Convalescence

Chapitre 8 : Le dossier

9094 mots, Catégorie: T

Dernière mise à jour 15/04/2023 03:36

 Il aurait été faux de dire que j’étais resté calme. George était resté figé, sa louche de ragoût suspendu au-dessus du chaudron dans la main, la bouche grande ouverte en regardant la porte de la cuisine. Moi, je resta figé jusqu’à ce que je sente monter dans mon ventre les prémices d’une crise de panique monstre.  


–Il est parti où, comme ça? On fait quoi? 


Je frissonna et m’enroula dans le chandail que Lockwood avait drapé sur mes épaules un peu plus tôt. Je m’étais sentie en sécurité avec Lockwood et George, mais je me souvenais désormais qu’on m'avait surveillé et piégé dès que les autres ont eu le dos tourné. Avec le départ de Lockwood dans cet état, ce n’était rien pour me rassurer, au contraire. J’avais confiance en George, certes, mais ce n’était pas le meilleur épéiste que je connaisse, sans compter qu’il semblait tout aussi hébété que moi en l’instant. J’essaya de calmer ma respiration qui s'était soudainement accéléré, sachant que ce n’était pas le moment pour une autre crise.


George sembla finalement analyser la situation et son regard se posa sur moi, semblant comprendre. Une seconde plus tard, il était à mes côtés, nerveux, mais essayant d'afficher une assurance qu’il n’avait visiblement pas. 


–Respire, Lucy, il fait ça tout le temps, on devrait être habitué, maintenant! C’est ça, respire comme il faut, tu es en sécurité, il y à une voiture du DERCOP devant la maison et on a le numéro de Barnes au besoin. Lockwood ne serait pas partie comme cela sans une bonne raison. J’aimerais savoir lequel, le connard…


Il avait marmonné la dernière phrase de manière presque inintelligible entre ces dents serrées. Il semblait nerveux aussi, mais ces paroles étaient somme toute véridiques. La voiture du DERCOP et la maison barricadée devraient nous assurer une certaine protection. Je m’obligea à me ressaisir. 


–Oui, tu as raison, Geroge… Et nous devons appeler Kipps.


Je respira encore plusieurs fois, profondément et lentement, essayant de refermer la petite boîte des émotions intenses qui me servait face au danger. George acquiesça, me détailla une nouvelle fois du regard, puis disparut dans le corridor pour passer son appel. À ce moment-là, je me sentis vraiment toute seule, nerveuse et pas vraiment en sécurité dans la cuisine aux fenêtres obscures.  


–D’accord, ressaisie toi, Lucy. 


Je pris une profonde inspiration et m’obligea à redresser les épaules que je gardais voûté sous le poids de mon malaise. J’obligea mes jambes lourdes à me porter pour sortir de la cuisine, attrapant ma rapière aux passages avant de monter dans ma chambre. J’entendit George parler avec Kipps au téléphone et lui expliquer la situation alors que je refermais doucement la porte de ma chambre. Je pris une douche très chaude, enfila une paire de Leggings, une jupe et un pull bien chaud avant d'attacher ma ceinture à ma taille pour y glisser ma rapière. Je brossa mes cheveux en vitesse avant de retourner à la cuisine où George nous servait deux bols de ragoût bien chaud. Il suspendit son geste pour me détaillé du coin de l'œil avant d’aller chercher un troisième bol qu’il disposa sur la table. 


–C’est bon de retrouver ma bonne vieille Lucy. Allez, viens manger, Kipps va arriver dans quelques minutes.


Je m’assis et m’attaqua à mon ragoût qui me servi de distraction spontanément. 


–Mieux vaut être prêt au cas où Lockwood aurait besoin de nous en revenant. Il aurait au moins pu attendre demain avant de prendre la fuite, j’ai l'impression de m'être fait passer dessus par un taxi.


George souris à mon commentaire grognon et je lui rendit un petit sourire, satisfaite d’avoir pu lui tirer un sourire au milieu de la tension qui l’habitait. Nous ne prîmes pas la peine de meubler le silence pendant que nous mangions et les coups à la porte nous firent tous deux sursauté. Par prudence, nous allâmes tous les deux ouvrir la porte en s’assurant que c’était bien Kipps. Il débarqua dans la maison en vociférant, visiblement irrité que Lockwood soit partie de la sorte en nous laissant tous les deux seule à la maison. Il jura encore un petit moment avant que George lui propose un bol de ragoût et un bon thé chaud. Cela sembla lui calmer les nerfs et l’adoucir un peu. Alors qu’il mangeait, je pris un stylo qui trainait sur la table et suivi la petite querelle amicale entre George et Kipps en traçant des lignes au hasard sur la nappe à penser. La tête appuyée sur ma main libre, je sentis mes yeux se fermer, laissant le bourdonnement familier des voix créer un agréable bruit de fond. 


–Tu devrais aller t’allonger, Lucy.


–Je vais bien, Kipps, cesse de t'inquiéter. 


–Tu semble en effet beaucoup mieux par rapport à ce matin, mais ce n’est qu’en prenant un réelle repos que tu vas vraiment retrouver tes forces. 


–Si je vais m'allonger sur le fauteuil, tu vas me laisser tranquille? 


–C’est mieux que rien.


–Je vais préparer du thé. 


Je laissa à George le soin de nous préparer une nouvelle tasse de thé et je me dirigea vers le salon en grommelant de mécontentement pour me fautré sur le fauteuil, laissant mes pensées dériver, essayant de savoir ce que Lockwood avait compris sans nous le partager. Mais, soit j’étais trop épuisé, soit cette partie de mes souvenir ne m’était toujours pas accessible, puisque je ne voyais vraiment pas la raison qui l’a poussé à sortir à cette heure et dans un tel contexte.


–Il doit être partie voir Flos, à cette heure, c'est le plus logique. 


Je poussa ma mémoire à se souvenir en fronçant les sourcils.


–Flos Bones…


Le nom avait glissé sur ma langue suite à un effort considérable de mémorisation et George acquiesça. 


–Tu fais des progrès, Lucy. Le médecin ne s'attendait pas à ce que tu retrouves ta mémoire avant plusieurs jours, lorsque ton système aura purgé les drogues et que le traumatisme se sera atténué. 


Kipps est apparu à la suite de George. Il avait lui aussi sa rapière à la hanche. 


–Ne parle pas trop vite, tout est comme dans un brouillard. J’ai eu quelques bribes de souvenir qui me sont revenu après certain déclencheur, mais ma tête est encore loin d’être redevenu à son plein potentiel. J’ai toujours une sorte de mal de tête, comme une pression derrière la nuque. Mais j’ai bon espoir. Beaucoup de repos devrait me faire du bien. 


George me lança une couverture brodé qui trainait sur le bras du fauteuil. 


–Dort un peu, dans ce cas. S' il est effectivement avec Flos, il en a pour une partie de la nuit. 


Il se tira lui-même une couverture et se laissa tomber dans un fauteuil avec une bande dessinée. Kipps se renversa aussi dans un siège et ferma les yeux, coupant court à toute conversation potentielle. Je ne pensais pas m’endormir, pourtant, je dérivais presque aussitôt dans le sommeil. 


************


– Je devais aller parler à Flos, George! Il y a quelque chose de pas net dans cette histoire. Lucy a dit que certaines personnes en savaient plus sur ces talents qu’ils ne le devraient, mais pourquoi faire des recherches sur elle de prime abord? Elle évite la presse comme on évite un groupe d’écorcher, ça n'a pas de sens.


--À moins que…


--Oui, George. À moins que quelqu’un avec beaucoups plus de moyen que les Winkman et les chasseurs de relique s'intéresse à Lucy. Tu te souviens pourquoi Flos est venu nous trouver, le soir de l’enlèvement? 


George envoya un coup de pied rageur dans quelque chose, finissant de me réveiller.


- Le dossier du DERCOP! Celui que flos a vu passer la porte de la boutique d’antiquité des Winkman!


--Exactement. Je devais aller vérifier quelques informations avec Flos pour être certain. 


Je baillai et m’étira bruyamment. J’avais mal à tous les muscles de mon pauvre corps et je gémit en m'asseyant sur le fauteuil, désorienter un petit moment avant de me souvenir pourquoi j’étais dans le salon. D’où j’étais, je voyais le dos de George et le visage blême et fatigué de Lockwood. Kipps n’était nulle part en vue, mais j’entendais des bruits de vaisselle dans la cuisine.


--Désoler de t’avoir réveiller, Luce. Je ne m’attendais pas à vous trouver tous endormi dans le salon. 


Je balaya ces excuses du revers de la main et repoussa mes jambes en bas du canapé, restant assise le temps de dissiper un vertige.


-De quoi tu parles? C'est quoi ce dossier du DERCOP.


--On peut faire ça devant une bonne tasse de thé?


Il ne fallut pas longtemps pour que nous prenions place à la table de cuisine, une tasse de thé bien chaude entre les mains . Il me résuma brièvement les paroles de Flos le soir de mon enlèvement, puis reprit sur les informations obtenues la nuit dernière.


-Quelque recherche préliminaire ont démontré qu’il existe non seulement des recherches sur toi, mais également tout un dossier sur ton talent. Le pourquoi n’est pas encore très clair, mais je crois qu’on peut aisément spéculer sur le qui.


--Pénélope Fitts…


Un silence répondit au murmure de George. Je rassemblais mes souvenirs, essayant de rassembler les pièces du casse-tête. 


--Mais pourquoi elle avait monté un dossier sur moi? Quel intérêt? Et pourquoi serait-il épinglé dans un dossier DERCOP?


- C'est toute la question, mais j’imagine que ça fait du sens, en fait. On pourrait peut-être sortir le crâne, si Lucy se sent assez bien pour le gérer. Peut-être qu’il aura quelque chose d’utile…


George se leva et sortit de la pièce. Lockwood me regardait, mais je n’écoutais pas du tout ces paroles, mon regard était fixé quelque part dans la pièce. Le crâne… C’était comme si ma tête était un long corridor rempli de portes fermées. Certaines semblaient verrouiller, d'autres s'ouvraient lorsque je faisais l’effort de tourner la poignée. C’était très irritant de savoir que l’information était à portée de main, mais sans arriver à l’atteindre. Un mal de crâne massif me fit grimacer et je porta les doigts à mes tempes pour les massés, fermant même les yeux sous le coup de la douleur soudaine. La main fraîche de Lockwood se referma doucement sur mon poignet alors qu’il avait à nouveau cet air soucieux. 


–Mal de tête. Ça va passer. Tu peux me faire couler un verre d’eau? Tu serais un amour. 


Il parut vaguement troublé par ma demande, mais j’avais trop mal à la tête pour m'inquiéter de ce que j’avais dit qui aurait pu lui faire monter le rouge au joue. Et puis, j’avais peut-être rêvé de son malaise puisqu’il avait entièrement disparu de son visage lorsqu’il revint avec un verre d’eau fraîche. 


–Ce n’est peut-être pas une bonne idée, George. C’est peut-être un peu trop tôt pour la mettre en contact avec le crâne. 


–Non, non, ça va, Lockwood, si cela peut nous aider à comprendre ce qui se passe, alors je suis partante. 


Je lui fit un bien maigre sourire pour appuyer mes dires, même si je savais que ma tentative infructueuse pour me souvenir semblait me brûler beaucoup d’énergie. Je regardai le bocal amené par George en essayant de ramener mon attention vaseuse sur le moment présent, mais ma tête semblait chercher encore et encore. Je savais ce qui se trouvait dans le bocal, mais chaque fois que je croyais pouvoir accéder aux souvenirs, il semblait s'effilocher entre mes doigts sans me transmettre l’information recherchée. La lueur verte dans le bocal fantôme était agitée et le plasma à l’intérieur se contractait et se détendait en une série de grimaces plus horribles les unes que les autres. 


–Il semble en colère…


–Je crois qu’il l’ai, aussi. Je l’ai enfermé dans mon tiroir à sous-vêtement le temps que tu te sentes assez bien pour lui faire face.


Je regardai le crâne dans le bocal et fini par tendre la main vers la valve, au sommet. 


Sadique! Connard! Crétin de Cubbins! Laisse-moi sortir d’ici que je puisse me venger! Et l’autre arrogant et suicidaire qui la regarder faire, vous allez me le payer, tous les deux! Oh,Lucy, ta pas l'air bien, ma vieille. On dirait que tu sors de la machine à laver. Tu as l'air complètement patraque. 


Je clignais des yeux, prenant un temps anormalement long pour réagir. J’avais beau me souvenir vaguement des types 3, mais la pression dans ma tête et ces paroles s'embrouillaient l'esprit. On disait que parler trop longtemps avec un type 3 était malsain. Ils avaient leur propre règle, leur propre perception des choses, les tordaient dans une  version qu’il leur plaisait, et c’était rarement à l’avantage des vivants. J’avais beau conversé avec lui depuis assez longtemps pour faire la part des choses, avec ma commotion et ma confusion actuelle, ce n’était peut-être pas la meilleure des idées… Mais je n’en avait pas d’autre. 


–Ce n’est pas très gentil, je trouve que je m’en sort assez bien pour quelqu’un d’amnésique, espèce de morceau d’os momifié. 


Le crâne cessa de tourner furieusement dans son bocal une seconde avant de grimacer une sorte de sourire peu rassurant, son ton changea pour devenir ridiculement mielleux


–Amnésique, tu dis? Alors tu ne te souviens pas qu’on est les meilleurs amis du monde? Aller, ouvre mon bocal, je vais régler tous tes problèmes d’un mouvement de main! 

Je clignais des yeux, ahurie par son changement soudain d’attitude et sa voix presque cajolante. Il espérait quoi, ce crâne coincé dans un bocal?


--J’ai dit que j'étais amnésique et commotionner, pas complètement idiote, abrutie de crâne. Tu crois vraiment que je vais ouvrir ton bocal parce que tu me dis que tu es mon ami? Si je ne l’ai pas fait avant, il doit y avoir une raison. 


--La raison est simple, ces trois imbéciles te manipulent, lucy, tue les avec ce couteau de boucher, là, sur le comptoir, et sera libre de me libérer par la suite!


Je le regardais avec des yeux scandalisés, alors que je cherchais mes mots, mon cerveau fonctionnant un peu au ralenti. Il dû prendre mon silence comme un signe d’encouragement puisqu’il reprit avec un enthousiasme renouvelé.


-Tu ferais bien de commencer par cet abruti arrogant avec le long manteau, celui qui a un teint de fantome et des cernes noir sous les yeux. Il ne réagira pas beaucoup et ne se défendra pas contre toi. Les deux autres ne réagiront pas si tu tue le chef en premier, ils sont moue et dégonfler!


--M’a tu écouter quand je t’ai dit que je n’était pas stupide, crâne dégenérer? Je ne vais assassiner personne et encore moins ouvrir ton bocal, tu me turais avant même que j'aille pu sortir ma rapière.


--tu as raison, tu n'es pas complètement idiote, tu n’aurais effectivement pas le temps de sortir ta rapière si je décidais de te tuer. 


Je clignais des yeux, sentant  le regard semi patient des autres sur moi. 


--Bon, maintenant que tu ne prends même plus la peine de nier, j’ai une question pour toi. 


-Et moi, je n'ai pas de réponse pour toi.


Et il recommença c’est horrible grimace, son plasma enfant et s’agitant. Je fronçais le nez avec dégoût avant de quand même tenter ma chance.


--Pourquoi Pénélope Fitts aurait de l'intérêt pour moi? 


Il arrêta net et me dévisagea. 


--La question serait surtout : pourquoi elle n’aurait pas d’intérêt pour toi.


-De quoi tu parles?


--C'est la descendante de la grande Marissa Fitts, la seule auditrice plus puissante que toi, pour ce que j’en sais. Cest une femme puissante qui est habituer d’avoir ce qu’elle desire et tu le lui as déjà refuser deux fois. Et ton petit chéri lui a refusé une troisième fois . Si elle a seulement une once de la cupidité de Marissa, ça m'étonne qu’elle ne soit pas déjà venue te chercher pour t'enfermer quelque part. 


--Quoi? Pourquoi aurait-elle fait ça? 


--Elle te convoite, ma chère petite idiote. Elle te convoite depuis qu’elle ta rencontré. Depuis qu’elle a entendu parler de tes exploits à combe carrey. Et, encore, elle n'est pas au courant avec certitude que tu converse avec les type 3.


--Aurait-elle pu faire des recherches sur moi? Aurais-je fait quelque chose pour me trahir par le passé?


--Tu te promène avec un bocal Fantôme. Si elle a fait des recherches, si elle t'a fait suivre, si elle a eu,même légèrement vent que tu traînait un bocal de fantômes dans ton sac… Elle aura compris, crois-moi. 


--Aurait-elle pu créer un dossier sur moi? 


Le crâne éclata d’un rire joyeusement sombre.


--Si elle ne l’avait pas fait, ça m'aurait inquiété.


--Bon, alors si mon talent la suffisamment intrigué pour qu’elle débute des recherches et qu’on lui as rapporter la présence d’un bocal fantôme, même vaguement entraperçus…


--même un vague doute l’aurait mise sur la piste.


--D’accord, donc quelqu’un a perçu la forme de ton bocal dans mon sac et elle a fini par déduire ce que tu étais et que nous discutions ensemble. Elle a tout mis ça dans un dossier et… et puis quoi? Pourquoi aurait-elle donné l'information aux wWnkman?


Lockwood m'écoutait en réfléchissant.


--Le dossier était étiqueté avec le logo du DERCOP.


Kipps se tourna vers Lockwood en finissant sa bouche de pain grillé .


--Le DERCOP et la maison fitts travail en étroite collaboration, je ne serais pas surprit qu’elle se soit adressé à la branche de recherche du DERCOP pour faire faire ces précieuses recherches. Elle en finance une grande part personnellement et le DERCOP à la meilleure base de données du pays.


--Et quelqu’un du DERCOO a dû voir le dossier, comprendre son importance et aller le vendre aux Winkman. 


- C'est imbécile n'ont sans doute pas compris toute l’implication de ce qu’ils avaient juste devant leurs gros visage d’affreux, rigola le crâne à mes oreilles. 


Je laissais ma tête retomber entre mes mains, terrassée par une migraine qui enflait à l'arrière de mon crâne. La main de Lockwood trouva mon épaule pour me réconforter. D’un mouvement vif, il ferma la valve du crâne qui se mit à s’agiter furieusement.



- Je crois que nous avons tous besoin d’un peu de repos et d’une nouvelle tasse de thé. Tu as assez entendu le crâne pour l’instant. 


George prit un torchon et le lança sur le bocal avant de sortir une petite boîte d’analgésique pour m’en tendre deux. Lockwood alla remplir mon verre d’eau fraîche  pour me permettre de les prendre. Un regard impératif de Lockwood m’empêcha de  protester. 


--Et maintenant? On fait quoi? Un dossier sur moi et mon talent circule à tout vent. On attend que la prochaine personne à le désirer me tombe dessus entre deux travails? Je m’enferme à portland row avec ma rapière et  sous surveillance jusqu’à ce que mon talent s'estompe?


--On pourrais faire comme tu dit, lucy… où on récupère ce fameux dossier.


Je releva la tête pour le regarder avec un mélange de surprise et de suspicion.


-Pour cela, il faudrait d’abord savoir où il se trouve… à moins que…


--A moins que quelqu’un d'incommensurément géniale ait passé la nuit à patauger dans la tamise boueuse pour trouver l’information.


Mon regard glissa à nouveau sur lockwood qui s’en gloussa fièrement malgré l’épuisement qui se lisait sur son visage.  


--Holly devrait arriver bientôt, elle pourra recevoir le prochain client le temps qu’on aille prendre un peu repos. Je vais me relever pour la rencontre.


--Je vais rester avec Holly, pour ne pas prendre de chance, j’ai pu dormir un peu cette nuit pendant que George veillait.


--J’ai dormi aussi, allez vous coucher, toi et George.


Je reçus trois regards mécontents qui semblaient clairement dire ce qu’ils pensaient de mes paroles.


--C'est bon, kipps, je vais te laisser expliquer la situation à Holly. On se revoit pour la rencontre et planifier la suite des choses. George, tu vas te coucher aussi.


Il se tourna vers moi, tira lui-même effrontément la rapière de ma ceinture pour l’appuyer contre le mur avec délicatesse, puis il me tapota le dos .


-Et, toi, tu viens avec moi. Tu as une mine épouvantable malgré la nuit. Je vais m’assurer moi-même que tu prennes du repos.


Je rechignais par principe, mais parler avec le crâne semblait avoir consommer toute mon énergie et ma tête me faisait souffrir. Je me doutais bien que c’était le mieux que je puisse faire pour l’instant, mais je n'appréciait certainement pas le ton doucereux et arrogant utiliser par lockwood.Je pensa l’ignorer royalement, mais , comme s’il avait prévu ma réaction, il me tira doucement, mais fermement hors de ma chaise. J'avais donc le choix de me lever et de le suivre, ou de m’obstiner et de me retrouver assise par terre. 


Après l’effort déployé avec le crâne, mes jambes étaient molles comme du coton et je dû me résoudre à prendre appuis sur la table en attendant que le vertige passe. Aussitôt, je sentis la fermeté des mains de lockwood sur ma taille pour me stabiliser. Heureusement, il s'abstient de tout commentaire. Lentement, il décrocha mes mains de la table et me dirigea vers l’escalier, m’aidant à monter les marches une à une, à mon rythme, même si ça aurait été moins long d'aller directement dans sa propre chambre. J'arrivai à ma chambre toute pâle et tremblante. Je pensais que lockwood me laisserais à l'entrée, mais, au lieu de ça, il me conduisit jusqu’à mon lit. Devant mon air interrogateur, il éclata d’un doux rire.


--Je t’ai dit que je m’assurerais moi-même que tu prendras du repos, je ne mentais pas.


Il m’aida à m'asseoir sur le lit et je défit mes lassait sous son regard prudent auquel je répondit avec humeur et sarcasme.


--Tu va rester là jusqu'à ce que je m'endorme ou quoi?


--Pourquoi pas?


Il se pencha, ramassa le pyjama que j'avais laissé en flaque sur le sol et me le lança avant de se retourner pour me laisser un peu d'intimité. J'avais trop mal a la tête et j'étais trop fatigué pour discuter avec lui, alors j'enfila un pyjama et me laissa glisser dans le lit. Lockwood se laissa glisser à côté de mon lit en position assise. Je roula sur le côté pour regarder son profil.


--Tu es fatigué et tu sens la tamise et les algues. Que dirais- tu de prendre une douche pendant que tu me surveilles? 


Lockwood sourit, se redressa et alla chercher un pyjama en bas avant de se glisser dans l’eau chaude de la douche à sa sortie, se changeant derrière le rideau qui délimitait la chambre de la salle de bain.


--Je ne suis pas là pour te surveiller, juste pour m'assurer que tu vas bien. Toi qui déteste être sous les projecteurs, ça te fait quoi de savoir que tu intéresses les mauvaises personnes? Soit honnête, lucy. 


Je réfléchi à la question en laissant mes yeux fermés doucement. Peut-être êtes-ce le demi sommeil, ou le fait de ne pas l’avoir devant moi pendant qu’il me parlait, mais je décida d’être honnête.


--Ça me fout les jetons, en fait. Je n’aime pas être sous les projecteurs et encore moins attirer l'attention. Combattre les visiteurs est déjà assez terrifiant sans avoir peur de me faire kidnapper au moindre tournant.


--La mémoire commence à revenir, on dirait. Ne t’en fais pas trop pour le dossier. Je te compterais tout en même temps que les autres, mais on devrait régler le problème rapidement et sans faire trop de vague. 


Il sortit de la salle de bain et vint reprendre son poste à côté du lit, les cheveux humide mouillant son col. Sa voix était si assurée que je me mis à le croire. Avant de glisser dans le sommeil je murmurait


--merci…


La dernière chose que je vis avant de basculer, c'est le sourire charmeur et sûr de lui de lockwood.



***



Je sombrai et remontais régulièrement au travers du sommeil les heures qui suivirent. Lockwood avait raison, la mémoire me revenait peu à peu et mon corps se soignait lentement. Le problème, c’était que l’essentiel de ce qui remontait à la surface était des scènes d’horreur et de cauchemard. 


Des morts, la mort de mes amis, le familier sous forme de lockwood sanglant de Aickmere, les Winkman… 


Je dormit quelque heures, mais c'était essentiellement peu reposant et, lorsque j'ouvris les yeux, glacé de sueur et que j’entendit la voix de Lockwood, George, de Holly et de Kipps, je sauta sur l’occasion de me changer les idées. Fraîchement douché et changé, je descendis les escaliers, pour entendre les voix se muer en dispute. Rien d'inhabituel, à Portland Row. Ce genre de dispute pouvait aller de qui avait mangé le dernier beignet a qui avait fait le plus d’erreur sur le travail de la veille. Lorsque je débarqua dans la cuisine inondée de soleil, ils se turent tous d’un coup en me tournant vers moi.


Ils se disputaient donc à mon sujet. Charmant.


Bien décidé à les ignorer, je traversa la cuisine et me prépara du thé, réconforter par les mouvement familier, avant de jeter a tous vent :


--Ne vous gêner pas pour moi, je peux m'en aller si vous voulez continuez à parler de moi.


Quelque seconde et une myriade de regards échangés, puis Holly céda.


--Ce n’était pas contre toi, Lucy, Lockwood nous exposait juste son plan.


--Et vous n'étiez pas d’accord avec mon implication dans ce même plan, c'est ça? Allez, crachez le morceau.


Nouveau silence. Je soupira, ramassa ma tasse de thé d’une main et mon pain griller de l’autre et, furieuse, me dirigea vers la porte du sous-sol. 


--Lucy, attends.


Comme je ne m'arrêtais pas, Lockwood me prit l'assiette de pain grillé des mains et la posa à ma place sur la table. 


--Je crois que Lucy va assez bien pour au moins entendre mon plan. Ensuite… nous continuerons notre conversation, qu'en dites-vous?


Je fis le tour de la table pour aller m'asseoir à ma place et commença à manger.


--D’abord, comment te sens-tu, ce matin, lucy? Demanda Lockwood d’une voix un peu trop joyeuse.


--Bien. La migraine est partie, mes souvenirs reviennent. J’ai moins mal. 


Satisfait, Lockwood hocha la tête dans ma direction et souris aux autres.


--Bon, cette question étant réglée, nous pouvons parler de notre cher client de ce matin.Un client tout particulier qui a demandé spécifiquement la meilleure auditrice de Londres pour un travail rapide. Un très cher jeune homme dont le manoir secondaire à Londres reflète la splendeur de sa richesse. Un jeune homme dont le nom se trouve dans le carnet d'adresse des Winkman pour leur avoir versé une grosse somme d’argent. 


Je le regarda en clignant des yeux avec stupéfaction, laissant mon pain griller pendre au bout de ma main alors que j'oubliais d’en prendre une bouchée. Lockwood, lui, s'était dramatiquement rejeté vers l’arrière de sa chaise, les bras croisés sur sa poitrine étroite et ces longues jambes étendues devant lui avec suffisance. Il me regardait directement avec un air arrogant, jaugeant ma réaction avec un certain amusement. 


--Quoi?! Tu veux dire qu’en une nuit, tu as trouvé le nom de la personne qui a acheter mon dossier aux Winkman, que tu as trouvé son adresse a Londres et que tu sais qu’il veut nous engager pour un travail dans ladites maison?!


--T'engager, Lucy. Toi et pas nous.


--Mais tu sais que c'est sans doute un piège pour m’attirer là bas, non? 


--Cela va de soi. 


-Alors? Tu vas cracher le morceau ou quoi, espèce d’arrogant  suffisant? 


Il éclata d’un doux rire, les yeux brillant d’un éclat de d'excitation comme seule le danger pouvait les faire briller 


--Allons, Luce, cesse de me flatter. Mais sur une note un peu plus sérieuse, j’ai réussi à convaincre notre très cher nouveau client que tu sortais tout juste de convalescence et qu’il était hors de question que je te laisse y aller seule. Il n'a pas pu protester beaucoup. Le dossier est quelque part dans la maison. Avec un fantôme ou deux, à mon sens. Le plan est simple. On s’assure que les clients quittent la demeure, on part à la chasse au dossier-et au fantôme- et on quitte la demeure avant de tomber dans un piège. 


Je le regardai longuement.


-Tu est au courant que c'est plutôt un objectif qu’un plan? 


--Allons luces, seules,ils t'auraient sans doute cueillit avant même que tu vois les murs de la maison. Avec moi dans le décor, ils n'auront pas le choix de mettre une chasse aux fantômes au point pour se donner du crédit, et puis, les chance son importante pour qu’ils tentent leurs chances  suite au travail, histoire de nous avoir dans un instant de faiblesse, affaiblie par le visiteur. 


--Mais nous ne serons pas seules, n'est-ce pas? Holly, Kipps et George serons prêts à intervenir, c'est ça? Donc, on fait disparaître le dossier et on espère que je disparaisse des conversations?


--Il va toujours rester l’original dans les ordinateurs du DERCOP, mais nous verrons plus tard ce que l’on fera de cet information. Il est beaucoup plus difficile de mettre la main dessus et les chances qu’il fuite de nouveau est mince. Selon kipps, la personne qui a fait sortir le dossier a simplement été chanceuse de réussir. Il y a peu de chance qu’il retente le coup dans un avenir rapproché. Nous nous en occuperons plus tard.


Je hocha la tête, perdu dans mes pensées. J’avais délaissé mon pain grillé pour me ronger distraitement les ongles, analysant le plan de Lockwood. 


--Ça me semble un plan correct. Pourquoi n’êtes-vous pas d’accord?


George se leva avec plus de véhémence que je m'y étais attendu, son air nerveux et furieux des mauvais jours où je m’alliais avec lockwood sur un plan complètement suicidaire.


--Tu sors de deux gros traumatismes, Lucy. Tu as été blessé, opéré, kidnappé et drogué. Juste dans le dernier mois. Tu ne devrais pas être sur le terrain avant des semaines. Sans compter que , je vous le rappelle, c'est un foutus piège! Ils vont nous attendre avec tout un lot de gros bras et des fantômes pré-sélectionnés et placés délibérément sur votre chemin pour vous épuiser! 


Je pris en compte son argument et tendit le bras pour retenir lockwood qui allait répliquer.


--c’est sources, es-ce qu’on en sait un peu sur eux? Que vous a-t-il dit?


--il n'a pas dit grand-chose d'intéressant. Il nous engage pour des miasmes acoustiques. Une brume bavarde? Un esprit hurleur?Un type 1 ou même un type 2 un peu plus bavard que la norme?  Pour ce qui est de notre client, il est réputé pour être un régulier des Winkman, alors il a sous la main potentiellement n'importe quoi comme source. 


--Il est près de 14 :00 et les sacs ne sont pas prêts, alors je présume que le travail n’est pas pour ce soir…


--Pour demain, à moins d’un report de notre part.


--D’accord…


Je me tourna vers George qui essuyais frénétiquement ces lunettes.


--Es-ce que ça te rassurerait si je me mettais à niveau avec Lockwood à la rapière? S’il me jugent suffisamment remise physiquement, on va de l’avant, d’accord? Nous n'aurons probablement pas d'autre occasion de ce genre avant un moment et je refuse de rester terrer à Portland Row à me demander qui sera le prochain à convoiter mon talent.


Holly jouait avec une mèche de cheveux.


-Et pour le traumatisme, lucy? Tu n'as pas mis les pieds dans une maison hantée depuis que tu es passé a un cheveux de te noyer dans une baignoire. Ce que les Winkman t'on fait subir n'a très certainement pas aider. Cette maison n'a pas les allures de « retour progressif » et le médecin ne te donnera pas son accord avant des semaines…


J’ai pâlie face aux paroles de Holly, mais je chercha a garder un visage neutre. Elle essayait de me faire réagir en évoquant la noyade, mais je ne voulut pas lui donner la satisfaction de me voir effondré.


-On ne peut pas attendre, qui sait quand se dossier changera de main. Je me sens bien, je vous dit. Et toi, kipps, tu ne dis rien?


Ce dernier se trouvait à sa place et buvait son thé en me détaillant du regard. A son interpellation, il haussa les sourcil  et les épaule.


--J’ai déjà dit à Tony ce que j’en pensais. Si je t’ai demandé de rejoindre mon équipe, à l’époque, c'est que j'ai confiance en ton jugement et en ton talent.Si tu dit que tu est apte au pour ce plan, je me range de ton côté et je t'apparais avec ma rapière en cas de problème. Le fait que tu acceptes qu’on évalue ta condition physique avant, me conforte dans le fait que tu as une tête sur les épaules. Nous adapterons le plan en conséquence. Lockwood à négocier un accompagnateur, mais il est logique que l’un de nous vous accompagne à l'improviste. Cela fait moins de gens en effet de surprise, mais c'est une adaptation possible.


Je hocha la tête et me tourna vers George. Nous avons beau être en désaccord quasiment tout le temps, son opinion comptait pour moi dans des choses aussi importantes que celle-ci. 


Ce dernier soupira, retira ses lunettes et les nettoya frénétiquement. 


--Tu sais que j’ai confiance en toi pour ma propre vie, sinon on ne travaillerait pas ensemble..  Mais ce que tu as vécu en un mois… Tu devrais prendre du repos et revenir chasser les fantômes à ton rythme. Ça… c'est gros… ça va être exigeant physiquement et mentalement. C'est un plan dangereux. 


Il remit ses lunettes et me regarda, un peu malheureux  


--C’est ta décision, Lucy. Je n'ai jamais pu vous rendre raisonnable, toi et lockwood, en deux ans de travail. Lorsque vous êtes ensemble, vous formez une sacré paire de suicidaires… Et individuellement, vous êtes pire l’un et l’autre. Ensemble, au moins, vous pouvez vous protéger mutuellement vos arrières.

 

Je lui lança mon plus beau sourire à la Carlyle et j’entendit lockwood glousser à côté de moi. 


--Et voilà! Ceci étant réglé, Lucy, tu finis de manger, tu vas avoir besoin de force pour le reste de cette après midi! Holly?


--Je vais faire les sacs . Il ne devrait rien manquer, mais si c'est le cas, j’aurais le temps de passer commande. 


--Parfait. Kipps, George, on se rejoint en bas. Nous allons préparer lucy de notre mieux et adapter le plan en conséquence.


Nous hochâmes tous la tête et ils se levèrent tous, sauf moi qui termina de manger en vitesse avant de mettre ma vaisselle dans l'évier. J’aurais dû aller rejoindre les autres dans la seconde, mais je pris mon temps, agrippant le comptoir en regardant le jardin. Un plan était mieux que l’inaction, aussi cinglé soit-il… Et pourtant. Maintenant que j’étais seule, je me suis laissée aller à la vérité. J'étais terrifié à l’idée de mettre les pieds dans une maison hantée pour la première fois depuis sa quasi noyade, surtout si les sources ont été choisies spécialement pour s'éprouver et nous affaiblir, moi et lockwood.


J’avais eu terriblement hâte de retourner sur le terrain. Je me souvenais d’avoir supplié et menacé  pour y retourner. Et maintenant que j’y étais, ça me retournait l’estomac.  Je n'avais pas non plus cru possible d’avoir d'autres ennemies que des visiteurs et me voila prise avec le trafic des Winkman. 


Alors que je regardait le soleil inonder la cour, je sentis le tourbillon d’angoisse enflé dans ma poitrine, prémices d’une crise de panique massive. Je regarda, impuissante, mes mains serrer le comptoir jusqu’à avoir les jointures blanchissent et se mettre à trembler, ajoutant une nouvelle couche de peur sur l'ouragan qui se préparait.  


Je ferma très fort les yeux, essayant de me souvenir de respirer. Je devais contrôler ÇA. Je devais le contrôler ou tout serait foutu. Dans mon dos, j’entendit la dernière marche du sous-sol grincer.


--Luce?


En un instant, lockwood était sur moi. Ma panique augmenta encore d’une intensité alors que je me marmonnait à moi-même, incrédule.


--Non, non,non,non…..


Une litanie sans fin parvenait à mes oreilles, j'étais terrifié à l’idée que lockwood assiste à mon désastre personnel. Avec précaution, je sentis lockwood refermer sa main sur mes poignet et décrocher mes doigt avec douceur pour ĺes envelopper de sa chaleur. Il me guida jusqu’au sol et m’interpella jusqu’à ce que j'ouvre les yeux, verrouillant mon regard dans le sien. Avec lenteur,je le laissai tirer ma main vers sa poitrine, comme on aurait appâté un animal blessé. Avec stupéfaction, je le vis utiliser le même schéma que kipps, la veille.


 

--C'est ça, Luce, inspire et expire en même temps que moi. Respire à mon rythme, c'est ça… Imagine un escalier dont tu descends les marches une à une jusqu’à retrouver ton calme.C'est ça, regarde moi.


À force de l‘écouter psalmodier des inepties du genre, ma respiration finit par se stabiliser. Je ferma les yeux le temps de retrouver mon sang-froid et les rouvrit pour voir le sourire à la lockwood illuminer la cuisine.  Il regarda l’horloge avec satisfaction.


--Dix minutes pour te calmer, on y arrive de mieu en mieu, non? 


Je fus surprise de son sourire et de sa satisfaction et pris un certain temps avant de saisir de quoi il parlait.


--Tu veux dire que tu avais prévus ÇA?


Il éclata d’un doux rire, lâcha ma main et se leva pour servir un verre d’eau qu’il me tendit.


--Prévus, non. Préparer, plutôt. Comme il était évident que tu reviendrais sur le terrain tôt ou tard, j’ai demandé à kipps de me montrer quoi faire en cas d'anxiété ou de crise de panique. Le DERCOP à monter l’un des meilleurs formations de ce type pour former leur chef d’équipe. Surprenant, non?



Pendant qu’il parlait, je bue mon verre d’eau avant de me tourner vers les escaliers où George nous regardait.


--Tout va bien, ici? Ça fait un moment qu'on attend.


--Lucy a juste eu une petite rechute, mais tout va bien, maintenant, n'est-ce pas, Luce?


Je hocha la tête et tendit le bras pour que Lockwood m’aide à me relever, George tua la distance qui nous séparait et me prit l’autre bras. Lui et Lockwood eurent une conversation silencieuse au-dessus de ma tête, puis semblèrent se mettre d’accord puisque George me fit asseoir à la table.


--Lucy, tu te prépare à aller dans une maison sans doute fortement hantée. Je rappellerais seulement à tout hasard que les fantômes se nourrissent des fortes émotions, surtout la colère, la peur et l’angoisse. Personne n'a envie de rejouer la scène d’Aikmere. 


Je gémit.


--Pas encore une discussion émotionnelle?


Lockwood souris, rassurant et me serra affectueusement l’épaule.


--Lucy, si tu as quelque chose sur le cœur qui peut te faire tuer, alors oui, nous discuterons émotion avec toi. 


Je roulais des yeux avec irritation. J’étais sensiblement la dernière à vouloir parler émotion avec les deux ados qui me servait de collocataire et collègue de travail. Mais ils avaient un peu raison, quand même. Mais ça m'énervais quand même un peu de l’avouer.


--Vous voulez que je vous dise quoi? À quelle point je suis terrifié à l’idée de me faire avoir à nouveau par un collectionneur complètement cinglé qui veux me kidnapper et m’enfermer quelque part pour me faire authentifier des source jusqu’à ce que mon talent s’étiole avant d'être  sans doute tué et revenir sous forme de visiteur pour hanter un lieux jusqu'à ce que l’un de vous vienne me chasser de l’autre côté? Ou que j’ai peur de faire une crise d’angoisse au milieu d’une maison hantée et de vous faire blesser ou tuer?


Oui, j'étais grincheuse, mais j’en avais assez de répondre «oui» à la question «comment vas-tu?». Ils voulaient que je parle franchement, et bien, voilà. T’en pis pour eux. Je relevai la tête vers eux en signe de défi, mais leur regard ne trahissait pas, comme je l'avais cru et craint, de la pitié, mais bien une compréhension soulagée. Je comprenais à quel point mon silence les avait angoissés ces derniers jours. Les « je vais bien » semblaient les avoir usés à la corde tout autant que moi. 


Il y eut une expiration générale, comme si un mur venait d’être abattu, l’atmosphère s’allégea et se fut comme si tout le monde recommençait à respirer en même temps. Moi-même, je sentais un poids de moins sur mes épaules, comme si partager mon fardeau émotionnel avec lockwood et George avait alléger la charge.


--Enfin, ça a été dit, merci le ciel! Sa a été si pénible que ça, lucy?


Je fit les gros yeux méchant à George et lui lança son vieux coussin de chaise par la tête, seule chose à ma portée. Il l'évita , éclata de rire et tourna les talons. Je tourna ensuite un regard noir a lockwood qui se moquait aussi :


--Allez, Luce, avoue que tu te sens un peu moins oppressé, maintenant. Ce n’est jamais bon de garder tout ça à l'intérieur, surtout avec le plan de demain. Tu dois nous parler qu’on puisse t’aider en cas de problème. Si Aikmere et la suite des choses nous as prouvé quelque chose, c'est bien ça, non?


Je grommela une réponse et me leva pour suivre George. Et lockwood m'emboita le pas. En bas, je prit appuis sur le mur et attendit patiemment que tout le monde prenne place dans le sous-sol, tendu. 


--Qu’elle est la suite, alors? 


Lockwood sourit largement et tira artistiquement sa rapière .


--Et maintenant, place à la danse! Si mademoiselle veut bien me l'accorder?


J’eu un léger gloussement face à son attitude, mais il réussit à chasser la tension qui habitait mon corps à l'idée d'être observé et critiqué. Je pris ma rapière, accepta sa main tendue et imita sa position, bien campée sur les jambes, mes hanches alignées avec la colonne et mon bras de rapière tendu. La position, éminemment basique, tirait douloureusement sur les muscles de mon bras, de mon dos et de ma poitrine blessés. Pourtant, je tint la position jusqu’à ce que lockwood se montre satisfait, je put retenir un grincement face à la lenteur dont il fit preuve en me contournant d’un œil critique. Avec douceur, me demandant la permission du regard, il agrippa mon épaule et fit rouler le muscle entre ces doigts avec  expertise. Je rechignai face à la douleur, mais résista à l’envie de me dégager. Il me manipula une minute entière et me relâcha avant d'aller prendre position devant moi.


-Ton bras est moins raide? 


--Oui, tu semble avoir remplacé l'articulation.


-Parfait, alors donne tout ce que tu as, je veux voir le meilleur de toi, Luce.


Je ne me fit pas prier. J’étais plus en forme que lors de mon duel contre Holly. La veille, j’y avais plongé avec fébrilité, hargne et besoin, tout dans la puissance du moment et le besoin d’épuisement.


Aujourd’hui, j'attaquais le duel avec plus de légèreté et d'assurance. J'étais loin d’être au plus haut de mon art, mes muscle protestaient, mes membres étaient raides, le tout manquait carrément de fluidité et de fioriture pour être simplement efficace. J'allais droit au but pour économiser un maximum d’énergie. Pour une fois, je laissa lockwood mener la danse, le laissant imposer son rythme et deviant sa lame au lieu de la bloquer pour éviter que le choc des lame se répercute dans mon bras déjà douloureux. 


Je fus assez surprise de pouvoir tenir le rythme rapide sur quelques minutes, rendant même quelques coups lorsque Lockwood me laissait une ouverture. À un moment, il réussit à me pousser contre le mur du fond et à entrechoquer sa lame avec la mienne qui se cogna contre le mur. La garde de ma rapière eu beau me protéger, le choc m'a fait ouvrir la main et échapper ma rapière dans un couinement embarrassant. Aussitôt, lockwood recula d’un pas. Il n’était même pas essoufflé alors que j’étais en nage, regardant avec choc la main qui tenait autrefois ma rapière prise de léger spasm douloureux. Il y eu quelque minute de flottement avant que lockwood rengaine sa lame pour prendre mon poignet avec douleur pour examiner ma main blessée. Presque aussitôt, il se mit à masser habilement mon poignet, ma paume et le dos de ma main. C’était assez douloureux pour que je grimace, mais assez supportable pour que je me retienne de reculer.


--Les muscles de ta main sont tétaniser. J’ai eu ça aussi en recommençant l'entraînement lorsque je me suis fait tirer dessus après le miroir d’os. C'est embêtant, ça a pris des heures et des heures d'entraînement et de massage pour reprendre la souplesse et la préhension pour tenir une lame convenablement.


-On a pas tout ce temps, lockwood…


Il sentit la tension dans ma voix et leva les yeux pour les plonger dans les miens. 


--Non, Lucy, nous n’avons pas tout ce temps, en effet. Sa signifie donc :pas de combat lame contre lame pour toi demain soir. Tu devrais arriver à tenir un peu contre un visiteur, les mouvements sont plus doux, sans choc. Mais on va devoir assurer ta sécurité pour la suite. Non, Lucy, je ne veux pas t’entendre protester. Le but de cette évaluation sommaire, c'est de planifier ton Niveau d’implication dans le plan. Alors, le voici : je serais ta rapière et ta défense contre les visiteurs. Ton rôle sera d’utiliser ton talent pour trouver, puis scellée la source, on cherche le dossier partout ou nous passe et tu restera dans un cercle de fer dès que nous ne serons pas scotchés l’un à l’autre. Pas de prise de risque ni de discussion rocambolesque avec les fantômes. On se la joue modéré et juste assez téméraire, compris?


--Juste assez téméraire, d’accord…Et pour le client? 


--Avec un peu de chance, on va trouver le dossier et nettoyer la maison avant leur retour. Sinon… Notre priorité, c'est nos vies. En cas de pépin majeur, on rentre à la maison et on appelle le DERCOP. Pour ce qui est d’un affrontement potentiel avec les gros bras de notre client, on va s’en charger, ton travail, Luce, sera de trouver un endroit sécurisé et d’y attendre la fin du combat. Tu comprends, Luce. Tu vas devoir fuir en évitant les combats, tu peux y arriver ou j’annule toute l’opération?


Il me fit un sourire à la lockwood. Je bouillonnais de rage et de fierté mise à mal. Lorsque j’ouvrit la bouche pour protester, lockwood massa particulièrement fort un point sensible de mon poignet pour me faire taire et poursuivit en regardant les autres par-dessus ma tête.


--Je crois que nous pouvons faire la chasse au dossier et nettoyer la maison, moi et Lucy. Je vais la protéger. Si nous devons en arriver aux mains contre des humains pour sortir de la, kipps, je te confie lucy pour cette partie. Tu t’assure qu’elle ne se met pas en danger et tu la couvre. 


Ignorant mon regard noir comme si je n’était pas là, ils échangèrent une conversation silencieuse et entendu qui me rendit encore plus furieuse. Je retira ma main de la poigne douce de Lockwood.


--Je ne suis pas une petite chose à protéger! Je sais me défendre!


--Et tu est en période de réadaptation et de guérison d’une commotion cérébrale. Tu as toi-même proposé  qu’on adapte le plan a ta condition physique, alors ne joue pas les victime, ça ne te va pas au teint, Luce. Tu as le droit d’être en colère, mais je peux aussi décider de te laisser à la maison et gérer le client le moment venu. 


Il y avait peu à dire après son discours. Soit j'écoutais comme une bonne fille, soit on annulait tout. Super, le libre arbitre. Après avoir donné ces instructions, Lockwood congédia tout le monde. George et Kipps se rendirent aux archives et Holly retourna chez elle pour se préparer. Lockwood me retint avant que je puisse aller m'enfermer dans ma chambre pour évacuer ma frustration. Fermement, se doutant de ma colère, sans doute, il me dirigea vers le banc de la salle d'entraînement et me fit asseoir. Avec des mouvements habile, il reprit le massage des muscles tétanisés de mon bras de rapière. Il laissa le silence perdurer jusqu’à ce que je me détende dans sa poigne. Son massage s'étaIt adoucie lorsqu’il se décida à me confronter :



--Je sais que le plan ne te plait pas, mais il ne serait pas raisonnable de te laisser livrer à toi-même demain. Tu te défends raisonnablement bien, mais tu dois reprendre de l'endurance et de la force. 


--Pourquoi tu reviens la dessus, tu as été très claire sur le sujet, plus tôt.


J’avoue que le ton de ma voix était aigri et je me raidis dans sa poigne.


--J’en reviens encore pour être certain  que tu saisisse l'importance de la consigne. Je te connais, Lucy Carlyle. Un peu trop bien, même. Demain, souviens-toi seulement que si tu te montres imprudente, je te trainerais moi-même hors de cette maison si j'ai un doute raisonnable que tu te met en danger.  


Sur ces paroles qui me firent grincer des dents, il retira ses mains de sur moi pour me tendre la main avec un sourire détendu et insouciant, comme s’il ne venait pas de me menacer sombrement.


--Sur ce, as-tu envie de dépenser le trop plein d'énergie que je sens bouillir en toi en essayant de me découper avec une lame?


J’aurais pu refuser. J’aurais pu retourner au plan initial et aller bouder dans ma chambre. Mais qui étais-je pour refuser une demande si bien formulée?



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