Patrocle
Le roi Ulysse n’était pas un homme ambitieux. L’île d’Ithaque et son sol fertile étaient assez riches pour faire de lui et de son épouse des gens heureux. Des revenus réguliers tirés du commerce du bétail et du grain lui permettaient d’entretenir une petite force militaire – cinq galères de guerre qui patrouillaient le long de la côte, et environ cinq cents soldats pour défendre la terre. Ni les galères ni la petite armée de soldats n’étaient assez impressionnantes pour faire craindre une invasion aux rois des îles voisines, tout en l’étant suffisamment pour décourager ces mêmes rois de s’attaquer à Ithaque.
À vingt-huit ans, Ulysse était satisfait de sa vie. Le succès, comme le roi l’avait découvert plusieurs années auparavant, résidait dans l’harmonie et l’équilibre. Ce chemin n’avait pas été facile pour Ulysse. Enfant, il était passionné et avait son franc-parler, au désespoir de son père le roi Laërte, qui essayait de lui apprendre à contrôler ses émotions. Chaque décision, disait son père, devait être fondée sur la pensée rationnelle et sur un examen soigneux des circonstances. Planification, ruse, stratégie à long terme suffisaient à contrer n’importe quel ennemi quel que soit sa force.
Laërte se moquait continuellement de l’incapacité de son fils à penser clairement. Mais il ignorait que ce jeune homme avait un esprit aussi aiguisé qu’une lame et qu’il planifiait déjà le futur sans révéler ses desseins à quiconque. À l’âge de vingt ans, Ulysse avait compris que son heure était venue. Il était allé voir son père, l’avait remercié, puis lui avait enfoncé une dague dans le cœur avant de devenir roi à son tour.
Les années passées depuis cet acte n'avaient pas effacé la culpabilité, mais l'avaient plutôt transformée en une ombre constante qui guidait chacune de ses décisions. Désormais, chaque geste, chaque parole qu'il prononçait, chaque sourire qu'il affichait lors des banquets royaux étaient soigneusement calculés pour maintenir l'illusion du roi sage et équilibré. Il savait que son peuple l'aimait, que ses conseillers le respectaient, mais personne ne connaissait la véritable nature de l’homme derrière le trône.
La paix qu'il avait instaurée à Ithaque n'était qu'une façade, une protection contre le chaos qu'il redoutait plus que tout. Chaque nuit, il rêvait de tempêtes dévastant ses côtes, de trahisons dans son propre palais, d'ennemis invisibles se glissant dans son ombre. Mais ces cauchemars ne faisaient que renforcer sa conviction : l'équilibre devait être maintenu à tout prix, même si cela signifiait commettre d'autres crimes silencieux pour préserver la paix.
Ainsi, Ulysse restait à l'écart des guerres et des ambitions des autres rois, se contentant de sa petite armée, de ses cinq galères qui patrouillaient la mer. Il n'avait pas besoin de conquérir des terres pour prouver sa force. Son véritable royaume était celui des esprits, là où il dominait par la ruse et l'intellect. Car, comme il se le répétait souvent, ce n'était pas les plus forts qui survivaient, mais les plus astucieux.
Et pourtant, au fond de lui, une question persistait, un doute qui refusait de s'éteindre : combien de temps encore pourrait-il maintenir cet équilibre fragile avant que tout ne s'effondre ?
Aujourd’hui il était assis avec d’autres rois Grecs, le plus puissant d’entre eux était Pelée de Thessalie très beau et élégant dans sa bure blanche striée d’or, et sa chevelure blonde striée de gris aussi. Après le trépas d’Agamemnon il est devenu la plus haute autorité du monde Grec, il pouvait se le permettre avec sa grande armée et ses Myrmidons commandés par Achille le sanguinaire.
— Ne commettons pas d’erreur, déclara Pelée d’une voix puissante en regardant les rois assis devant lui. Nous ne pouvons-nous le permettre vue la situation actuelle.
Les membres de l’assemblée gardaient le silence. Télamon, seigneur de Salamine, était affalé dans son siège, les yeux rivés sur son gobelet de vin rouge. Diomède, seigneur d’Argos, et depuis peu, seigneur protecteur de Thèbes, exposait à la vue de tout le monde son noble profil, le visage tourné vers la fenêtre. À l’opposé de la table siégeait Nestor, roi de Pylos ; il avait une barbe semblable à celle de Zeus, et de petits yeux perçants et brillants qui jetaient des regards furtifs en direction des membres du conseil. Perdue dans ses pensées, Philomèle, reine de Locride, jouait avec les énormes perles de son collier, et tordait, de temps à autre, ses belles lèvres charnues en une grimace ambiguë.
— La pacification avance bien, déclara Pelée. Mais nous devons nous méfier de Sparte, d’Athènes, et surtout Skyros, ils étaient de proches alliés d’Agamemnon, et malgré sa mort ils montrent encore de la sympathie pour Mycènes. Et Mycènes reste un lion avec des crocs acérés même blessé, nous l’avons constaté avec Cotys.
Ulysse écoutait attentivement les paroles de Pelée, sans bouger ni trahir la moindre émotion. Il observait les autres rois, notant leurs expressions, leurs gestes et leur silence. Chacun d'entre eux portait en lui des ambitions ou des peurs bien dissimulées. Le roi d'Ithaque savait mieux que quiconque que cette assemblée n'était pas un conseil de camarades, mais une arène silencieuse où se tramaient les futurs jeux de pouvoir.
Pelée, désormais à la tête des armées grecques depuis la chute d'Agamemnon, incarnait cette figure imposante et redoutée. Il avait gagné l'autorité non seulement par la force, mais aussi par sa capacité à imposer la paix à travers la crainte. Sa beauté vieillissante et son charisme naturel n'avaient fait qu'ajouter à sa réputation. Et avec Achille, son fils sanguinaire, commandant les Myrmidons, aucun roi n'osait remettre en cause sa suprématie, au moins pas ouvertement.
— Vous avez surtout sous-estimer la fille de Tyndare, intervint Philomèle avec un sourire moqueur. Voilà ce qui arrive quand on ne se méfie pas assez d’une louve qui a survécus à deux maris, ma fois j’aurais aimé une fille qui lui ressemble, elle m’aurait donné de féroces petits enfants.
— Tout le monde sait que tu envies beaucoup les enfants des autres, dit Nestor froidement. Et tout le monde sait aussi comment tu traites les tiens avec le respect qui leur est dû.
Philomèle abandonna son sourire et toisa froidement le roi de Pylos, ce dernier leva sa coupe et dégusta son vin en soutenant son regard sans être impressionné. Ulysse choisit cette fois d’intervenir.
— Nous devons d’abord apprendre à nous entendre sans se sauter à la gorge, déclara-t-il d’une voix apaisante. Si Agamemnon a constitué une ligue par la peur, nous devons en créer une en établissant des liens fort. Mais pour y arriver nous devons cesser de nous comporter comme des enfants, nous sommes rois, alors agissons comme tel.
— Ma remarque n’avait pas pour but d’embarrasser quiconque, répliqua Philomèle d’une voix puissante. Comme l’a déclaré l’honorable Pelée ne commettons pas la même erreur en sous estimant les cités de l’Ouest de la Grande Grèce, ils ont des armées plus nombreuses et leurs terres sont deux fois plus fertiles que les nôtres, ils ne vont pas se rendre sans combattre. Je ne doute pas de la force de nos guerriers, mais la prudence reste de mise.
— Je suis d’accord avec la reine Philomèle. Intervint cette fois Diomède. Je suis le plus jeune roi de cette assemblée, mais j’ai appris beaucoup de choses lorsque je combattais Thèbes pour venger mon père, je n’ai pas peur de combattre, mais je préfère le faire lorsque les conditions de victoire soient plus sûres, si nous devons marcher vers l’Ouest assurons d’abord nos arrières, et méfions-nous des puissances émergentes, et vous savez tous de qui je parle.
— Le royaume de Troie, dit Télamon avec gravité.
Les mots de Télamon tombèrent comme un coup de tonnerre dans la salle. Le nom de Troie, évoqué à voix haute, fit frissonner certains rois et rois-reines, même les plus aguerris. Ulysse, qui observait silencieusement les réactions de chacun, savait que cette simple mention n’était pas anodine. Troie, la cité légendaire, se dressait à l’horizon comme une menace silencieuse, mais persistante, dont on redoutait la force autant que l'influence.
— Qui sera un empire d’ici peu, fit Nestor en déposant sa coupe vide. Et qui va finir par regarder du côté de chez nous.
— Troie est une puissance, c’est indéniable. Mais je doute qu’ils se mêlent à nos affaires pour l’instant. Assura Ulysse. Ils ont leurs propres commerces à gérer, leurs alliances avec les Hittites et les Assyriens à entretenir. Ils ne prendraient jamais le risque de traverser la mer Egée pour nous envahir.
C’est alors qu’un invité choisit ce moment pour intervenir, le prince Palamède d’Eubée, il était le plus grand rival d’Ulysse car comme ce dernier il avait une ruse digne d’Hermès et réussissait à obtenir des informations provenant d’une armée d’espions disséminés partout, même en dehors de la Grèce. Certains le qualifiait même d’homme le plus intelligent du monde, beau comme un dieu et soldat émérite, il ne laissait aucune femme indifférente à son charme, sauf bien sûr Ulysse qui le haïssait, surtout lorsque Pelée l’avait convoqué sans en aviser le roi d’Ithaque, ce qui avait déplut à ce dernier.
— Tu oublies noble roi d’Ithaque que Priam commande des rois et non des soldats. Il a Anchise de Dardanie qui a son tour pour fils le prince Enée dont on dit qu’il très redouté comme guerrier, sans oublier Éétion roi de Thèbe sous le Placos dont la fille a épousé le prince Hector, et je ne parle non plus de Sarpédon le roi de Cilicie qui est le plus grand stratège d’Asie et qui fut le mentor d’Hector et d’Enée, ajouter a cela les Amazone de Penthésilée et Memnon d’Ethiopie, alors non Troie n'est pas juste une cité puissante par ses murailles ou ses armées, ce qu’Agamemnon a voulu construire en Grèce, Priam l’a fait depuis longtemps en Asie. Si nous continuons à nous déchirer entre nous, il se pourrait bien que ce soit Troie qui profite de nos faiblesses. Leur influence s'étend déjà dans les mers du Nord, leurs espions rôdent probablement dans nos terres.
Les mots de Palamède traversèrent la salle avec un effet immédiat. L'atmosphère, déjà tendue, devint soudainement plus lourde. Chaque roi mesurait l'ampleur de ce que le prince d'Eubée venait de révéler. Ulysse, assis dans son siège, serra légèrement la mâchoire en écoutant attentivement les propos de son rival. Il n'aimait pas la manière dont Palamède exposait les faits, ni l'aisance avec laquelle il capturait l'attention des autres.
Pelée, pourtant, resta impassible, ses yeux gris sondant Palamède avec une froide curiosité.
— Ce que tu dis, prince Palamède, n’est pas faux, répliqua Ulysse en croisant ses mains. Mais si nous devons commencer à craindre chaque royaume qui forme des alliances ou produit de grands guerriers, alors nous serons paralysés par la peur et la suspicion. Priam a peut-être construit un réseau solide en Asie, mais il est loin d’avoir la mainmise sur le monde grec. Nos querelles internes peuvent affaiblir certaines cités, mais ensemble, nous restons une force que Troie hésiterait à défier.
Palamède esquissa un sourire en coin, son regard brillant d'une intelligence aiguë.
— Ensemble ? demanda-t-il, l’ironie dans sa voix parfaitement palpable. Combien de fois avons-nous réellement été "ensemble", roi Ulysse ? Agamemnon a tenté d’unir les Grecs sous une même bannière, et nous avons tous vu où cela l’a mené. La vérité, c’est que notre fragmentation est notre plus grande faiblesse. Tant que nous ne mettons pas de côté nos différences, Priam et ses alliés seront toujours une menace silencieuse, prêts à frapper quand nous serons au plus bas.
Pelée intervint, sa voix grave et autoritaire mettant fin au débat pour un moment.
— Il est vrai que notre division est un problème, et c’est exactement pourquoi nous nous réunissons ici, aujourd’hui. Il ne s’agit plus seulement de parler de l’Ouest, mais de garantir notre propre survie en tant que peuple uni. Troie est une menace, oui, mais elle ne le sera véritablement que si nous leur en donnons l’opportunité. Tant que nous restons forts et coordonnés, nous pouvons encore régner sur cette mer sans craindre une invasion.
Philomèle hocha la tête, ses yeux perçant chaque homme autour d’elle.
— Il n’y a aucune raison de paniquer maintenant, mais nous devons être prévoyants. Troie ne traverse pas la mer pour nous envahir aujourd’hui, mais si nous échouons à stabiliser notre propre maison, ils n’auront qu’à attendre que nous nous effondrions de nous-mêmes.
— Commençons par Sparte alors, déclara Ulysse d’une voix puissante. Tous les princes qui vont demander la main de la princesse Hélène et qui vont jurer de défendre son honneur ainsi que l’honneur de celui qu’elle aura choisi comme époux, scelleront une alliance qui garantira la paix dans toute la Grèce.
— N’oublies pas aussi de préciser que cette idée n’était pas la tienne, intervint Palamède avec un sourire de renard. Car sagesse et ruse ne vont pas toujours de pairs.
— De quelle sagesse tu veux parler ? demanda Ulysse avec un air menaçant. Cesses tes sous-entendus et dis-moi le fond de ta pensée.
— Je veux parler de la sagesse qui a défendu Mycènes contre la force de Cotys et la ruse qui l’accompagne, en clair de toi. Répliqua Palamède avec froideur en lui rendant son regard.
La tension dans la salle monta d'un cran, tandis que les yeux des rois se tournèrent vers Ulysse et Palamède, les deux hommes se défiant silencieusement. Palamède, toujours avec ce sourire en coin qui en disait long sur sa confiance en lui, s’avançait doucement dans un duel verbal qu’il semblait avoir prémédité.
Ulysse, quant à lui, ne comptait pas se laisser intimider. Bien qu’il ne l’ait jamais avoué à voix haute, l’intelligence et la ruse de Palamède lui inspiraient une certaine admiration, mais cela ne signifiait pas qu’il accepterait d’être ouvertement raillé devant une telle assemblée.
— Je n’ai jamais dit que cette idée venait de moi, répliqua Ulysse d’une voix maîtrisée. C’est en fait Patrocle qui l’a soufflé à Agamemnon lorsqu’il l’avait invité à Mycènes, et je n’ai pas non plus honte de reconnaître que Patrocle a bravement combattu aux côtés des mycéniens, et qui a sauvé la cité du pillage, mais dois-je te rappeler que Cotys avait ignorer mes avertissements contre Patrocle et que ce dernier ne doit sa survie que grâce à Achille qui a lui-même tué Cotys de ses mains ?
— Et le résultat de tout cela est notre présence ici invités du roi de Thessalie , dit Palamède en hochant la tête. La Thrace fut ravagée par les amazones de Penthésilée. Et Mycènes demeure solide malgré ses pertes et qui a pour général l’hoplite sanglant de Qadesh, le résultat doit dépasser tes espérances roi d’Ithaque.
— Les espérances ne sont que des mirages, prince d’Eubée, rétorqua Ulysse d'une voix douce mais teintée d'ironie. Tu parles de la Thrace ravagée et de Mycènes toujours debout, comme si la guerre n’avait jamais eu de conséquences. Toute victoire entraîne des pertes, et ce sont les survivants qui doivent gérer ce chaos. Mycènes est debout, oui, mais à quel prix ? Sans Patrocle, et sans Achille, Cotys aurait fait tomber la cité.
Palamède croisa les bras, son sourire s’élargissant. Il aimait jouer avec les vérités incomplètes, tissant ses propres récits au milieu des faits. Mais Ulysse restait un adversaire coriace, toujours à deux pas d'anticiper la prochaine manœuvre.
— Tu as raison, Ulysse, admit Palamède, son ton se faisant plus conciliant. Mais tu vois, ce n’est pas la guerre que je critique. C’est l’illusion que tout est sous contrôle. Nous savons tous ici que les choses sont bien plus précaires qu’elles n’y paraissent. Et cette idée d’alliance par le mariage... est certes bonne, mais disons… que cela laisse beaucoup de place aux imprévus.
— Les imprévus sont précisément ce qui rend cette stratégie nécessaire, répondit Ulysse, un brin de défi dans son regard. Tu parles de chaos et de guerre comme si c’était inévitable, mais c’est justement la paix que nous devons sécuriser. Si nous attendons que Troie ou d’autres forces s’abattent sur nous pendant que nous continuons à nous déchirer, alors oui, Palamède, tu pourras dire que tu avais raison. Mais ce n’est pas encore le cas.
Pelée, qui jusqu'alors observait l’échange sans intervenir, frappa enfin du poing sur la table, attirant l’attention de tous.
— Suffit. Les jeux de mots et les joutes verbales ne nous mèneront nulle part. Ce que nous avons aujourd’hui, c’est une opportunité. Une chance d’unir la Grèce. Qu’il s’agisse de Patrocle, d’Achille ou des ombres de la guerre passée, nous devons maintenant avancer avec clairvoyance. La stratégie proposée, celle de l’alliance par le mariage d’Hélène, est notre meilleure option. Quiconque voit cela autrement, qu’il s’exprime maintenant ou garde le silence à jamais.
Un silence pesant suivit ses paroles. Tous les regards s’étaient tournés vers Palamède, qui, malgré son sourire persistant, choisit de rester silencieux. Il savait que pousser trop loin son point de vue, dans cette assemblée, serait contre-productif. De plus, il préférait manœuvrer dans les ombres, laissant les autres rois croire qu’ils avaient la situation en main.
— Alors, poursuivit Pelée en se levant, nous sommes d’accord. Nous enverrons des émissaires à Sparte, et nous veillerons à ce que chaque prétendant d’Hélène respecte son serment. La Grèce doit être forte, unie, et prête à faire face à toute menace, qu’elle vienne de l’intérieur ou de l’extérieur.
Le conseil se leva à l’unisson, marquant la fin de la discussion. Palamède, toujours dans son rôle d’observateur habile, jeta un dernier regard à Ulysse. Ce dernier le soutint sans ciller, sachant que leur rivalité venait de franchir une nouvelle étape, subtile mais décisive.
Les dés étaient lancés.
La tension palpable entre Palamède et Ulysse semblait s'être dissipée en surface, mais sous-jacente demeurait une rivalité qui ne demandait qu'à éclater. Ulysse sentait que cette manœuvre politique ne marquait pas la fin de leurs échanges, mais bien le début d'un jeu bien plus complexe. Le mariage d'Hélène, la fille de Tyndare, n'était qu'une pièce d'un puzzle bien plus vaste, un catalyseur pour des ambitions cachées et des alliances à double tranchant.
Palamède, quant à lui, avait pris la décision de reculer, mais non sans arrière-pensées. Derrière son sourire, il anticipait déjà ses prochains mouvements. Il savait que le mariage d'Hélène attirerait des prétendants de toute la Grèce, des hommes puissants et ambitieux qui pourraient être utilisés à son avantage. Et même si cette stratégie d'union semblait solide, Palamède savait mieux que quiconque que l'amour et le pouvoir faisaient rarement bon ménage.
Le conseil s’était dispersé, mais chaque roi repartait avec ses propres réflexions, ses propres doutes. L'ombre de Troie planait toujours, silencieuse mais oppressante. Et au-delà de Troie, d'autres menaces guettaient. La Grèce était un champ de bataille, non seulement pour les épées, mais pour les esprits.
Ulysse, en descendant les marches de la salle du conseil, se tourna brièvement vers Palamède qui parlait avec quelques émissaires. Le regard que le roi d'Ithaque lui jeta n'était pas hostile, mais calculateur. Il avait anticipé une partie des manœuvres de son rival, mais savait que Palamède ne manquerait pas d'occasions pour tenter de détourner le cours des événements. Un jeu d'esprit, où chaque faux pas pouvait entraîner des conséquences désastreuses.
Alors que la mer Égée s’étendait devant eux, étincelante sous le soleil couchant, Ulysse murmura pour lui-même :
— Le plus grand des combats est celui qui n’a pas encore commencé.