Clair-Obscur
Noir (2)
La seconde fois qu’ils couchent ensemble, Naruto ne s’y attendait pas, promis juré craché.
Ils ne couchent pas ensemble d’ailleurs. C’est une lutte indistincte, un échange de fluides corporels, et comme à peu près tout en eux cela commence –et se poursuit- comme un combat, parce que Sasuke est incapable d’accepter autre chose, et parce que Naruto ne sait pas quoi faire d’autre, qu’il ne peut que vouloir, et que c’est trop, trop vite, trop fort, parce que c’est Sasuke.
À vrai dire il ne s’attendait à rien. Tout est trop confus, trop étrange, et la réalisation de sa propre vulnérabilité face à celle de Sasuke le déstabilisa peut-être plus que tout le reste. Peut-être même plus que le yukata entrouvert et la naissance des ombres bleues et découpées sur les muscles de Sasuke, peut-être même plus que la soudaine chaleur, et cette brutale détermination à prouver la réalité du lien entre eux, aussi irrationnelle que la colère et la confusion qui ont précédé et tout aussi absolue, alors même que l’action risque de détruire définitivement ce même lien.
En fait, il ne réfléchi pas.
-
« Sors d’ici, Naruto »
La voix de Sasuke est étroitement contrôlée, et tromperait n’importe qui d’autre même parmi ceux qui le connaissent, à l’exception peut-être de Kakashi-sensei.
« Non, » s’entend-il répondre. « Sasuke, je… suis désolé. »
« Très bien, maintenant fous le camp de chez moi. »
Naruto se redresse un peu et découvre les dents, alors que l’irritation fait son grand retour. Bon sang, Sasuke a-t-il vraiment besoin d’être un tel mur d’impassibilité hautaine tout le temps ?
« Hé, salaud, je suis en train de m’excuser, tu n’es pas obligé de te conduire comme un connard méprisant…»
« Je ne veux pas de tes excuses, je veux que tu sortes de chez moi. »
« Et comme ça tu pourras recommencer à te morfondre en paix ? Cours toujours, tu as eu suffisamment d’une semaine pour faire ça. »
Le poing de Sasuke s’ouvre puis se referme, et tout en retenant un geste de parade automatique Naruto réalise que sa poitrine se soulève à intervalles brefs et irréguliers. Ses pupilles noires sont dilatées.
Il s’appuie d’une main contre le mur derrière lui et se remet debout, sans quitter des yeux l’Uchiha en face de lui.
« Je t’encule Naruto. Sors d’ici maintenant. »
Et c’est à ce moment-là que tout dérape, parce qu’au lieu de répondre par une autre insulte, et peut-être de trouver un moyen de traîner Sasuke jusqu’à un terrain d’entraînement pour ventiler la tension une bonne fois pour toute, Naruto fait un pas en avant, qui le mène presque torse contre torse avec l’Uchiha. Et il souri d’un demi-sourire confiant, prédateur, et sa voix n’est qu’un souffle rauque et suggestif.
« Non, c’est moi qui t’encule Sasuke, et avec plaisir. »
Si les pupilles de Sasuke étaient dilatées avant, il n’y a probablement pas de mot pour maintenant. Pourtant il répond par un haussement de sourcils hautain et un rictus chargé d’un mépris plutôt convaincant.
« Ne soit pas trop présomptueux, trou-du-cul. »
Mais le sourire vacille quand Naruto fait un pas de plus en avant, et pose sa main à plat contre son torse –et son souffle est court, Naruto peut le sentir en plus de la chaleur qui dévore sa paume ; et la très (très) petite part de son cerveau qui conserve une once de rationalité lui fait remarquer que c’est plutôt une bonne chose. Que ça peut peut-être prolonger son espérance de vie d’une dizaine de secondes de plus, qu’il a même une chance de s’en sortir, s’il se met à courir maintenant…
Au lieu de quoi il glisse sa jambe derrière celle de Sasuke, et pousse.
Sasuke est rapide et plus habile, mais si Naruto est plus petit, il est aussi plus lourd et physiquement plus fort. Au corps à corps c’est lui qui a l’avantage, et ils le savent tout les deux.
Et même si évidemment ça n’empêche pas une seconde Sasuke de résister, Naruto a bien calculé sa poussée, et la gravité fait le reste.
Ils atterrissent durement sur le plancher de bois, dans un entrelacs de membres. Sasuke amorti sa chute sans même avoir besoin d’y penser, tête rentrée contre sa poitrine et dos arrondis malgré le poids de l’autre. Et avant Naruto n’ait tout à fait fini de réaliser ce qu’il vient exactement de faire –mais-qu’est-ce-qui-m’a-pris ???- , Sasuke se cambre sous lui, saisi à deux mains le col du blond qui se déchire à moitié quand il le tire vers lui dans le mouvement, et frappe de toutes ses forces.
Il y a un craquement de mauvais augure quand son front rencontre le nez de Naruto et celui-ci sent le sang chaud ruisseler, mais Sasuke ne s’arrête pas pour si peu, et d’un nouveau mouvement de hanche il parvient à dégager sa jambe droite, suffisamment pour pouvoir prendre appui, et intervertir leurs positions.
L’air contenu dans les poumons de Naruto s’échappe d’un coup quand son dos heurte le sol à plat, et que le genou de Sasuke s’enfonce une fois dans son ventre avant de se reposer par terre pour assurer son équilibre.
Le visage du jeune homme au-dessus de lui est fermé en une grimace rageuse, mais ses yeux sont trop écarquillés et sa respiration est trop inégale pour un combat qui a à peine duré une seconde, deux tout au plus.
« Je t’avais prévenu, ne soit pas trop présomptueux, Naruto. »
La douleur à son visage et dans son ventre ont eu l’avantage de tirer Naruto de l’indécision paniquée qui l’a un instant envahi. Il tousse un peu pour dégager le sang qui coule dans sa gorge. C’est de nouveau une situation qu’il connaît, même si pas tout à fait, et dans ces cas-là il sait quoi faire. La réaction à ce genre de situation est trop profondément ancrée dans son inconscient, et s’il sait vaguement que ce terrain connu débouche à terme sur un territoire qui l’est beaucoup moins, il ne prend pas le temps de réfléchir.
Sasuke est penché au-dessus de lui, beaucoup trop près pour le calme physique de Naruto. Sa main droite est refermée comme un étau sur l’un de ses poignets, l’immobilisant au sol, mais il pèse inconsciemment beaucoup moins sur l’autre, celle qu’il vient d’arracher aux bandages qui maintenaient le bras. La pensée incongrue que Sakura ne va pas être contente du tout traverse vaguement l’esprit de Naruto avant de disparaître sous des préoccupations plus pressante. De si près il ne peut que sentir l’odeur de Sasuke, enivrante, un mélange de cuir sec, d’huile à nettoyer les armes et de quelque chose d’autre qui n’est que lui.
Sans laisser le temps à Sasuke d’affermir sa position, Naruto dégage son bras et agrippe l’épaule de son équipier tandis qu’il coince la jambe du côté opposé sous la sienne. Avec une torsion soudaine il roule sur lui même, et au terme d’une brève lutte durant laquelle le yukata de Sasuke laisse entendre un bruit de déchirure inquiétant, leurs positions sont de nouveau interverties, et un Sasuke échevelé et haletant est immobilisé sous le poids de Naruto.
Ils restent un instant ainsi, et Sasuke essaye vainement de se dégager en déséquilibrant Naruto. Ses muscles se tendent, et ils luttent en silence alors que Naruto pèse de tout son poids contre lui. Cette fois-ci l’effet de surprise a disparu, et son bras faible se retrouve immobilisé au-dessus de sa tête. Il laisse échapper un juron entre ses dents serrées, à présent leurs deux respirations sont labourées comme s’ils venaient de courir le parcours d’obstacle d’entraînement des anbus.
Les yeux noirs de Sasuke portent en eux des promesses de mort toutes plus violentes les unes que les autres, et Naruto se demande une fraction de seconde s’il a imaginé l’étincelle de quelque chose d’autre avant que l’Uchiha ne commence à se débattre. C’est difficile à dire. Il n’est pas doué pour lire les gens, il n’a pas l’intelligence aigue de Sakura, les yeux de Sasuke. Il ne peut qu’essayer de deviner, et ne pas renoncer.
Il y a du sang sur la joue pâle de Sasuke, et il faut une bonne seconde à Naruto pour réaliser que c’est le sien bien que son nez ait déjà arrêté de saigner.
Leurs deux corps sont étroitement liés, presque torse contre torse pour réduire l’espace d’amorçage des coups, et lorsque Sasuke ouvre la bouche pour l’insulter, ou le menacer, ou Dieu sait quoi d’autre, les lèvres de Naruto viennent heurter les siennes dans un mouvement irréfléchi.
Ce n’est qu’une parodie de baiser, instinctif, maladroit et violent, qui a goût de sang et de sel. Et quand Sasuke entrouvre la bouche et que la langue de Naruto franchit ses lèvres, ce n’est une action réfléchie de la part d’aucun d’entre eux.
Mais ça l’est sans doute au moins à moitié lorsque Sasuke referme ses dents sur la langue de Naruto, et serre.
Dans le fond de sa gorge Naruto émet ce qui ressemble fortement à un glapissement de douleur offensé et surpris, qui s’étouffe dans leurs bouches et ne sort que comme un gémissement. Il a un mouvement de retrait, mais Sasuke ne lâche pas prise, pas même lorsque le poids sur ses poignets s’allège et que le goût du sang se fait plus prononcé contre sa propre langue.
Et soudain Naruto bouge, et son genou vient se nicher entre les jambes de Sasuke, pressant contre le yukata à demi défait et le tissu de ses sous-vêtements.
Cette fois c’est Sasuke qui laisse échapper un bruit de gorge incontrôlé, et sous le corps de Naruto il se raidit brutalement. La pression de ses dents sur la langue de Naruto s’est relâchée, et expérimentalement le blond répète le mouvement, pressant sa cuisse contre le bas-ventre de Sasuke. Cette fois ci aucun son ne franchit les lèvres de l’Uchiha, mais le spasme qui le traverse est visible à l’œil nu, et sa bouche s’ouvre sur un souffle silencieux. Ses yeux sont grands ouverts, mais Naruto n’est pas certain qu’il le voit réellement.
D’une main tremblante il essuie le sang qui perle sur ses lèvres, et attend une fraction de seconde avant de parler, parce que sa voix risque de le trahir.
« Bo-bordel Sasuke, t’as failli m’arracher la langue… Qu’est ce qui t’as pris, t’étais pas obligé de faire ça connard ! »
Sasuke aussi a besoin d’une fraction de seconde pour se reprendre, mais son expression agressive est beaucoup plus réussie que celle de Naruto malgré ses joues légèrement empourprées et son regard fiévreux qui le toise.
« Tu l’as cherché crétin… Si tu crois que je vais me laisser faire… Lâche-moi.»
La tête de Naruto lui tourne vaguement, et son esprit cour en cercles fermés, s’arrêtant alternativement sur deux faits aussi indiscutables qu’antagonistes. D’un côté la stupidité incommensurable de ce qu’il est en train de faire –qu’est-ce qu’il est exactement en train de faire, d’ailleurs, à part la plus grosse connerie de son existence ?-, Sasuke va le haïr et cette fois il n’y aura pas de retour possible… Et de l’autre côté l’expression de surprise qui a envahi un instant le visage de Sasuke en même temps que la décharge de plaisir, cette expression étrangement fascinante qu’il n’avait encore jamais vu, pas même cette fois là auprès du corps d’Itachi. Et aussi son gémissement étouffé, et la façon dont son corps a ondulé sous le sien, mu par un besoin que Sasuke n’arrive pas à s’autoriser. La langue de feu du désir qui se contorsionne dans son propre ventre.
Il a la bouche terriblement sèche.
« Lâche-moi Naruto. »
Il passe sa langue sur ses lèvres desséchées, et n’essaye même pas de forcer un sourire.
« Non. »
Il se demande vaguement si l’Uchiha a réalisé qu’il n’immobilise plus qu’un seul de ses bras, puis oublie la question lorsqu’il frotte de nouveau sa jambe contre l’érection de Sasuke avant que ce dernier ne décide de se passer de mots et de l’exécuter manu militari.
Son souffle vacille, mais il continue à foudroyer Naruto du regard. Si les Regards pouvaient tuer, Sasuke aurait probablement à son actif le décompte de morts le plus élevé des Cinq pays, en compétition directe avec Gaara.
Avec plus de confiance en lui Naruto répète le mouvement une nouvelle fois, plus agressivement, puis encore, cherchant sur le visage étroitement contrôlé de Sasuke les indices dont il a besoin, cherchant cette expression de nouveau. Dans le même temps il laisse sa main libre remonter sur le torse bandé de son équipier, entre les plis sombres du yukata et jusqu’à la peau.
Sasuke était en train de dégager l’une de ses jambes, mais son mouvement avorte et Naruto sent sa cuisse se contracter contre la sienne. L’insulte qu’il était sur le point de prononcer meurt sur ses lèvres, « Ah… », et le propre souffle de Naruto se tarit dans sa poitrine. La langue de feu est partout à présent, dans le moindre de ses nerfs, et le moindre contact peau contre peau déclanche un infime frisson qui se propage sur tout son épiderme. Il n’avait jamais réalisé à quel point un simple contact pouvait être si enivrant. Mais en même temps ce n’est pas comme si beaucoup de monde le touchait volontairement, en dehors des combats et des soins.
Il se demande si Sasuke se rend compte à quel point sa main tremble, et s’il réalise qu’il n’a aucune idée de ce qu’il est en train de faire, mais il ne peut pas arrêter, pas maintenant, et quand ses doigts rencontre la trace d’une cicatrice ancienne et qu’il entreprend d’en remonter le cours, le dos de Sasuke s’arque de nouveau, et ses yeux s’écarquillent. Et sa jambe libre remonte soudain, et vient s’appuyer contre l’entrejambe de Naruto.
Le contact est comme une décharge, plus violente que tout ce à quoi il s’attendait et tous les muscles de son dos se contractent d’un coup tandis qu’il laisse échapper un halètement surpris et que dans un mouvement instinctif de bassin il se colle plus étroitement encore à la jambe de Sasuke. La chaleur dans son ventre déborde, demande contact et apaisement, et son pantalon de toile est bien trop serré.
Les yeux de Sasuke sont trop dilatés, et un peu vagues, mais ils ont une lueur de satisfaction et de supériorité –connard- lorsque Naruto revient chercher la friction, encore et encore, et qu’il ne peut retenir un râle étouffé.
Sa main abandonne la cicatrice et remonte rapidement, allant et venant sans douceur contre la peau pâle, accrochant au passage un mamelon rosit et provoquant un spasme incontrôlé des hanches de Sasuke. Sa mâchoire se contracte tandis que la main de Naruto continue ses tâtonnements, et il expire à travers ses dents serrées.
« Imbécile, tu mets… du sang partout. »
Naruto se détourne un instant du visage de l’Uchiha, pour constater que c’est effectivement le cas : c’est la main avec laquelle il a essuyé son nez et sa bouche ensanglantés, et les bandages ainsi qu’une bonne partie du torse de Sasuke sont couverts de traces et d’empreintes écarlates. Noir, blanc et rouge, et par-dessus sa propre main à la peau bronzée.
Entre deux goulées d’air il émet un son qui pourrait passer pour un grognement offensé mais n’est en fait qu’un râle. Il a du mal à être cohérent, et c’est une insulte personnelle que Sasuke le soit encore autant.
« C’est… ta faute, tu n’avais qu’a pas me casser le nez –ha !- salaud… »
« T’avais qu’à… être suffisamment doué pour… l’éviter, nullard. » Sasuke le toise, et le masque est encore presque totalement en place malgré la fièvre qui empourpre ses joues.
« Ho… et un peu –hn- de sang te gêne, hein ? »
Sasuke arrache soudain sa main qui était encore prisonnière de la poigne de Naruto et profitant du manque de méfiance du blond fait brutalement basculer leur étreinte, jusqu’à être une nouvelle fois au-dessus de Naruto. Ses mains enserrent douloureusement les poignets de son équipier, mais pas un instant ils n’ont cessé de s’arque-bouter désespérément l’un contre l’autre. Cette fois c’est sa bouche qui vient chercher celle de Naruto, mordant et goûtant frénétiquement. Avec un grondement l’anbu blond se débat –la friction est telle qu’il a l’impression qu’il va éjaculer ici et maintenant, mais il n’est est pas question- et au terme de quelques torsions et autres coups de genoux dans le ventre de Sasuke il parvient à placer sa jambe pliée entre leurs deux corps, s’arrachant un trop long instant à la chaleur, et il laisse échapper un gémissement face à la perte soudaine, mais il pousse quand même, et projette Sasuke sur le côté de toutes ses forces.
Dans un fracas de verre brisé l’Uchiha s’écrase sur la table basse qui était appuyée contre le mur sous la fenêtre – le choc est tel qu’un parchemin calligraphié probablement aussi coûteux qu’ancien tombe du mur et va rouler au milieu des éclats de verre.
Mais aucun des deux ne s’en rend compte parce que Sasuke s’est déjà remis sur ses pieds, ignorant la coupure sur sa pommette et les éclats acérés, et il est de nouveau sur Naruto qui n’a eu que le temps de se redresser à demi, et ils roulent de nouveau ensembles au sol, dans un entrelacs de coudes et de genoux, et d’insulte entrecoupées par leurs souffles labourés.
Ils finissent par heurter un mur et s’immobilisent, poussant l’un contre l’autre avec une violence presque désespérée. Le T-shirt noir déjà déchiré de Naruto n’est plus qu’un souvenir abandonné à quelques mètres de là après que Sasuke ne s’en soit servit un peu trop énergiquement comme prise, et quand au yukata il est à présent totalement défait et son état ne vaut pas beaucoup mieux, imbibé de sueur, coincé en plis désordonnés sous les épaules de l’Uchiha.
Avec un râle rageur qui ne masque pas le tremblement dans ses épaules le brun arrache sa bouche de celle de Naruto.
« Va… te faire voir Uzumaki, je ne suis pas une putain de kunoïchi… si t’as envie de mettre ta verge dans quelque chose trouves-toi une… fille… pour écarter les-hn jambes… »
« T’as pas… intérêt que Sakura t’entende dire ce genre de truc si tu veux… garder ta sale gueule de beau gosse, connard… » Naruto s’interrompt un instant avec une expiration bruyante lorsque Sasuke agrippe ses cheveux d’un geste approximatif pour le rapprocher et mettre le creux de son épaule a porté de ses dents.
- Arrête… » Il repousse le brun avec brutalité, suffisamment pour qu’ils puissent être nez à nez et passe sa langue sur ses lèvres irritées. « Et… je vais te dire un truc, Uchiha, je suis pas une putain… de kunoïchi non plus… et pourtant je l’ai fait pour toi. » Il accompagne chaque mot d’un mouvement rageur des hanches, frottant leurs érections couvertes de tissus l’une contre l’autre, et le souffle de Sasuke se bloque un instant.
Quand il se souvient qu’il sait respirer son visage se ferme, et il grimace.
« Pas de chan-… »
Mais il n’a pas le temps de finir sa phrase, parce que Naruto a enfoui sa tête dans le creux de son épaule gauche, et sa langue et ses dents viennent laper et mordre et sucer la peau, et tout à coup ses lèvres frôlent la barrière extérieur de protection du sceau maudit.
La décharge qui traverse le corps de Sasuke n’a rien a voir avec les précédentes. C’est une explosion de douleur-plaisir-surprise plus terriblement intense que tout ce qu’il a ressentit jusque là, et sa tête bascule en arrière tandis qu’il laisse échapper un cri rauque qu’il n’a pas le temps de retenir. Tout son corps brûle et ses doigts se referment convulsivement sur les mèches ébouriffées et pleines de sueur de Naruto alors que son autre main griffe inutilement le plancher à la recherche d’un appui.
Contre lui le blond s’immobilise brusquement, et la chaleur de sa bouche quitte son cou.
« Sas’ke ? »
Il ne demande pas “ça va ?”, parce que pour l’Uchiha ce serait une insulte et dieu sait comment il réagirait. Les choses sont suffisamment mauvaises comme ça.
Sauf que ça c’est Sasuke et lui en train de rouler par terre dans l’appartement de l’Uchiha, qu’il veut, qu’il prend, et que Sasuke ne l’a toujours pas frappé.
Enfin si, mais ça ne compte pas vraiment, parce que nul ne peut prétendre forcer Sasuke Uchiha, et s’il décide que Naruto va trop loin il sait qu’il le découvrira en même temps que le Chidori ou le kunaï sous sa gorge.
Parce que les actes de Sasuke en ont toujours plus dit que les mots. Et que ce qu’il ne fait pas, à autant d’importance que ce qu’il fait. Il n’a jamais essayé de partir de nouveau.
Quand Sakura et Naruto le traînent au restaurant il est à peu près muet et il se conduit comme si la présence de ses équipiers étaient un poids accablant et un peu honteux, mais il est là, et parfois ses moues affligées ressemblent juste un peu trop à des sourires. Et il jure peut-être, et menace et lance des regards meurtriers, mais son corps est là, contre le sien.
La pensée rend Naruto un peu nauséeux, et en même temps étrangement extatique. Tout va trop vite. C’est Sasuke, Sasuke bordel.
Sasuke, trop fier pour son propre bien, Sasuke dont la carapace est déjà bien trop fêlée. Sasuke qui craint sa propre faiblesse plus que tout et pourtant lui offre sa gorge.
Il va le regretter, il le sait, d’une manière ou d’une autre. La certitude est là à l’arrière de son esprit, mais elle n’est pas assez forte, pas avec le désir qui boue en lui. Il ne peut plus arrêter de toucher Sasuke à présent. Et il est déjà trop tard, les choses sont trop engagées pour qu’aucun puisse prétendre qu’il ne s’est rien passé, que c’est juste un combat qui a dégénéré.
Si les choses ont commencé à dégénérer, c’est bien avant ça.
Il rouvre les yeux qu’il avait un instant fermé et fixe le visage de Sasuke sous lui. Ses yeux sont clos et sa bouche est entrouverte dans une expression tendue qui pourrait être douleur aussi bien que plaisir, sa respiration est erratique. Des mèches d’encre rendues poisseuses par la sueur collent à son front et d’autres encadrent son visage, sur le parquet.
Cette simple vision suffirait à le rendre instantanément dur si ce n’était déjà le cas.
D’un ton bas parce que la voix lui manque, Naruto appelle de nouveau, inquiet. La brusque convulsion de Sasuke lui a soudainement rappelé ce qu’il savait déjà, à quel point il leur est facile de se blesser l’un l’autre, et cette connaissance et la peur qu’elle engendre se mêlent amèrement au désir, le rendant étrangement plus consistant, à tel point qu’il en devient douloureux. A tel point qu’il a l’impression que sa propre poitrine va exploser.
« Sas’ke ? »
Son équipier expire et entrouvre les yeux tandis que sa prise dans les cheveux de Naruto se relâche, et il parvient à lui adresser un regard perçant qui fait se tordre quelque chose dans l’estomac de Naruto. Sasuke parvient presque à masquer le frisson qui le traverse par une grimace arrogante.
« Tss… déjà fatigué, Uzumaki ? »
Naruto répond par un sourire mordant de sa composition, et ouvre la bouche pour répondre mais s’interrompt avant d’avoir laissé échapper quoi que ce soit. La tête lui tourne et il n’est plus sure de rien, juste de la présence de Sasuke et d’à quel point tout n’est que violence et confrontation entre eux. A quel point il le désire maintenant. Il se demande si le défit muet pour la dominance, sa fierté sont les seules choses qui empêchent Sasuke d’interrompre leur étreinte. Il se demande si Sasuke ne le laisse faire que pour distraire la douleur et la confusion dans son propre esprit.
« Oh, Naruto, c’est une tâche trop compliqué pour ton cerveau ? Si tu fais quelque chose, fais le bien crétin… » Le ton est provoquant, hautain, mais pas totalement maîtrisé. C’est la chose la plus proche de l’encouragement verbal ou de la demande que Naruto obtiendra. C’est déjà beaucoup trop.
Sasuke, c’est Sasuke, bourdonne une petite voix en lui, Sasuke, Sasuke…
Ca ne devrait pas sembler aussi normal, et il ne devrait pas le désirer à tel point que tout le reste disparaisse.
Il sent sa vision se teinter de rouge tandis que sous lui l’Uchiha laisse échapper un grognement impatient et cherche ses hanches d’un mouvement de bassin. Naruto est tétanisé au dessus de lui, et malgré le besoin qui englue chacun de ses membres, qui liquéfie son intérieur, il reste parfaitement immobile lorsque Sasuke plaque agressivement ses hanches contres les siennes, lorsque sa main se referme sur son épaule et qu’il enfonce ses doigts dans les muscles pour assurer sa prise.
Mais lorsque la bouche de Sasuke revient chercher le creux de son cou, et qu’il sent son corps normalement tellement maîtrisé trembler contre le sien il laisse retomber sa tête et se mord la lèvre inférieur.
Sasuke laisse échapper un gémissement qui ressemble à un sanglot, et Naruto enfonce ses doigts dans le sol comme pour s’ancrer parce que son propre corps n’en peut plus, et que tout brûle en rouge autour de lui. L’une de ses mains reposait sur le yukata, mais sous sa prise le tissu cède, et il ne l’entend même pas alors que ses ongles s’enfoncent dans le bois, et que le goût de sang dans sa bouche se fait plus prononcé.
Et à présent il se presse contre Sasuke, et ne ressent plus rien d’autre que le feu rouge qui dévore tout, et leurs hanches se rejoignent dans une lutte convulsive dont le silence est uniquement interrompu par leurs halètements et le bruit des corps qui se heurtent.
Sasuke ramène sa tête dans un geste violent pour arque-bouter ses épaules contre le sol, et quand ses yeux noirs –noirs, toujours noirs- rencontrent ceux de Naruto ils s’écarquillent un peu plus, mais aucune peur ne se lit sur son visage, ni dégoût ni rien à par le même déchaînement farouche et désespérée que celui qui brûle en Naruto. Et ça veut sans doute dire quelque chose, même s’il ne sait pas quoi.
Après cela ils durent ridiculement peu de temps.
Sasuke étouffe son cri en enfonçant ses dents dans l’épaule de Naruto, et Naruto se cambre avec un dernier spasme contre le corps sous le sien avant de se laisser retomber.
Un instant il laisse son front reposer contre l’épaule de Sasuke tandis que le feu se retire, mais quand il ouvre les yeux ses griffes qui ont laissé de profonds sillons dans le sol n’ont pas fini de se rétracter, et le chakra crépite encore sous sa peau.
Sasuke ne dit rien à propos de ses pupilles fendues, rien à propos des canines qui doivent encore dépasser de ses lèvres. Simplement d’un coup de hanche il se contente de faire basculer Naruto à côté de lui, et détourne la tête, face au mur.
Ses épaules tremblent.
Et Naruto reste ainsi, dos contre le parquet froid, l’avant de son pantalon désagréablement humide mais trop vidé pour oser bouger. Trop effrayé aussi, tandis que la respiration de Sasuke se calme lentement, jusqu’à ce que son équipier se mette en position assise et cale son dos contre le mur. Ses yeux noirs sont de nouveau illisibles, et il passe une main sur son front, chassant les mèches désordonnées.
Il regarde Naruto.
« Laisses-moi maintenant. Vas t’en.»
Et Naruto voudrait protester de nouveau, répondre jamais et être sérieux, et mettre Sasuke au défit de se débarrasser de lui aussi facilement, mais il est confus, il a peur et il lui semble que son esprit à a peu près la consistance de ramens oubliés trop longtemps dans l’eau. Il se sent malade.
Alors il se lève, il attrape son T-shirt en lambeau, et il prend la fuite.