Speak of the Devil

Chapitre 8 : The edge of heaven

Chapitre final

3403 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 27/08/2017 13:26

THE EDGE OF HEAVEN


Lucifer


L'enfant de l'inspectrice reposait dans son petit lit étroit et le regardait par en dessous avec ses petites billes d'yeux noirs incertains. Ses mains étaient sagement croisées sur le drap jusqu'alors, mais l'une d'elle attrapa sa poupée qu'elle réajusta mieux contre elle, sans doute dans une tentative peu convaincante de se donner une contenance.

Lucifer n'avait toujours pas réussi à déterminer si les enfants étaient des animaux domestiques ou des mini humains. La regarder suffisait à le faire douter des prétendues lois de la génétique car sur le strict plan physique, elle ne semblait pourtant rien partager avec ses parents, et par exemple tout avec Miss Lopez... ou lui-même. Si on laissait de côté l'idée ridicule qu'il puisse engendrer d'autres néphilims ou le fameux Antéchrist, force était de constater que Béatrice pouvait très facilement passer pour sa propre descendance. Mêmes cheveux noirs, même yeux sombres enjoués, même appétit pour les négociations retorses…

Il chassa cette pensée incongrue quoique plaisante et se racla la gorge.

— Amenadiel a pensé que ce serait bien que je te lise l'histoire que tu voulais…

— Pas la peine. Je sais que ça ne t'intéresse pas vraiment. Je préfère que ce soit lui.

— Ça ne peut pas être vrai !… Je ne connais personne de plus ennuyeux que mon frère ! Quelle histoire voulais-tu ?

— La suite du dieu qui vole avec des ailes amoureux de la belle princesse...

— Ah ? fit Lucifer en tournant les pages. Je comprends mieux que mon frère ait eu l'envie irrésistible de te la lire… Un conseil : ne le crois pas s'il essaie de te faire avaler qu'il est un dieu...

— Est-ce qu'Amenadiel a des ailes, alors ?

— Oui.

— Est-ce qu'on peut les voir ?

— Non. Elles sont en panne.

— Et est-ce que toi tu en as ?

— Non, éluda-t-il. Peux-tu me dire quel est le titre de ton histoire ? J'irai plus vite à la retrouver...

— Amour et Picyché.

— Oh, délicieusement narcissique, n'est-ce pas ? Est-ce que c'est à propos d'aimer ce qu'on voit dans le miroir ?

— Nan ! Tu la connais pas ! C'est l'histoire d'une princesse tellement belle que tout le monde veut l'épouser. Son père le roi veut qu'elle se marie avec un prince. Mais un jour, une méchante sorcière ou un truc comme ça, fait une prossécie…

— Une quoi ?

— Une pro-ssé-cie. C'est quand on dit l'avenir.

— Prophétie, peut-être ?

— Bin, c'est ce que j'ai dit !

— Admettons… Encore que je n'ai pas une grande estime pour les prophètes - une navrante engeance peu fiable qui se gonfle d'une importance indue, si tu veux mon avis… ça disait quoi ?

— Que son mari serait un horrible monstre qui déchire les cœurs avec ses griffes pointues.

— C'est ce que je dis toujours. Qui pourrait être assez bête pour avoir envie de se marier après ça ?

— Ah, mais c'est mieux raconté dans le livre, dit-elle en tournant les pages. Tiens, c'est là. J'ai fait un dessin, dit-elle en le lui tendant.

Lucifer s'assit sur le bord du lit, déploya la feuille de papier bariolée au crayon de couleur, en considérant l'œuvre naïve d'un sourcil dubitatif. Il pencha la tête et tourna la feuille plusieurs fois.

— Bonté divine ! Mais qu'est-ce que ça représente exactement ? Un docker succombant à une harengère ?

— Nan ! Disney n'a pas fait de film, alors je ne sais pas à quoi ils ressemblent… Du coup, j'ai fait toi et maman.

— C'est un outrage ! Je crois que je suis un peu plus séduisant que ça ! s'indigna-t-il en désignant le dessin d'un doigt consterné. Et… j'ai un peu peur de le demander mais... qu'est-ce que cette épaisse chose longue et rouge qu'elle tient dans la main, exactement ?

— La bougie !

— S'il s'agit de ta mère, il aurait mieux valu lui dessiner son arme de service… Pourquoi une bougie ?

— C'est dans l'histoire. Tu ne sais pas à quoi sert une bougie ?

— Et bien, si mais je suis juste un tantinet surpris… Fais-moi penser de féliciter tes parents pour leur éducation plus libérale que je ne l'imaginais…

La petite se mit à rire un peu.

— Tu dis vraiment des trucs qui ne veulent rien dire du tout ! Est-ce que tu vas lire ou pas ?

Lucifer inclina la tête et rétorqua, délibérément charmeur :

— Bien sûr. Vos désirs sont des ordres, ma dame.

Toutes dents dehors, Trixie se fendit d'un sourire radieux et Lucifer la considéra mi-figue mi-raisin. Ça au moins, elle avait l'air de le comprendre parfaitement. A se demander si ça marchait sur toutes les humaines quel que soit leur âge...

.

Placé dans une situation qui le rendait nerveux, Lucifer ne pouvait s'empêcher d'émailler sa lecture de commentaires, plus ou moins appropriés à son auditoire, que Trixie n'écoutait heureusement pas. Il était quelque peu interpellé par certains aspects du conte qui résonnaient tout particulièrement. Il avait hâte que Linda lui explique la nature de ce qui le titillait derrière le crâne à la lecture de ce prétendu dieu de l'amour, malencontreusement tombé amoureux d'une mortelle à laquelle il refusait de montrer son vrai visage…

Trixie s'était assoupie au bout de trois pages (parce qu'il refusait de prendre une voix de fausset pour faire celle de la princesse) mais il avait continué à lire avec un malaise persistant. Et pour cause : un dieu froussard qui s'enfuit quand son identité secrète est démasquée. Une mère abusive trop puissante qui veut du mal à sa bien-aimée mais à laquelle il n'a pas le cran de s'opposer… Mhh… Pourquoi ce scénario lui semblait soudain si familier ?

Ensommeillée, l'enfant lui murmura tandis qu'elle se rencognait contre son oreiller :

— Est-ce que tu en es au moment où Picyché doit aller en Enfer ? Comme c'est chez toi, j'ai pensé que tu pourrais bien expliquer comment c'est, non ?

— Non, petite. Ce n'est plus chez moi maintenant, j'habite ici à Los Angeles.

L'agacement colérique qu'il ressentait face aux cruelles manigances jalouses d'Aphrodite envers Psyché lui fit comprendre qu'il n'avait peut-être pas besoin du Dr Linda pour comprendre en quoi cette histoire le touchait. Évidemment, l'inspectrice n'était pas une princesse, il n'était pas un dieu et il n'avait même plus d'ailes. Et puis surtout, contrairement à ce glorieux idiot, lui avait de vraies bonnes raisons de garder secret son hideux visage planqué sous une séduisante illusion. Comment pourrait-il jamais révéler à la beauté faite femme son affreux cuir tanné, scarifié et rougeâtre, et sa face effroyable aux orbites creuses et cendreuses, chauffées à blanc à tout jamais par une fournaise dantesque ?…

— Qu'est-ce que tu fais ?

La voix de son frère qui chuchotait en entrebâillant la porte le fit sursauter. Lucifer se leva sans bruit en emportant le livre tout en refermant derrière eux pour laisser l'enfant dormir. Ils gagnèrent le salon et le Diable reposa le livre fermé sur le comptoir aux tons granite de la cuisine ouverte.

— J'étais en train de lire la fin de l'histoire que voulait Beatrice. Est-ce qu'on sait où sont Daniel ou Chloe ?

— Oui, en fait ils sont tous allés voir le spectacle d'une collègue. La petite brune bizarre avec des cheveux super noirs, celle qui t'appelle "Mec"…

— Ella ?

— Non, Maze a dit qu'elle s'appelait Lopez et que c'était un devoir tribal.

— Quel genre de spectacle ?

— Au cas où tu n'aurais pas remarqué, je n'y suis pas allé… ça devait être là que Linda voulait m'inviter…

— Ouh, tu sors en même temps avec Maze et Linda ? Et après c'est moi qu'on appelle l'Ange Déchu !

.


Un bruit de voix animées provenant de l'extérieur interrompit leur vaine chamaillerie en se faisant entendre sur le palier. De toute évidence, il s'agissait de Mazikeen et l'inspectrice qui daignaient enfin faire une apparition… La porte s'ouvrit précipitamment sur une Chloe au visage inquiet, à peine soulagée de voir les deux silhouettes inattendues debout dans son salon.

— Tu vois Decker ? Qu'est-ce que je t'avais dit ? Trixie n'était pas toute seule du tout ! triompha la démone.

Chloé ignora la remarque et se précipita vers les deux anges qui reculèrent prudemment.

— Qu'est-ce qui se passe ? Où est-elle ? Qu'est-ce qu'elle a ?

— Tout va bien. Elle dort dans sa chambre. Une indigestion, répondit Amenadiel dans l'ordre, avec une remarquable concision.

— Mais vous n'avez pas appelé un médecin ?

— Si ! protestèrent les deux frères d'un bel ensemble avant de se foudroyer du regard.

.

Étrangement, Lucifer était resté silencieux à l'écart, adossé à un mur quand le pédiatre était arrivé. Une part de lui aurait voulu rentrer tout de suite mais il se doutait quand même qu'il n'était pas très poli de partir comme un voleur sans avoir au moins une excuse valable à présenter. Il commençait à s'ennuyer ferme en écoutant à peine le bourdonnement de la conversation entre le docteur et Chloe.

C'est la raison pour laquelle il fut pris par surprise quand il sentit soudain des doigts se glisser dans les siens pour presser légèrement sa main d'un geste léger. La douceur retenue et l'intimité innocente qu'il y avait dans ce geste lui mirent le cœur au bord des lèvres tandis qu'elle levait ses grands yeux bleus sur lui et que sa bouche amusée murmurait des remerciements.

— Oh, laissez donc, inspectrice, contra-t-il. Je n'ai presque rien fait d'utile, à part recueillir un maximum de vomi à l'aide de ma seule chemise…

Ils étaient seuls apparemment. Quand donc les autres s'étaient-ils éclipsés ? Elle sourit largement avec dans les pupilles une incroyable tendresse projetée à bout portant quand elle répondit :

— Je vous crois, mais je vous remercie quand même d'être resté. Je ne vous en pensais pas capable, pour tout dire.

Et il resta là à la contempler comme un idiot, la bouche sèche, clairement hypnotisé par ses joues, par le modelé soyeux de ses lèvres et ses yeux qui se décidaient enfin à le regarder directement… Il fallait qu'elle soit vraiment belle pour être aussi magnifique sans aucun artifice de maquillage.

— Ce sourire m'a terriblement manqué, déclara-t-il sans réfléchir réalisant trop tard qu'il avait parlé à voix haute. Quoi qu'il en soit, je vais y aller maintenant, inspectrice et vous laisser en famille.

— Lucifer, attendez ! le retint-elle. N'avez-vous pas… quelque chose d'autre à me dire ?

— Euh… le pressing reste à ma charge ? essaya-t-il avec un mince sourire hésitant.

Elle leva les yeux au ciel et s'approcha un peu plus près en le coinçant en sandwich contre le mur. Il rentra le ventre en se retenant à moitié de respirer.

Il avait conscience que c'était lâche de sa part. Une conscience aiguë de cela même, mais la seule idée de la voir froncer les sourcils parce qu'il aurait encore dit quelque chose qui la bouleversait, lui donnait des sueurs froides. Il voulait garder ce souvenir. L'expression qu'elle avait pour lui, juste à cet instant, alors qu'elle était fallacieusement persuadée qu'il avait fait quelque chose d'adorable, alors que ce n'était pas du tout le cas.

— Non, sur votre fuite après que j'ai failli mourir de ce poison, sur votre mariage ! Ne croyez-vous pas que j'ai mérité une explication honnête ?

— Je suis sûr que vous la méritez mais… pas certain que vous puissiez vraiment l'entendre…

— Laissez-moi une chance d'en juger, s'il vous plaît.

Il ouvrit la bouche, hésita, pencha la tête de côté, semblant chercher comment formuler les choses.

— Très bien, soupira-t-il. Je suis parti… Je suis parti parce que je suis persuadé que mon père vous a créée pour moi et placée sur mon chemin pour m'obliger à faire ce qu'Il veut… Comme Il l'a fait avec le Père Franck, ce que le malheureux a payé de sa vie... Je ne supporte pas qu'Il vous instrumentalise ainsi. Vous méritez de vivre normalement, avec tout votre libre-arbitre… Loin de moi et du surcroît d'attention pesante de toute ma famille.

— Lucifer, arrêtez. Votre famille ce n'est pas la mafia, n'est-ce pas ?

— Vous pensez donc que c'est un hasard si le film s'appelle le Parrain ?* plaisanta-t-il.

— Écoutez, je n'ai pas la prétention de comprendre les difficultés que vous avez traversées dans votre jeunesse, mais ce que vous dites n'a pas de sens. J'ai vécu sans vous connaître de très nombreuses années où j'ai dû commettre un paquet d'erreurs et de choix discutables… Comment cela aurait-il été possible si je n'avais pas de libre-arbitre ? Tourner High School Jacuzzi ? Devenir flic alors que mon père en était mort ?... Me marier avec Dan ? ajouta-t-elle pour le faire sourire. Je vous en prie, arrêtez de me servir votre baratin, donnez-moi la vraie raison. Je ne vais pas me moquer de vous. Je ne sais plus comment vous faire comprendre que vous pouvez baisser votre garde et avoir confiance en moi. Nous en avons besoin si nous devons fonctionner en équipe, le pressa-t-elle en s'approchant encore plus presque à le toucher.

Elle ne le croyait pas, se désespéra-t-il clignant des yeux. Et comment l'aurait-elle pu ? Sur des charbons ardents de la sentir si proche, si accessible d'un simple geste, il sourit pour masquer sa gêne. Que pouvait-il dire si la vérité était par trop incroyable ?

— La vraie raison ? répéta-t-il pour gagner du temps.

— Lucifer, chuchota-t-elle en posant une main sur sa joue. Est-ce que ce serait si terrible de reconnaître que vous avez flippé ? Que vous avez eu peur que les choses ne soient plus pareilles entre nous après cette épreuve ? Que je vous inflige "une terne et ennuyeuse relation monogame" alors que vous n'êtes clairement pas prêt pour ça ?

Il ferma à demi les paupières. Qui savait à quoi il pouvait être prêt quand il était question d'elle ? Mourir en tous cas, check.

C'était vrai pourtant qu'il avait craint sa propre colère s'il se retrouvait seul dans un monde où elle ne serait plus. Il avait vu quels actes insensés il avait été conduit à accomplir pour que cela n'arrive pas. Senti dans sa chair le pouvoir considérable qu'elle avait sur lui quand il n'en avait pas sur elle... S'il était resté, et qu'elle était venue le retrouver à sa sortie de l'hôpital, il savait qu'elle se serait donnée à lui par gratitude et qu'en dépit des fois où il avait réussi à ne pas profiter de ses moments de désarroi, cette fois, il n'aurait pas pu faire autrement que d'accepter avec fièvre.

— Je... suppose qu'on peut dire ça… concéda-t-il avec réticence. Je suis désolé d'avoir réagi de la sorte.

— A quoi ça sert que vous ayez l'accent anglais si c'est pour être plus indécrottablement macho qu'un latino ? soupira-t-elle. Je voulais juste vous dire merci, c'est tout… Je sais que ça vous met mal à l'aise, mais ce n'est pas la première fois que vous me sauvez la vie… Ne devriez-vous pas commencer à vous y habituer un peu ? le taquina-t-elle pour essayer de le faire sourire car sa légèreté coutumière lui manquait affreusement pour affronter le quotidien.

— Je n'ai pas d'excuse, s'enroua-t-il en regardant vers la porte comme issue de secours.

— Lucifer, je suis sérieuse, regardez-moi…

Bloquant toujours toute retraite de son corps, totalement oublieuse du fumet âcre du vomi de sa fille, elle le fixa intensément avec un léger sourire mi moqueur, mi amusé, qui roulait sur lui comme un baume, avant de demander :

— Peu de temps après que nous nous soyons rencontrés – c'était pendant une planque – vous m'avez demandé entre deux crackers au piment, si j'avais peur de vous. Vous vous souvenez ?

— Assez bien, acquiesça-t-il avec enfin un coin de sourire.

— Donc, considérant tout ce qui s'est passé, la distance physique que vous avez mise entre nous, et la strip-teaseuse que vous avez jeté en travers de notre relation de confiance dans une tentative évidente pour me tenir à l'écart, je suis obligée de vous demander à mon tour : est-ce que je vous fais peur ?

Elle souriait comme une enfant qui aurait fait une blague. Et il ne put s'empêcher de relâcher un bref rire, avant de la regarder d'un air terriblement charmeur et de répondre en prenant son temps et en lorgnant sa bouche avec un peu trop d'insistance :

— Non ! ronronna-t-il lentement. Pas du tout.

Elle arbora un lumineux sourire comique et satisfait, à l'opposé de toute séduction, et se recula d'un pas pour aller lui ouvrir la porte et le congédier.

— Bon ! Alors je vous attends demain au poste. Ne soyez pas en retard !

.



ÉPILOGUE


Sous les lueurs froides des spots du Lux, quelques derniers clients se trémoussaient encore sans conviction, leurs gestes se faisant plus lents, leur tempo moins vif, accablé par des heures d'agitation frénétique, un abus de boisson ou les deux à la fois. Debout les bras tendus sur la rambarde du perchoir d'où il aimait tout observer, Lucifer balayait la salle du regard pour contempler ses hôtes de la soirée. D'un geste, il désigna un couple un peu trop saoul à son personnel de sécurité et descendit pour leur parler aimablement en leur proposant de rentrer en taxi.

La femme se jeta à son cou en pleurant et il la rendit gentiment à son compagnon où elle pleura de plus belle, tandis qu'il signifiait aux videurs de les aider à ressortir sans encombre. D'aucuns auraient pu trouver que cette attitude n'était guère diabolique, mais Lucifer était devenu de par la force des choses un commerçant, il n'avait pas un intérêt fondamental à perdre inutilement de la clientèle fidèle. De plus, il connaissait désormais le pouvoir d'une bonne reconnaissance de dette, de quelque nature qu'elle soit.

Quand il se retourna pour aller discuter de la recette avec le barman remplaçant Maze, il aperçut soudain une femme qui s'était approchée du piano et qui faisait mine de relever le couvercle protégeant les touches. Elle était tournée et portait une longue chevelure noire détachée qui brillait plus qu'un miroir dans le V suggestif de son profond décolleté dorsal.

— Excusez-moi, ma chère, les clients ne sont pas autorisés à toucher le piano. L'instrument est sensible et un rien le désaccorde.

En entendant sa voix, elle fit volte-face avec une lenteur étudiée. Lucifer resta quelques secondes stupéfait face à ses yeux noirs abyssaux, son teint pâle et sa bouche rouge entrouverte sur des fines petites dents pointues. Son teint irradiait légèrement sous les tonalités douces des spots, contrastant avec le sombre éclat de sa tenue courte drapée sur ses courbes voluptueuses.

Elle accrocha son regard au sien, parcourant son visage et le reste de sa personne avec une attention légèrement curieuse, et peut-être un peu méfiante ou… disons… incrédule. Sa main aux ongles d'un rouge si foncé qu'il était presque noir effleura les revers étroits de son costume avec prudence, puis d'un toucher de plume s'aventura sur la peau de son cou et ses joues qu'elle grattouilla par jeu, semblant intriguée par sa barbe.

— Tu as changé Samael, mais est-ce que c'est une façon d'accueillir une vieille amie ?

Sans prévenir, elle l'attira avec force contre elle pour l'embrasser avec passion et avec la meilleure volonté du monde, il n'était guère possible pour lui de lui résister. Il ne l'avait pas vue depuis des millénaires, et de surcroît, il la croyait morte. Et voici que soudain elle était là devant lui, merveilleusement en chair et en os. Pourtant il rompit leur baiser.

— Personne ne m'avait dit que tu étais ici, murmura-t-elle à son oreille. Tu sais comme ils peuvent être snobs…

Attrapant ses épaules, il fit un effort pour la reculer légèrement secouant la tête, manifestement troublé et le souffle court.

— Lilith ?

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FIN

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* La blague fonctionne mieux en VO où le titre est The Godfather

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