était déjà debout mais Nora dormait encore. Il était monté sans bruit dans sa cuisine pour prendre un café. Nora se réveilla et le rejoignit dans la cuisine.

« - Bonjour Gibbs, dit-elle aveuglée par la lumière de la cuisine et encore à moitié endormie.

- Salut Nora, bien dormie ?

- Ca va. Il sent fort ton café ! Tu as mis combien de paquets dans ta tasse,  ironisa-t-elle en s’en approchant.

- Fort c’est meilleur.

- D’accord avec toi, mais pas dès le matin, c’est trop agressif ! répondit-elle en souriant.

- Tu n’aimes pas le café ?

- Ah si ! J’aime beaucoup le café noir, corsé et sans sucre mais pas le matin à 6h30.

- Tu prends quoi alors le matin ?

- En général un chocolat chaud mais des fois ma tante me laisse faire mon nucalait. Enfin, laissait… rectifia-t-elle en soupirait.

- Et c’est quoi ce ‘nucalait’ ?

- C’est ce que préfères prendre le matin. Mais vu que c’est du café et vu qu’il faut avoir l’estomac accroché, je ne pouvais pas en prendre tous les matins. En fait, c’est un mélange de café noir, corsé et sans sucre, avec du Nutella fondu et du lait. C’est du café, mais moins agressif que le tiens.

- T’arrives à avaler ça !

- Oui.

- Bon, c’est parti pour un  ’nucalait’, dit Gibbs en commençant à sortir les ingrédients de ce curieux mélange.

- Chouette ! s’exclama-t-elle en s’asseyant sur une des chaises de la cuisine.

- Tu prends quoi avec ? Croissants ? Pain ?

- Rien, merci. Je ne mange presque rien le matin. »

Nora but sa tasse pendant que Gibbs alla se doucher rapidement. En attendant, Nora observait ce qui l’entourait. Elle trouvait que Gibbs était sympa, elle aurait bien voulu pouvoir avoir assez confiance en lui pour lui expliquer ce qui la pesait tant mais elle n’en avait pas la force, pas pour l’instant. Trop de choses se bousculaient dans sa tête, il y avait ça, l’enlèvement, la mort de son oncle et sa tante, la vérité sur ses parents biologiques. Ca faisait beaucoup trop de choses. C’est vrai qu’elle donnait l’apparence qu’elle avait réussi à passer dessus, à l’avaler mais en vrai elle n’avait rien réussi du tout. Elle avait simplement appris à cacher ces choses-là et à tout garder enfoui au plus profond d’elle-même. Alors qu’elle était perdue dans ses pensées assise dans la cuisine, Gibbs arriva sans qu’elle ne s’en rende compte. Elle sursauta ce qui surpris Gibbs. Il lui demanda si ça allait, elle répondit que oui et Gibbs lui dit qu’elle pouvait aller prendre une douche. A peine 10 minutes plus tard, elle redescendit vêtue de vêtements propres et les cheveux encore mouillés mais coiffés en deux tresses. Elle portait un jean slim bleu un peu grand en raison de sa maigreur et un long pull multicolore rayé de noir tombant à mi-cuisse qui mettait en valeur ses cheveux roux. Elle alla enfiler des petites bottes motardes noires et ils partirent tous deux au NCIS.

Au NCIS, un jeune homme de 25 ans attendait près du bureau de Gibbs. Gibbs le vit et le reconnut. C’était le fils d’un ami à lui qu’il avait connu du temps où il était marine.

« - Jesone ? dit Gibbs surpris en s’approchant de lui pour lui faire une accolade amicale.

- Salut Jethro.

- Qu’est-ce que tu fais là ? demanda Gibbs pendant que Nora s’était dirigée vers le bureau de Ziva.

- J’aurais besoin de ton aide.

- Tu as un souci ?

- Pas moi mais James.

- James ?

- Oui, James MAYER c’est mon meilleur ami et le frère de Tom MAYER, celui qui est mort pour… fit-il en désignant Nora du regard.

- Qu’est-ce qu’il lui arrive ?

- Il pense qu’il est responsable de la mort de son frère et il veut en finir. Je suis vraiment inquiet, regarde il est passé me mettre ça dans la boîte aux lettres, expliqua-t-il en tendant une lettre de suicide à Gibbs. J’ai essayé de lui téléphoner mais il m’a dit qu’il ne voulait parler à personne même pas à ses parents.

- Tu sais où il peut être ?

- Il est pas chez lui, mais je pense qu’il est allé là où il se sent le mieux, c’est à dire à la piscine d’Alexandria.

- Il n’est que 7h30, elle n’est pas ouverte à cette heure-ci.

- Justement, c’est parce qu’il n’y personne là-bas qu’il y serait.

- Ok, je m’en occupe Jesone, le rassura Gibbs en lui donnant une petite tape sur l’épaule en allant vers l’ascenseur.

- On t’accompagne Gibbs ? demenda Tony. 

- Non j’y vais seul. »

Gibbs était au niveau du bureau de Ziva quand Nora se plaça face à lui en le fixant du regard.

« - Emmène moi avec toi Gibbs.

- Hors de question, fit Gibbs en essayant de passer.

- S’il te plaît Gibbs. Son frère est mort à cause de moi, je veux lui parler, dit-elle avec un regard suppliant et en le retenant par le bras.

- Pff, d’accord mais tu restes derrière moi quoi qu’il arrive. C’est bien compris ?

- 5 sur 5. 

- Tony amène-toi ! » décida finalement Gibbs.

Gibbs conduisait et Nora était à l’arrière. Il était inquiet sur ce qui allait se passer, personne ne peut prédire les réactions d’une personne suicidaire, surtout dans ce cas-là. Mais il la comprenait, il savait ce que ça faisait de se sentir responsable de la mort de quelqu’un. Ils arrivèrent à la piscine.

Ils pénétrèrent à l’intérieur, l’endroit était désert et ils ne voyaient personne. C’est alors, qu’ils aperçurent une ombre assise sur l’un des plongeoirs, une arme à la main.

« - Agent spécial Gibbs, NCIS, allongez-vous, les bras et les jambes écartés, vite.

- Je ne suis plus les ordres, dit le jeune homme.

- Faites ce que je vous dit James MAYER. »

L’homme leva son arme et la pointa sur sa tempe.

« - Non, ne faites pas ça ! s’exclama Gibbs.

- Alors posez votre arme et allez vous-en, cria l’homme.

- Je ne peux pas, il faut que je couvre quelqu’un. N’est-ce pas Nora ?

- Oui, dit Nora.

- Une enfant ? Je ne ferais jamais de mal à une femme et encore moins à une enfant.

- Bon, dit Gibbs en jetant un coup d’œil sur Nora. Je vais ranger mon arme comme vous le voyez, continua-t-il en joignant le geste à la parole. Maintenant à vous. »

L’homme abaissa son arme mais Tony se rendit compte de ce qui pesait sur lui : il ne restait que lui qui pourrait protéger Nora. Gibbs lui remettait presque la vie de sa propre fille entre ses mains. Il était flatté de cette marque de confiance mais il n’en restait pas moins très angoissé par rapport à la suite des évènements.

« - Ca fait des heures que j’essaie d’appuyer sur la détente mais je peux pas parce que je suis un lâche.

- Vous n’êtes pas un lâche, vous ne voulez pas mourir, lui dit Gibbs.

-  Je ne peux pas passer le reste de ma vie en ayant la mort de mon frère sur la conscience. Il a été tué presque devant moi et je n’ai rein fait, dit l’homme avec colère.

- Vous n’avez rien pu faire, James », dit Nora d’une voix douce en s’approchant de lui.

Gibbs lui envoya un regard furieux pour lui indiquer de s’éloigner mais elle l’ignora et s’approcha encore plus. Gibbs était très inquiet, il pourrait avoir une réaction totalement imprévisible. Elle prenait trop de risques, elle n’avait pas de gilet par balle, bon sang !

« - J’aurais du le suivre plutôt que de bougonner.

- Et vous seriez mort aussi.

- Qu’est-ce que tu en sais ?

- J’étais là.

- Comment ça tu étais là ?

- C’étaient mes cris que votre frère avait entendus. »

 L’homme resta bouche bée.

« - Et puis ça ne change rien, je ne peux pas vivre avec ça.

- Vous étiez proche de votre frère ? demanda Nora en s’asseyant à côté de lui sous le regard désapprobateur et inquiet de Gibbs.

- Je me moquais souvent de lui mais c’était mon frère et j’ai besoin de lui. Ses sermons me manquent.

 - Il était du genre à toujours donner des leçons ? dit-elle en souriant.

- Oui. Ca m’a toujours énervé même si je savais qu’il ne voulait que m’aider.

- S’il était là, qu’est-ce qu’il vous aurait dit ?

- Il aurait été furieux et m’aurait passé un sacré savon, répondit en souriant légèrement.

- Je ne pense que ce soit une bonne idée de faire ça. Vous ne voudriez pas qu’il soit oublié ?

- Non, bien sûr que non.

- Personne ne le connaît mieux que vous. Sans vous, on ne pourra pas se souvenir de lui, c’est votre responsabilité de parler de lui aux autres pour que personne ne l’oublie. Si vous appuyez sur la détente, vous dites à votre frère que vous voulez que tout le monde l’oublie et que personne ne se souvienne de lui. Ce n’est pas ce que vous voulez ?

- Non, répondit calmement l’homme.

- Alors vous n’avez pas besoin de ça ? » dit Nora en commençant à approcher sa main de l’arme que James tenait toujours dans la main.

Les deux agents commencèrent à voir leur rythme cardiaque s’accélérer. L’homme pouvait mal réagir face au geste de Nora et lui tirer dessus à n’importe quel moment. Tony était nerveux, c’est à lui d’assurer les arrières de Nora. Quant à Gibbs, il était très inquiet, sa propre fille était assise à côté d’un gars inconnu et suicidaire, il pourrait la blesser en se tirant dessus ou pire la tu… non, il ne pouvait pas penser à ça, et pourtant le risque était là et il était plus que présent.